Accueil > Financement et politiques publiques > Politique de santé > Pierre Desmarais (Desmarais Avocats) : “IA en santé et lutte contre le coronavirus, même combat !” Pierre Desmarais (Desmarais Avocats) : “IA en santé et lutte contre le coronavirus, même combat !” La Commission européenne a publié le 19 février une foire aux questions intitulée "Façonner l'avenir numérique de l'Europe", document dans lequel elle se montre plus ouverte que la France à l'utilisation de l'intelligence artificielle en matière de dispositifs médicaux ou même à la réutilisation des données pour faire face notamment à des situations d'urgence. L'avocat Pierre Desmarais confronte ces deux positions. Par . Publié le 23 mars 2020 à 11h04 - Mis à jour le 23 mars 2020 à 11h04 Ressources Alors que la pandémie du coronavirus s’étend et que la quasi-totalité de la population de l’UE est désormais confinée chez elle, l’utilisation des données relatives à la santé apparaît à certains comme une solution. Taiwan a utilisé l’intelligence artificielle (IA) pour suivre et endiguer la propagation du virus et l’on apprend que Deutsche Telekom aurait transféré 5 Gb de données de connexion des téléphones mobiles à l’institut allemand en charge du contrôle et de la lutte contre les maladies. Objectif : utiliser des données « anonymes » – on peut en douter vu les études sur la réidentification des personnes à partir des données de mobilité – pour étudier la propagation sur le territoire national de l’Allemagne. Passons outre – aujourd’hui – l’infléchissement probable du droit à la protection des données à caractère personnel pour nous focaliser sur l’utilisation de l’IA en matière de santé. Pour mémoire, la France souhaite un cadre relativement strict interdisant tout dispositif médical de diagnostic reposant sur l’IA. C’est en tout cas la position que défend le Gouvernement dans le projet de loi bioéthique, en cours de discussion. La position de la Commission Européenne semble nettement plus favorable. Le 19 février dernier, elle a publié une foire aux questions intitulée « Façonner l’avenir numérique de l’Europe » revenant sur l’utilisation de l’IA, tous secteurs confondus. Dans le domaine de la santé, la Commission voit dans les données un moyen notamment « de faire face à des situations d’urgence » et « d’aider les personnes à vivre plus longtemps et en meilleure santé ». Sur quel fondement juridique se base la Commission pour proposer une réutilisation des données ? Sur l’ « actuelle » directive Opendata qui impose la mise à disposition des données, et qui a été transposée – sectoriellement – avec la mise en place du Système national des données de santé (SNDS). Mais visiblement, cela ne va pas assez loin. La Commission demande désormais la création d’un « espace européen des données de santé afin de promouvoir la recherche, le diagnostic et le traitement ciblés ». Si l’on peut voir dans le SNDS un moyen de promouvoir la recherche, il est en revanche peu probable que son contenu permette de promouvoir le diagnostic et le traitement et tout à fait certain qu’il ne permet pas de « cibler » le diagnostic et le traitement. L’ouverture des données de santé va donc devoir se poursuivre et concerner désormais des « dossiers » comprenant des données individuelles et permettant l’identification, même indirecte, des patients, afin de pouvoir améliorer leur prise en charge. Pour ce faire, la Commission souhaite l’instauration d’un climat de confiance pour l’adoption de l’IA par les citoyens. Elle ne craint pas de leur promettre des soins de santé de meilleure qualité. De façon assez classique, la Commission recommande une approche par le risque du côté des industriels de santé et des régulateurs. Elle considère que dans le domaine de la santé, le recours à l’IA est à haut risque. Cette évaluation du niveau de risque se base sur la sensibilité de notre secteur de prédilection et sur la gravité de l’impact d’un incident. En effet, un défaut affectant un algorithme d’IA pourrait induire des séquelles graves, voire un danger de mort pour les malades. Ce haut niveau de risque ne paraît pas de nature à devoir stopper les investissements et recherches européennes, pour l’exécutif de l’UE, qui n’écarte pas l’utilisation de l’IA en matière de dispositifs médicaux. Se pose alors la question de la compatibilité de la future loi bioéthique avec le droit communautaire. De façon très concrète, comment pourra-t-on concilier l’interdiction de l’IA autonome en santé, actuellement défendue dans le projet de loi bioéthique, avec les dispositions relatives à la libre circulation des dispositifs médicaux marqués CE sur tout le territoire de l’Union ? Au final, la lutte contre le coronavirus comme l’utilisation de l’IA en matière de santé pointent du doigt un même obstacle : la compétence réservée des Etats membres en matière de santé ! PIERRE DESMARAIS 2016 : Obtient la certification ISO27005 Analyste de risque SI 2012 : Création du cabinet Desmarais Avocats, spécialisé en droit numérique, des données et de l’innovation 2012 : Devient correspondant Informatique et libertés (CIL) 2009 : Avocat au Barreau de Paris, spécialisé en droit numérique et de la santé Commission EuropéenneCOVID-19Dispositif médicalDonnées de santéIntelligence ArtificielleLegislation Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind