David Giblas (Malakoff Médéric) : “Nous avons recensé près de 40 cas d’usages data”

Vous avez intégré Malakoff Médéric pour diriger la direction Innovation, Digital & Data, nouvellement créée. Comment cela s’inscrit-il dans la stratégie mm20 ?

Cette direction a été créée dans le cadre du plan stratégique mm20 lancé fin 2016 par Thomas Saunier,  directeur général du groupe. L’innovation, le digital et la data figurent parmi les enjeux clés de ce plan.
Il s’agit d’un levier extrêmement important pour contribuer à la croissance et l’efficacité de l’entreprise et la qualité des services rendus aux clients. Cette direction dédiée est composée d’une soixantaine de personnes et dispose d’un budget de 100 millions d’euros sur les cinq ans, dédié à la transformation interne.

Quels sont les objectifs de cette direction ?

Nous avons trois principaux objectifs : accélérer nos capacités d’innovation, mettre sur le marché de nouveaux outils digitaux et exploiter le potentiel de la data. Ensuite, nous voulons contribuer à la mise en place de nouveaux socles technologiques (datalake, plateforme API…). Enfin, notre rôle est de contribuer à la diffusion d’une nouvelle culture et la montée en compétences de l’entreprise.

Cette direction s’articule autour de trois équipes qui permettent d’assurer un continuum : l’innovation qui réfléchit aux nouveaux usages, le digital qui travaille sur l’expérience client et la data qui construit les moteurs de prédiction et personnalisation. Nous engageons une transformation en profondeur de l’entreprise, sur le plan humain, en matière de compétences et de modèle de management pour tendre vers un mode de fonctionnement de plus en plus agile.
Cette échéance de cinq ans est nécessaire dès qu’on touche à l’ADN de l’entreprise et à ses hommes et femmes. Cela demande du temps et de l’expérimentation. Cela se traduit par une gouvernance spécifique, une nouvelle façon de mener les projets, un budget dédié…

Comment travaillez-vous avec les autres directions de Malakoff Médéric ?

Cette direction est rattachée directement à la direction générale mais elle est au service des directions métier du groupe et travaille étroitement avec la DSI qui est en charge de la fabrication et l’exploitation. Quand on parle de sujets technologiques, il faut que les solutions livrées soient sécurisées, robustes et performantes. Nous ne pouvons pas travailler indépendamment de la DSI. Une équipe est dédiée au sein de la DSI pour la mise en place des projets issus de la direction Innovation, Digital & Data.

Votre direction intervient autour de trois thématiques. Quels sont les objectifs pour la partie innovation ?

L’équipe Innovation, en lien avec les différentes directions métiers (Santé, Marketing stratégique…), réfléchit aux nouveaux usages et services dans nos métiers et les domaines adjacents : santé, prévoyance, qualité de vie au travail et bien-être, ressources humaines notamment. Au CES début 2017, nous avons présenté MonAssistantRH, qui a été lancé en fin d’année dernière en partenariat avec la start-up lyonnaise Troops. Il s’agit d’un DRH virtuel pour les petites entreprises. Au total, c’est plus d’une trentaine de services que nous proposons à nos clients en compléments des produits d’assurance.

Au CES qui se tient cette semaine à Las Vegas nous présentons un nouveau concept : activ’mm 360. Il s’agit d’un dispositif d’accompagnement au quotidien des dirigeants d’entreprises et des salariés. Il s’appuie sur l’Internet des Objets et des algorithmes d’intelligence artificielle permettant de prédire et personnaliser les actions d’améliorations de la qualité de vie des employés de l’entreprise.

L’équipe Innovation est également en charge de la diffusion de l’innovation dans le groupe. Elle anime un réseau de 90 personnes (Innov’R) pour diffuser cette culture au plus proche du terrain. Enfin, nous avons ouvert en septembre 2017, le Lab, un espace créé au siège de Malakoff Médéric dédié à l’innovation, la créativité et l’accélération des projets. Il héberge des projets en interne mais accueille également des partenaires et des clients pour des sessions de travail. Notre objectif est de l’étendre à d’autres sites, parisiens et en région.

Quelles sont les missions de l’équipe dédiée au digital ?

Elle travaille sur l’expérience client et en est charge du déploiement de toutes les méthodes agiles dans l’entreprise. Une quinzaine de projets sont en cours et impliquent l’ensemble des compétences présentes.

Nous souhaitons passer à l’échelle rapidement et nous avons bâti notre organisation et notre méthode de travail dans cet objectif. Actuellement, les projets concernent un portail pour nos courtiers, des outils d’aide à la vente pour les commerciaux, le lancement d’un portail pour les entreprises et un portail pour nos employés.

Enfin, pour l’équipe data, quels sont les enjeux ?

A la différence des deux autres qui existaient déjà, cette équipe a été créée en 2017. Son rôle est de construire les modèles de prédiction et de personnalisation. Elle travaille sur des algorithmes sophistiqués et certains s’appuient sur le machine learning. Nous avons recensés près de 40 cas d’usages data que nous avons priorisés avec les directions métiers. Nous fonctionnons par vague de 4 use cases. Ils couvrent toute la chaîne de valeur : marketing (chum), développement (génération de lead), relation client (usage des services), technique (fraude)…

Quels sont les objectifs en terme de taux d’usage ?

C’est un sujet fondamental, car sans taux d’usage vous n’aurez pas de monétisation de vos services. La monétisation prenant différentes formes : fidélisation des clients, aide à la vente, prévention et maîtrise des risques etc. Les taux d’usages cibles sont variables selon les types de services. Il faut se donner les bons objectifs par rapport à la valeur que vous souhaitez atteindre et les cibles clients. Par exemple sur les services autour de la prévention, on arrive facilement à 10-15 % de taux d’usage mais ce n’est pas forcément la bonne population qui utilise l’application. Il faut aller chercher dans les 85 % la population directement concernée par ces services. Pour d’autres services, l’objectif est d’atteindre 5 à 10 % de taux d’usage.

Le groupe a également annoncé fin 2017 la création d’un fonds d’investissement. Pouvez-vous en dire plus ?

En effet, je viens de vous décrire notre dispositif d’innovation interne. Nous avons décidé d’aller plus loin et d’accélérer ce dispositif en renforçant notre dispositif d’open innovation et en particulier dans le financement des start-up. Nous allons créer un fonds, baptisé MM Innvov’, dédié en partenariat avec un spécialiste du capital-risque. En complément nous garderons une activité d’investissement dans des fonds ouverts et une poche gérée en direct. Au total nous allons investir 150 millions d’euros dans ces différents véhicules. Aujourd’hui nous avons trois participations directe : H4P, Ignilife et Nouveal. Par ailleurs, nous travaillons avec une trentaine de start-up, dans le cadre de partenariats ou tout simplement comme fournisseur.

La majorité des 150 millions d’euros devrait être dédiée au fonds d’investissement. Comment préparez-vous sa création ?

A l’issue d’un processus de sélection de plusieurs mois, nous avons décidé de nous associer avec Idinvest. L’objectif de ce partenariat sera de concilier rendement financier et impact sur nos métiers en terme de croissance, performance et qualité de services. Ce fond sera opérationnel au cours du premier trimestre 2018. Nous aurons une équipe mixte Malakoff Mederic / Idinvest qui sera dédiée au management de ce fond.

Les domaines d’investissement prioritaires sont la e-santé, la fintech, la deeptech et les services B2B en lien avec le capital humain. Nous viserons des séries A et B en ciblant des start-up avec un premier produit, et si possible des premiers clients, pour que nous puissions rapidement l’intégrer dans notre modèle. Nous regarderons en priorité la France et l’Europe mais nous scruterons bien évidemment l’Asie et les Etats-Unis.

Crédit photo : Malakoff Médéric / Jean Chiscano