Accueil > Marques & Agences > Achat média > Il n’y aura pas de crédit d’impôt en faveur de la communication des entreprises en France à court terme Il n’y aura pas de crédit d’impôt en faveur de la communication des entreprises en France à court terme Aides à la presse, crédit d'impôt communication, situation des pigistes dans les dispositifs de chômage partiel des entreprises de presse... le ministre de la Culture Franck Riester a fait le point jeudi 16 avril sur le soutien gouvernemental possible en faveur des acteurs des médias et de la publicité en ligne pour surmonter la crise économique. Par Jean-Michel De Marchi. Publié le 16 avril 2020 à 22h25 - Mis à jour le 16 avril 2020 à 22h25 Ressources Le ministre de la Culture Franck Riester a été auditionné le 16 avril en visioconférence par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat sur différents dossiers liés aux secteurs des médias et de la communication, et sur la façon d’aider les différents acteurs à affronter la crise économique. mind Media y a assisté. Voici les points essentiels de ses réponses et notre analyse. Pas de crédit d’impôt communication à court terme L’interprofession des médias et de la publicité, soutenue par des députés et sénateurs, a proposé ces quinze derniers jours au gouvernement l’instauration rapide d’un “crédit d’impôt” – autrement dit une déduction fiscale – en faveur des entreprises maintenant leurs campagnes publicitaires dans un contexte global d’arrêt brutal et massif des investissements en communication. La proposition a été reprise par des députés, puis jeudi par des sénateurs membres de la commission. “Nous étudions cette possibilité, a répondu le ministre. Elle a du sens pour prendre en compte les difficultés des médias, et aussi pour tirer la consommation et la croissance globale. Mais beaucoup de secteurz industriels font ce type de demande. Le gouvernement devra faire des choix. Pour ce crédit d’impôt en faveur de la communication, on peut réfléchir à des délais, des limites, des plafonds. On aura l’occasion d’en parler le moment venu. Je me bats pour le secteur des médias, mais n’oublions pas qu’il n’y a pas que ce secteur-là dans l’économie, le gouvernement a beaucoup de sollicitations. J’ai une conviction : les mécanismes que nous mettrons en place ne devront pas habiller les uns en déshabillant les autres. Les initiatives qui seront mises en place pour certains acteurs ne devront pas nuire à d’autres. Nous allons continuer à étudier le dispositif.” Notre analyse : Ce type de crédit d’impôt a été mis en place en Italie, où le gouvernement a publié fin mars un décret qui ouvre un crédit d’impôt de 30 % jusqu’en 2022 pour les investissements publicitaires réalisés sur les médias nationaux. Au Canada, une mesure différente a été instaurée : 30 millions de dollars canadiens sont investis par le gouvernement dans des publicités de sensibilisation à la lutte contre la pandémie dans les supports des médias nationaux et pas dans les plateformes. En France, comme le dit entre les lignes le ministre Franck Riester, le gouvernement est soumis a des contraintes budgétaires et les sollicitations sectorielles sont nombreuses. Il n’est pas convaincu pas l’efficacité économique à court terme d’une telle mesure en faveur de l’écosystème média et publicitaire car la consommation est trop ralentie. L’idée du crédit d’impôt communication n’est pas rejetée, mais sauf volte face de dernière minute, elle ne sera pas à l’ordre du jour avant plusieurs semaines ou quelques mois, lors de la reprise de la consommation. L’application du chômage partiel largement étendue aux pigistes Jusqu’à présent, chaque groupe de presse posait de manière discrétionnaire ses propres conditions pour intégrer ou non les journalistes pigistes à leur dossier de chômage partiel. La plupart posaient des conditions drastiques (par exemple 9 bulletins de salaires au cours des 12 derniers mois) de manière à ne retenir dans leurs dispositifs qu’une poignée de pigistes (notre synthèse). Ce jeudi 16 avril, le ministre de la Culture a précisé les critères d’application du chômage partiel par les entreprises de presse pour les journalistes pigistes. Ce sont le critères pour voter aux élections professionnelles – la position que défendaient les syndicats de journalistes – qui ont été retenus : “Les pigistes devront être intégrés dans les dossiers de chômage partiel déposés par les éditeurs de presse à partir de 3 bulletins de paie mensuels reçus dans les 12 derniers mois par une entreprise de presse, dont deux dans les derniers mois”, ou qui ont collaboré à la dernière parution dans le cas d’une publication trimestrielle. Il n’y a pas de condition liée à la détention de la carte de presse, ni à un niveau de rémunération minimal. Un décret d’application a été publié vendredi 17 avril avec effet rétroactif au mois de mars pour l’officialiser et préciser le calcul de la rémunération des pigistes. Notre analyse : Ces critères, souples, vont entraîner la prise en compte de plusieurs centaines de pigistes au sein des dispositifs actionnés par chacun des plus grands groupes médias, des dizaines pour les autres. Les entreprises de presse devront donc rééditer des bulletins de paie pour le mois de mars pour leurs pigistes qui remplissent les conditions et adapter les prochains. L’indemnité mensuelle perçue par chaque pigiste qui remplit les critères correspond à la moyenne des rémunérations brutes perçues au titre des piges réalisées au cours des douze mois civils, ou le cas échéant de la totalité des mois civils travaillés si le salarié a travaillé moins de douze mois, précédant le premier jour de placement en activité partielle de l’entreprise ou de l’établissement, à l’exclusion des frais professionnels et de certains éléments de salaire (lire le décret). Un lobbying intense a opposé ces trois dernières semaines les éditeurs aux syndicats de journalistes et associations de pigistes, pas pour des raisons économiques, puisque c’est l’État qui in fine prend en charge une large partie de la rémunération habituelle des salariés concernés par le chômage partiel, mais pour des motifs juridiques : la plupart des éditeurs de presse estiment traditionnellement qu’ils n’exercent pas de lien de subordination sur les pigistes et en font des salariés à part. Certains éditeurs craignent que leur attribuer le même statut que les journalistes mensualisés à l’occasion du chômage partiel, avec le même type de bulletin de salaire et les mêmes droits sociaux, ne crée un précédent susceptible de se retourner contre eux ces prochains mois et années : lors des litiges juridiques entre pigistes et entreprise de presse, des tribunaux pourraient s’appuyer sur ces nouveaux éléments administratifs pour accorder aux journalistes pigistes les même droits sociaux que les journalistes mensualisés (notre synthèse). Des aides à la presse à brève échéance Les éditeurs de presse et plus largement l’ensemble des acteurs des médias sollicitent un appui financier de la part des autorités gouvernementales pour soulager leurs difficultés. “Nous préparons un plan global en faveur de la presse, je le présenterai dans les prochaines semaines, a indiqué le ministre de la Culture. Il y a plusieurs aspects. Nous préparons notamment un projet de transformation de Presstalis, qui se trouve dans une situation très grave, pour garantir un pluralisme d’accès à la presse écrite. La structure est dans une situation très difficile et complexe, il faut faire des choix et dans l’immédiat s’assurer de maintenir une chaîne de distribution de la presse pérenne. Nous avons également pris la décision d’assurer un accompagnement financier pour les marchands de presse et nous examinons comment orienter le fonds stratégique pour le développement de la presse. Il pourrait aussi y avoir des dispositifs fiscaux autre que le crédit d’impôt communication. C’est en cours d’examen. Enfin nous allons accélérer le versement des aides à la presse pour donner de la trésorerie aux éditeurs de presse. Partout où c’est possible, nous aidons.” Notre analyse : Ce dernier point est important. Selon nos informations, plusieurs éditeurs de presse observent avec inquiétude leur ligne de trésorerie fondre depuis un mois – notamment les éditeurs de presse papier déjà impactés par de lourdes pertes causées par les difficultés de Presstalis – avec des craintes réelles pour les tout prochains mois. Le projet de loi audiovisuel sera revu Tous les projets de loi en discussion ont été mis en pause, dont celui portant réforme du secteur audiovisuel. “Un plan spécifique pour l’audiovisuel public sera élaboré pour tenir compte de la crise des recettes, notamment publicitaires”, a indique le ministre. Par ailleurs, “le projet de loi sur l’audiovisuel sera réexaminé, a-t-il aussi souligné. Ses fondements restent pertinents et ses dispositions restent nécessaires, mais le projet de loi tirera les conséquences de la crise.” Notre analyse : L’objectif est de ne pas destabiliser le secteur, déjà fragilisé par la crise. Le ministre semble vouloir s’assurer que certains acteurs ne soient pas pénalisés par les nouvelles dispositions du texte, mais il n’a pas apporté de précision sur ce point. Sur la loi créant des droits voisins Franck Riester a rappelé son intention de voir appliquer la loi sur les droits d’auteur créant un droit à rémunération pour la reprise dans ses espaces des contenus produits par des auteurs, des entreprises de presse et des agences de presse. Il veut voir Google et les plateformes appliquer pleinement l’esprit du texte : “La décision de l’Autorité de la concurrence va en ce sens. Si rien ne se passe, je n’écarte pas la possibilité d’utiliser un véhicule législatif pour être certain que les dispositions de la loi votée en juillet 2019 soient appliquées. Mais cela doit se faire en lien avec les éditeurs et agences qui vont d’abord négocier avec Google et les plateformes.” Notre analyse : Les éditeurs de presse et les agences vont très prochainement ouvrir des discussions avec Google, comme l’a imposé l’Autorité de la concurrence au groupe américain le 9 juillet (notre synthèse). Google a indiqué vouloir se conformer à la décision, mais des incertitudes subsistent sur son souhait réel de rémunérer éditeurs et agences. Un délai de trois mois a été posé, mais les négociations promettent d’être difficiles. SPÉCIAL COVID-19 Un nouvel espace est créé sur notre site pour rassembler les informations, chiffres et documents les plus utiles aux décideurs sur les principales problématiques des médias et de la publicité en ligne. Le premier “hub” concerne l’impact de la crise sanitaire et économique. Les essentiels À suivre également sur notre site : tous nos articles sur le #covid-19 Jean-Michel De Marchi Covid-19FinancementLobbyingRéglementationStratégies annonceurs Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Les annonceurs bientôt responsables juridiquement du contexte de diffusion de leurs campagnes ? Covid-19 : les conséquences sur le secteur des médias et de la publicité en ligne Bataille entre syndicats de journalistes et éditeurs de presse autour de l'application du chômage partiel pour les pigistes essentiels Nos synthèses et chiffres sur les principales thématiques du marché Les mutations du search à l'ère de l'IA générative L'application inaboutie de la loi sur les droits voisins Google vs DOJ : tout ce qu'il faut savoir sur le procès qui pourrait redéfinir l'adtech L’essentiel sur les identifiants publicitaires La transformation du marché publicitaire en 2024 2023 : le marché publicitaire doit se préparer à la fin du tracking utilisateur Comment l’intelligence artificielle générative bouleverse les médias Les enjeux réglementaires des médias en 2023 analyses Les articles d'approfondissement réalisés par la rédaction Adtech : pourquoi la Commission européenne sanctionne Google de près de 3 milliards d’euros Retail media : une consolidation indispensable des régies pour répondre aux attentes des acheteurs publicitaires IA et monétisation des contenus : comment l’IAB Tech Lab veut contrôler les robots crawlers Droits voisins : l’Apig veut introduire une plainte contre Meta devant l'Autorité de la concurrence Paul Boulangé (Starcom France) : "Nous sommes en train de déployer Captiv8 en France, notre solution d'automatisation du marketing d'influence" Claire Léost devient DG de CMA Média, WPP Media promeut Stéphanie Robelus… Comment les SSP généralistes investissent le secteur du retail media Bénédicte Wautelet (Le Figaro) : “Toute solution qui utilise de l’IA en rapport avec nos contenus doit y être autorisée et nous rémunérer” Aides à la presse : combien les éditeurs ont-ils perçu en 2024 ? 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