Nicolas Riegert (PayXPert) : “L’intégration de CB est cruciale pour le déploiement complet de Click to Pay en France”

Vous faites partie des sept premiers partenaires à déployer Click to Pay en France, en partenariat avec Mastercard. De quoi s’agit-il ?

Click to Pay vise à offrir aux consommateurs une expérience de paiement fluide en leur permettant d’utiliser leurs cartes sans avoir à saisir manuellement les informations ou à se souvenir d’un mot de passe. La solution repose sur les spécifications gérées par EMVCo et soutenues par les principaux acteurs du paiement par carte, ce qui garantit une interopérabilité et une acceptation internationale des paiements sécurisés. Un élément important est que cette solution n’est pas liée à un seul réseau de cartes. Cela signifie qu’elle reste ouverte à tous les schemes. 

Concrètement, lors de sa première utilisation, l’utilisateur, qu’il soit sur ordinateur, mobile ou tablette, doit enregistrer sa carte sur Click to Pay. Il lui suffit de fournir son numéro de téléphone et son adresse e-mail pour authentification. Une fois cette étape effectuée, la carte est “tokenisée” par le réseau de paiement. Ce jeton est ensuite lié à l’appareil de l’utilisateur, permettant d’identifier automatiquement l’utilisateur lors de ses achats futurs sur d’autres sites. Plusieurs moyens de paiement peuvent être enregistrés au sein d’un même appareil et un moyen de paiement peut être également enrôlé dans plusieurs appareils.

Comment la sécurité des paiements est-elle assurée ?

L’authentification forte garantit la sécurité. D’abord, l’utilisateur doit passer une étape de sécurité pour accéder à l’appareil, puis une authentification forte est de nouveau demandée au moment du paiement, assurant que c’est bien le titulaire qui valide la transaction. Une fois la carte tokenisée, un cryptogramme à usage unique permet d’effectuer des transactions sans friction, même si les informations de la carte, comme la date d’expiration, sont modifiées. Cela est particulièrement utile pour les abonnements, comme ceux à Netflix, où les paiements peuvent se poursuivre sans interruption.

Le réseau CB, principal réseau domestique de cartes en France, n’est pas encore compatible avec Click to Pay. Est-ce prévu ?

Oui, c’est prévu pour 2025. L’intégration de CB est cruciale pour le déploiement complet de Click to Pay en France.

Quel rôle joue PayXPert dans ce système ?

En tant que PSP (prestataire de services de paiement), notre rôle est de proposer cette technologie aux commerçants et de les aider à l’intégrer facilement à leur page de paiement.

Les commerçants ne craignent-ils pas de perdre le lien avec leurs clients ou leurs données en utilisant un système où la tokenisation est gérée directement par les réseaux de cartes ?

Au contraire, cela simplifie la situation pour les commerçants. Actuellement, lorsqu’un commerçant change de PSP, il doit transférer les informations liées aux tokens, ce qui peut créer des frictions et entraîner des pertes de transactions. Avec Click to Pay, le token est géré directement par le réseau de cartes, ce qui permet au commerçant de changer de prestataire sans perdre de données.

La solution Click to Pay est-elle une manière pour les réseaux de cartes, comme Mastercard, de reprendre du terrain face à des solutions comme les wallets ou le paiement de compte à compte ?

Oui, en partie. Click to Pay offre une expérience similaire à des solutions comme Apple Pay, tout en continuant à utiliser les cartes. Cela permet aux réseaux de cartes de rester compétitifs face à des solutions de paiement de compte à compte, tout en habituant les consommateurs à une nouvelle manière de payer. 

A quel stade se situe le déploiement de cette solution ? 

En Europe, nous n’avons pas encore de clients de la solution qui sont actifs. Nous lançons Click to Pay avec Mastercard et nous travaillons actuellement avec Visa pour un déploiement global. Nous visons le premier trimestre 2025 pour un déploiement effectif.

Click to Pay est-il payant pour les commerçants ?

Le modèle tarifaire n’est pas complètement défini. Nous en sommes encore à la phase d’intégration technique, et les aspects marketing et commerciaux restent à élaborer.

