Accueil > Services bancaires > Paiements > Comment PayTop a opéré son virage vers le BtoB Comment PayTop a opéré son virage vers le BtoB La start-up de Truffle Capital, qui n’a pas réussi à trouver son marché en BtoC, opère déjà plusieurs programmes de cartes en marque blanche pour des banques. Par Aude Fredouelle. Publié le 03 septembre 2018 à 15h55 - Mis à jour le 03 septembre 2018 à 15h55 Ressources Confrontées à des coûts d’acquisition trop élevés ou à des marchés encore trop peu matures, nombreuses sont les fintech BtoC qui ont opéré un virage vers le BtoB, en profitant de la volonté de plus en plus forte des institutions financières d’innover. C’est le cas du français PayTop, spécialisé dans les transferts à l’international, la livraison de devises et les cartes multidevises. PayTop a été créé par la société de capital-risque Truffle Capital en 2012 suite à la reprise de la start-up Sencillo, fondée en 2005 et spécialisée dans les transferts d’argent. Truffle investit alors 2,1 millions d’euros dans le projet et place en 2013 Minh Q. Tran (alors venture partner de Truffle Capital) au poste de directeur général. Fin 2013, PayTop emploie 17 personnes et revendique 12,5 millions d’euros de flux générés depuis sa création. Fin 2014, Truffle investit 3,3 millions d’euros supplémentaires dans la société, dont il est alors actionnaire à 94%. Désormais, la société de capital-risque détient plus de 96% du capital. Elle a investi plus de 10 millions d’euros dans Paytop depuis sa création. Il faut dire que le créneau sur lequel se positionnait PayTop à ses débuts, le transfert d’argent à l’international en ligne et à moindre coût, est extrêmement compétitif et réclame des financements importants pour absorber les coûts d’acquisition. Entre 2010 et 2012 se sont lancés WorldRemit, TransferWise, Remitly ou encore Azimo, tous financés à coups de dizaines de millions de dollars. De quoi accélérer et surtout populariser leur marque. TransferWise, par exemple, a franchi la barre des 50 millions de livres (soit environ 56 millions d’euros) de flux fin 2012 et des 250 millions de livres dès octobre 2013. Sans compter que PayTop n’est pas parvenu à proposer des tarifs aussi avantageux que Transferwise, dont l’organisation et la technologie permettent de casser les prix. Coûts d’acquisition trop élevés En lançant en 2015 une carte Mastercard prépayée multidevise avec plusieurs wallets, les dirigeants espéraient trouver un nouveau levier de croissance. Mais là aussi, les coûts d’acquisition s’avèrent très élevés : la carte seule coûte 100 à 250 euros à fournir pour la société, sans compter le coût du canal d’acquisition, indique Julien Letourneux, dirigeant de PayTop depuis 2016. “Même si notre offre de cartes est innovante avec le multidevise, le marché est bien trop disputé, entre les banques traditionnelles, les banques en ligne, les néo-banques et les autres fintech”. Autre obstacle à la croissance de PayTop : “les deux produits visent deux clientèles totalement différentes donc il n’y avait aucune synergie sur les coûts d’acquisition : les transferts de fonds intéressent plutôt des expatriés, et la carte multidevises des CSP+ qui voyagent souvent à l’étranger”, commente le CEO. Qui précise par contre qu’une plateforme technologique unique permet une synergie de coûts sur la gestion de données et des flux financiers, les sujets de conformité, de comptabilité ou de lutte anti-blanchiment. Quand Julien Letourneux rejoint PayTop en février 2016 puis qu’il en est nommé président en octobre de la même année, la décision est prise de cesser d’investir en BtoC bien que cette activité continue d’exister. Pour émerger, PayTop décide alors de “proposer ses solutions de paiement avec une application et un site, via un développement interne ou externe, en marque blanche à des institutions financières”, indique le CEO. Même stratégie pour l’activité de transferts de fonds, en mettant à disposition du client via des APIs “la plateforme technologique, le réseau de partenaires, l’agrément, la gestion des flux, le KYC, la conformité…”. La marque PayTop et l’activité BtoC fonctionne désormais “comme un lab que nous pouvons présenter à nos clients BtoB et BtoBtoC”, ajoute Julien Letourneux. les banques traditionnelles se résignent à innover Le marché semble propice à la bascule de PayTop vers le BtoB. Sur le créneau des transferts de fonds, les banques traditionnelles habituées à facturer des coûts importants à leurs clients doivent faire face à la compétition de nouveaux entrants qui cassent les prix. Un mémo interne de Santander révélé en 2017 par le Guardian dévoilait par exemple que la banque espagnole facturait alors son service de transfert d’argent à l’international six fois plus cher que Transferwise… et que ces opérations représentaient 10% des revenus de la banque. Une manne que les banques traditionnelles ont longtemps rechigné à délaisser. Mais face à la compétition, certaines commencent à innover : en France Natixis Payments et BPCE ont ainsi annoncé en juin dernier un partenariat avec TransferWise, une grande première. Le créneau des cartes multidevise s’annonce encore plus facile à conquérir : souvent, les banques traditionnelles ne proposaient pas d’offres jusqu’ici. Face à l’arrivée des néo-banques qui proposent ce produit, elles cherchent à pouvoir proposer rapidement à la petite niche des clients intéressés un produit, quitte à externaliser sa création. Trois programmes de cartes déployés en marque blanche Les premiers programmes de cartes en marque blanche de PayTop sont nés en 2017. La Banque Palatine, banque privée du groupe BPCE, a annoncé en juin 2017 le projet de lancement d’une carte prépayée multidevise avec la start-up. Palatine first a finalement vu le jour le 23 août dernier. En octobre 2017, PayTop a annoncé la signature d’un partenariat avec la Macif pour mettre à disposition des sociétaires de la mutuelle une carte prépayée multidevise destinée aux adolescents de 12 à 17 ans. “Les cartes sont avant tout des cartes du quotidien pour les enfants, mais elles présentent l’avantage du multidevise pour leurs voyages à l’étranger”, décrit Julien Letourneux. Enfin, la première banque marocaine, Attijariwafa Bank, passe par Paytop pour fournir des cartes à des Marocains résidents en France, baptisées Attijari’Money. Une expérimentation a également été lancée par le Crédit Agricole de Savoie, à destination des transfrontaliers. Trois autres projets sont en cours de déploiement, assure le CEO. “Tous visent des usages clients précis.” Julien Letourneux assure pouvoir déployer un programme en moins de six mois chez un partenaire. Concernant l’activité de transferts de fonds, une offre en marque blanche sera aussi lancée d’ici la fin de l’année avec un premier client, dévoile le CEO. Sur ce créneau, la marque PayTop en BtoC ne sera absolument plus promue non plus. La start-up a mandaté une autre entreprise pour la commercialisation : Monisnap créée en 2017 et également financée par Truffle Capital. Paytop opère donc le site de transfert d’argent Monisnap (back end, plateforme technique, gestion des flux, relation avec les partenaires, KYC…) tandis que Monisnap prend en charge la commercialisation de l’offre en tant qu’intermédiaire en opérations de banque (IOB) immatriculé à l’Orias. Le chiffre d’affaires réalisé est partagé entre les deux sociétés. PayTop possède également une troisième activité de niche : l’achat de devises en ligne avec livraison à domicile. Là aussi, la société a signé des partenariats BtoB, avec Boursorama, Fortuneo, Orange Bank, Socram Banque… Modèle économique PayTop, agréé établissement de paiement, a noué des partenariats avec des acteurs dans chacun des pays dont la société propose la devise (96 pays pour les transferts internationaux, et six devises sont disponibles sur la carte bancaire). Le CEO assure travailler sur l’ajout de “devises plus exotiques pour des populations précises”. “Tous les services reposent sur des taux de change que l’on négocie auprès des partenaires et sur lesquels on prélève un mark-up”, explique Julien Letourneux. Pour la carte, chaque institution financière cliente propose un modèle tarifaire différent (cotisation annuelle, frais de rechargement et d’utilisation…) sur lequel PayTop prélève également des commissions. PayTop passait jusqu’à fin 2017 par Raphael & Sons pour émettre ses cartes prépayées mais, son partenaire ayant cessé son activité, les cartes ont cessé de fonctionner en janvier 2018. Désormais, tant la nouvelle carte PayTop proposée en BtoC et lancée en début d’année que celles des clients de l’offre en marque blanche sont émises par Prepaid Financial Services. En BtoC, la société compte environ 3 000 nouvelles cartes actives, un parc équivalent à celui des cartes stoppées en janvier. Par contre, PayTop ne communique pas sur le nombre de cartes en circulation pour son activité BtoB car la société est soumise à des accords de confidentialité, justifie le CEO. Objectif de la société : au moins plusieurs dizaines de milliers de cartes en circulation d’ici la fin de l’année. Le chiffre d’affaires de PayTop, non communiqué, se répartit de manière équilibrée entre l’activité de transferts de fonds, celle de cartes et celle de commande de devises… mais les deux premières sont vouées à prendre davantage d’importance dans les années à venir grâce aux programmes en marque blanche. Aude Fredouelle carte bancaireéchange de devisespaiements internationauxpartenariattransfert d'argent Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind