Fiona McKinnon (Pangaea Alliance) : “Le RGPD a eu un impact fort sur les revenus que nous tirions du programmatique ouvert”

Quel a été l’impact du RGPD pour votre activité ?

“Il a été particulièrement fort sur l’open market, où nous avons perdu plus de 50 % de nos revenus pendant les deux semaines qui ont suivi son entrée en vigueur, le 25 mai. Les places de marché privées ont été moins touchées. Même si les choses se sont arrangées depuis, cela reste compliqué. Pangaea n’étant pas un éditeur, mais un partenaire de vente, nous avons besoin que chaque éditeur nous transmette le consentement pour diffuser nos publicités.

Or, tous les SSP et DSP ne sont pas encore prêts à le transmettre via le consent & transparency framework de l’IAB Europe. Pour compenser, nous lançons une offre de ciblage contextuel, via la technologie de Grapeshot (une start-up britannique acquise par Oracle en mai 2018 pour 300 à 400 millions de livres, ndlr). Malgré cela, nos revenus ont augmenté de 65 % au premier semestre 2018 par rapport à la même période en 2017, et nous apportons plusieurs millions de livres de revenus additionnels à nos éditeurs.”

Quel type d’inventaire commercialisez-vous, et à qui ?

“L’essentiel de nos revenus provient encore du display sur desktop, mais nous avons noué un partenariat il y a deux mois avec Teads pour proposer de la vidéo outstream. Nous souhaitons développer encore davantage le format vidéo. Par ailleurs, nous créons aussi des segments de données grâce à celles que nous transmettent les éditeurs via la DMP de Krux.

Nous vendons notre inventaire en open market et sur des places de marché privées. Via les agences et les trading desks, certains de nos principaux annonceurs se trouvent dans la finance et la banque, comme UBS, Deutsche Bank et Barclays, mais nous travaillons aussi avec des opérateurs télécom, des compagnies aériennes et des maisons de luxe.”

Quels sont les membres de l’alliance ?

“Six éditeurs premium qui cumulent une audience de 200 millions d’utilisateurs uniques par mois aux principalement Etats-Unis et au Royaume-Uni, mais aussi au Canada, en Australie, à Singapour et au Moyen-Orient. Il s’agit de CNN International, The Guardian, Reuters, Mansueto Ventures (Inc., Fast Company), Dennis Publishing (The Week, Alprh, IT Pro), ainsi que The Economist, qui l’a réintégrée récemment. Cela représente 3,1 milliards d’impressions publicitaires par mois dans 140 pays. D’autres éditeurs devraient bientôt nous rejoindre, puisque nous sommes en discussion avec une poignée d’acteurs. Nos critères pour rejoindre l’alliance ? Publier en anglais, être une marque mondiale reconnue, et avoir une bonne affinité avec les membres actuels.”

Comment est organisée Pangaea Alliance du point de vue opérationnel ?

“Nous avons une équipe assez réduite, et entièrement tournée vers la commercialisation de nos offres : quatre personnes au total, dont un directeur des ventes monde, un responsable ventes, et un responsable de comptes programmatiques. Car nous bénéficions du support de Turner International, la maison mère de CNN. Or, via WarnerMedia, la maison-mère de Turner International, nous sommes mariés depuis quelques mois à AT&T (lire sur notre site), qui a racheté AppNexus, notre principal partenaire technologique. Notre vocation n’est donc pas de grandir en effectif, mais de proposer les technologies qui permettront à nos partenaires de maximiser leurs revenus.”

Ces derniers mois ont encore été marqués par des critiques sur le manque de transparence de la publicité programmatique, notamment avec la pratique du bid caching par Index Exchange. Cela vous inquiète-t-il ?

“Nous sommes toujours préoccupés par ces sujets. En juillet 2017, Pangaea et Dennis Publishing ont reçu un financement du fonds Google DNI pour développer une SSP qui garantisse la transparence à la fois aux vendeurs et aux acheteurs. Il s’agit du Project Arete. Cette plateforme, fondée sur la blockchain, doit permettre aux éditeurs de comprendre pourquoi ils tirent des revenus différents pour un même annonceur, et aux annonceurs de comprendre la vraie valeur qu’ils tirent de leurs différents partenaires technologiques. Elle est aujourd’hui testée par quelques éditeurs en version bêta, et sera bientôt ouverte plus largement.”