Matthieu Stefani (CosaVostra) : “Les compétitions actuelles entre agences digitales créent des situations perdant-perdant”

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Trop rigide, trop inégal, souvent mal organisé, le système actuel des compétitions empêche agences comme annonceurs d’être à la hauteur des défis digitaux actuels, estime Matthieu Stefani, fondateur de l’agence digitale CosaVostra, qui propose quelques pistes d’amélioration.
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Le système des compétitions actuel est bancal, voire néfaste. Récemment, notre agence CosaVostra s’est retrouvée en compétition pour une chaîne de restauration qui voulait revoir son approche digitale face à… 20 autres agences. Une shortlist pas short du tout qui, en calculant rapidement, représentait un minimum de 5 jours de travail intensif par agence, soit un total de 100 jours de talents gratuitement mis à disposition du client. Qui gagne dans ces cas-là ? La proposition la moins chère, rafistolée avec des bouts de stratégie glanés en cours de route. Un exemple extrême mais symptomatique d’un équilibre malsain entre agences et entreprises en quête d’innovation.

Un coût supporté par les clients

Soyons clair : c’est moins la réappropriation des idées que les conséquences pour nos clients qui inquiètent. Lorsqu’une compétition puise autant dans les forces vives des agences sans qu’aucune contrepartie ne soit envisagée, cela représente du temps et de l’argent que l’on fait fatalement payer aux clients déjà acquis. Plus une agence s’engage dans des compétitions, plus elle risque logiquement d’en perdre, au détriment de ses clients existants et de ses projets. Et, même si chez CosaVostra notre ratio de victoires est bon – plus de 65 % de compétitions remportées l’année dernière -, le système actuel nous semble particulièrement inefficace. Il nous impose trop souvent un brief initial bancal auquel on est obligé de se conformer, avant, une fois la compétition remportée, de déployer une grande énergie pour le mettre d’équerre.

Les compétitions trop strictes ne tirent pas l’innovation par le haut

Les compétitions actuelles incitent à remplir des cases au lieu de les redessiner ensemble. Autrement dit, elles n’incitent pas à challenger le brief, ni à s’assurer en amont que les outils choisis sont pertinents. Encore moins que les KPI fixés sont les bons. En phase finale, les compétitions ont aussi l’effet pervers d’augmenter le risque pour l’agence de se faire écarter pour une couleur qui ne plaît pas, ignorant le principe créatif sous-jacent. Rares sont les compétitions où l’on peut prendre du recul, échapper à un brief-traquenard et laisser une réelle chance à l’innovation d’émerger.

L’innovation réclame pourtant liberté, prise de risque et confiance. Rendons les agences digitales plus autonomes. Les projets numériques se doivent d’être bien pensés, servis avec intelligence par des contenus à forte valeur ajoutée. C’est là la mission des agences digitales aujourd’hui : make digital smart again. Ce qui se traduit par un investissement de tous les jours, dans des recrutements talentueux et la formation continue d’une équipe qualifiée. L’objectif : être capable d’accompagner des clients de A à Z, de l’idéation au développement de plateformes, puis à la stratégie d’acquisition. Avec des projets pour lesquels développeurs, consultants innovations et creative designers travaillent main dans la main. Hélas, le système actuel des compétitions ne valorise pas une telle autonomie et une telle exigence, pourtant essentielles.

Il faut une relation agence digitale – annonceur plus fluide

Alors que faire ? Rémunérer les compétitions, comme cela a été le cas dans les années 2000 ? C’est sans doute illusoire aujourd’hui. Sans aller jusque-là, on peut s’appliquer les règles de tout bon business deal : se mettre autour de la table pour une session de travail intensive de plusieurs jours, afin d’examiner les bases d’une future collaboration. Dans cette configuration, le client rencontre les agences qui lui plaisent – par recommandation, projets réalisés, etc. -, il en sélectionne une et commence à travailler rapidement avec elle sur un premier projet (payant). Si la méthode et l’équipe lui conviennent, il engage l’agence, sinon il passe son chemin et avance avec un autre structure.

Un “design sprint” en quelque sorte, où la mise en place de la collaboration annonceur-agence est souple afin de ne pas perdre de temps, ni d’un côté, ni de l’autre. Cela implique de définir une juste rétribution pour l’agence et un fonctionnement par étapes. Pas de cahier de charges rigide et imparfait, ni de contrat sur deux ans incassable. Mais une méthode partagée nous permettant de se challenger respectueusement et intelligemment pour que tout le monde en sorte gagnant.

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