Accueil > Industrie > Marché du médicament : les grands renversements Marché du médicament : les grands renversements IQVIA présentait le 9 mars 2023 son panorama du marché du médicament. Chiffres à l’appui, la multinationale américaine spécialisée dans les données de santé au service de la recherche clinique, relève les changements radicaux, présents et à venir, induits par la pandémie de Covid-19. Par Romain Bonfillon. Publié le 09 mars 2023 à 17h26 - Mis à jour le 27 avril 2023 à 15h41 Ressources Le Covid aura lourdement impacté les dépenses mondiales en médicaments. Les prévisions pré pandémiques estimaient ces dépenses à 497 Mds $ pour la période 2020-2027. Elles seront largement dépassées. Si le marché mondial du médicament maintient sa croissance (IQVIA table sur un taux de croissance annuel moyen – TCAM – de 3 à 6 %), il devrait atteindre environ 1900 Mds $ en 2027. À noter que ces perspectives diffèrent beaucoup selon le pays analysé : la France devrait connaître, selon IQVIA, une croissance de son marché du médicament de 5 à 6% par an entre 2021 et 2026 (identique à celui du Royaume-Uni, de l’Italie ou de l’Espagne), là où des pays émergents comme la Turquie se voient prédire un taux de croissance de 33 à 34% par an jusqu’en 2026. Cette croissance sera tirée par l’oncologie et l’obésité, ajoute l’étude d’IQVIA, qui prévoit d’ici 2026 un TCAM du chiffre d’affaires en hausse de 13 à 16% pour l’oncologie et de 10 à 13% pour l’obésité. L’index des bilans économiques du Leem – mind Health La croissance annoncée du marché français En France, les ventes de médicaments ont continué à augmenter en 2022, qu’il s’agisse de médicaments remboursables (+8,1%) ou de médicaments non remboursables (+9,9%). Il est intéressant de noter qu’environ 44% des médicaments ont été prescrits en 2022 dans le cadre de l’hôpital. C’est 13,3% de plus qu’en 2021, là où les prescriptions faites par les professionnels de santé libéraux n’ont augmenté que de 4,6%. “Ce différentiel nous interroge, fait remarquer Stéphane Sclison, Senior Principal d’IQVIA. Dans un contexte de saturation de l’hôpital, nous nous demandons pendant encore combien de temps cette croissance sera soutenable”. La croissance du marché officinal est principalement le fait de l’augmentation des volumes : ces derniers ont doublé, notamment en raison de la demande de vaccins Covid. Stéphane Sclison fait également remarquer un phénomène nouveau : “Même si elle est toujours derrière ses voisins britanniques et allemands, la France a désormais des taux de croissance de son marché similaires à eux”. Un signe encourageant, selon lui. Panorama 2022 de la healthtech : la filière française résiste et se transforme L’innovation en panne ? “Les cinq plus gros marchés du médicament (Etats-Unis, Chine, Japon, Allemagne, France, ndlr) ont mis en place un système de régulation des dépenses médicamenteuses post-covid. Le débat sur les prix a été initié par Donald Trump mais la phase Covid a accéléré ce processus”, note Elsa Duteil, directrice associée Prix et accès au marché chez IQVIA. La pression mise par les États sur le prix des médicaments n’est donc pas seulement affaire de conjoncture. Elle traduit une tendance lourde, et sans doute durable. Aussi, souligne le panorama d’IQVIA, les lancements de nouveaux médicaments ne parviennent pas à rattraper les niveaux d’adoption d’avant-crise : ils sous-performent. Cette tendance s’explique, outre par les contraintes budgétaires auxquelles sont soumis les payeurs, par des exigences toujours plus grandes pour apporter des preuves d’efficacité des traitements, notamment en vie réelle. “Les nouvelles thérapies contre l’obésité et la maladie d’Alzheimer ouvriront-elles la voie en 2023 ?”, s’interroge le rapport d’IQVIA. Ce dernier note en effet une faible incitation à l’innovation, hormis en oncologie, et une frilosité des payeurs pour favoriser l’accès des thérapies innovantes au plus grand nombre (exemple des nouveaux traitements de l’obésité ou des thérapies anti-amyloïdes). Ces thérapies innovantes représentent pourtant une réelle source d’espoir. “Ces dernières deviennent enfin commercialement viables”, note Elsa Duteil, évoquant plusieurs décisions passées ou à venir, parmi lesquelles l’enregistrement en 2022 par l’EMA de la thérapie génique de Biomarin contre l’Hémophilie A ou le lancement aux États-Unis en 2023 de la première thérapie ciblant le microbiome. Biotech : de meilleures perspectives d’accès à l’innovation en France – mind Health Les perspectives 2023 Le marché du médicament reste en croissance, eu égard aux besoins grandissants de produits de santé, liés principalement au vieillissement de la population mondiale, note Stéphane Sclison. Aussi, les contraintes budgétaires nationales et les conséquences de la pandémie va mettre l’écosystème du médicament face à plusieurs défis, parmi lesquels : le financement des biotechs. Après deux années records de levées de fonds, les niveaux de financement de ces entreprises pourvoyeuses d’innovations importantes sont revenus au niveau pré pandémie. “Elles ont répondu au manque de cash par des licenciements”, souligne l’étude d’IQVIA. la crise des systèmes de santé nationaux. Entre 2019 et 2022, la part des dépenses de santé dans le PIB a augmenté partout. Sur la zone UE / UK / US, cette croissance se situe entre +11% et +27%. Les retombées post pandémiques prolongeront sans doute cette tendance, puisque le coût prévisionnel de la vaccination et des traitement COVID jusqu’en 2026 s’élève à 251 Mds $ une période de fusions/acquisitions. “Les grands groupes pharmaceutiques disposent aujourd’hui de beaucoup de trésorerie et sont plus que jamais en quête de nouvelles innovations pour conquérir de nouveaux marchés. Automatiquement, cela va donc les pousser à faire des acquisitions, prédit Stéphane Sclison. Financement des medtechs : bientôt la disette? – mind Health En conclusion : trois tendances de fonds En guise de conclusion, Stéphane Sclison note trois tendances qui caractérisent aujourd’hui le marché du médicament : un pic de croissance : les dépenses de santé ont connu avec la pandémie une croissance forte. Une stabilisation devrait se faire progressivement ; un renversement : “la pandémie n’est pas une crise, mais un renversement qui a accéléré les tensions et évolutions déjà présentes dans les systèmes de santé” ; des opportunités : “l’industrie pharmaceutique, conclut Stéphane Sclison, a pu montrer qu’elle ne représentait pas seulement un poste de dépense pour les pouvoirs publics. Elle a pu démontrer son rôle vital dans la sortie de crise”. À ce titre, il se félicite que le regard, en partie celui des décideurs politiques, sur cette industrie ait changé. Romain Bonfillon BiotechsCOVID-19EtudeHôpitalMarchéMédicament Besoin d’informations complémentaires ? 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