Accueil > Adtechs & Martechs > Ian Maude (EPTVI) : “Avec la publicité programmatique, nous voulons ouvrir la télévision à davantage d’annonceurs et rendre le marché plus efficace” Ian Maude (EPTVI) : “Avec la publicité programmatique, nous voulons ouvrir la télévision à davantage d’annonceurs et rendre le marché plus efficace” En mai dernier, l’EPTVI, initiative européenne pour la publicité programmatique TV, a lancé son plan d’action pour accompagner le développement de la TV programmatique dans les cinq principaux marchés européens, y compris en France, où TF1 et M6 ont déjà adhéré au projet. Soutenu par The Trade Desk, OpenX, Google, PubMatic, Equativ, Cadent, Magnite et Adform, l’EPTVI ambitionne de définir des standards communs pour la TV programmatique. Lors des Cannes Lions, mind Media a rencontré Ian Maude, à l’origine du projet. Par Chiara De Martino. Publié le 26 juin 2025 à 15h29 - Mis à jour le 26 juin 2025 à 15h30 Ressources Pouvez-vous présenter en quoi consiste Project X, l’organisation à la base de l’initiative EPTVI ? Project X Initiative est un think tank réunissant des dirigeants expérimentés issus des secteurs des médias, de la publicité et des adtechs, avec deux objectifs principaux. Nous menons, d’une part, des projets de conseil stratégique pour différents clients individuels, notamment dans les secteurs des médias, de la technologie et de la publicité. D’autre part, nous réunissons des acteurs du marché, dont des entreprises, pour travailler sur des enjeux d’intérêt commun pour l’industrie. Comme, par exemple, le retard du programmatique TV en Europe par rapport aux États-Unis. Plus précisément, comment le projet EPTVI s’est-il lancé ? Cette initiative est née de discussions que nous avons eues avec plusieurs grands diffuseurs, comme Sky au Royaume-Uni, RTL en Allemagne, TF1 en France, MediaForEurope en Italie, et d’autres encore. Nous avons eu de même des discussions similaires du côté des agences médias, avec de grands groupes comme WPP, Publicis, Dentsu et Omnicom. Ce qui est intéressant, c’est que des deux côtés — diffuseurs et agences — on entendait le même message : oui, nous avons un réel besoin de davantage de collaboration, de standards communs, pour faire croître le marché programmatique en Europe. Les agences ont notamment souligné leur besoin d’un marché plus efficace et plus automatisé, avec umeilleur usage des données. Cela passe par l’adoption d’un ensemble de définitions communes, ainsi que de standards partagés. Quelle est l’idée forte portée par cette initiative ? Le principe fondateur de l’initiative est clair : la publicité programmatique en TV permet à un plus grand nombre d’annonceurs d’accéder à ce marché , en attirant davantage d’investissements. Cela permet également de mieux rivaliser avec les walled gardens. En synthèse, avec la publicité programmatique, nous voulons ouvrir la télévision à davantage d’annonceurs et rendre ce marché plus efficace. CTV : les acteurs du marché investissent pour capter les petits annonceurs – mind Media Quelles sont, à votre avis, les raisons principales de ce retard dans le développement du programmatique TV en Europe par rapport aux Etats-Unis ? Plusieurs facteurs expliquent ce retard. L’Europe constitue un marché bien plus fragmenté que les États-Unis. De même, les diffuseurs européens n’ont pas bénéficié des mêmes incitations à évoluer aussi rapidement que leurs homologues américains. La majorité des broadcasters arrivent déjà à vendre la quasi-totalité de leurs inventaires publicitaires, en particulier sur la télévision linéaire, et leurs activités sont très rentables. Il y avait donc, jusqu’à récemment du moins, peu d’incitations à miser sur le programmatique. En mai dernier, vous avez présenté le plan d’action du projet EPTVI, lancé une année plus tôt, en 2024. Pourriez-vous nous détailler ses principaux objectifs ? L’objectif était d’identifier clairement les principaux freins à l’accélération du développement du marché. L’initiative ayant été lancée en août 2024, nous avons travaillé près d’un an sur cette feuille de route, un délai plus long que prévu. Cela nous a toutefois permis d’avoir des échanges très approfondis et détaillés avec les différents acteurs du marché. Et un consensus s’est dégagé : des changements sont nécessaires, et chacun devra probablement faire un pas vers l’autre. Si les différents acteurs continuent à développer leurs propres solutions dans des silos technologiques, sans coordination, cela risque de freiner l’intérêt des annonceurs pour la télévision programmatique. Et ces derniers pourraient alors continuer à privilégier les grandes plateformes numériques pour leurs investissements. Investissements dans la publicité digitale en Europe : les 5 points clés à retenir – mind Media Plus concrètement, quels sont les principaux changements que vous avez repérés et qui permettraient le développement du programmatique TV en Europe ? Nous avons identifié deux freins principaux. Le premier concerne les disparités entre diffuseurs en matière de mesure publicitaire. En télévision, la mesure d’audience repose généralement sur le foyer, via des panels. Il s’agit de boîtiers installés dans les foyers, qui enregistrent ce qui est regardé sur le téléviseur. Au contraire, la publicité numérique est fondée sur les impressions et adressée à l’individu, avec une mesure plus granulaire. Le défi consiste à réconcilier ces deux types de données, puisque ces deux systèmes coexistent aujourd’hui en parallèle. Le second frein est opérationnel et technique : l’écosystème est fragmenté, avec une multitude de solutions non interopérables. Notre objectif à terme est de faire évoluer le marché publicitaire télévisé vers un modèle davantage fondé sur l’impression, plus proche des standards du numérique. Alors que le marché publicitaire de la télévision est encore si fragmenté, comment avez-vous réussi à trouver un accord de principe pour votre feuille de route ? Nous avons créé une feuille de route qui s’inspire du travail mené par la WFA (World Federation of Advertisers) avec le projet Halo Framework (projet qui vise à relever les défis des mesures cross-médias, ndlr). C’est-à-dire, nous avons défini un ensemble de principes directeurs communs, tout en prévoyant une certaine flexibilité pour les spécificités locales. Nous avons appelé cette charte “programme des trois P”, pour “premium”, “programmatic”, “partner”. Son objectif est de protéger la valeur de l’inventaire TV premium en établissant des normes claires et contraignantes en matière de qualité, de transparence et de responsabilité à l’échelle de l’ensemble de l’écosystème, puisque ce que les broadcasters veulent éviter, c’est que leur inventaire soit banalisé ou transformé en simple marchandise. Pour eux, il est important que la publicité TV ne soit pas classée de la même manière qu’une publicité vidéo diffusée sur des sites de vidéos assez génériques, alors qu’ils disposent de contenus premium qui sont extrêmement coûteux à produire, qu’ils ont des audiences de très grande qualité et des formats publicitaires de haut niveau. Comment envisagez-vous de protéger la spécificité de la publicité TV et son inventaire premium ? Nous travaillons à la mise en place d’un système d’accréditation, ou de certification, afin de permettre aux entreprises dans l’adtech d’être accréditées et approuvées. Ce mécanisme vise à rassurer les diffuseurs quant au fait que leur inventaire ou leurs audiences sont correctement représentés. Nous avons d’ailleurs reçu des retours très positifs de la part des acteurs du marché à ce sujet. Carine Jean-Jean (RTL Group) : ”Les broadcasters doivent s’allier” – mind Media Maintenant que votre roadmap a été lancée, comment allez-vous procéder durant cette deuxième phase ? Nous sommes en discussion avec l’ensemble des groupes d’agences et de diffuseurs. L’objectif de cette deuxième phase est de définir en détail les principes directeurs du projet et d’élaborer concrètement les standards, la documentation et les normes. Par exemple, même pour la validation des publicités, les normes que les spots TV doivent respecter pour être diffusés sur les chaînes linéaires sont très différentes de celles qui s’appliquent à la publicité digitale. Il y a donc un véritable travail d’harmonisation à mener collectivement. Tous les diffuseurs qui étaient impliqués dans la première phase sont également engagés dans cette deuxième phase. Il en va de même pour les groupes d’agences, et nous essayons d’en rallier encore plus, afin de construire un consensus très large au niveau de l’industrie. Aujourd’hui, qui sont les broadcasters et les différents acteurs de l’écosystème qui adhèrent à l’initiative ? R. Nous travaillons avec ITVX, Channel 4 Streaming et Sky NOW au Royaume-Uni ; RTL+ et Joyn en Allemagne ; TF1+ et M6+ en France ; Mediaset Infinity et RAIplay en Italie ; Atresplayer et Mitele en Espagne ; ainsi qu’avec Warner Bros Discovery, Rakuten, Fubo, DAZN et Vevo. Les plateformes technologiques qui soutiennent l’initiative sont The Trade Desk, OpenX, Google, PubMatic, Equativ, Cadent, Magnite et Adform. En ce qui concerne les agences, nous comptons actuellement WPP Media, Dentsu, the7Stars, OMG et Publicis Media. Des discussions sont en cours dans les différents marchés, avec notamment plusieurs diffuseurs souhaitant rejoindre ce projet lors de la deuxième phase. Quel délai vous fixez-vous pour cette deuxième phase ? Nous estimons disposer de suffisamment d’élan et de soutien pour mener ce projet à bien dans les douze prochains mois. Pour moi, l’EPTVI peut réellement faire la différence pour la publicité TV, un secteur qui fait face à de nombreux défis, notamment en raison de la forte concurrence pour capter les investissements publicitaires. Tout ce qui peut rendre la publicité TV plus attractive, plus efficace, plus simple à acheter, est bénéfique pour tous les acteurs de l’écosystème. Nous constatons actuellement, auprès des principaux diffuseurs européens, qu’il y a un véritable mouvement et une volonté d’adapter le modèle économique pour l’avenir. Chiara De Martino AdtechPublicité programmatiquetélévisionTélévision connectée Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Analyses Andrew Buckman (Azerion) : “Nous sommes en consolidation permanente” Omnicom annonce des partenariats data avec Disney, Walmart, Amazon et Meta INFO MIND MEDIA - Azerion nomme un responsable marketing pour la France Dentsu muscle sa plateforme d'insights et son médiaplanning avec MiQ et Criteo Roku et Amazon s’allient pour élargir leur audience adressable en CTV Analyses Procès contre Google : tout comprendre de la décision judiciaire défavorable à RMC BFM Ads essentiels Nos synthèses et chiffres sur les principales thématiques du marché Les mutations du search à l'ère de l'IA générative L'application inaboutie de la loi sur les droits voisins Google vs DOJ : tout ce qu'il faut savoir sur le procès qui pourrait redéfinir l'adtech L’essentiel sur les identifiants publicitaires La transformation du marché publicitaire en 2024 2023 : le marché publicitaire doit se préparer à la fin du tracking utilisateur Comment l’intelligence artificielle générative bouleverse les médias Les enjeux réglementaires des médias en 2023 analyses Les articles d'approfondissement réalisés par la rédaction Adtech : pourquoi la Commission européenne sanctionne Google de près de 3 milliards d’euros Retail media : une consolidation indispensable des régies pour répondre aux attentes des acheteurs publicitaires IA et monétisation des contenus : comment l’IAB Tech Lab veut contrôler les robots crawlers Droits voisins : l’Apig veut introduire une plainte contre Meta devant l'Autorité de la concurrence Paul Boulangé (Starcom France) : "Nous sommes en train de déployer Captiv8 en France, notre solution d'automatisation du marketing d'influence" Claire Léost devient DG de CMA Média, WPP Media promeut Stéphanie Robelus… Comment les SSP généralistes investissent le secteur du retail media Bénédicte Wautelet (Le Figaro) : “Toute solution qui utilise de l’IA en rapport avec nos contenus doit y être autorisée et nous rémunérer” Aides à la presse : combien les éditeurs ont-ils perçu en 2024 ? 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