Accueil > Financement et politiques publiques > Financement de l'innovation > Marc Julien (Diabeloop) : “Créer de la confiance avec les investisseurs prend du temps” Marc Julien (Diabeloop) : “Créer de la confiance avec les investisseurs prend du temps” Pour une start-up, une levée de fonds est un moment crucial qu’il faut savoir anticiper. Expert en stratégie de développement et d’investissement, Marc Julien revient pour mind Health sur les fondamentaux d’une levée de fonds réussie, au travers notamment de l’expérience de la start-up grenobloise Diabeloop, dont il est le directeur des opérations. Par Romain Bonfillon. Publié le 19 juillet 2022 à 23h31 - Mis à jour le 19 juillet 2022 à 14h18 Ressources Pour une start-up, comment et quand doit se faire le choix de recourir à une levée de fonds ? Une levée de fonds sert fondamentalement à financer une entreprise qui ne gagne pas encore assez d’argent et qui a besoin d’en dépenser pour développer l’activité qu’elle met en place. Pour trouver du financement en externe, une start-up a 3 possibilités : lever des fonds auprès d’investisseurs en equity (en échange d’action) ; trouver de l’argent par le biais de prêts, notamment auprès des banques ; faire appel à des financement publics soit par de la subvention, soit par de l’avance remboursable. L’inconvénient de l’equity est de diminuer la proportion de capital que vous détenez, de faire ce que l’on appelle de la dilution. Celle-ci est d’autant plus grande que vous faites une augmentation de capital au moment où votre entreprise est la plus faible. Existe-t-il un moment idéal pour lever des fonds ? Il existe dans les différentes phases de développement d’une entreprise des marqueurs qui vont faire que les investisseurs vont valoriser votre entreprise à un niveau différent. Le marqueur clé dans le secteur de la santé numérique est l’autorisation réglementaire de pouvoir commercialiser une solution. Dans la biotech, ce sera plutôt la réalisation d’un certain nombre d’études cliniques, aux phases I, II et III, mais dans les medtech, c’est vraiment le marquage CE ou l’autorisation de la FDA qui sont les marqueurs de la création de valeur. Comment financer son projet d’innovation en santé ? Quel est le risque pour une start-up de lever des fonds trop tôt ? Si vous faites une augmentation de capital trop tôt, avant d’avoir ce marqueur de l’autorisation réglementaire, vous allez vous faire diluer. Pour l’investisseur, il existe aussi un risque de perte de valeur et de potentiel de valorisation de vos titres. Attendre le premier marqueur est donc aussi un moyen d’ôter ce risque pour l’investisseur arrivant. Vous pourrez alors lui demander d’investir plus ou, pour un même montant, lui accorder une partie moins importante du capital de l’entreprise. Pour choisir le bon moment de la levée de fonds, le dirigeant de start-up doit finalement répondre à deux questions : “mon entreprise dispose-t-elle encore de cash ?” et “ai-je la possibilité d’attendre un ou plusieurs marqueurs de création de valeur ?” Si c’est le cas, vous avez tout intérêt à faire votre levée de fonds après ce changement d’étape dans le développement de votre société. Les investisseurs valoriseront votre entreprise à une valeur plus élevée et vous perdrez moins de part du capital. Diabeloop a levé cette année 70 M€ dans une série C. Quelle a été votre “stratégie de séduction” des investisseurs ? Cette stratégie a évolué en fonction des moments de la vie de l’entreprise. Au stade seed (série A) les investisseurs veulent être rassurés sur le fait que le produit va bien arriver sur le marché et qu’il va notamment pouvoir obtenir un marquage CE. Il nous a donc fallu apporter des résultats cliniques et des preuves de l’efficacité technique de notre solution. Il a aussi fallu convaincre ces investisseurs que l’équipe qui pilote l’entreprise est la bonne et qu’elle sait s’entourer des bonnes personnes. À un deuxième niveau, le business plan doit prouver