Accueil > Marques & Agences > Achat média > Ce qu’il faut retenir des Rencontres de l’Udecam 2019 Ce qu’il faut retenir des Rencontres de l’Udecam 2019 Lors des Rencontres de l’Udecam, matinée de conférences organisée jeudi 5 septembre et dont mind Media était partenaire média, les professionnels des médias et de la communication se sont exprimés en faveur d’une “biodiversité” des médias. Autrement dit, un rééquilibrage du marché publicitaire, actuellement préempté par les plateformes, en faveur des médias traditionnels. En voici les points marquants. Par Paul RoyJean-Michel De Marchi. Publié le 06 septembre 2019 à 11h25 - Mis à jour le 26 février 2021 à 17h44 Ressources 1 – Pour éviter la concentration, repenser la biodiversité et les relations avec les plateformes Raphaël De Andreis, président de l’Udecam et d’Havas Village France Il a insisté sur une responsabilité partagée et des efforts communs à poursuivre : “Les acteurs ont vécu une mutation de l’écosystème vertigineuse. De nouvelles espèces, les entreprises technologiques, sont venues tout bouleverser. Elles offrent des opportunités d’accès au contenu incroyables, mais il faut retrouver un équilibre et les agences médias ont bien sûr un rôle à jouer pour cela. Retrouvons tous ensemble du bon sens. Collectivement, nous nous sommes trop concentrés ces dernières années sur des KPI quantitatifs. Une impression, c’est quoi ? Un affichage de quelques secondes ou une empreinte dans l’esprit de l’utilisateur ? Il faut remettre de l’objectivité, de la mesure et du bon sens dans la façon dont nous construisons l’écosystème pour le futur. Les agences doivent être vigilantes à cela. Nous nous sommes battus pour la mise en place du Digital Ad Trust, ce n’est sans doute pas suffisant, mais c’est une première étape. Les pouvoirs publics ont aussi un rôle à jouer. Aucun gouvernement avant celui celui-ci n’a autant pris à coeur l’avenir du secteur, avec les droits d’auteur, l’égalité fiscale des acteurs, la loi sur la réforme de l’audiovisuel. Tout ça va dans le bon sens, Il faut continuer ainsi”. Arnaud Baudry d’Asson, président de l’agence Oconnection Il a mis en avant la biodiversité comme outil de performance des campagnes : “Le marché de la publicité est déséquilibré aujourd’hui, mais plutôt qu’une question d’éthique ou de démocratie, l’enjeu porte sur l’efficacité publicitaire et en quoi la biodiversité peut nous aider à apporter plus d’efficacité aux campagnes de communication. Le programmatique et l’influence, par exemple, ont eu tendance ces dernières années à enfermer les audiences dans des bulles. On a oublié ce qu’est la communication, avec des préoccupations trop souvent uniquement portées sur la rapidité et l’immédiateté des campagnes pour mesurer le ROI. Il faut effectivement redonner du sens à la communication.” Pierre Louette, PDG des groupes Le Parisien et Les Echos Il a évoqué la place prise par les plateformes dans les modèles économiques et la nécessité de rétablir l’équilibre entre les différents acteurs de l’écosystème via l’instauration de règles communes : “Je ne crois pas qu’il y ait une fatalité à ce que nous, les médias, soyons des idiots utiles du numérique, et que tous les contenus produits soient exploités par quelques acteurs. Il y a une oligarchie du numérique : 40% du temps passé et 80 % du chiffre d’affaires de la publicité se font sur deux acteurs. Il faut travailler sur une relation équilibrée avec les plateformes (…) Je mène actuellement un groupe de travail qui négocie directement avec elles dans le cadre de la réforme des droits voisins. Nous ne voulons pas montrer d’hostilité majeure, mais pas de signe de soumission non plus. La diversité, c’est l’équilibre : il faut que les plateformes se rendent compte qu’elles doivent composer avec le réel, notamment avec le respect de la loi (…) Les effets de réseaux jouent au profit de ceux qui se sont installés comme numéro un : il n’y a pas beaucoup de numéro deux dans chacun des marchés en ligne (…). Cette concentration du secteur a eu un impact énorme : 50 % des revenus publicitaires des éditeurs ont été perdus en dix ans. Cette perte joue sur la diversité des contenus offerts au public, ce qui sur la durée menace leur qualité. Il y a donc des enjeux de droit de la concurrence qui se posent” Louis Dreyfus, président du directoire du Monde, Il a expliqué à quelles conditions Le Monde noue une relation étroite avec les plateformes, en l’occurrence Facebook, lors d’une présentation avec Laurent