Accueil > Financement > Finance alternative > Les grands affactureurs essaient d’imiter l’agilité des start-up Les grands affactureurs essaient d’imiter l’agilité des start-up Hormis le groupe CM-CIC, les principales sociétés d’affacturage ont annoncé ces derniers mois le lancement de nouvelles offres en ligne plus flexibles pour les entreprises. Mais seul le Crédit Agricole, avec Cash In Time, parvient à égaler les nouveaux entrants sur ce point. Par Aude Fredouelle. Publié le 23 novembre 2017 à 11h45 - Mis à jour le 23 novembre 2017 à 11h45 Ressources Les nouveaux acteurs de l’affacturage, qui ciblent les TPE et PME, ne pèsent pas lourd sur le marché français, estimé en France à 189,5 milliards d’euros en 2016 par l’Association française des sociétés financières. En 2017, Finexkap vise les 150 millions d’euros financés et Edebex les 50 millions d’euros sur le marché français. Mais cela n’empêche pas les acteurs traditionnels de l’affacturage de ressentir la pression de ces nouvelles offres bien plus souples. Depuis le début de l’année, plusieurs factors de premier plan ont annoncé en réaction le lancement de nouvelles offres plus flexibles et digitales : Crédit Agricole Leasing & Factoring avec Cash In Time, en octobre et Compagnie Générale d’Affacturage (CGA), filiale de la Société Générale, avec Avenir plus le même mois. Natixis Factor est aussi en train de tester une nouvelle offre baptisée Flash Factures. La Banque Postale serait en train de travailler sur une nouvelle offre, tandis que BNP Paribas Factor met en avant son offre impulsion, créée en 2011 et adaptée depuis pour permettre la cession des factures en ligne et gagner en souplesse. CM-CIC Factor, qui a racheté GE en 2016, n’a par contre pas fait d’annonce en ce sens. Seul un service de numérisation de la transmission des factures baptisé e-defact a récemment vu le jour. Ces nouveaux services se positionnent, comme les nouveaux entrants, auprès des TPE et PME, même si seul Avenir Plus (Société Générale) fixe un chiffre d’affaires maximum de 1,5 million d’euros HT. Ils proposent de financer jusqu’à 150 000 à 200 000 euros (contre 500 000 euros pour Finexkap). Les acteurs traditionnels tentent de mieux servir un segment jusque-là délaissé par le secteur et veulent toucher un nouveau segment de clientèle. Depuis le lancement de Cash in Time, en septembre 2017, le financement moyen s’élève à 10 000 euros, rapporte Pierre Stelmaszyk, responsable communication de Crédit Agricole Leasing & Factoring. “Jusqu’ici, nous accompagnions beaucoup de grosses entreprises et d’ETI, notamment pour les aider dans leur expansion internationale, raconte-t-il, mais nous adressions peu la cible des TPE qui a pourtant des besoins importants de trésorerie.” Démocratiser l’affacturage chez les TPE En ouvrant de nouvelles offres simplifiées, les acteurs traditionnels espèrent ouvrir un nouveau marché que les start-up ont commencé à démocratiser. “Les TPE utilisent peu l’affacturage en France et voient cette solution comme le dernier recours pour les sociétés au bord du gouffre, commente le responsable communication de Crédit Agricole Leasing and Factoring. “3% des TPE ont recours à l’affacturage en France, contre 10 à 15% aux États-Unis. Recourir à ce mécanisme était jusqu’ici trop compliqué : il fallait rencontrer son banquier, communiquer des documents, prouver son ancienneté, ouvrir une ligne, s’engager sur un certain nombre de factures, pour un certain montant… Avec Cash in Time, nous espérons mieux servir les besoins des TPE.” Notre offre sera élargie à d’autres réseaux bancaires Eric Frachon Directeur général de CGA Seule la Société Générale restreint son offre aux clients de la banque, pour l’instant. “Dans le futur, notre offre sera élargie à d’autres réseaux bancaires, puis à des prospects, explique Eric Frachon, directeur général de CGA. “Nous espérons bien entendu être un levier de recrutement important pour notre réseau bancaire.” Les autres offres des factors se veulent agnostiques même si elles sont avant tout promues au sein de leurs réseaux, considéré comme un vecteur d’acquisition efficace. Depuis le lancement de Cash in Time en septembre, le factor observe environ 70% de clients du groupe et 30% d’externes. Chez Natixis, Flash Factures est encore en phase pilote avec deux banques régionales, l’une dans le réseau des Banque Populaires et l’autre dans le réseau des Caisses d’Épargne. “Nous sommes en train de définir le modèle et les entreprises éligibles”, indique Claude Valade, directeur général de Natixis Factor. Processus digitalisé Ces nouvelles offres se revendiquent “100% en ligne”, avec des plateformes sur lesquelles les clients peuvent gérer leurs factures et leurs remboursements en