que le produit est valorisable sur un marché. Lors de notre série A, nous avons mis en avant le fait que nous avions déjà une stratégie go-to-market et que nous discutions avec les autorités françaises pour un remboursement de notre solution. Lors de notre tour B, nous avons valorisé le fait que nous disposions du marquage CE et pour le dernier tour, celui de cette année, nous avons montré qu’un certain nombre de patients étaient aujourd’hui équipés de notre système d’administration automatisée d’insuline, et donc que nous étions capables de le commercialiser rapidement. Comment choisir son fonds d’investissement ? Il faut, lorsqu’on parle aux fonds d’investissement, bien les comprendre, c’est-à-dire savoir à quelle typologie de fonds d’investissement on s’adresse. Certains sont très à l’aise sur des tours A, d’autres plus spécialisés sur des tours C. De la même manière que ces investisseurs font leur due diligence (étape de vérification des comptes par les potentiels investisseurs, ndlr), le manager doit faire de même vis-à-vis du fonds d’investissement avec lequel il souhaite travailler. Quels sont ses besoins ? Quelle est sa stratégie d’investissement ? Et sa stratégie de sortie ? A-t-il l’intention de rester longtemps ? “Il ne faut pas attendre d’avoir un besoin réel de fonds pour rencontrer les investisseurs.” Existe-t-il des fonds d’investissement qui ont une bonne ou mauvaise réputation, en termes de niveau d’exigence au moment de la transaction ? Il existe des cultures différentes dans les fonds d’investissement. La culture anglo-saxonne n’est pas la culture française. Il y a des fonds d’investissements qui sont plus “financiers” dans leur approche et d’autres, c’est plus notre culture en France, qui sont orientés vers le business et qui ont plus de souplesse dans la gestion de leur participation aux investissements de l’entreprise. Une autre distinction peut se faire entre des fonds qui sont très présents dans la vie de l’entreprise et d’autres qui injectent de l’argent et vous laissent faire. Quels conseils donneriez-vous aux start-up désireuses de lever des fonds ? Cette recherche de fonds est un chemin de pèlerin et il ne faut pas attendre d’avoir un besoin réel de fonds pour rencontrer les investisseurs. Je conseille donc d’aller les voir le plus tôt possible, même si ce n’est pas pour faire un investissement dans l’année. Ils doivent apprendre à connaître une équipe, une solution, les prochaines étapes importantes de son développement,… Il faut en quelque sorte les éduquer et créer un dialogue. Chez Diabeloop, c’est avec les investisseurs que nous connaissions dès nos débuts que nous avons été les plus efficaces. Créer de la confiance avec les investisseurs prend du temps. Je conseille également d’anticiper les levées de fonds, qui demandent beaucoup de temps aux équipes managériales. Enfin, pour les séries B et C, la levée de fonds doit se faire au moment où l’entreprise dispose d’une nouvelle création de valeur, démontrable devant des investisseurs. Marc Julien Depuis 2016 : Co CEO / COO de Diabeloop Depuis 2018 : Membre du Conseil d’administration de France Biotech 2018-2020 : Membre du bureau PME de Minalogic (pôle de compétitivité des technologies du numérique en Auvergne-Rhône-Alpes) 2006 -2015 : Il mène plus de 30 projets de transactions (acquisitions /cessions/partenariats) au Fonds Stratégique d’Investissement (aujourd’hui BPIfrance) ainsi que pour des acteurs internationaux comme Moniteur Deloitte, Econocom ou Schneider Electric dont il est Senior Vice President “Strategy & Acquisitions”. Romain Bonfillon DiabèteFonds d'investissementLevée de fondsRèglementairestart-up Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Diabeloop ouvre un nouveau segment sur le marché de l'insulinothérapie Start-up à la loupe Comment Diabeloop se positionne sur la technologie de "pancréas artificiel" Diabeloop lève 70 M€ pour accélérer son déploiement à l’international Diabeloop lève 31 M€