Accueil > Investissement > Les start-up et scale-up françaises de la finance ont levé moins d’un milliard d’euros en 2023 Les start-up et scale-up françaises de la finance ont levé moins d’un milliard d’euros en 2023 Selon le baromètre de mind Fintech, avec les données de son partenaire eCAP PARTNER, les acteurs numériques de la finance et de l’assurance ont levé près de 728 millions d’euros en 2023. Un montant en net recul par rapport à l’année précédente. Par Rudy Degardin et Aymeric Marolleau avec Antoine Duroyon et Aude Fredouelle. Publié le 22 janvier 2024 à 16h27 - Mis à jour le 01 mars 2024 à 15h44 Ressources Depuis le deuxième semestre 2022, la hausse des taux d’intérêt et les conséquences inflationnistes de la guerre en Ukraine ont fortement freiné les investissements dans les start-up et scale-up françaises de la technologie. eCAP PARTNER, cabinet de conseil en fusion-acquisition et levée de fonds pour les acteurs du numérique qui tient le compte de leurs opérations depuis 2016, note qu’elles n’ont réuni, tous secteurs confondus, que 6,25 milliards d’euros en 2023, soit une baisse – la première depuis sept ans – de 6 milliards d’euros par rapport à l’année précédente. Plusieurs facteurs expliquent cette tendance : “L’augmentation des taux d’emprunt a rendu l’argent plus cher pour les investisseurs, qui engagent leurs fonds auprès des sociétés d’investissement”, explique Alban Dohin, vice-président M&A chez eCAP PARTNER. En outre, “nombre d‘entreprises qui cherchent à lever aujourd’hui l’ont déjà fait à de très bonnes conditions et à des valorisations très favorables lors de cycles précédents. Elles peinent à retrouver les mêmes propositions dans ce contexte plus tendu, où les investisseurs ne se bousculent plus pour les dossiers”. Dans ce contexte, seul le secteur de l’énergie a levé davantage qu’en 2022, avec 1,7 milliard d’euros réunis l’an dernier contre 114 millions en 2019. A l’inverse, le recul est marqué pour le secteur de la finance et de l’assurance, puisqu’il atteint -67 %, de 2,2 milliards levés par 104 sociétés en 2022 à 728,4 millions par 83 acteurs l’an dernier. Après une forte progression des levées de 2020 à 2022, les sommes récoltées retombent donc quasiment au niveau observé trois années auparavant (en 2020, qui était pourtant une année particulière du fait du Covid). Les opérations annoncées publiquement pourraient toutefois masquer une partie de la réalité du marché. “Nous pressentons que de nombreux acteurs ont eu recours à des bridges, non communiqués, pour tenir le temps d’atteindre les objectifs qui séduiront les fonds lors de leur prochain roadshow”, indique Alban Dohin. [Data] Comment évolue le financement des start-up et scale-up de la finance et de l’assurance ? Par ailleurs, le ticket médian des levées de fonds des start-up et scale-up françaises de la finance et de l’assurance est passé de 5 millions d’euros en 2022 à 3 millions en 2023. On observe aussi une concentration plus importante des petits tickets. Si en 2022, 75 % des sommes récoltées allaient jusqu’à 15 millions d’euros, elles ne dépassent pas à présent 7 millions, soit une baisse de plus de moitié. Avec 100 millions d’euros levés en mars auprès, notamment, de True Global Ventures, Digital Finance Group ou encore 10T, Ledger compte pour 13,7 % du total des fonds levés par les start-up françaises de ces secteurs en 2023. La licorne spécialisée dans les solutions de sécurité pour la conservation des cryptoactifs a levé 562 millions d’euros depuis sa création en 2014, grâce à des opérations menées en 2017, 2018, 2021 et 2023. Pigment (planification financière) et Blank (néobanque) complètent le podium, avec respectivement 88 millions d’euros et 47 millions levés. Cette dernière, fondée par la Fabrique by CA, start-up studio du groupe Crédit Agricole, a en effet bénéficié de nouveaux fonds injectés par le Crédit Agricole SA et par les caisses régionales. Outre cet apport de capitaux frais, l’intégralité des parts de la Fabrique by CA dans Blank ont par ailleurs été rachetées par les deux autres entités du groupe, qui reprennent les commandes de la néobanque. “La Fabrique n’avait pas vocation à nous accompagner ad vitam aeternam, et ces nouveaux actionnaires peuvent nous accompagner sur la durée, avec des montants plus importants”, s’est félicité Simon Parisot, CEO de Blank, auprès de mind Fintech. Quels ont été les investisseurs les plus actifs en 2023 ? Hors business angels, 84 investisseurs différents ont participé au tour de table d’une start-up de la finance et de l’assurance en 2023. 26 d’entre eux ont participé à plus d’une opération, dont Kima Ventures, Mandalone Partners et Accurafy 4. Bpifrance a été particulièrement actif, participant à sept opérations, dont les levées de Swan (37 millions d’euros levés en Série B en septembre, à l’occasion d’un tour de table mené par LakeStar), Garantme (15 millions d’euros levés en janvier) et Dattak (8,5 millions d’euros levés mi-2023), au même moment que son concurrent Stoïk (pour le même montant). Quelles acquisitions en 2023 ? Outre les levées de fonds, eCAP PARTNER tient aussi le compte des opérations de fusions & acquisitions (M&A) dans le secteur de la tech. Alors que le total des montants levés a été divisé par deux et que le nombre d’opérations a baissé de 12 % (de 745 en 2022 à 652 en 2023), les opérations de M&A ont, elles, augmenté de 15 % (de 335 en 2022 à 387 en 2023). “Lorsqu’on n’arrive pas à lever de nouveau dans de bonnes conditions, l’adossement à un groupe peut être une solution. D’autant que ce n’est pas la crise pour tout le monde. Des champions ont émergé et ont les moyens de s’offrir des sociétés qui se portent moins bien qu’eux. De plus, le mouvement de digitalisation des grands groupes perdure, ce qui les amène à boucler des opérations de croissance externe”, note Alban Dohin. La tendance se vérifie dans le secteur de la finance et de l’assurance, puisque 22 entreprises y ont été acquises l’an dernier, contre 20 en 2022 et 19 en 2021. Parmi les opérations marquantes de 2023, on retiendra le rachat du spécialiste du prélèvement Slimpay par le Suédois Trustly en août 2023, pour lequel l’agence Bloomberg a évoqué un montant de 70 millions d’euros. Trustly revendiquait alors plus de 8 300 marchands clients dans plus de 30 marchés et a réalisé 250 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022, pour un Ebitda ajusté de 28,5 millions d’euros. SlimPay, de son côté, comptait 2 000 clients dans plus de 20 pays. En 2022, la société a enregistré un produit net bancaire de 11,3 millions d’euros (contre 10,5 millions d’euros l’année précédente) pour une perte nette de 1,8 million d’euros (2,7 millions d’euros en 2021), selon des documents consultés par mind Fintech. Ses 80 collaborateurs s’ajoutent aux 1 000 salariés de Trustly. Le robo-advisor Nalo est quant à lui passé sous le giron du groupe de protection sociale Apicil en avril. Selon Les Echos, le montant de l’opération serait “un peu inférieur à la dernière valorisation de la fintech (entre 15 et 20 millions d’euros). Apicil avait déjà pris une participation minoritaire dans le robo-advisor BtoB FundShop, racheté début 2022 par le groupe Alpheys. Notons aussi la reprise du pionnier du crowdequity Sowefund par Founders Future, en octobre, alliance inédite entre le monde de l’investissement early-stage et celui du financement participatif. L’objectif consiste à unir les deux mondes en permettant à des particuliers de bénéficier de capacités de reporting et de due diligence habituellement réservées aux investisseurs professionnels. Enfin, la solution de BNPL Joe a été reprise par La Banque Postale, cette dernière la rapprochant ainsi de sa filiale Django. Joe proposait une application permettant de fractionner a posteriori un paiement. Elle passait par Floa (groupe BNP Paribas) pour le financement. Django a racheté le fonds de commerce, avec l’application, les 15 salariés et les clients (Joe en revendiquait 200 000), mais pas la marque. Kevin Ohana a pris en charge les produits BtoC de Django tandis que le CTO de Joe, Alexandre Leclercq, est devenu CTO de Django. Mises en perspective avec les autres secteurs, les acquisitions dans la finance et l’assurance sont chaque année supérieures à la moyenne. Malgré une légère baisse en 2022, le nombre de start-up rachetées demeure stable, ce qui témoigne de la vitalité du secteur. Méthodologie La société eCAP PARTNER, cabinet de conseil spécialisé dans l’accompagnement des entrepreneurs dans leur cession auprès de groupes industriels ou en recherche de financements, envoie une fois par trimestre au groupe mind les données sur les levées de fonds et les fusions & acquisitions dans les secteurs suivants : Marketing & Communication ; Industrie du Culturel, Image et Média ; Finance, Assurance. La rédaction de mind Fintech ajoute ou retire parfois certaines sociétés à ce périmètre. La liste de toutes les sociétés prises en compte est consultable dans notre espace Data. Limites Il n’est pas toujours possible de distinguer précisément la part levée en equity de celle levée en dette. Certaines start-up et certains fonds d’investissement peuvent avoir changé de nom au cours de leur histoire, ce qui complique le suivi de leurs opérations. Toutes les levées de fonds ne sont pas communiquées publiquement, pas plus que l’identité de tous les participants à un tour de table. La frontière entre ‘start-up’ et entreprise mature est parfois difficile à tracer précisément, de même que la frontière des sociétés de la finance et de l’assurance, auxquelles nous nous sommes efforcés de restreindre notre périmètre. Si des levées de fonds ont échappé à notre vigilance et à celle d’eCAP PARTNER, ou si vous pensez avoir repéré une erreur, n’hésitez pas à nous le signaler : datalab@mind.eu.com Rudy Degardin et Aymeric Marolleau avec Antoine Duroyon et Aude Fredouelle levée de fonds Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Comment évolue le financement des fintech en France ? 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