temps réel et obtenir un financement rapidement (12 à 48 heures selon les cas).En réalité, seul le Crédit Agricole peut se targuer d’un service 100% en ligne. Les chefs d’entreprise peuvent s’inscrire en ligne en cinq minutes, avec leur numéro SIRET, une pièce d’identité, un IBAN et un KBis. Chez les autres acteurs traditionnels, l’inscription nécessite encore de prendre contact avec un conseiller au préalable. Natixis assure être “en train de développer un processus d’inscription 100% en ligne” mais pour l’instant, un contact doit encore être réalisé avec un conseiller par mail ou téléphone. Moins d’engagements sur le financement La flexibilité promise n’est pas non plus la même chez tous les acteurs traditionnels. Certains, comme le Crédit Agricole ou Natixis, ont créé une offre sans engagement de volume ni de durée. “Notre première idée avec Flash Factures était de donner la possibilité à nos clients et prospects de faire de l’affacturage à la facture : quand je veux, à mon rythme et pour traiter les besoins ponctuels”, raconte Claude Valade, de Natixis Factor. Plus d’unicité du débiteur, donc, mais toujours les caractéristiques traditionnelles de relance et de recouvrement. “Ce n’est plus le contrat qui impose mais les besoins du client.” De quoi séduire les petits clients aux besoins non récurrents. Sur ce point, Société Générale n’a pas réussi à se distancier des méthodes traditionnelles de l’affacturage. Avenir Plus oblige ses clients à céder toutes les factures d’un même client, alors que les autres permettent, comme les nouveaux entrants, un financement “à la carte”. Les acteurs traditionnels ont du mal à se détacher de l’abonnement Les tarifs restent encore parfois typiques des offres traditionnelles d’affacturage. Chez BNP Paribas, l’offre Impulsion fonctionne sous abonnement, à partir de 240 euros par mois pour financer jusqu’à 15 factures pour un montant maximum de 20 000 euros. Ensuite, le factor prélève une commission sur le montant de la facture. Même fonctionnement chez Avenir Plus, de Société Générale, avec un abonnement mensuel moindre (59 euros) et une commission de cession par facture. Dans les deux cas, la résiliation de l’abonnement est gratuite mais reste soumise à un préavis de trois mois. Au Crédit Agricole et chez Natixis, par contre, le système d’abonnement a été laissé de côté au profit d’un paiement à la carte : 3,5% du montant TTC de la facture chez Cash in Time et 100 euros + 1,5% du montant de la facture TTC chez Flash Factures. Moins de garanties requises L’un des arguments forts des nouveaux entrants, outre la rapidité et la simplicité, réside dans l’absence de demandes de garanties. Chez Finexkap, la plateforme prélève une retenue de garantie de 10% environ du montant des factures cédées mais ne demande aucune caution au dirigeant de l’entreprise. Edebex et Urica ne demandent quant à eux pas de caution ni même de garantie. “Nous ne regardons même pas la santé financière de l’entreprise, décrit Xavier Corman, CEO d’Edebex, mais uniquement celle de ses clients.” Les nouvelles offres suivent ce mouvement, sans toujours égaler les nouveaux entrants. BNP Paribas demande un fonds de garantie et parfois un fonds de réserve, mais pas de caution du dirigeant, tout comme Natixis Factor avec Flash Factures. Seule l’offre Avenir Plus, de la Société Générale, réclame une caution jusqu’à 25 000 euros en plus du fonds de garantie de 10%. Et là encore, le Crédit Agricole se démarque. L’offre n’impose ni caution, ni fonds de garantie. “Nous nous appuyons sur les 50 ans d’expérience du groupe Crédit Agricole en matière financement de factures et sur notre connaissance clients”, décrit Pierre Stelmaszyk. “Nous avons développé des algorithmes Big Data puissants qui nous permettent d’évaluer le risque avec précision et donc d’être plus souples sur les garanties demandées aux clients.” Chez Natixis aussi, Claude Valade met en avant “la masse de data internes”. Pour le credit scoring de Flash factures, de “nouveaux arbres de décisions ont été créés”, précise-t-il. chez bnp paribas, finsy finance les factures des pme clientes du groupe Chez BNP Paribas, un nouveau service baptisé FINSY a bien été lancé en juin dernier, mais il ne s’agit pas d’un concurrent aux plateformes d’affacturage en ligne : la plateforme n’assure que du financement de créances et ne donne pas de prestations complémentaires (assurance crédit, relance, recouvrement des créances…). Surtout, le service est réservé à des entreprises clientes de BNP Paribas et enregistrant un chiffre d’affaires de plus de deux millions de clients. Les PME peuvent décider de ne financer qu’une partie de la facture. “L’objectif est de financer plus d’une centaine de millions de créances sur 