Comment Vivy veut bousculer l’e-santé en Allemagne

L’équivalent du dossier médical partagé (DMP) français existe également en Allemagne. La différence consiste désormais dans son utilisation, que la start-up berlinoise Vivy est en train de démocratiser grâce au soutien des caisses d’assurance maladie, officialisé le 17 septembre.

Son appli est ainsi le condensé d’un DMP (stockage et échange de données médicales avec les professionnels de santé) et de services variés que peuvent proposer diverses applis santé, comme le suivi de rendez-vous médicaux et de vaccination, la localisation de professionnels de santé, le rappel de posologie par scan de QR-code, des conseils pratiques et bilans de santé, les données d’assurance, etc. Les trackers de fitness peuvent aussi y être couplés.

L’utilisation de l’appli est basée sur le volontariat, et la décision de transmettre ou de stocker un document est uniquement à l’initiative du patient, qui doit aussi explicitement autoriser la communication à un tiers. Avec cette appli tout-en-un, Christian Rebernik, PDG et co-fondateur de Vivy (auparavant CTO de la banque mobile N26), a déjà conquis 14 caisses d’assurance maladie régionales* et trois compagnies d’assurance privées : Allianz (qui détient 70% de Vivy), Barmenia et Gothaer (en février 2019).

13,5 millions d’utilisateurs potentiels

 Vivy totalise donc déjà 13,5 millions d’utilisateurs potentiels et a pour objectif de toucher les utilisateurs finaux des 90 caisses d’assurance maladie (85% de l’ensemble des caisses) utilisant le fournisseur de services informatiques Bitmarck, soit 25 millions de personnes (environ 40% de l’ensemble des assurés allemands). Le déploiement de Vivy a en tous cas pris de court deux caisses d’assurance maladie, AOK et TK, encore en phase de test avant la généralisation de leur propre solution, prévue début 2019.

L’appli est gratuite pour l’utilisateur assuré auprès d’une caisse ou d’un assureur partenaire. Pour se rémunérer, Vivy facture donc des frais aux caisses d’assurance maladie et compagnies pour chaque utilisateur qui s’enregistre. Car l’appli facilite la transmission d’information entre assurés et assureurs, tout comme entre les différents assureurs. Le deuxième plus grand fournisseur allemand de logiciels pour cabinets médicaux, medatixx, intégrera également une interface avec Vivy dans son logiciel à partir de début 2019. A l’avenir, 22 300 cabinets pourront envoyer des données médicales cryptées à leurs patients avec VivyAkte directement depuis leur logiciel.

Chiffrement asymétrique

 Le point sensible consiste dans la sécurité et la confidentialité des données, pour lequel la start-up redouble de vigilance et de communication. Les données sont stockées et communiquée sous forme cryptée, les dossiers médicaux protégés par un chiffrement asymétrique de bout en bout, les serveurs uniquement situés en Allemagne, et l’authentification par l’utilisateur à deux facteurs par couplage d’appareils (SMS et TOTP). La sécurité des données a enfin été testée par des organismes de certifications (TÜV Rheinland, ePrivacy) et de sécurité informatique (ERNW, Blue Frost Security). Les sceptiques commencent pourtant à se faire entendre outre-Rhin, estimant que la transmission involontaire de données n’est jamais à exclure.

Le Plan Santé présenté par Emmanuel Macron le 18 septembre prévoit quant à lui le déploiement et la généralisation du DMP en novembre 2018. Des concurrents de Vivy commencent à se positionner : c’est par exemple le cas d’Orange Labs Caen qui a présenté une appli similaire le 13 octobre. Interrogés à ce sujet, Allianz France, dont la maison-mère détient 70% de Vivy, tout comme cette dernière, n’ont pas souhaité réagir quant à un futur déploiement dans l’Hexagone.

* Les 14 caisses d’assurance maladie régionales sont : DAK, IKK Classic, Pronova BKK, IKK Südwest, Mhplus, IKK Nord, BKK Gildemeister Seidensticker, Heimat Krankenkasse, BKK Stadt Augsburg, BKK M+, Bertelsmann BKK, BKK Diakonie, BKK Dürkopp Adler, BKK HMR.