Emilie Geairon (UM) : « Arrêtons de parler de la femme et du digital »

Image à la une de l'article Emilie Geairon (UM) : « Arrêtons de parler de la femme et du digital »
Cet article vous est proposé gratuitement par la rédaction.
Lancez votre essai gratuit de 15 jours pour découvrir l’ensemble de nos contenus

Si bonne soit l’intention initiale, le fait que la présence et le rôle des femmes dans le digital soient un sujet de discussion en 2017 dans de grandes conférences n’est pas normal, estime Emilie Geairon, directrice de clientèle chez UM (IPG Mediabrands France).

« Les Rencontres de l’Udecam de cette rentrée 2017 portaient sur l’influence au feminin, notamment sur le digital. Que le comportement des femmes dans le numérique soit un thème porteur, que des hommes en fassent un objet d’études, c’est peut-être banal mais ce n’est pas normal. Je ne suis pas une militante, loin de là. Je fais parfois quelques remarques quand j’entends des énormités dans mon entourage et je constate au quotidien le gouffre qu’il va falloir combler pour que les femmes n’aient plus à écrire ce type de billet.

Mais ça s’arrête là. Personnellement, et surtout professionnellement, je n’ai jamais vraiment eu à me battre car j’ai eu la chance d’être entourée de mentors bienveillants et sans doute eux même un peu sensibles à la cause féminine si ce n’est féministe. Je n’ai jamais agi, ni travaillé de façon différente parce que je suis une femme.

Force est de constater que le monde des médias et de la communication aime bien les comparaisons. Et pour toute comparaison, il faut forcement une référence de base. J’aurais voulu pouvoir dire que cette référence est « neutre », mais elle ne l’est pas, puisque dès que la question commence par les femmes, il est évident que nous allons les comparer aux « hommes ». Si vous faites une recherche Google sur les femmes et les médias, vous trouverez des tas d’articles chiffrés et extrêmement documentés sur la représentativité des femmes dans les médias, des débats sur leur valeur en entreprise, sur le gap des salaires. Et la référence systématique de ces articles, ce sont les hommes. Voilà donc la première piste de réponse à la question des « femmes dans le digital ». Pas très glorieux. Mais instructif.

Toujours une mise à l’écart

On pourrait se dire que la « génération Y a sans doute repris le flambeau du féminisme avec des moyens plus appropriés, plus « digitaux » , et donc plus efficaces. Mais d’un point de vue comportemental, on s’aperçoit rapidement que le digital n’a pas effacé les clivages de genre. On a juste adapté et transposé ces comportements sur la toile.

Si vous échangez avec des « femmes de la jeune génération », celles que nous appelons tous les Millennials », beaucoup d’entre elles vous diront que malgré le fait qu’elles soient passionnées de jeux vidéo ou de cinéma de genre par exemple, elles éviteront de s’aventurer sur des forums spécialisés avec un pseudo genré et surtout de dire qu’elles sont des filles, au risque de déchainer les foudres de haters masculins anonymes et courageux. C’est donc aussi cela, les « femmes dans le digital ». Edifiant.

Si nous regardons ensuite cette question du « digital » d’un point de vue entrepreneurial, nous trouvons de très belles initiatives et success stories féminines, allant du site marchand à l’association, en passant par des sites serviciels. Les femmes ont clairement embrassé cette transformation digitale et l’ont maîtrisée au même titre que les hommes. L’ensemble des professionnels du secteur soulignent volontiers le succès de la sensibilité féminine alliée à un vrai sens du business. Mais la vérité c’est qu’il subsiste un réel hermétisme des réseaux existants, ceux qui historiquement sont plutôt masculins.

Sinon, pourquoi auraient-elles ressenti en parallèle de ces succès, le besoin de créer leur propre corporation et réseau ? Pourquoi existe-t-il autant d’évènements célébrant les « femmes du numérique », « la journée de la Femme digitale », etc. et aucun pendant masculin ? Ces associations de femmes entrepreneuses et dirigeantes du digital ne se sont-elles pas créées simplement parce qu’elles ne trouvaient pas ou peu d’écho dans les circuits classiques ? Les initiatives entrepreneuriales et les réseaux visant à les soutenir ont-ils nécessairement besoin d’être genrés ? N’aurions-nous finalement pas plus à gagner en jouant sur la diversité des compétences et des points de vue ? Les « Femmes dans le Digital » c’est encore aujourd’hui une certaine forme de mise à l’écart. Et c’est dommage.

Cessons les comparaisons

Professionnels des médias et des audiences, j’aimerais que nous soyons un peu moins arque-boutés sur des comparaisons entre les hommes et les femmes ; que notre métier soit un peu plus « gender-neutral ». En effet, nous sommes les détenteurs et premiers utilisateurs d’une technologie qui devrait nous permettre de nous affranchir des questions de genre. A l’heure des DMP et de l’achat programmatique, n’avons-nous pas entre les mains la possibilité d’insuffler une façon plus actuelle de voir les cibles ? Ne devrions-nous pas penser usage et comportements plutôt que genre ? Ne devrions-nous pas penser contenu plutôt que tranche d’âge ?

Le thème des Rencontres de l’Udecam 2017 était un thème sociétal actuel et le fait d’aborder le digital via le prisme féminin permet de remettre en lumière ce constat que nous faisons au quotidien. Merci pour cela.

Cependant, je pense que nous connaissons tous les chiffres et le chemin qui reste à parcourir pour trouver cette sacrosainte parité. Alors, devons-nous continuer à faire des constats ? En tant que professionnels de la communication, n’avons-nous pas une responsabilité ?

Nous nous devons de combattre les idées reçues, mais aussi, à défaut de les devancer, d’accompagner et de faciliter ces transformations sociétales. Nous ne pouvons pas continuer à cautionner les stéréotypes et succomber à la facilité sociodémographique.

Même si nous pensons que la parité viendra un jour, même si nos actions nous semblent parfois dérisoires, nous ne pouvons pas seulement rester observateurs et commentateurs de ce changement. Ne répétons pas l’expectative de « l’année du mobile ». Faisons en sorte que « l’année de la femme », commence dès aujourd’hui. Soyons les principaux artisans de cette transformation. Avançons. »

Vous avez une information à nous partager ?
Article à retrouver dans La lettre mind Media n°350
Chaque mois, retrouvez l'essentiel de nos articles
Lundi 18 septembre 2017
Nos autres services
Research
La réalisation d'études sur-mesure : benchmark, panorama, newsletter personnalisée, contenus en marque blanche.
En savoir plus
Formations
Nos formations & masterclass : des formats courts pour le management, le coaching de dirigeants, la montée en compétence de profils junior.
En savoir plus
Events
Des conférences d'une demie journée dédiées aux problématiques du secteur et ouvertes à l'ensemble de l'écosystème.
En savoir plus
Ce que vous devez absolument lire cette semaine
Les contenus essentiels de la semaine sélectionnés par la rédaction.
Voir tout
Les chatbots IA ne renvoient pas encore de trafic significatif, selon le CEO de Reddit 
Trois ans après leur apparition, les chabots IA n’apportent pas encore de trafic aux médias, y compris pour ceux ayant conclu des accords de collaboration. Steve Huffman, CEO...
6 novembre 2025
IA agentique : Dailymotion Advertising crée sa plateforme de marketing vidéo
Jeudi 6 novembre, Dailymotion Advertising a annoncé le lancement de sa plateforme agentique de marketing vidéo, baptisée “Ray”. Conçue pour transformer un...
6 novembre 2025
La Tribune temporise sur ses projets avec BFM Business et vers le BtoB
Selon des informations conjointes de mind Media et de La Lettre, la direction du groupe La Tribune a annoncé lundi 3 novembre, lors d’un CSE, la mise en pause du projet de...
5 novembre 2025
CoSpirit teste l’activation de personas basée sur un nouveau partenariat entre Implcit et Kantar
CoSpirit intègre depuis cet été une solution d’activation de personas basée sur un nouveau partenariat entre Kantar, qui édite l’étude TGI sur...
5 novembre 2025
Les articles les plus consultés du mois sur mind Media
Ce sur quoi les lecteurs cliquent le plus le mois dernier.
Ce sur quoi les lecteurs cliquent le plus le mois dernier.
1
Le marché mondial du retail media en hausse de 13,7% en 2025
D’après l’étude « Future of Commerce Media » publiée par WARC mardi 4 novembre, le marché mondial du retail media approchera les 175...
2
Julien Rosanvallon (Médiamétrie) : “L’un des enjeux clés de la mesure d’audience hybride porte sur la qualité et la certification des données utilisées”
Alors que Médiamétrie vient de lancer fin octobre le premier volet de sa mesure “Watch”, sur l’audience cross-vidéo des broadcasters et des plateformes, mind Media a interrogé Julien Rosanvallon...
3 novembre 2025
3
Google remporte une première manche judiciaire contre Leboncoin
Selon nos informations, dans une décision rendue lundi 27 octobre concernant le contentieux en réparation engagé par le groupe Adevinta/Leboncoin contre Google pour des...
4
Patrick Pérez (Kyutai) : “Synthèse vocale, traduction, transcription… plusieurs de nos projets IA sont applicables aux médias”
mind Media a interrogé Patrick Pérez, CEO de Kyutai, laboratoire d’IA créé en novembre 2023 par Xavier Niel, Rodolphe Saadé et Eric Schmidt, doté de plusieurs centaines de millions d’euros de...
30 octobre 2025
5
Comment l’IA peut-elle contribuer à l’efficacité des stratégies de monétisation publicitaire des régies ?
Les cas d’usage de l’IA au sein des régies sont multiples, de la simplification des flux de travail et l’aide à la préparation de rendez-vous commerciaux, à l'amélioration des recommandations aux...
23 octobre 2025
6
Search : Liligo attaque Google en justice
La société française Liligo, qui édite un métamoteur éponyme de recherche et de comparaison de services de voyage (vols, hôtels, locations de...
3 novembre 2025