Cafeyn s’apprête à consolider le marché européen des kiosques en ligne

Cafeyn est bien parti pour poursuive ses opérations de croissance externe. La plateforme de contenus d’informations sur abonnement a annoncé lundi 5 décembre un projet d’acquisition des activités européennes de Readly, son homologue suédois, en dehors de la Scandinavie. L’opération est prévue en deux temps avec un partenaire, le groupe Bonnier. Cette holding d’activités dans les médias basée à Stockholm, vient de lancer une OPA amicale sur le capital de Readly, côté au Nasdaq de Stockholm, sur une valorisation d’entreprise de 41,6 millions d’euros, soit une prime de 60 % pour les actionnaires par rapport au cours moyen des 120 derniers jours. 

L’OPA sera close le 13 janvier. Si 90 % des actions sont apportées à l’opération – et sous réserve de l’autorisation des autorités de concurrence locales, Cafeyn acquiera ensuite auprès de Bonnier les activités commerciales de Readly – pas la plateforme technique – en dehors de Scandinavie : au Royaume-Uni, Allemagne, Autriche, Suisse et en France, où Readly a acquis ePresse (Toutabo) il y a un an, ainsi qu’en Australie et Nouvelle-Zélande.

Readly a généré près de 35 millions d’euros de revenus en 2020, puis près de 43 millions en 2021. La plateforme revendique plus de 7 000 publications internationales et environ 447 000 abonnés dans près de 50 pays. Son premier marché est l’Allemagne (36 % des revenus), devant le Royaume-Uni (21 %), la Suède (17 %) et la France (11 %). Cafeyn acquiert donc une très large partie de l’activité. De son côté, Bonnier veut développer des synergies en Suède entre les activités existantes de Readly et ses activités médias.

Une taille européenne nécessaire

Le secteur des kiosques en ligne s’est développé depuis une dizaine d’années en Europe avec une concurrence très vive entre ses acteurs spécialisés. Et beaucoup d’échecs. En France, Lagardère a fermé son service Relay.com en 2018, Zinio n’a jamais décollé, comme différentes initiatives plus récentes, comme Pressmium, lancé en 2019 et dont le projet s’est achevé dès 2020. La société canadienne PressReader, qui a tenté de se déployer dans l’Hexagone sur un positionnement BtoBtoC a presque disparu. Le coût d’acquisition des abonnés est élevé et nécessite des investissements marketing importants, de même que le développement technique de l’offre. Enfin le partage de la valeur, d’une part avec les éditeurs de presse qui sont rémunérés sur chaque téléchargement, d’autre part avec les éventuels partenaires distributeurs qui agissent comme carrefours d’audience, est lui aussi à déduire du chiffre d’affaires réalisé. 

Pire, un certain nombre de grandes marques médias, qui concentrent une large partie des usages sur ces plateformes, sont de plus en plus réticentes, désormais, à partager la commercialisation de leurs ventes avec ce qu’elles considèrent être des intermédiaires. Une partie des éditeurs préfèrent conserver la commercialisation de leurs abonnements numériques au sein de leurs espaces dans une approche plus globale et plus exclusive de leur offre. Suivant en cela l’exemple du Monde, qui est absent des kiosques, et L’Equipe, Ouest-France et Le Point ont quitté ces plateformes en 2022, tandis que Le Figaro et La Croix y ont restreint leur présence – ils restent accessibles indirectement sur Cafeyn notamment via les offres en partenariat avec SFR.

Vers une offre globale de contenus pour Cafeyn

L’économie des plateformes d’agrégation d’informations sur abonnement demeure donc fragile, ce qui a poussé à sa consolidation. Readly avait ainsi acquis fin 2021 la société française ePresse, tandis que Cafeyn, soutenu depuis deux ans par l’entrée du fonds de capital développement Bregal Milestone à son capital, a multiplié les opérations, avec les acquisitions de Blendle aux Pays-Bas et MiLibris en France en 2020, puis Kidjo aux États-Unis en 2021. “Nous avons toujours été clair dans notre volonté d’atteindre une certaine taille, d’améliorer notre produit et de diversifier l’offre de contenus que nous proposons. Cette opération, si elle aboutit, va en ce sens”, souligne Ari Assuied auprès de mind Media. L’objectif de la société française est aussi d’augmenter les synergies techniques et commerciales, et proposer à ses partenaires de contenus une audience plus large tout en étant moins exposé aux exigences financières de certains d’entre eux. 

Cafeyn, qui emploie environ 200 personnes, revendique aujourd’hui 500 éditeurs et fournisseurs de contenus donnant accès à près de 3 000 publications sur sa plateforme pour 2,5 millions d’utilisateurs (une consultation par mois au moins). En intégrant l’offre de Readly, la société pourra proposer près de 7 000 publications avec une présence dans plus d’une dizaine de pays. La société est en train de faire évoluer son offre vers une plateforme de contenus multiformats en intégrant, outre les PDF de ses partenaires éditeurs, des flux d’actualité en continu – notamment thématiques – une écoute audio et des contenus hors presse, en particulier ludo-éducatifs.

La prochaine étape sera désormais d’augmenter la rentabilité de la société. A cet égard, selon nos informations, l’intégration de publicités au sein de la Cafeyn est en réflexion afin de compléter les revenus issus de l’abonnement.