Accueil > Services bancaires > Open banking > Comment le Crédit du Nord développe un modèle d’univers de services Comment le Crédit du Nord développe un modèle d’univers de services En 2019, le Crédit du Nord a déployé sur ses espaces bancaires en ligne des univers de services regroupant des offres de partenaires financiers et extra-financiers. mind Fintech dresse le bilan de la stratégie de Banking-as-a-Platform de la filiale de Société Générale. Par Aude Fredouelle. Publié le 09 juillet 2021 à 9h25 - Mis à jour le 12 juillet 2021 à 18h26 Ressources Fin 2018, le Crédit du Nord annonçait la mise en place d’une stratégie de Banking-as-a-Platform. “Nous avons identifié 23 univers de services qui correspondent à une offre bancaire ou à des services non bancaires que l’on souhaite enrichir, expliquait alors Gérald Manzanares, directeur du marketing et de l’innovation, à mind Fintech. Sur chaque segment, nous allons proposer des services de partenaires sélectionnés par nos soins afin de fidéliser nos clients et de les inciter à utiliser régulièrement notre application. (…) Au premier semestre 2019, nous publierons une plateforme en ligne refondue mettant en valeur nos univers serviciels et les partenaires liés.” Deux ans et demi plus tard, qu’en est-il de la stratégie mise en place ? Huit univers de services déployés Sur les 23 univers de services identifiés au début par le Crédit du Nord, huit ont été déployés. “Nous avons préféré sélectionner un nombre limité d’univers qui nous paraissaient les plus pertinents pour nos clients et les travailler en profondeur pour offrir une large gamme de partenaires pour chacun, explique Ludovic Van de Voorde, directeur retail du groupe. Nous élargirons probablement par la suite en ajoutant quelques univers supplémentaires.” Les huit univers : simplifier mon quotidien, construire et développer mon patrimoine financier, simplifier ma vie d’entrepreneur, construire mon patrimoine immobilier, développer mon activité à l’international, payer et encaisser en toute sécurité, protéger ma famille, mes biens et mon activité et enfin, financer la croissance de mon activité. Site vitrine et application mobile Le Crédit du Nord a fait le choix de présenter les services sur ses plateformes en ligne. D’abord, sur son site vitrine. Ensuite, sur son application. “Nous avons aussi déployé un bouton baptisé “Mes univers Mes besoins” sur l’application pour mettre l’offre à disposition des clients et prospects. 80 % des univers y sont déjà déployés, raconte Ludovic Van de Voorde. Et pour les clients connectés, les univers apparaissent de manière personnalisée et ciblée.” Chaque univers présente à la fois des produits et services du Crédit du Nord et d’autres filiales du groupe (comme 59 Immobilier, société de transaction immobilière filiale à 100% du groupe Société Générale, dans l’univers immobilier), et des produits de partenaires. Une cinquantaine d’offres sont ainsi proposées aux clients, parmi lesquelles celles d’une quinzaine de partenaires comme Fizen et Agicap (gestion de la trésorerie), Expensya (gestion des notes de frais), Captain Contrat (conseils juridiques), PayFit (gestion RH)… Quasi-systématiquement, des offres spéciales sont proposées aux clients du Crédit du Nord : par exemple, chez PayFit, 50% de réduction sur les abonnements les trois premiers mois, chez Agicap, 10% de réduction sur l’abonnement, ou chez Fizen, l’abonnement premium au prix de l’abonnement classique. Améliorer l’intégration Pour accéder à une offre, le client consulte une page du site ou de l’application Crédit du Nord présentant l’offre du partenaire, puis il est redirigé vers une page dédiée sur le site du partenaire pour y souscrire (comme ici avec PayFit par exemple). Mais la banque veut améliorer l’expérience client en travaillant sur des intégrations plus profondes. “Certains partenariats sont semi-intégrés : dans ce cas, nous renvoyons vers le site du fournisseur où les données du client sont pré-remplies dans le formulaire de souscription. C’est le cas avec Expensya, et avec Aon pour la garantie de loyers impayés”, explique Ludovic Van de Voorde. Présentation des offres et services sur l’application mobile Expensya a d’ailleurs prévu d’aller encore plus loin dans l’intégration, avec un rapprochement bancaire 100 % automatisé et le développement d’APIs pour fluidifier le parcours client et automatiser les rapports de données. D’autres attendent d’abord les résultats du partenariat pour envisager plus de développements. “Nous avons mis en place un partenariat de prescription, mais nous envisageons de rediscuter les termes d’ici la fin de l’année pour faire évoluer ce partenariat en 2022, assure de son côté Amélie de Vomécourt, directrice des partenariats chez Agicap, solution déployée depuis avril 2021 sur la marketplace. L’objectif est de fluidifier le parcours client au maximum pour qu’il ait le moins de contraintes possibles entre la gestion de son compte en banque et la prévision de sa trésorerie.” Promouvoir par l’agence La “Bank-as-a-Platform” peut-elle vraiment séduire sous la forme d’une marketplace ? Pas à elle seule, reconnaît le Crédit du Nord. “Ces offres et ces vitrines ne peuvent pas fonctionner aujourd’hui de manière autonome car la majorité des clients ne se rendent pas sur la plateforme et ne souscrivent pas aux services de manière autonome, décrit Ludovic Van de Voorde. L’objectif est de miser sur la complémentarité des réseaux et des canaux de distribution : les conseillers peuvent parler des offres aux clients, les clients vont aussi eux-mêmes discuter avec leur conseiller d’une offre repérée sur le site, etc.” Pour faciliter cette logique de complémentarité, le Crédit du Nord a mis en place une version du site adaptée pour les collaborateurs. “Quand ils cliquent sur une offre ou un besoin, ils accèdent à des contenus divers tels que des verbatims et vidéos expliquant les détails des partenariats. On ne demande pas aux conseillers d’être spécialistes de tous les produits, mais de connaître les arguments clés pour savoir qui ils ciblent et comment les proposer aux clients”. Des objectifs commerciaux ont été mis en place sur la logique de promotion de la plateforme. Ainsi, chez Fizen, outil de pilotage pour les entrepreneurs et indépendants, le partenariat noué à l’été 2018 consiste avant tout à proposer la solution “par le biais des conseillers bancaires pour les pros auprès de leur clientèle de chefs d’entreprises”, indique Léo-Paul Sorin, directeur opérationnel. Parmi les leads envoyés par le Crédit du Nord, 85 % sont ainsi des souscriptions réalisées via le conseiller et 15 % en autonomie sur la page du site Fizen dédiée aux clients Crédit du Nord. “Mais a priori, dans ce cas, c’est le conseiller qui leur a poussé l’information, car je ne pense pas que les clients fassent d’eux-mêmes le tour des partenaires sur le site avant de faire leur choix”, ajoute le directeur. Même stratégie mise en place avec l’outil de gestion de trésorerie Agicap, qui est entré en discussions avec le Crédit du Nord en octobre 2020 et a déployé le partenariat de prescription en avril 2021. “Les conseillers font la promotion d’Agicap auprès de leurs clients professionnels et entreprises car ils ont validé le fait que la solution est la plus pertinente du marché”, indique Amélie de Vomécourt. 80% des leads de clients de Crédit du Nord proviennent des conseillers, et 20% de l’espace en ligne – environ la même proportion que chez Fizen. Il faut dire qu’Agicap investit dans l’évangélisation auprès des 400 conseillers du groupe : depuis la mise en place du partenariat, deux collaborateurs veillent à plein temps au bon fonctionnement du partenariat, notamment en tenant les conseillers au courant de l’évolution des dossiers de leurs clients. Outre les conseillers en agence, la plateforme de services du Crédit du Nord se reposera aussi sur un troisième pilier : le centre de relation clients. “Je crois beaucoup à un modèle de distribution reposant à la fois sur l’agence, le centre de relation client au téléphone et les espaces en ligne, poursuit le directeur retail. Par exemple, le centre de relation clients peut proposer à des clients investisseurs immobilier d’établir un devis garantie des loyers impayés sur le site du partenaire Aon. Nous mettrons en place ces complémentarités en 2022.” Stratégie de contenus En parallèle de la stratégie de vente par les réseaux, le Crédit du Nord veut tout de même pousser ses clients à découvrir la vitrine et à souscrire en toute autonomie certaines offres de partenaires. En janvier 2021, Ludovic Van de Voorde nous expliquait que depuis la refonte des sites fin 2019, 90 % des clients qui se connectent vont ensuite dans leur espace bancaire pour consulter leurs comptes ou réaliser une opération, tandis que 10 % vont explorer l’univers des besoins. “Notre ambition est désormais de générer davantage de trafic”, décrivait alors Ludovic Van de Voorde. Une direction de la distribution omnicanale a donc été créée mi-2020 pour “générer du trafic vers le site vitrine”. La direction de la distribution s’est ainsi vue donner des objectifs en termes de souscription via les partenaires. Le groupe met notamment en place une stratégie de contenus, avec des campagnes de mailing. C’est par exemple le cas dans le domaine de l’immobilier, comme nous l’expliquait Ludovic Van de Voorde en janvier dernier (lire notre dossier : “Banking-as-a-Platform : comment les banques agrègent des services autour du crédit immobilier”) : “Nous voulons travailler sur la publication de contenus éditoriaux sur l’immobilier. Nous souhaitons rentrer par le besoin client et être reconnu comme fournisseur de services sur la question du patrimoine immobilier”. Le CEO de la solution de création de sites web pour les TPE et PME Simplébo, Alexandre Bonetti, confirme l’importance de la stratégie éditoriale dans la promotion des services partenaires. “Les conseillers ont beaucoup de produits à mettre en avant, donc nous préférons parier sur la promotion en ligne. Mais les clients du Crédit du Nord ne vont pas d’eux-mêmes sur les pages consacrées aux partenaires. Notre mission est donc de fournir au groupe des éléments de communication pour qu’ils relayent facilement notre service et qu’ils renvoient leurs clients sur le site via des pushs variés : newsletters, réseaux sociaux, webinars, formations gratuites…”, détaille le dirigeant. Résultat : chez Simplébo, deux tiers des clients de Crédit du Nord viennent de la vitrine en ligne – même si dans ce cas de figure certains clients “ont certainement entendu parler de Simplébo par leur conseiller” – et un tiers des agences. “Cette stratégie permet de faire de la communication pour Simplébo sans mobiliser les forces de vente du Crédit du Nord sur le sujet”, se félicite Alexandre Bonetti. Quels résultats ? “Tous les services permettant d’aider à la digitalisation fonctionnent très bien, car ils répondent à de nouveaux besoins spécifiques des clients, se réjouit Ludovic Van de Voorde. C’est le cas de Simplébo, outil d’aide à la création de sites pour les petites entreprises, par exemple.” Son CEO Alexandre Bonetti assure en effet que “plusieurs centaines voire milliers de personnes ont souscrit à notre service grâce au Crédit du Nord”. “Nous avons une cinquantaine de partenaires et le Crédit du Nord est l’un de ceux avec qui cela fonctionne bien car la banque a une relation de confiance avec ses clients”, poursuit-il. Chez Agicap, le partenariat annoncé en avril 2021 a rapporté à la solution de suivi de trésorerie plus de 120 leads, “un volume qui double chaque mois”, “avec un excellent taux de transformation et de satisfaction client”, se réjouit Amélie de Vomécourt. “Onze ont déjà contractualisé et nous sommes encore en discussions avec les autres”, explique la directrice des partenariats, qui assure qu’Agicap est le partenariat le plus actif de la marketplace du Crédit du Nord. Par ailleurs, “le cycle de vente est raccourci grâce à la pré-qualification du besoin par les conseillers bancaires et l’avantage de la prescription par un tiers de confiance.” Enfin, “le panier moyen est plus élevé que notre panier habituel, car le Crédit du Nord nous permet de toucher des clients plus importants”. Même constat chez Lumo, plateforme de crowdlending rachetée par Société Générale il y a trois ans, qui a noué en novembre 2019 un partenariat de distribution avec le Crédit du Nord. Présent sur la marketplace, Lumo est avant tout promu par les conseillers clientèle. “Les prospects qui viennent du Crédit du Nord complètent quasi-systématiquement leur inscription et deviennent investisseurs, car les échanges avec le conseiller leur ont donné confiance et les ont convaincus. Et ensuite, ce sont souvent des clients qui réalisent plusieurs investissements”, indique Florence Schwob, responsable RSE et impact positif chez Lumo. Quelques centaines de contrats pour les meilleurs partenaires Si le Crédit du Nord se rémunère en tant qu’apporteur d’affaires, le modèle n’en est qu’à ses prémices, reconnaît Ludovic Van de Voorde, “mais les revenus sont nettement encourageants à ce stade”. Le directeur évoque “plusieurs centaines de contrats signés avec certains partenaires.” Mais “nous avons de grandes ambitions en la matière, grâce à notre force de frappe d’un peu moins de 2 millions de clients Crédit du Nord et de 8 millions de clients Société Générale dans le cadre du rapprochement” – la fusion entre Société Générale et sa filiale Crédit du Nord devrait intervenir d’ici 2024.Pour le groupe, la rémunération n’est d’ailleurs pas le seul objectif poursuivi. Pour Alexandre Bonetti, CEO de Simplébo, “outre la commission d’apporteur d’affaires, l’intérêt principal pour le Crédit du Nord réside dans la fidélisation des clients, en les accompagnant dans leur transformation numérique avec des tarifs préférentiels. Sans compter que dans le cas de Simplébo, équiper les TPE et PME d’un site web permet aussi de leur pousser la solution de Crédit du Nord pour l’encaissement à distance, Clic&pay.” Amélie de Vomécourt, d’Agicap, confirme la volonté du groupe de fidéliser ses clients avec ces nouveaux partenaires. “Le partenariat fonctionne très bien car Agicap est dans une logique d’acquisition clients et le Crédit du Nord de rétention. Cela permet d’appuyer la valeur conseil du groupe et de proposer des outils innovants à ses clients.” La stratégie du Crédit du Nord pique en tout cas la curiosité de ses concurrents. La Banque Postale souhaite créer un écosystème de banque compagnon avec des services de partenaires d’ici 2025 et à l’occasion de la présentation de son plan stratégique 2024 le 8 juin 2021, le groupe bancaire BPCE a annoncé la mise en place d’une marketplace permettant l’accès à des partenaires externes. Aude Fredouelle banking-as-a-platformopen bankingpartenariat Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Comment Lumo s’intègre au groupe Société Générale Banking-as-a-Platform : La Banque Postale va créer un écosystème de services d’ici 2025 Banking-as-a-Platform : comment les banques agrègent des services autour du crédit immobilier