Accueil > Financement > Régime pilote : Lise (ex-Kriptown) devient le troisième système de négociation et de règlement DLT autorisé dans l’UE Régime pilote : Lise (ex-Kriptown) devient le troisième système de négociation et de règlement DLT autorisé dans l’UE Lise, la Bourse de Kriptown dédiée aux PME et ETI, a décroché le précieux agrément de système de négociation et de règlement DLT. La nouvelle infrastructure de marché, qui compte notamment BNP Paribas, Caceis et Bpifrance à son capital, prépare ses premières IPO pour début 2026. Par Caroline Soutarson. Publié le 16 octobre 2025 à 6h50 - Mis à jour le 16 octobre 2025 à 10h01 Ressources Lise (pour Lightning Stock Exchange) a annoncé le 16 octobre intégrer le club très privé des systèmes de négociation et de règlement reposant sur la technologie de registre distribué (SNR DLT ou DLT TSS). Lise est ainsi le troisième acteur européen à pouvoir cumuler les fonctions de système multilatéral de négociation (MTF) et de dépositaire central de titres (CSD) – un cumul rendu possible grâce au règlement n°2022/858 sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués (DLTPR). Avant elle, l’Allemand 21X (décembre 2024) et le Lituanien Axiology (juillet 2025) avaient réussi à obtenir ce statut. La solution états-unienne de tokenisation d’actifs Securitize, dans laquelle a notamment investi BlackRock, est également sur le coup. Régime pilote : les infrastructures de marché DLT arrivent timidement sur le marché Qu’est-ce que le régime pilote DLT ? Le DLTPR a introduit les conditions d’un cadre expérimental pour tester la tokenisation d’actifs financiers cotés au niveau de l’Union européenne. “Pour ne pas modifier la réglementation européenne – ce qui aurait pris beaucoup de temps –, il a été décidé de créer un bac à sable réglementaire d’une durée de deux fois trois ans, avec des exemptions [aux règlements MIF 2 et CSDR, Ndlr] délivrées au cas par cas par les autorités nationales compétentes. Ce cadre permet de ne pas bloquer l’innovation, notamment celle des acteurs traditionnels, tout en permettant d’apprendre et de légiférer en conséquence”, résumait pour mind Fintech Anne Maréchal, avocate associée chez De Gaulle Fleurance, en décembre 2024. Une première IPO sur Lise attendue pour début 2026 Lise a opté pour cet agrément combiné afin d’opérer une Bourse pour les PME et ETI reposant sur la tokenisation d’actifs. Elle ouvrira ces prochains mois, avec une première introduction en Bourse (IPO) prévue début 2026. Une dizaine d’IPO pourrait suivre cette année-là, espère le directeur général Mark Kepeneghian. En attendant, Lise étoffe ses équipes avec un recrutement en conformité (compliance officer). À la clef, un métier redéfini, “qui n’aura rien à voir avec un poste équivalent chez Euronext”, assure Mark Kepeneghian. Et pour cause : le recours à la blockchain (Hyperledger Besu, voir plus bas), aux automatisations inhérentes, ainsi qu’à la combinaison des métiers (émission, négociation et règlement-livraison) impliquent que Lise opérera différemment d’une Bourse traditionnelle. “L’exécution des ordres et le règlement-livraison s’effectue[ro]nt de manière instantanée et intégrée sur la même infrastructure. Le risque de contrepartie [sera] structurellement limité et la cotation devien[dra] continue, ouvrant la voie à des échanges d’actions en temps réel, 24/7”, décrit l’entreprise nouvellement agréée. Lise pourra accueillir les investisseurs finaux en direct Autre changement avec Lise : l’accès à la Bourse en direct pour les investisseurs finaux. “Alors que la directive MIF n’autorise un accès aux MTF qu’aux acteurs régulés, le DLTPR introduit la possibilité que des personnes morales et physiques non régulées puissent aussi accéder directement à un DLT MTF”, explique Matthieu Lucchesi, avocat spécialisé fintech, finance numérique et innovation chez Gide Loyrette Nouel. Lise est pour l’instant la deuxième infrastructure de marché DLT à avoir demandé cette exemption (à l’article 53, paragraphe 3, de MIF 2), après 21X. Si elle permet à l’opérateur boursier d’être moins dépendant des intermédiaires régulés, l’exemption fait également porter plus de tâches sur la société, réalisées par d’autres parties prenantes dans le schéma traditionnel. “Nous disposerons de données plus complètes que les Bourses classiques, qui délèguent une partie non négligeable de la compliance aux teneurs de compte-conservateurs (TCC), ce qui implique plus de responsabilités pour nous”, évoque Mark Kepeneghian. L’accès en direct entraîne également un travail sur le parcours d’onboarding par la Bourse – une mission traditionnellement confiée aux courtiers ou aux banques. Selon l’article 4, paragraphe 2, du DLTPR, “l’exploitant d’un MTF DLT” qui permet à des investisseurs de “négocier pour leur propre compte” doit notamment s’assurer qu’ils “possèdent un niveau suffisant de qualifications, de compétences et d’expérience pour la négociation, y compris une connaissance du fonctionnement de la technologie des registres distribués” et connaissent les risques associés. La protection des investisseurs étant en jeu, les discussions avec les régulateurs ont été longues, souligne Matthieu Lucchesi. “Il a fallu trouver le bon équilibre entre poser les questions nécessaires, adaptées aux spécificités de Lise, et éviter d’alourdir le parcours clients en entrant trop dans les détails techniques.” Renforcer le lien entre émetteurs et actionnaires Cette ouverture aux investisseurs permettra à Lise d’optimiser les services rendus aux émetteurs. “Traditionnellement, lorsqu’un émetteur est coté et qu’il doit organiser une assemblée générale, il doit passer par son dépositaire central de titres, qui doit ensuite demander à ses teneurs de compte-conservateurs de convoquer les actionnaires. Avec notre registre, nous serons capables de convoquer ses investisseurs directement. Idem pour le regroupement des votes ou bien la distribution des dividendes et, plus globalement, pour tout ce qui touche au lien entre l’émetteur et ses actionnaires”, affirme Mark Kepeneghian. En “organisant le lien” entre les entreprises et leurs actionnaires, Mark Kepeneghian veut aussi faciliter la mise en place de récompenses pour les investisseurs. “Aujourd’hui, les détenteurs d’actions en nominatif Accor disposent d’une carte de fidélité gratuite. Ce qui n’est pas le cas pour les détenteurs au porteur [lorsqu’il y a un intermédiaire financier, Ndlr]. Cela pourrait être intéressant d’avoir cette d’option pour une PME et elle sera native dans Lise.” Modèle économique Les services évoqués par le dirigeant de Lise seront intégrés à l’offre de base pour se différencier des Bourses traditionnelles et ne constitueront par conséquent pas des sources de revenus complémentaires. Les revenus proviendront principalement des frais liés à l’introduction en Bourse, en ligne avec ce qui est déjà facturé sur le marché, et des frais de listing annuels, “autour de 20 000 euros contre 150 000 à 200 000 dans la finance classique”, précise Mark Kepeneghian. Notre objectif n’est pas d’afficher un argument prix mais de rendre le processus de financement moins lourd, avec moins de frais fixes”. Lise s’appuie sur Hyperledger Besu Pour offrir ces services, Lise se basera sur la technologie Hyperledger Besu (notamment utilisée par la Banque mondiale), “une surcouche d’Ethereum que nous utilisions pour Kriptown ces dernières années [la plateforme de financement de Kriptown avant le régime pilote, Ndlr]. Nous avons la capacité de la maintenir, mais nous préférons tout autant qu’elle soit maintenue par la fondation Hyperledger”, indique Mark Kepeneghian. Le DLT TSS s’appuiera également sur un établissement de crédit Memo Bank, qui fournira “des comptes espèces chez nous, en monnaie commerciale, pour nos clients, et supportera le règlement-livraison instantané via API”, précise le dirigeant. “Nous sommes, à notre connaissance, la seule banque dans l’Union européenne, à fournir des IBAN virtuels bidirectionnels. Ces derniers permettent une réconciliation automatique : Lise va associer un Iban virtuel à chaque opération sur titres, ce qui lui permettra de lettrer les opérations et de tenir la comptabilité de ses comptes clients, cantonnés chez nous”, détaille Pierre Darbre, directeur des risques chez Memo Bank. En dehors de ce partenariat, Lise se positionne en alliée des banques et espère voir plusieurs autres établissements de crédit rejoindre son capital à l’avenir. BNP Paribas, Bpifrance et Caceis (Crédit Agricole) ont déjà franchi le pas. Tokenisation d’actifs financiers : les banques françaises se tiennent prêtes Succès relatif du régime pilote DLT Entré en application mars 2023, le DLTPR n’a pas eu la popularité escomptée. “Le succès n’est pas encore au rendez-vous”, réaffirmait encore la présidente de l’Autorité des marchés financiers (AMF) Marie-Anne Barbat-Layani, le 9 octobre 2025, à l’occasion du Forum Fintech ACPR-AMF. Avec Lise, cinq agréments ont été décernés en l’espace de deux ans et demi. “Six autres acteurs ont déposé un dossier [dont Securitize et au moins deux dossiers en France, selon nos informations, Ndlr] et six autres encore sont dans le pipeline”, complète Julien Nivot (ex-AMF, Ledger), policy officer de l’ESMA, lors de l’événement Fintech 3.0 organisé par l’Association pour le développement des actifs numériques le 14 octobre. Dans ce contexte, l’AMF et la Consob italienne ont émis des propositions, en avril 2025, pour réviser le DLTPR, parmi lesquelles donner plus de flexibilité aux acteurs “en prenant davantage en compte le principe de proportionnalité”, rappelle Marie-Anne Barbat-Layani. “Le régime devrait également voir ses plafonds d’admission et de capitalisation relevés, la liste des actifs éligibles élargie, et sa durée prolongée. Ces mesures permettront d’accueillir des projets plus ambitieux et de sécuriser les investissements à long terme nécessaires à la mise en place de marchés ambitieux. Troisièmement, assurer l’interopérabilité entre infrastructures DLT et systèmes traditionnels.” Suivez sur mind Fintech les infrastructures de marché DLT autorisées en Europe Caroline Soutarson blockchainDLTfinancement des entreprisesIBANopérateur boursierpost-marchérégime piloterégulationtokenisation Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Kriptown ouvre son capital à Caceis MiCA : l’AMF appelle les sociétés qui ne passeront pas le cap réglementaire à cesser leurs activités Régime pilote : le DLT TSS 21X lance son premier produit tokenisé L’Adan appelle l’Europe à se positionner sur la tokenisation Dossier Régime pilote : les infrastructures de marché DLT arrivent timidement sur le marché BNP Paribas entre au capital de la plateforme de financement Kriptown