2018, décrit Bozana Douriez, directrice générale de BNP Paribas Factor. Avec FINSY, nous espérons toucher des entreprises qui n’ont pas encore eu recours à l’affacturage, qui ne connaissent pas encore BNP Paribas Factor.” BNP Paribas Factor opère l’offre pour la banque de détail de BNP Paribas. Malgré l’absence de garanties réclamées et grâce aux données analysées, Cash in Time assure accepter “plus de 75 à 80% des factures proposées”. “C’est une vraie évolution, commente le responsable communication, parce que les offres des fintech acceptent 15 à 20% des factures en général puisqu’elles n’ont pas des bases de données comparables aux nôtres”. Arthur de Catheu, cofondateur de Finexkap, nous révélait en effet en septembre dernier accepter “moins d’une facture sur dix” sur la plateforme – mais trois quarts en “network lending”, c’est-à-dire lorsque les entreprises passent par un partenaire comme un logiciel de comptabilité et que Finexkap accède à davantage de données. Les réseaux bancaires, vecteurs d’acquisition Les factors comptent s’appuyer sur leurs réseaux pour promouvoir ces nouvelles offres. SocGen forme ses conseillers à Avenir Plus. L’offre a été lancée début octobre 2017 dans le réseau Société Générale, et le sera en janvier 2018 dans le réseau Crédit du Nord. Et si le Crédit Agricole lancera en 2018 une campagne, “notamment sur le digital”, pour promouvoir la nouvelle offre, le factor s’appuie aussi à court terme sur LCL et les caisses régionales. Les conseillers sont actuellement sensibilisés et le factor est en train de développer des campagnes d’e-mailing clients et des supports de présence dans le réseau d’agences. Au Crédit Agricole Leasing & Factoring, on voit d’ailleurs déjà plus loin que cette première offre en ligne pour TPE. “Nous voulons déployer un produit similaire sur l’ensemble de nos offres, pour de plus grosses entreprises et des besoins plus spécifiques”, dévoile Pierre Stelmaszyk. Par exemple, la mise en place de Cash in Time a nécessité la mise en place d’une deuxième vacation par jour pour effectuer le financement dans les caisses régionales et au LCL. “Nous pourrions aussi mettre en place une deuxième vacation sur d’autres produits pour les grosses entreprises.” Network lending et API-sation La stratégie de network lending engagée par Finexkap intéresse les acteurs traditionnels. S’ils n’ont pas autant besoin que les start-up de sources de données externes pour le credit scoring, ils y voient des canaux d’acquisition intéressants. “Cela fait partie des multiples évolutions que l’on peut avoir en tête : les APIs, l’internationalisation…”, note Pierre Stelmaszyk, du Crédit Agricole. Même son de cloche pour Bozana Douriez, directrice générale de BNP Paribas Factor. “Ce sera certainement la prochaine étape et récupérer des informations pourra nous permettre de délivrer l’accord dans la journée.” Elle indique avoir déjà lancé une API permettant de se connecter avec “tous les assureurs crédit de la place.” Chez Natixis Factor, annonce Claude Valade “on utilisera tous les moyens à notre disposition pour mettre en place le produit si on décide de généraliser, tant en commun avec nos réseaux actionnaires qu’en se raccrochant à des logiciels comptables, de gestion de trésorerie… On a même pensé pouvoir travailler avec certaines plateformes qui proposent d’autres formes de financements pour les entreprises.” À la Société Générale, pour l’instant, le réseau reste le principal axe de distribution. “La stratégie d’acquisition d’Avenir Plus est centrée sur les apporteurs d’affaires de CGA”, confirme Eric Frachon, directeur général de CGA. des projets en mode agile Au Crédit Agricole, le projet a été lancé en juin 2016, “en voyant comme Finexkap des nouveaux acteurs arriver sur le marché”, reconnaît Pierre Stelmaszyk. Le factor a été accompagné par CapGemini sur le projet et a fait appel à des start-up, notamment pour la reconnaissance optique de caractères lors du scan de factures ainsi que pour la partie communication et marketing digital. Cash in time a aussi noué un partenariat avec Euler Hermes pour assurer les crédits et s’occupe en interne de la relance et du recouvrement. L’offre a été testée auprès de premiers clients en décembre 2016 puis ouverte à 500 d’entre eux via certaines caisses régionales en phase pilote en avril 2017 avant un lancement à l’ensemble du marché en septembre. Chez Natixis Factor, quatre collaborateurs ont travaillé avec les filiales du groupe depuis septembre 2016 et les décisions concernant la commercialisation seront prises début 2018. Cliquez sur le tableau pour l’agrandir (fichier PDF) Aude Fredouelle affacturagefinancement des entreprises Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind