Accueil > Services bancaires > Banque au quotidien > Quelles transformations pour les distributeurs automatiques de billets ? Quelles transformations pour les distributeurs automatiques de billets ? Traditionnellement associés à la distribution d'espèces dans l'espace urbain, les distributeurs automatiques de billets sont eux aussi touchés par les effets du tout-numérique. Tour d’horizon des transformations qui touchent ces ordinateurs d’un genre particulier alors que leur nombre devrait baisser dans les prochaines années. Par . Publié le 09 octobre 2019 à 10h56 - Mis à jour le 09 octobre 2019 à 10h56 Ressources Le 23 juillet, la Banque de France publiait son Rapport sur l’état des lieux de l’accès du public aux espèces. Le constat : une bonne accessibilité, quelque 53 000 distributeurs automatiques et plus de 23 000 points de distribution d’espèces, chez les commerçants et les buralistes. Néanmoins, un autre document publié plus tôt dans l’année prévoyait une réduction des espèces pouvant aller, en valeur, à plus de 20% d’ici 2025. Chez NCR, on estime aussi que le nombre de distributeurs tombera autour de 51 000 d’ici 2024. Le mouvement n’a rien de spécifique à la France : les nouveaux usages comme le paiement sans contact ou par QR code ainsi que la multiplication de néo-banques qui mettent l’accent sur le tout en ligne prennent une ampleur mondiale. Partout, donc, les banques comme leurs fournisseurs doivent réfléchir à l’évolution des distributeurs automatique de billets (DAB), tant du point de vue technologique que de celui des usages associés à la machine. Si le mouvement se détecte un peu partout sur la planète, toutefois, certains marchés sont plus friands d’innovations comme la biométrie ou la multiplicité de services que d’autres. La France, notamment, n’est pas vraiment en avance. Cloud et continuité d’expérience Point de vue logiciel, c’est une révolution similaire à celle qui touche beaucoup de services bancaires que traversent les automates : celle du cloud. Auparavant, tout était tourné en local, chaque machine ressemblait à un méga ordinateur. “C’était extrêmement rigide, raconte Bruno Savournin, directeur secteur bancaire de NCR en France et en Belgique : à chaque fois qu’on voulait ajouter un nouveau service on devait générer une nouvelle application, des recettes d’homologation qui pouvaient durer de 12 à 18 mois, puis il fallait encore les installer sur tous les automates” du parc de la banque concernée. Désormais, les DAB comme le reste des ordinateurs sont connectés à un nuage. Ce dernier interagit avec la très légère couche logicielle qui subsiste encore sur les machines. Pour Bruno Savournin, si les banques investissent dans cette transformation, “c’est pour les raisons habituelles de time to market, d’agilité, de plus grande maniabilité…” Et parce que cela permet de déployer beaucoup plus simplement et rapidement les services qui répondent aux nouvelles attentes des clients. Car ces derniers, explique le directeur commercial France chez Diebold Nixdorf Grégoire Basquin, “recherchent des expériences plus homogènes, plus fluides, qui répondent à des exigences de rapidité et de facilité d’usage.” Passer par le cloud, c’est donc aussi permettre de rendre l’usage de l’automate plus cohérent avec celui des autres écrans, ordinateur et smartphone en tête, via lesquels le client interagit avec sa banque. L’autre piste d’amélioration technique des DAB, c’est l’intégration de technologies différentes auxquelles l’usage est déjà habitué, et qui permettent aussi de simplifier l’interaction avec l’automate. Ainsi du NFC, en Israël par exemple, où Bank of Leumi propose “cash by mobile”, un retrait qui s’effectue directement par téléphone, sans avoir besoin de carte bancaire, ou du retrait par SMS, l’option proposée par la Caisse d’Épargne lorsqu’un de ses clients attend de récupérer une nouvelle carte. Ou encore de la biométrie, dont “le Maroc, les pays du Moyen-Orient, l’Amérique latine et l’Afrique du Sud sont les plus demandeurs” selon Grégoire Basquin. Même en Espagne, CaixaBank propose déjà de réaliser des retraits depuis ses automates en n’utilisant que la reconnaissance faciale, et plus son code PIN. Diebold Nixdorf utilise aussi “des éléments tels que la téléphonie mobile, les tablettes ou les montres connectées” pour permettre aux utilisateurs de tirer le meilleur parti de leur expérience. Stratégie digitale multicanale Toutes ces évolutions permettent d’inscrire les DAB “dans une stratégie multitouch, et permettent la même poursuite d’expérience que lorsqu’il s’agit de passer de son ordinateur à sa tablette ou à son smartphone”, selon les mots de Bruno Savournin. Un progrès qui pousse un autre angle d’évolution des distributeurs automatiques : celui des services offerts en tant que tels par la machine. Car pour Grégoire Basquin (Diebold Nixdorf), répondre aux nouvelles attentes des clients, c’est aussi “sortir du cadre strict des fonctions régaliennes que les DAB pouvaient apporter jusqu’à maintenant”. En Inde, par exemple, HDFC Bank propose de payer ses factures à l’automate. En Espagne, au Portugal, “près de 200 services peuvent être accessibles depuis certains DAB”, selon Bruno Savournin. Pour Grégoire Basquin, la France reste en fait, de ce point de vue là, “un des rares pays à ne pas proposer des services avancés sur les automates bancaires”. Le DAB comme dernier point de contact Pourtant, sans même passer par des partenariats avec des fournisseurs de gaz ou d’électricité, l’automate pourrait devenir “le parfait réceptacle pour faire l’éloge de toutes les nouvelles offres des banques”, selon les mots de Julien Maldonato, associé innovation chez Deloitte. S’il évolue, aussi bien d’un point de vue technologique que de services proposés, c’est que l’automate, en réalité, suite la pente vers sa mutation en “point de contact unique entre le client et la banque”, selon Grégoire Basquin. Bruno Savournin (NCR) va dans son sens : “Des agences express, sans personnel, sont déjà installées dans des points de passage (des galeries commerçantes par exemple) aux Etats-Unis ou au Moyen-Orient.” Ces solutions-là permettent aussi bien de fournir un chéquier ou une nouvelle carte que d’engager une visioconférence avec un conseiller en cas de besoins spécifiques. Par ailleurs, le passage par le cloud et l’intégration toujours plus importante d’algorithmes dans la mécanique de ces machines permet aussi d’en assurer une partie de la maintenance, voire du réassort, à distance. NCR vient par exemple de lancer une nouvelle génération de machines qui “recyclent” les billets, et sont capables de les redistribuer directement. Une innovation qui pourrait concerner les 12 000 distributeurs déjà équipés pour gérer automatiquement des dépôts en France. Mais pour Julien Maldonato, la valeur ajoutée de ces nouveaux usages reste douteuse. Du côté des nouveaux services bancaires, notamment, “Si l’on peut réaliser une simulation de crédit ou d’épargne à long terme sur l’écran qu’on a dans notre poche, pourquoi irait-on le faire debout devant un grand écran, sans intimité ?” La question mérite d’être posée. Par ailleurs, le coût de transformation des machines reste élevé, aussi ce spécialiste du secteur bancaire estime-t-il que, si les DAB deviennent effectivement très performants, ils ont finalement peu de chance d’être adoptés en France. Ceux à qui ces outils seront destinés sont plutôt “les clients à très forte marge. Ceux-là, ça vaut le coup de les choyer, de leur donner une expérience digne, presque, d’un parc d’attraction.” Mais les marchés concernés ne sont pas très nombreux. Quelques pays du Moyen-Orient, “peut-être Singapour ou quelques mégavilles chinoises… Mais dans un marché comme la France, où on ne gagne quasiment plus d’argent sur une population de masse, ce n’est pas intéressant.” Quel usage dans un monde sans cash ? Pourquoi tant de rejet pour une machine qui promet pourtant une (r)évolution complète ? “La question, soulève l’expert de Deloitte, est celle de la pérennité : les compléments offerts par des distributeurs par rapport à un smartphone ou un ordinateur risquent de diminuer la valeur des avantages de ce type de machine.” Pour lui, les DAB traversent une phase de transition qui, en réalité, n’est qu’un palliatif avant leur disparition complète, de concert avec celle des espèces. À moins de voir apparaître une forme paradoxale de DAB sans cash, uniquement dédié à fournir d’autres types de services. Bruno Savournin, de NCR, se veut plus optimiste : “Le cash reste une valeur refuge, en 2018, il a même augmenté de 7% [en émissions nettes, ndlr] par rapport au cash en circulation en 2017.” Des chiffres qu’il explique parce que les espèces sont “un moyen de paiement universel, un moyen de thésaurisation, parce qu’elles permettent de ne pas être trop tracés à l’heure où nos données indiquent tout de nous…” Une théorie que confirme au moins en partie la Banque de France. Mais le gros enjeu, admet-il, consiste tout de même à trouver de nouveaux foyers de rentabilité, probablement du côté des nouveaux services que les machines peuvent proposer. Malgré tout, la Banque de France envisage aussi une baisse de 20% en valeur des billets en circulation d’ici 2025. Julien Maldonato, de son côté, tempère ainsi : “l’intuition que nous avons, c’est que l’usage du cash n’est pas forcément important pour M. Tout le monde.” Pour lui, si le volume en circulation persiste à augmenter d’une année sur l’autre, c’est plutôt parce qu’il sert “de réserve de valeur certes, mais aussi à des économies qui ont un vrai intérêt à rester dans l’ombre.” C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles le billet de 500 euros n’est désormais plus émis par 17 des 18 banques centrales de l’eurozone, accusé de ne servir qu’au marché noir. Surtout, Julien Maldonato tient à souligner le “changement de rythme très fort” constaté dans l’adoption des offres des néobanques par les Français. “Ça n’a rien à voir avec ce qu’on avait pu constater lors de l’avènement des banques en ligne, des Boursorama et autres. Cette fois-ci, on peut totalement souscrire en ligne, très simplement, et si la nouvelle posture qui consiste à utiliser ces services se généralise, ça justifiera une disparition encore plus rapide du cash.” Une évolution qui, qu’elle soit brutale ou plus douce, aura forcément un impact sur le besoin et donc la taille des parcs de distributeurs automatiques de billets, avec ou sans avancées technologiques. La gestion des parcs d’automates, un casse-tête à part entière En confiant la gestion de son parc d’automates à Brink’s, selon Julien Maldonato, la “BPCE est probablement la première d’une longue lignée”. En France, explique Bruno Savournin, “les DAB n’ont très longtemps été utilisés que pour le retrait d’espèces. Or leur nombre baisse, les commissions sont tombées de 72 à 57 centimes par retrait effectué chez la concurrence…” Bref, le marché n’est plus rentable pour les banques, qui ont tendance à chercher des moyens de se défaire de ce lourd poste de coûts, “à part, peut-être, chez celles qui estiment avoir un devoir territorial”. Voire, donc, si La Banque Postale et le Crédit Agricole ne préserveront pas leur parc. Les autres, elles, cherchent “à réduire les coûts liés aux automates, et pour cela mettent de la pression sur les fabricants”, constate Grégoire Basquin. C’est l’une des raisons pour lesquels ces derniers proposent désormais de l’infogérance, qui permet à leurs clients, selon le directeur commercial de Diebold Nixdorf, de “réduire de 10 à 30% le coût de gestion technique du DAB”. Pour réduire les coûts, une autre option a pu être proposée, y compris par les autorités : le partage d’automates entre banques, comme il se fait déjà aux Pays-Bas. Bruno Savournin admet que NCR comme ses clients “observent ce type d’initiative”, mais il doute qu’elles connaissent une adoption large. “La logique serait de construire des cash center, où les clients de n’importe quelle banque pourraient aller chercher leurs espèces, mais pour les institutions financières, cela reviendrait à perdre un outil de différenciation.” Dernière proposition, imaginée par Brink’s et lancée le 19 juillet Locmaria-Plouzané, dans le Finistère : l’automate sans banque. Un nouveau service qui répondra, surtout, à la question de la couverture territoriale des DAB, et est proposé entre 500 et 1300 euros par appareil et par mois, selon le volume de retraits. Il “peut convaincre peut-être 500 communes” selon Julien Maldonato, “car les institutionnels finiront probablement par fermer une partie de leurs distributeurs”. Pour consulter le tableau, cliquez sur l’image (PDF) agence bancairebiométriecloudsystème de paiement Besoin d’informations complémentaires ? 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