Accueil > Assurance > Assurance numérique & collaborative > Les robo-advisors français éprouvent leurs modèles face aux réalités du marché Les robo-advisors français éprouvent leurs modèles face aux réalités du marché Sur les traces des poids lourds américains Wealthfront et Betterment, les robo-advisors français ont naturellement opté pour une stratégie BtoC. Mais le marché implique de lourds investissements pour soutenir les coûts d'acquisition. Certains acteurs ajustent la mire. Par . Publié le 15 décembre 2016 à 17h33 - Mis à jour le 15 décembre 2016 à 17h33 Ressources Avec à peine 100 millions d’euros d’encours gérés ou conseillés, les robo-advisors français occupent une position encore confidentielle sur un marché de l’assurance vie estimé à quelque 1 621 milliards d’euros d’encours, selon la Fédération française de l’assurance. Sur ce segment de la gestion digitale et automatisée de l’épargne, deux approches du client coexistent. La première est celle de la gestion conseillée ou assistée qui consiste à aider le client à prendre ses décisions d’investissement. Advize, Fundshop et Marie Quantier, agréés CIF (conseiller en investissements financiers), ont choisi cette voie avec quelques variantes. Advize propose un contrat d’assurance-vie “Ma Sentinelle-Vie” libellé en euro (2 fonds en euros) et/ou en unités de comptes (66 fonds diversifiés) et assuré par Generali et l’allocation d’actifs est réalisée par les experts de Morningstar sur la base de cinq profils. Fundshop donne, quant à lui, la possibilité au client d’arbitrer les placements de son contrat d’assurance vie déjà existant, l’algorithme se chargeant d’optimiser l’allocation et de lui soumettre des arbitrages en fonction de l’évolution des marchés. Marie Quantier, pour sa part, se définit comme une plateforme technologique de stratégies d’investissement qui prodigue des conseils personnalisés. Marie Quantier fournit des ETFs (fonds indiciels cotés) dans le cadre d’un contrat d’assurance vie géré par Suravenir et/ ou d’un compte-titres intermédié par Interactive Brokers. Les clients de ces trois acteurs gardent ainsi la main sur les décisions de gestion de leurs portefeuilles. La seconde grande approche, retenue par Yomoni et WeSave, est celle de la gestion déléguée ou pilotée qui donne au robo-advisor la capacitė de réaliser des arbitrages au nom du client et pour son compte. Pour cela, ces deux acteurs se reposent sur leurs algorithmes mais aussi sur leurs équipes de gestion. Yomoni propose son offre dans le cadre d’une assurance vie, d’un compte titre ou d’un PEA alors que WeSave se cantonne à l’assurance vie. Tous deux ont choisi Suravenir pour assurer leur contrat et proposent d’investir via des ETFs qui sont des produits faiblement chargés et sans rétrocessions. Un besoin vital de fonds Même si ces acteurs ont opté pour des stratégies différentes, ils présentent un point commun : aucun n’est rentable aujourd’hui, y compris les pionniers américains, et ils font preuve d’une grande discrétion sur leurs indicateurs de croissance. Certains robo-advisors français espèrent néanmoins atteindre le point d’équilibre d’ici trois à cinq ans. En effet, le marché BtoC s’avère être très coûteux pour ces fintechs en terme d’acquisition client. “Aujourd’hui, même s’ils sont porteurs de véritables propositions de valeur pour les épargnants, les robo-advisors souffrent d’un manque de visibilité, explique Yannick Gaillard, directeur de Chappuis Halder & Cie en France. Leur développement passe obligatoirement par des levées de fonds.” Et Yomoni l’a bien compris. “Nous sommes en pleine campagne de levée de fonds avec pour objectif d’améliorer notre service et réussir à capter davantage de clients“, précise Sébastien d’Ornano, président de Yomoni. Le Crédit Mutuel Arkéa et Iena Venture font déjà partie du capital de la start-up qui a levé 3,5 millions d’euros depuis sa création. Changement de cap Si la plupart des robo-advisors sont conscients de la nécessité de lever des fonds pour continuer à exister sur le marché français, plusieurs d’entre eux changent de positionnement. “Nous observons aujourd’hui un virage effectué par les robo-advisors BtoC qui s’orientent de plus en plus vers le modèle BtoBtoC afin d’acquérir du volume et ainsi accélérer leur développement“, explique Yannick Gaillard. A l’image de Betterment qui s’est récemment réorienté vers le BtoB en lançant “Betterment for Business”, Advize et Fundshop déclarent ouvertement se repositionner. Racheté par cinq investisseurs privés en décembre 2015, Advize déploie aujourd’hui sa technologie d’usage sur les acteurs BtoB. La société prépare actuellement une levée de fonds auprès d’investisseurs privés. “Les coûts d’acquisition d’une clientèle sur le marché de l’épargne sont intenables pour assurer un business rentable, admet Olivier Gentier, directeur général d’Advize Groupe. Le business n’est pas là aujourd’hui, il est là où se trouve le client à savoir chez les acteurs traditionnels. Nous souhaitons ainsi aider ces derniers à se digitaliser et offrir à leurs clientèles nos services.“ De son côté, Fundshop assure avoir cette stratégie en ligne de mire depuis ses débuts. “Avant de pouvoir percer dans le BtoB, il a fallu démontrer la qualité de notre modèle et notre capacité à capter du client, souligne Léonard de Tilly, CEO de Funshop. Notre ambition aujourd’hui n’est pas d’augmenter notre clientèle. Cette application nous a servi à développer un socle technologique au service de notre stratégie BtoB. Après trois ans d’existence, nous arrivons désormais à vendre en BtoB.” Même s’il a déjà conclu des partenariats avec une banque en ligne, un courtier, une plateforme de CGP et quelques fintechs, Fundshop envisage de lever des fonds en 2017. Ce robo-advisor compte déjà Axa Strategic Ventures (anciennement Axa Seed Factory) parmi ses actionnaires. Les robo-advisors BtoC qui changent leur stratégie en BtoBtoC profitent de la tendance des acteurs traditionnels, tels que les banques, les assureurs, les sociétés de gestion et les CGPI, à poursuivre un mouvement de digitalisation des conseils financiers qu’ils apportent à leurs clients. Quand certains comme Invesco ou Blackrock reprennent des robo-advisors pour s’accaparer leur technologie, d’autres comme Bank of Montreal, Bank of America, UBS ou encore Deutsche Bank lancent leurs propres plateformes de conseil automatisé. Une tendance saluée par le cabinet Chappuis Halder & Cie. “L’avenir des robo-advisors est chez les acteurs traditionnels, à savoir les assureurs, les banquiers privés, les gestionnaires d’actifs et les CGPI. Ces outils vont s’intégrer dans leur offre patrimoniale“, confirme Yannick Gaillard. L’avenir est dans le BtoB Anticipant ce mouvement, certains robo-advisors comme Active Asset Allocation International Consulting (AAAic) ou Fundvisory ont proposé quasiment dès leur création leurs services en BtoB. Le premier s’est d’ailleurs tourné rapidement vers les assureurs, son coeur de cible aujourd’hui. “Notre robo-allocator permet aux clients des assureurs d’appréhender la manière dont vont se comporter leurs portefeuilles en prospectifs sur des milliers de scénarios possibles ainsi que l’impact de leurs choix sur leurs projets d’épargne. Cet outil est avant tout mis à la disposition des conseillers qui vont ensuite pouvoir monter une allocation optimale avec leurs clients. L’objectif est d’accompagner le conseiller dans sa démarche avec son client“, explique Adina Grigoriu, directrice général d’AAAic qui a déjà noué des partenariats avec Spirica (Crédit Agricole) et UAF Life. Même si la plupart des établissements traditionnels de l’épargne et de l’assurance sont restés discrets quant à la sortie de potentielles offres de conseil automatisé, des partenariats se seraient déjà noués entre les start-ups et certains bancassureurs, selon le cabinet Chappuis Halder & Cie. Une intervention humaine indispensable Au-delà du positionnement BtoB ou BtoC des robo-advisors, le concept du “tout automatisé” sans intervention humaine peut également présenter un frein à la croissance de certains modèles. “L’automatisation est possible à condition, que le client perçoive un même ou meilleur niveau de qualité de relation avec son partenaire financier“, souligne Yannick Gaillard. Contrairement à ses concurrents, Yomoni et WeSave ne se limitent pas à un modèle quantitatif. Chez Yomoni par exemple, un comité d’investissement ajuste l’allocation en fonction des critères tactiques de l’équipe de gestion. Il y a donc une intervention humaine dans la gestion tout comme chez WeSave. Ces derniers participent d’ailleurs au comité de gestion d’Amundi, qui a pris une participation minoritaire au capital de la start-up. Et l’intervention humaine ne doit pas s’arrêter là. En effet, selon le cabinet de conseil Chappuis Halder & Cie, les robo-advisors doivent détenir des services commerciaux répondant directement aux questions des clients. “Même si la possibilité d’obtenir un conseil 24/7, via l’automatisation et la digitalisation du conseil apporte un atout considérable, la majorité de la population aura aussi toujours besoin d’une relation humaine. Elle n’est pas nécessairement physique, elle peut être plus ou moins dématérialisée“, ajoute Yannick Gaillard. Un élément non négligeable pour les robo-advisors BtoC. Ainsi, Yomoni dispose de quatre conseillers en interne qui répondent aux questions des clients sur le chat. “Nous avons un CRM extrêmement complet permettant aux conseillers d’avoir à disposition tout l’historique des échanges avec le client“, précise Sébastien d’Ornano, président de Yomoni. Même si elle trouve le concept du chatbot intéressant, la fintech n’en utilise pas pour échanger avec ses clients. Quel que soit le positionnement retenu, l’avenir des robo-advisors français devrait passer par un accompagnement des grands acteurs financiers traditionnels, à travers des partenariats capitalistiques ou commerciaux. Des passerelles dans une industrie qui pourrait atteindre les 2 200 milliards de dollars d’encours sous gestion en 2020, selon A. T. Kearney. MIFID 2 : une opportunité pour les robo-advisors La directive européenne MIFID 2, qui entrera en vigueur le 3 janvier 2018, constitue une opportunité incontestable pour les robo-advisors interrogés par mind Fintech. En refondant la directive sur les marchés d’instruments financiers, les autorités européennes ont souhaité renforcer la protection des investisseurs par une transparence à tout prix, tant sur les problématiques d’exécution que de distribution de produits financiers. En outre, elle peut initier la transformation du “business model” de toute une catégorie de distributeurs, une aubaine pour les robo-advisors. Tous ont déjà intégré les obligations de MIFID 2 dans leur modèle. La plupart d’entre eux ont automatisé leur processus d’informations. Ainsi, les clients reçoivent facilement par mail des reportings très détaillés de leurs portefeuilles financiers de manière hebdomadaire, mensuelle ou trimestrielle, ainsi que des points marché. Les clients peuvent également suivre à tout moment leurs portefeuilles à travers une interface dédiée. Un élément technologique que les robo-advisors comptent bien exploiter pour prendre des parts de marché. Outre leur processus d’information, les robo-advisors assurent également faire preuve d’une transparence totale en termes de frais de gestion. Ces fintechs ne présentent pas de coût caché, ni de rétrocession. Une exigence tout à fait conforme à MIFID2. Cliquez sur le tableau pour l’agrandir (fichier PDF) assurance viegestion d'actifsrobo-advisor Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind