Accueil > Investissement > Yorick Naeff (BUX) : “Le plus important, c’est d’opérer sur un terrain de jeu parfaitement égal” Yorick Naeff (BUX) : “Le plus important, c’est d’opérer sur un terrain de jeu parfaitement égal” Rencontré à Money20/20, le CEO du néocourtier BUX revient sur la pratique du paiement pour flux d’ordre en Europe, qu’il assimile à une distorsion de concurrence. Yorick Naeff évoque par ailleurs les projets de développement de la société au Royaume-Uni, mais aussi dans les cryptoactifs. Par Antoine Duroyon. Publié le 22 juin 2022 à 15h00 - Mis à jour le 28 janvier 2025 à 15h50 Ressources Vous avez récemment lancé BUX Zero en Italie, votre huitième pays en Europe. Pouvez-vous revenir sur votre développement ? Après une première offre lancée en 2014 et centrée sur les CFD [contrats pour la différence, sont des produits financiers qui permettent de parier sur les variations à la hausse ou à la baisse d’un actif sous-jacent sans jamais le détenir, Ndlr], nous avons travaillé sur une application d’investissement sans commission multi-actifs baptisée BUX Zero [initialement STOCKS, Ndlr]. Nous savions que si nous voulions préserver nos marges et maintenir nos coûts bas, nous devions maîtriser et posséder les différentes composantes de la chaîne de valeur. C’est pourquoi nous avons créé notre propre infrastructure de courtage. BUX Zero compte désormais plus de 500 000 clients, avec une croissance très forte en Belgique et aux Pays-Bas, mais aussi en France, en Irlande, et en Espagne. L’Allemagne et l’Autriche restent des marchés plus difficiles, car ils abritent des concurrents très agressifs. BUX Zero est disponible sur les principaux marchés d’Europe continentale. Visez-vous un déploiement au Royaume-Uni ? C’est prévu ! Nous détenons déjà une licence auprès du régulateur FCA et l’autorisation pour proposer des produits reposant sur l’enveloppe fiscale ISA. Mais c’est un chantier technique complexe, car nous devons gérer des titres dans des environnements différents et la gestion des liquidités n’est pas la même selon les pays. Par exemple, le Royaume-Uni impose de faire du “pooling” et de se connecter à différentes banques, alors que ça n’est pas le cas aux Pays-Bas, pays où nous sommes régulés en Europe. Il va nous falloir encore quelques mois pour bâtir le système et nous devrions être en production au Royaume-Uni en 2023 [En 2021, BUX a recruté Salim Sebbata pour piloter son développement au Royaume-Uni, Ndlr]. Un sujet suscite de vifs débats en Europe : le paiement pour flux d’ordre (PFOF), qui consiste, pour un courtier, à recevoir des rémunérations de parties tierces pour l’exécution d’ordres. Quel est votre avis ? BUX ne reçoit pas de paiement pour flux d’ordre : cette pratique est interdite par le régulateur néerlandais. Je ne suis pas contre le PFOF par principe, mais honnêtement, je pense qu’il donne lieu à des conflits d’intérêt en Europe en raison de la manière dont il est structuré. Aux Etats-Unis, il existe une “consolidated tape”, ce qui veut qu’il y a un spread national de référence (National Best Bid and Offer ou NBBO) auquel le marché doit se conformer. C’est le type de réflexion qu’on devrait aussi avoir en Europe. Le problème avec MiFID II, c’est que le concept de “meilleure exécution” est difficile à manier dans l’environnement fragmenté que nous connaissons en Europe. Le plus important, c’est d’opérer sur un terrain de jeu parfaitement égal. Pouvons-nous tous le faire ou ne pas le faire ? A cause de cette distorsion, le marché allemand est très compliqué pour un acteur comme BUX [Scalable Capital et Trade Republic recourent au PFOF, cette pratique étant autorisée en Allemagne, Ndlr]. BUX intervient sur un secteur très concurrentiel. Quels sont les impacts en termes d’acquisition client ? Même si le contexte a évolué, la focalisation sur la croissance à tout prix a engendré une très forte pression sur les coûts d’acquisition. Nous avons vu Trade Republic surenchérir tellement en Allemagne que cela ne faisait plus de sens d’un point de vue économique. Au bout du compte, je suis convaincu que le meilleur produit, avec l’expérience la plus simple et la plus accessible, gagnera à la fin. Il y a par ailleurs d’autres leviers sur lesquels nous pouvons jouer et que d’autres acteurs n’activent pas, comme le prêt de titres par exemple. Quelle est votre stratégie dans les crypto ? Je suis persuadé que les cryptos constituent une classe d’actifs qui va rester. Parmi nos nouveaux clients, 20 à 25 % investissent en cryptos et s’ils le font, c’est un produit additionnel, en plus des actions, pour 80 % d’entre eux. Il y a un donc un réel intérêt en termes de diversification à réserver une poche de 10 à 15 % de son portefeuille aux cryptoactifs. Nous avons notre propre jeton (BUX) en circulation. Il vise à proposer à nos clients des incitations financières (staking, réduction des frais de trading…) et non financières (invitation à des événements, possibilité de voter pour des fonctionnalités, services dédiés, etc.). C’est un axe important sur lequel nous allons travailler dans les prochains mois. Vous avez réalisé deux acquisitions à ce jour : la filiale britannique du courtier en ligne Ayondo en 2019 et la plateforme d’investissement social dans les cryptoactifs Blockport en 2020. Est-ce un mouvement que vous souhaitez poursuivre ? Comme je l’ai mentionné un peu plus tôt, l’infrastructure de courtage est cruciale et la maîtriser dans son ensemble est déterminant. Pour y arriver, on peut soit la construire soit l’acheter. Honnêtement, le M&A est un processus tellement douloureux et compliqué. Avec Ayondo, l’intégration a été un réel défi et nous avons dû nous séparer d’un tiers des effectifs. Donc, si on a la possibilité de développer par soi-même, mieux vaut le faire ! Antoine Duroyon money20/20trading Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind