Qonto a déposé une demande d’agrément bancaire

Comme les challengers N26 ou Revolut, Qonto veut à son tour devenir une banque. La néobanque pour les entreprises a déposé sa demande de licence bancaire il y a deux mois auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et elle espère obtenir le sésame “en quelques années” auprès du régulateur français et de la Banque centrale européenne, indique son cofondateur et CEO Alexandre Prot. L’obtention de l’agrément d’établissement de paiement, en 2018, avait nécessité une année. Qonto rejoindrait alors Memo Bank dans les rangs des start-up françaises détenant une licence bancaire.

Le CEO avait déjà annoncé en janvier 2020 vouloir décrocher l’agrément d’établissement de crédit à l’occasion d’une levée de fonds de 100 millions d’euros, avant d’abandonner le projet un an et demi plus tard. “Décrocher l’agrément implique des chantiers organisationnels et techniques et des capitaux propres que nous préférons utiliser pour développer de nouvelles fonctionnalités en interne ou nouer de nouveaux partenariats, indiquait alors Alexandre Prot. Nous apportons plus de valeur en investissant dans nos équipes tech et produit qu’en passant 12 à 18 mois à ajuster notre organisation pour pouvoir s’appeler banque”. Aujourd’hui, il ajoute : “nous n’étions pas vraiment prêts. Désormais, nous sommes une société rentable [depuis 2023, Ndlr], ce qui nous permet de générer du capital pour les fonds propres. Pour l’obtenir il y a plusieurs années, nous aurions eu besoin de boucler un tour de table très important. Et nous étions par ailleurs occupés à développer des outils financiers, de paiement, et à tester des crédits courts permis par l’article 4 de notre agrément d’établissement de paiement.”

50 millions d’euros financés depuis 2024

Qonto propose en effet depuis 2024 des produits de crédit jusqu’à un an et 30 000 euros. 50 millions d’euros ont été financés à ce jour, assure le CEO. L’agrément d’établissement de paiement lui impose cependant de prêter avec les fonds propres de la société, et non avec les dépôts des clients. La société propose aussi une mise en relation avec des partenaires (Defacto, Karmen, Silvr, RiverBank) pour des crédits plus longs – dont certains pourraient subsister après obtention de l’agrément bancaire, selon Alexandre Prot. 

L’agrément bancaire lui permettra de proposer davantage de produits de crédit en propre, en utilisant les dépôts des clients, ainsi que des produits d’épargne et d’investissement (pour augmenter les dépôts), et de “gagner en agilité pour lancer de nouveaux produits encore plus rapidement”. Qonto s’est déjà émancipé de ses partenaires historiques en décrochant son agrément d’établissement de paiement en 2018 et en construisant son propre core banking system, se passant ainsi de Treezor. Puis, plus récemment, en développant son propre processeur de cartes, s’affranchissant de Monext. 

Produits d’épargne et d’investissement d’ici fin 2025

La néobanque annonce aussi le lancement imminent – au cours du trimestre à venir – de produits d’investissement et d’épargne. “Nous n’attendrons pas l’agrément bancaire, dévoile Alexandre Prot. Nous lancerons directement les produits que nous autorise notre agrément et sinon, nous nous appuierons sur des partenaires.”

Objectif : compléter sa plateforme européenne de gestion financière, “avec le compte bancaire en son cœur, augmenté par des outils financiers”, décrit le CEO. Derniers développements en date : l’encaissement en ligne via des liens de paiement grâce à Mollie ou encore des terminaux co-brandés avec Adyen. L’acquisition de Regate en mars 2024 a par ailleurs permis à Qonto de se renforcer sur le segment de la pré-comptabilité.

600 000 clients en Europe

Qonto revendique avoir franchi la barre des 600 000 clients sur ses 8 marchés européens, sans communiquer sur leur profil ni leur répartition géographique. “Notre premier marché est la France, puis l’Allemagne, notamment grâce à l’acquisition de Penta en 2020, puis l’Italie et l’Espagne, énumère Alexandre Prot. Les quatre marchés sur lesquels nous nous sommes implantés en 2024 [Portugal, Belgique, Autriche et Pays-Bas, Ndlr] suivent.” Objectif : deux millions de clients utilisant quotidiennement Qonto d’ici cinq ans, en 2030. Depuis juillet 2024, le régulateur italien interdit cependant à la néobanque d’accueillir de nouveaux clients, en lui demandant d’améliorer ses mesures anti-blanchiment. “Les restrictions sur l’acquisition de nouveaux clients en Italie restent en vigueur, mais nous collaborons étroitement avec la Banque d’Italie pour mettre en œuvre les améliorations demandées de notre dispositif LCB-FT. Nous n’avons pas, à ce stade, de visibilité sur le calendrier“, indique la société à mind Fintech.

311 millions d’euros de PNB en 2023

Selon ses derniers comptes annuels publiés, Qonto, qui compte 1 600 collaborateurs répartis dans 5 bureaux, a enregistré en 2023 un résultat net de 71 millions d’euros, contre une perte nette de 212 millions d’euros en 2022. Le produit net bancaire (PNB) s’est envolé, passant de 111 millions d’euros en 2022 à plus de 311 millions en 2023. L’activité a été portée par une hausse des abonnements et des commissions d’interchange, ainsi que par l’environnement de taux, qui a fortement gonflé les intérêts issus des dépôts de la clientèle. Qonto indique en particulier que son fonds Lyxor Qonto Fund, créé en 2021, qui vise à diversifier les mécanismes de protection des fonds des clients et totalise 2,6 milliards d’euros, a eu un impact positif sur le PNB grâce à un rendement final plus important que prévu. Un deuxième fonds – Amundi Qonto II – a vu le jour fin 2023.

En novembre 2024, le Financial Times assurait que Qonto cherchait à vendre au moins 200 millions d’euros d’actions existantes, détenues par des salariés et des investisseurs de la première heure, pour une valorisation globale de 5 milliards d’euros. La société avait atteint une valorisation de 4,4 milliards d’euros en janvier 2022, à l’occasion d’une levée de 486 millions d’euros en Série D.