DSP2 : manager.one, banque en ligne pour les pros, a ouvert son API

D’ici septembre 2019, les banques devront obligatoirement se conformer à la DSP2 en proposant via une API (ou bien, a minima, via une interface permettant une forme de “web scrapping” authentifié) l’accès aux données bancaires de leurs clients aux acteurs agréés. De nombreux acteurs bancaires traditionnels se montrent encore réticents à l’ouverture et, si des tests ont commencé avec les agrégateurs, aucune API n’est encore pleinement opérationnelle. La banque en ligne pour les pros manager.one, lancée en juillet 2017 par la Banque Wormser Frères, se démarque en affichant une stratégie d’ouverture volontariste et a ouvert son API il y a deux mois et demi aux acteurs agréés.

Elle a commencé à développer en septembre 2018 son API donnant accès à “tout ce qui est disponible sur le web banking”, selon Adrien Touati, co-fondateur. Une fois l’autorisation d’accès donnée par l’utilisateur final, un token d’authentification sera généré par la banque et l’acteur tiers pourra par son biais accéder à l’historique des données, initier des virements simples ou multiples, ajouter un bénéficiaire, etc. Par ailleurs, manager.one ne demandera pas de réauthentification contraignante tous les 90 jours : “l’utilisateur devra simplement, sur l’application tierce, réaffirmer qu’il autorise le tiers à accéder à ses données, mais il n’aura pas besoin de se réauthentifier”, assure le co-fondateur.

A noter que la néo-banque pour entrepreneurs Shine propose déjà une API, à laquelle est par exemple connecté Budget Insight, mais celle-ci ne permet que la consultation des soldes, pas encore l’initiation de virements ou l’ajout de bénéficiaires. 

Les agrégateurs accaparés par les négociations avec les acteurs traditionnels

Deux start-up clientes de manager.one se sont déjà connectées à l’API pour exporter les données vers leurs systèmes d’information : “cela leur permet d’initier des virements et d’accéder à leurs comptes directement depuis leur propre interface”, décrit Adrien Touati. Par contre, les agrégateurs de la place, à qui manager.one a ouvert l’API depuis deux mois et demi, ne l’ont pas encore intégrée faute de temps et continuent d’utiliser des techniques de web scrapping. “Les agrégateurs se sont battus pour avoir des APIs mais mettent des mois à les intégrer et continuent de scrapper la donnée… alors que s’interfacer à l’API prend 2 à 3 jours”, regrette Adrien Touati. Seul Bankin’ (qui ouvre son capital à Casino) a entamé les démarches pour se connecter à l’API de manager.one. “Nous avons eu de demandes de connexion, mais nous n’avons plus de nouvelles depuis”, indique Adrien Touati.

Linxo a prévu de faire des tests, assure son CEO Bruno Van Haetsdaele. De même, Budget Insight s’est engagé à s’y connecter mais n’a pas eu le temps de le faire, explique Romain Bignon, CEO. Il faut dire que les agrégateurs sont engagés depuis des mois dans des discussions tendues avec les banques, pour déterminer à quoi ressembleront les futures APIs : “Nous sommes assez concentrés sur les APIs des banques traditionnelles, puisqu’il y a davantage d’enjeux pour nous, et qu’on fait confiance à manager.one pour faire moins de rétention d’informations”. Par ailleurs, Budget Insight “fait de la prestation pour plusieurs banques pour évaluer leurs API et les accompagner, donc la société a également un sujet économique dans la priorisation des tests.” Bertrand Jeannet, directeur risques et conformité, ajoute que “connecter une API, vérifier sa conformité avec la réglementation et les standards (STET par exemple pour les principales banques françaises), corriger les dysfonctionnements constatés et tester ses performances prend du temps ” 

Enrichir le service pour les clients

manager.one se pose en tout cas comme un ovni dans le secteur bancaire, où les acteurs tentent de restreindre les informations délivrées aux acteurs tiers. Pour le CEO de la banque en ligne, “l’ouverture des données devient clé” et la peur de perdre la relation principale avec les clients n’est “pas un sujet”. “L’objectif du développement des APIs est de simplifier la vie des clients en leur permettant de réaliser leurs opérations bancaires depuis l’interface la plus adaptée, sans avoir à revenir obligatoirement sur l’interface bancaire”, assure Adrien Touati. Avec son API, la banque espère faire bénéficier ses clients de “nouvelles fonctionnalités développées par des tiers”.

manager.one ne communique pas sur son nombre de clients mais assure recevoir actuellement 30 à 50 demandes d’ouverture de compte par jour, dont 50% à 80% aboutissent après les tests de détection de fraude. Ses clients sont principalement des entreprises comptant 3 à 50 salariés. manager.one facture 29,90 euros par mois son compte entreprise puis 9,99 euros chaque compte supplémentaire. La société qui a levé 2 millions d’euros en septembre 2017 emploie 20 collaborateurs et vise l’équilibre d’ici septembre 2019.