Comment BNP Paribas Securities Services intègre l’IA en conservation globale

Filiale à 100 % de BNP Paribas, BNP Paribas Securities Services se présente comme un des principaux acteurs mondiaux du métier titres. L’entreprise affiche 12 063 milliards de dollars d’actifs en conservation. Elle compte notamment pour clients asset managers et asset owners (gestionnaires d’actifs, compagnies d’assurance, fonds de pension…).

Ces différents acteurs sont amenés à manipuler d’importants volumes de données pour piloter leurs activités en conservation globale. Ils gèrent en effet des investissements sur plus de 90 marchés et doivent dans ce cadre superviser des indicateurs et paramètres multiples : actifs investis, paiements, règlements, distribution de dividendes…

Simplifier le pilotage des investissements

“C’est une activité complexe pour ces entreprises et pour laquelle elles s’appuient sur leurs prestataires, dont les Global Custodians dont nous faisons partie“, souligne Christelle Ybanez, en charge de la stratégie Asset Owners & Managers pour ce métier du groupe BNP Paribas. Afin de simplifier ces opérations pour ses clients et se doter d’un avantage concurrentiel, l’entreprise se lance en 2018 dans un projet visant à apporter de la simplification et à améliorer l’expérience clients.

Gestionnaires et détenteurs d’actifs sont déjà bénéficiaires de nombreux rapports. Ceux-ci étaient mis en forme jusqu’à récemment par un chargé de clientèle, qui pouvait enrichir les statistiques automatisées de commentaires. La tâche restait donc essentiellement manuelle, l’intervention humaine permettant de traduire les données pour les clients. Trop détaillés et volumineux, ces reportings ne répondent pas pleinement à cet enjeu de simplification. BNP Paribas Securities Services souhaitait faciliter la prise de décision au travers d’une information plus synthétique et personnalisée.

La réponse, c’est donc un rapport supplémentaire à la disposition de ces clients. En revanche, celui-ci prend la forme d’un document d’une page, embarquant en particulier des données pertinentes sur le suivi d’activité. Ces informations leur permettent ainsi d’être alertés, par exemple, sur des anomalies liées à des opérations d’investissements ou à leur règlement.

“La partie suivi d’activité est importante dans le rapport que nous avons, nous prestataires, avec nos clients. Il s’agit de traduire ces activités en une information compréhensible et de leur permettre un pilotage global comportant de nombreux marchés d’investissement et points de données“, insiste l’experte de la banque.

Des rapports automatisés, mais personnalisés de l’activité

Depuis novembre 2020, les chargés de clientèle peuvent communiquer aux clients institutionnels un rapport succinct. Pour générer les commentaires de ce document, sur la base d’un important volume de données, BNP Paribas s’appuie dorénavant sur l’intelligence artificielle, dont la pertinence est validée par le chargé de clientèle.

Les commentaires portent ainsi sur les marchés d’investissement, le taux d’automatisation, l’activité de règlement, et fournissent également des statistiques sur les actifs en conservation. Technologiquement, ces rapports s’appuient donc sur le NLG, le Natural Language Generation ou génération de langage naturel. La solution logicielle, sous licence, a été développée par un fournisseur partenaire.

La filiale de BNP Paribas ne souhaite pas préciser son identité. Il pourrait cependant s’agir de l’éditeur Yseop, dont la technologie NLG est exploitée pour d’autres branches du groupe, notamment pour automatiser l’analyse financière des dossiers de crédit. BNP Paribas Securities Services ne confirme pas cette information néanmoins.

En ce qui concerne le rapport à proprement parler, il se fonde sur l’activité réelle du client. Ses opérations, comme ses investissements, arrivent automatiquement sur le système de conservation globale. Les données en entrée du générateur de commentaires sont ainsi directement générées par son activité. Par ailleurs, la banque ne se contente pas d’utiliser une application sur étagère et prête à l’usage. Elle a en effet totalement adapté cette technologie en interne pour lui permettre de répondre à ses spécificités métiers. Cette adaptation s’est effectuée en collaboration avec les équipes IT et produit de BNP Paribas Securities Services, mais aussi le support client.

Une machine nourrie au vocabulaire du métier titres

“Nous disposons de spécialistes qui travaillent en proximité du besoin client en analysant les besoins de persona. Cette démarche vise à se caler sur l’expérience client, sur leur chaîne de valeur et sur les attentes des utilisateurs finaux de la solution“, détaille Christelle Ybanez.

Il a donc fallu transmettre cette expertise métier au système. Cette phase d’apprentissage, y compris sur le vocabulaire spécifique, constitue de fait “le gros du travail” pour l’intégration de technologies de type NLG. “L’essentiel du travail consistait à stipuler à la machine les données sur lesquelles elle devait générer des commentaires, et ensuite à lui apprendre à parler notre langage avec des termes qui sont compris par les clients. Une machine ne peut pas parler le langage du métier titres de façon spontanée“, précise encore l’experte.

Générer un rapport de synthèse, même d’une page, mensuel ou à la demande, n’est en effet pas une mince affaire. En tout, le projet s’est échelonné, en accéléré par ailleurs, sur une période de 18 mois. Suivait une phase de test de 6 mois impliquant les chargés de clientèle, les premiers destinataires des commentaires générés automatiquement grâce au NLG.

Un gain de temps et des économies à la clé

Ce rapport automatisé se compose de trois sections au travers de zooms sur les actifs, l’activité de règlement et enfin les paiements de dividendes. L’entreprise envisage en outre d’enrichir le document de nouvelles rubriques, comme les activités de valorisation et la gestion de souscription au sein des fonds par exemple.

Depuis novembre 2020, ces rapports d’activité, disponibles en anglais et en français, sont à disposition des chargés de clientèle. Ceux-ci peuvent les proposer à l’ensemble des clients en conservation globale sur 14 pays (booking centres). Plusieurs dizaines de clients consomment actuellement ce document pour le pilotage de leurs investissements.

A ce jour, BNP Paribas n’a pas poussé l’automatisation jusqu’à l’envoi directement au client. Un humain reste dans la boucle, à savoir le chargé de clientèle, qui recueille par ailleurs les retours des clients sur la solution. Et ces premiers feedbacks sont jugés très favorables grâce à des indicateurs et alertes sur des informations clé comme le taux d’automatisation et les nouveaux marchés investis.

“C’est pour nos clients un gain de temps dans le suivi de toutes les opérations, toutes les transactions sur tous les marchés. Cela représente vraiment un bénéfice, qui peut potentiellement être d’ordre financier pour eux, surtout sur l’automatisation des instructions manuelles. Détecter des problèmes opérationnels, automatiser des instructions manuelles, c’est un bénéfice énorme“, assure Christelle Ybanez.

Des projets stratégiques autour du NLU et de la NLG

De manière opérationnelle, ce rapport généré par l’IA vise à aider les utilisateurs à renforcer la supervision et le contrôle de leurs opérations via une sélection de tendances ciblées, personnalisées, et des recommandations claires et succinctes. L’accès à ces documents de pilotage n’est pas facturé aux clients. Il intègre la prestation en conservation globale.

Pour BNP Paribas Securities Services, le bénéfice n’est pas nul cependant. Cette option représente ainsi un facteur de différenciation par rapport à la concurrence. Elle permet en outre “d’être plus réactif et pertinent sur les analyses de données de nos clients“, note sa porte-parole.

“Nous sommes dans un monde d’opérations, de transactions, et toute simplification apporte énormément à nos clients et à nous-mêmes. Il est de plus valorisant de travailler sur des solutions innovantes pour lesquelles assez peu d’acteurs et de concurrence sont positionnés aujourd’hui“, poursuit-elle.

Cette simplification, au travers en particulier de l’automatisation, l’entreprise l’approfondit via différents projets en matière de NLG et de NLU (Natural Language Understanding) ou compréhension du langage naturel. Ces technologies peuvent ainsi s’appliquer à l’ensemble des bases de données centralisées structurées dont elle dispose.

Ce sont déjà 500.000 documents qui sont traités grâce au NLU, qui permet une lecture plus rapide et automatique afin de raccourcir les temps d’exécution. La prochaine étape pour BNP Paribas Securities Services sera d’en étendre l’exploitation aux données non structurées.