Accueil > Médias & Audiovisuel > Audiovisuel & vidéo > Le Monde et Le Figaro ont-ils vraiment écarté les sous-régies ? Le Monde et Le Figaro ont-ils vraiment écarté les sous-régies ? Six mois après l'annonce de Skyline, les régies du Monde et du Figaro sont-elles parvenues à se passer des intermédiaires et sous-régies ? Si leur engagement est globalement tenu, quelques ombres demeurent. Mind Media explique pourquoi. Par Aymeric Marolleau. Publié le 12 janvier 2018 à 15h31 - Mis à jour le 26 février 2021 à 16h07 Ressources En juillet 2017, Le Monde et Le Figaro annonçaient à l’occasion du lancement de leur alliance, “Skyline”, qu’ils souhaitaient se passer des sous-régies qui commercialisaient leurs inventaires par types de formats (vidéo, habillage, outstream…) ou supports (mobile). Sources de données Pour déterminer si ces déclarations ont réellement été suivies d’effet, mind Media s’est appuyé sur trois sources de données : les fichiers ads.txt de leurs sites internet, lorsqu’ils étaient disponibles ; la base de données d’Exodus, une plateforme qui recense les trackers installés dans les applications mobiles françaises sur Android, et la Tracker Map d’Evidon, société à l’origine du traqueur et adblocker sélectif Ghostery, un outil qui permet de recenser tous les trackers, notamment publicitaires, installés sur les sites internet et de choisir ceux à bloquer. Ces informations sont réunies dans les deux tableaux ci-après. Media.Figaro Dans l’ensemble, la promesse semble plutôt bien respectée par le Groupe Figaro. Ses fichiers ads.txt indiquent ainsi que la régie ne travaille plus en direct qu’avec Amazon, AppNexus, Google, Ligatus et Outbrain. En revanche, il n’a pas que des relations directes. Rubicon Project apparaît parmi ses revendeurs car il est utilisé par La Place Media, l’alliance programmatique dont Media.Figaro est l’un des actionnaires. Et Smart apparaît au titre de revendeur pour la sous-régie indépendante Romandie Network (Virtual Network SA), qui commercialise les inventaires du Figaro pour les internautes qui se connectent sur son site depuis la Suisse. La Tracker Map d’Evidon montre que la plupart des sites du groupe Figaro sont liés à ZeBestOf, son trading desk et DSP propriétaire, pour opérer de l’extension d’audience (acheter sur d’autres sites les internautes qui ont visité les pages des sites du groupe). Par son intermédiaire, le Figaro est connecté à de nombreux SSP : Smart, Improve Digital, LiveRail, Yahoo, Rubicon Project, StickyAds (FreeWheel). “Le pixel de ZeBestOf fonctionne comme le tag d’une DMP traditionnelle. Cela lui permet d’améliorer la synchronisation des cookies et sa capacité de ciblage”, explique Alexis Marcombe, chief operating officer de Media.figaro. Par ailleurs, Les applications du groupe Figaro étudiées par Exodus, Le Figaro et Madame Figaro, sont connectées à AppNexus, Facebook, Flurry (Yahoo), Google, Outbrain et Smart. Les intermédiaires publicitaires du Groupe Figaro (au 20 décembre 2017) – Tableau à télécharger en bas de page Media.Figaro a “débranché” les sous-régies en septembre. “Nous n’avons pas vu de conséquences sur nos revenus, car nous avons plus que compensé leur arrêt grâce à Skyline”, affirme Alexis Marcombe. Les sous-régies, en particulier Advideum, lui permettaient principalement de monétiser son inventaire vidéo, puisqu’elles représentaient jusqu’à l’été 35 % de son chiffre d’affaires publicitaire sur ce format. “Lorsque nous travaillions avec des sous-régies pour la vidéo, nous étions peu sollicités en direct par les agences pour ce sujet. Elles viennent désormais vers nous plus naturellement”, poursuit Alexis Marcombe. M Publicité – RégieObs La situation du groupe Le Monde semble plus complexe. Mi-décembre, la présidente de M Publicité – RégieObs, Laurence Bonicalzi-Bridier, indiquait à mind Media que sa régie “a cessé toute collaboration avec tous ses partenaires ou prestataires de monétisation le 31 août”. Jusque-là, elle a travaillé avec MobValue, Advideum, Teads, Digiteka, Invibes, AdyouLike et Piximedia. De fait, ses fichiers ads.txt montrent que Courrier International et L’Obs n’ont que deux partenaires direct – Google DFP et AppNexus, pour l’activation de Skyline et les fonctionnalités de header bidding –, et que leurs seuls revendeurs sont associés à Audience Square, l’alliance programmatique dont le groupe Le Monde est actionnaire. Mais Télérama, l’une des marques médias fortes du groupe, compte une quinzaine de revendeurs. Outre ceux d’Audience Square, on observe ainsi AOL, FreeWheel, Fyber, HIRO, OpenX, Optimatic, Pulse Point, Spring Serve et Telaria. “Télérama a un partenaire technologique sur les modules de commentaires. Nous souhaitons d’ailleurs clarifier cette situation en 2018 et étudions les modalités de reconduction de ces partenariats éditeurs”, explique Laurence Bonicalzi-Bridier. Mais M Publicité n’a pas encore publié le fichier ads.txt du Monde.fr. La raison est sans doute à chercher du côté des sites thématiques (jardinage, recettes de cuisine, paroles de chanson…) avec lesquels il a signé des partenariats voici quelques années pour gonfler ses audiences panélistes chez Médiamétrie, tout en leur laissant l’autonomie de leur monétisation. A date, comme ces URLs – par exemple jardinage.lemonde.fr, paroles2chansons.lemonde.fr et chefsimon.lemonde.fr – utilisent désormais son nom de domaine, le fichier ads.txt du Monde.fr devrait nécessairement intégrer l’ensemble de leurs partenaires de monétisation, en plus de ceux de M Publicité. Alors que la régie est engagée dans une démarche de clarification, certains noms seraient difficiles à assumer : Binette & Jardin travaille avec Ad6media, Adverline, Mozoo et Adikteev. Chef Simon a plusieurs dizaines de revendeurs différents, et Paroles2Chansons une douzaine. Parmi la vingtaine de partenaires directs de Chef Simon figure également la sous-régie Sublime Skinz. “Nous allons mettre en place de nouveaux types d’accord avec ces partenaires, car nous ne voulons pas envoyer un message confus au marché”, explique Julien Laroche-Joubert, directeur du numérique du Monde. Par ailleurs, selon la tracker map d’Evidon, Courrier International, autre marque média emblématique du Groupe Le Monde, est toujours connecté, de façon directe, avec la sous-régie Adverline. Enfin, la plupart des sites de la régie sont liés à la DMP Weborama, qui communique avec plusieurs SSP : Rubicon Project, Smart, Criteo. De même, TripleLift, présent indirectement sur les sites de Rue89, Huffington Post et Télérama, communique avec AOL, GumGum, Sonobi, Pulse Point, Tapad… Côté applications mobiles, celle du Monde est connectée à Ad4Screen (pour les push notifications), Google, Facebook (pour mener des actions d’acquisition marketing) et Smart (pour la monétisation publicitaire), tandis que L’Obs est connecté à Google. Les intermédiaires publicitaires du Groupe Le Monde (au 20 décembre 2017) – Tableau à télécharger en bas de page De même que le Groupe Figaro, Le Monde indique n’avoir pas observé de conséquences financières après l’arrêt de ses relations directes avec les sous-régies. “Le travail de premiumisation et de raréfaction de nos inventaires publicitaires au travers de plusieurs innovations technologiques (lazy-laoding, partenariat avec Integral Ad Science, nouveaux formats, meilleure expérience utilisateur, etc.) associé à une “reprise en main” de ces inventaires, nous ont permis une reprise de valeur sur tous les modes transactionnels. Nous avons vu nos CPM augmenter de près de 40 % sur le canal programmatique, permettant ainsi de compenser la perte d’inventaire liée au non affichage des impressions non visibles, et même d’augmenter sensiblement la valeur de près de 50 % des formats les plus premium comme la video instream et outstream”, affirme Laurence Bonicalzi-Bridier. Développement technique de Skyline et premiers résultats Avec Skyline, l’objectif des deux groupes était de disposer d’un outil de diffusion unique, permettant de gérer des formats couplés (un annonceur dispose de l’exclusivité de la publicité d’une page) et un même caping à travers tous leurs sites. L’une des difficultés provenait de la différence dans les choix techniques : Google DFP pour Le Monde, AppNexus pour Le Figaro. “Nous avons dû mettre en place au-dessus de ces architectures une technologie compatible avec toutes les spécificités et à laquelle d’autres éditeurs pourraient à l’avenir se connecter (au niveau local et régional, et au niveau international, ndlr)”, explique Manuel Garcia, directeur des opérations chez Media.Figaro. C’est Prebid, le wrapper header bidding open source développé par AppNexus, qui a été adapté pour répondre à ces contraintes, avec l’aide d’un salarié d’AppNexus. La mise en place technique de Skyline a pris trois mois, de juillet à septembre. Après quatre mois d’activité, Skyline indique avoir convaincu plus de 30 annonceurs pour près de 50 campagnes publicitaires, tous secteurs d’activités confondus, sur tous les formats éligibles et les deux modes transactionnels disponibles (gré à gré et programmatique en private auction). “Les sous-régies nous ont beaucoup apporté pendant longtemps, mais nous avions depuis quelque temps le sentiment de ne pas être rétribués à la hauteur de nos marques et de ce que pensaient investir les annonceurs sur nos supports. Se passer des sous-régies n’est pas si simple : il faut d’abord avoir des marques fortes et suffisamment de reach, et ensuite être capable de dépasser l’obstacle technique, pour intégrer des formats particuliers (inread, habillage…) et disposer d’une équipe technique qui puisse les opérer et d’une équipe commerciale pour les vendre”, explique Alexis Marcombe (Media.Figaro). Fichiers ads.txt : méthodologie et état de lieux Les fichiers ads.txt que les deux régies ont affiché sur certains de leurs sites sont une source d’informations précieuse sur leurs choix technologiques… et les relations avec les intermédiaires. Dans ces fichiers, destinés à lutter contre l’usurpation des noms de domaine, elles indiquent en effet les SSP autorisés à commercialiser leurs inventaires, que ce soit en direct, c’est-à-dire avec un contrat de commercialisation, ou en tant que revendeurs, c’est-à-dire par l’intermédiaire d’une sous-régie (lire sur notre site). Aucune des deux régies n’a encore déployé les fichiers ads.txt sur l’ensemble de ses sites. Alors qu’il possède près d’une trentaine de marques, Media.Figaro ne l’a mis en place que sur trois d’entre elles : Figaro.fr, La Chaîne Météo et Jeux-gratuits.com. Aucun des sites rachetés à CCM Benchmark n’avait publié son fichier ads.txt le 11 janvier 2018. Quand à M Publicité, qui possède une dizaine de marques, il a mis en place ads.txt sur L’Obs, Rue89, Télérama, le HuffPost et Courrier International, mais toujours pas sur Le Monde au 11 janvier 2018. Jeux-gratuits.com Le fichier ads.txt du site Jeux-gratuits, qui appartient à CCM Benchmark (groupe Le Figaro) montre que son inventaire est vendu par un large éventail de régies. Outre Media.Figaro, on en dénombre 14, par exemple GameDistribution, CoolGames, GamePix ou Poki. Son fichier ads.txt comprend environ 450 lignes, dont environ 350 consacrées à des revendeurs. “Comme il s’agit d’un site spécialisé dans le gaming, il est commercialisé par des régies spécialisées. Il n’est par nature pas comparable avec les autres sites du groupe, et n’est d’ailleurs pas intégré dans l’offre Skyline”, explique Jean Isnard, son éditeur. Jeux-gratuits.com a été acquis par CCM Benchmark il y a quelques années en même temps que le site de coloriage Hugo L’Escargot, afin de compléter la cible du Journal des Femmes par les femmes avec enfants. Aymeric Marolleau MobileSSPStreaming vidéoTransparence Besoin d’informations complémentaires ? 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