Solly, VP Europe du sud de Facebook : “Le Monde s’associe aux plateformes à trois conditions : le respect total de l’indépendance de la rédaction – les contenus produits et distribués ne peuvent être décidés que par les journalistes -, ensuite que les partenariats participent à la transformation de notre business model, et enfin qu’il nous permettent de générer des revenus et de la rentabilité. Nous avons par exemple refusé de participer à Facebook Instant articles car ce dispositif faisait disparaître la marque Le Monde. Mais Facebook peut nous aider à développer notre modèle, y compris notre modèle payant. Le Monde a aujourd’hui 205 000 abonnés purs digitaux, en croissance d’environ 30% depuis janvier 2019, avec entre 300 et 400 nouveaux abonnés nets par jour. Environ 85 % de nos abonnés en ligne sont acquis via nos propres supports. Sur le reste, Facebook est de loin le premier levier d’acquisition d’abonnés, et on travaille très bien avec les équipes de Facebook pour progresser encore sur cet aspect, sur les contenus les plus adaptés à la plateforme, la vérification d’informations, etc.” Franck Gervais, président de Union des marques (UDM) et du groupe AccorHotel Il a affirmé la nécessité de revoir les règles du marché publicitaire : “La confiance, c’est un tiers des actifs d’une marque. Comment recréer les conditions de la confiance ? Premièrement avec contenu adapté au média sur lequel il va être diffusé. Deuxièmement avec une distribution de qualité, sécurisée, traçable. Nous avons lancé le Digital Ad Trust qui permet en engagement des marques signataires pour pousser des contenus sur des sites labellisés favorisant qualité, sécurité et traçabilité des campagnes. Ces contenus labellisés sont vus six fois plus qu’avant. Troisièmement, avec des outils pour bénéficier de mesures pertinentes, un aspect pas assez abordés dans le débat alors que les outils indépendants et de confiance sont clés pour les campagnes. Mais plus largement, un “New deal” au sein du secteur est nécessaire car la relation de confiance s’est détériorée entre les acteurs. Et même au-delà, puisque 62 % des Français déclarent ne pas avoir confiance dans les grandes entreprises. L’attention s’est altérée. Chacun doit faire un travail individuellement, mais le devoir d’agir est collectif ; l’UDM soutient donc les Etats généraux de la communication (qui ont été proposées par Mercedes Erra, ndlr)”. 2 – Une adaptation nécessaire de la réglementation aux mutations des médias Pour donner aux acteurs traditionnels les armes pour résister à la concurrence des plateformes numériques, les professionnels des médias ont plaidé pour une adaptation de la législation aux évolutions de la consommation numérique. Franck Riester, ministre de la Culture et de la communication Il est revenu sur la réforme de l’audiovisuel dont il a présenté les contours lundi 2 septembre auprès des professionnels du marché français et sur les droits voisins aux droits d’auteurs : “Il faut inventer un nouveau modèle destiné à intégrer l’ensemble des acteurs, nouveaux et historiques. Cette loi sera destinée à inventer un nouveau modèle économique pour les acteurs de l’audiovisuel. Nous pouvons et devons agir pour protéger nos acteurs nationaux, nos agences de communication et nos médias, et – finalement – protéger l’exception culturelle française et notre souveraineté culturelle. Le vote sur les droits voisins aux droits d’auteurs va dans le même sens. C’est un signal très fort pour la presse et les journalistes. La valeur créée par les éditeurs et les créateurs de contenus est jusqu’à présent accaparée par les plateformes qui réutilisent leurs contenus. C’est aussi la preuve que l’Europe a un rôle à jouer. Plus largement, nous allons nous pencher également sur le piratage des contenus en ligne en nous attaquant aux sites de streaming illégaux.” Daniel Kretinsky, propriétaire de CMI France, actionnaire de LNEI L’industriel tchèque, qui a investi dans LNEI et acquis les activités presse de Lagardère, désormais rassemblées au sein de CMI France, a justifié son entrée dans le marché de la presse française : “Mon ambition est de soutenir le journalisme traditionnel, qui perd de l’audience et des parts de marché publicitaires au profit des GAFA, ce qui fait peser une menace sur les démocraties européennes. Pour cela, il y a deux actions à mettre en place. Premièrement, les GAFA doivent avoir la même responsabilité de l’information qu’ils diffusent que les médias traditionnels. Deuxièmement, les groupes médias, dont la puissance financière limite les investissements dans les technologies nécessaires à la diffusion de l’information en ligne, doivent mettre en commun leurs efforts pour développer leurs propres outils.” Roch-Olivier Maistre, président du CSA Il a souligné que la régulation doit prendre la mesure des évolutions de la consommation média : “On constate une grande asymétrie entre les médias traditionnels soumis à une régulation et les nouveaux entrants qui y échappent. Or, la diversité des médias est l’objectif même de la régulation française.” L’organe va prochainement se voir confier de nouvelles missions dans ce sens, en particulier grâce à la réforme de l’audiovisuel qui va le doter, par exemple, du pouvoir de négocier avec les plateformes vidéo de leur investissement dans la création française. 3 – Repenser les modèles des médias traditionnels Dans un climat de défiance global des audiences, face à de nouveaux acteurs et à une baisse de leurs revenus publicitaires, les éditeurs traditionnels doivent repenser leurs modèles économiques, leurs stratégies éditoriales et leur modes de diffusion. Anna Bateson, chief Customer officer de The Guardian Les revenus du Guardian issus des dons ont aujourd’hui dépassé ses revenus publicitaires, et qui a pour objectif d’atteindre les deux millions de donateurs d’ici 2022 – a exposé les piliers de la stratégie de transformation mise en place par l’éditeur depuis trois ans : “Le travail collaboratif est indispensable. Le premier levier est de casser les silos traditionnels au sein des médias, partager la donnée, faire travailler ensemble les équipe éditoriales, digitales et commerciales. Le deuxième est l’expérimentation, le test encore et toujours. Enfin, tout notre travail doit être basé sur l’exploitation de la data, dont nous nous assurons qu’elle est disponible, partagée, comprise et qu’elle guide les décisions finales.” Philippe Carli, PDG d’EBRA Le dirigeant de l’un des principaux groupes de presse quotidienne régionale (PQR) français a expliqué comment il comptait transformer son activité : “L’ensemble de nos rédactions (1 500 journalistes et 6 000 correspondants) vont s’attacher à produire un contenu plus adapté à chaque moment de vie (voiture au travers de podcast etc.). Le journal du lendemain sera ainsi construit en reverse publishing et ne sera plus qu’un élément de notres grille de contenus. Nous avons mis en place une Digital Factory, une cellue de développement transversale au groupe, avec un investissement de 20 millions d’euros sur trois ans pour former les journalistes au numérique mais aussi pour le lancement de projets” (Ndlr : l’exemple du projet “métropole”, ayant pour but de produire des contenus destinés aux plus grandes villes) 4 – L’intérêt des plateformes pour les contenus éditeurs et utilisateurs Souvent critiquées pour leur omniprésence et le non respect des réglementations locales, les plateformes sociales présentes aux Rencontres de l’Udecam ont mis en avant l’intérêt des utilisateurs pour le contenu. Jeff Miller, director of global business marketing de Snap Il a rappelé les noms de la trentaine de partenaires médias que compte Snapchat en France, parmis lesquels France Télévisions, Webedia ou encore Brut (voir la liste), et qui produisent des formats dédiés à l’application. Cette dernière est d’ailleurs la plus utilisée chez les 15-34 ans, et ses utilisateurs sont très engagés avec le contenu puisque les filtres, que peuvent créer les éditeurs, sont utilisés au total 250 millions de minutes chaque jour. Emilie Nguyen, global lead CPG de Pinterest, Elle a fait valoir la particularité de l’expérience sur cette plateforme : “les utilisateurs de Pinterest ne recherchent pas la validation de leurs pairs mais la consommation de contenus qui les intéresse”, et a affirmé que “chacune des 200 milliards d’épingles sur Pinterest redirige vers le créateur du contenu”. Inam Mahmood, director monetisation & partnerships Europe de TikTok Il a invité les annonceurs “à accepter de perdre le contrôle pour pleinement tirer profit des contenus générés par les utilisateurs”. Les adeptes de l’application de partage de clips musicaux consacrent par ailleurs en moyenne 51 minutes à la production d’une vidéo de six secondes. Paul RoyJean-Michel De Marchi Achat médiaAgencesDuopoleLobbyingRelations agences-annonceursStratégies annonceursUnion des marques Besoin d’informations complémentaires ? 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