En mars 2022, vous avez annoncé le déploiement du PIN Online dans 9 000 taxis G7. Comment cette fonctionnalité s’articule-t-elle avec la certification SoftPOS ? 

Les banques ne sont pas encore toutes prêtes, mais le PIN Online est une technologie qui se développe progressivement en France. Pour rappel, elle permet de valider un paiement en ligne sans avoir besoin d’insérer la carte dans un terminal, même pour les paiements supérieurs au plafond de paiement sans contact [50 euros en France, Ndlr]. Le code PIN est saisi directement sur le terminal et validé en ligne avec l’émetteur de la carte, ce qui élimine la nécessité d’un lecteur de puce. Quant au SoftPOS, c’est une solution qui transforme un téléphone Android ou iOS en terminal de paiement. SoftPOS utilise la fonctionnalité PIN Online pour valider le code PIN de l’utilisateur, sans nécessiter de lecteur de carte physique.

PayXpert ne dispose pas encore de solution certifiée SoftPOS. Quels sont vos projets dans ce domaine ?

On ne peut pas nier la forte dynamique autour du SoftPOS et nous allons lancer une offre en 2025. Pour iOS, nous développons une solution en interne afin d’avoir un contrôle total sur les fonctionnalités. Quant à Android, nous envisageons de collaborer avec un partenaire. Pour autant, je suis convaincu que le POS a encore de belles années devant lui, surtout chez les marchands tiers 2 ou 3.

Comment s’est passée l’intégration au sein du groupe Société Générale ?

Depuis le closing en août 2023, nous avons vécu de manière intense l’intégration de PayXpert au sein du groupe. Ce n’est pas simplement parce qu’il s’agit de Société Générale, mais plutôt à cause du fossé qui existe entre une fintech indépendante et une fintech intégrée dans un grand groupe bancaire. Il y a eu un vrai besoin de mise à niveau, avec des exigences très strictes, notamment en termes de conformité et de gestion des risques. Nous sommes vraiment satisfaits d’avoir passé ces étapes avec succès, mais cela a été très éprouvant pour les équipes.

En parallèle, nous avons aussi consacré beaucoup de temps à ce qu’on appelle le “comité de nouveaux produits”. Dans une banque, avant de lancer un produit, tout doit être vérifié et validé : les aspects juridiques, techniques, fonctionnels, etc. pour garantir la pérennité du produit. Nous avons finalement passé ce processus, ce qui permet au groupe Société Générale, depuis début septembre, de commercialiser nos offres, en commençant par celles liées au segment e-commerce. Nous travaillons actuellement sur les offres de proximité, comme les terminaux de paiement et les solutions omnicanales.

Quels sont les autres projets à venir ?

Société Générale nous a aussi inscrits parmi les partenaires de Wero. D’abord en tant que prestataire technique, c’est nous qui allons gérer l’intégration technique de Wero pour le groupe sur le volet paiement en ligne. À terme, nous adopterons probablement pour le compte de Wero le statut de Payment Facilitator [Payfac, c’est-à-dire un facilitateur de paiement, enregistré auprès d’une banque acquéreuse, qui gère les relations avec les réseaux de cartes, l’inscription des sous-marchands et les services de paiement pour les marchands, Ndlr]. Société Générale sera le principal partenaire de Wero, et nous serons un sous-partenaire.

Pouvez-vous nous faire un point sur vos activités à l’international ? Comment se répartissent-elles entre la France et les autres pays ?

Nos activités en France vont croître beaucoup plus rapidement grâce au portefeuille de marchands de la Société Générale et à son influence. Ensuite, nous sommes très présents en Espagne et nous devrions lancer l’Italie d’ici la fin de l’année. Nous avons déjà là-bas un partenariat solide avec un éditeur de logiciels qui souhaite utiliser nos solutions. Aujourd’hui, nos principaux pôles sont le Royaume-Uni, la France et l’Espagne. Au total, PayXpert sert environ un millier de clients et compte 105 collaborateurs.