Sébastien Tautou (Wakam) : “Nous prévoyons d’aller progressivement vers plus de blockchain publique sur notre chaîne de valeur”

En quoi consiste votre plateforme Play & Plug ?

Lancée il y a deux ans, Play & Plug est notre plateforme technologique qui regroupe l’ensemble des services destinés à nos partenaires distributeurs. Elle fournit en particulier des services de conception de produits d’assurance sur-mesure dans un time-to-market court, ainsi qu’un module de conception en self-service pour les produits les plus simples : le partenaire a accès à un simulateur de tarification qui permet d’apprécier les différents niveaux de garantie et leur impact sur le prix. S’ensuit l’étape de contractualisation avec le protocole d’accord de distribution. Enfin, pour utiliser notre produit d’assurance, le partenaire est guidé vers un portail API qui met à sa disposition la documentation nécessaire pour pouvoir l’intégrer dans son écosystème.

La plateforme propose également des outils de souscription de produits d’assurance, sous forme d’API également. Les insurtech en sont très friandes. Les acteurs traditionnels, qui se digitalisent, se tournent aussi progressivement vers ce genre de solution. L’utilisation de nos centaines d’API est donc croissante, avec approximativement 10 millions d’appels API par mois. L’API présuppose toutefois des capacités en interne. Pour les insurtech, il n’y a pas de problème. Mais pour nos partenaires non spécialistes de l’assurance, la solution doit être clé en main. Nous proposons donc aussi un service complémentaire de front (site web) ou de widget, qui s’intègre au parcours d’achat en proposant de l’assurance sous forme d’option.

Quels services additionnels la plateforme recouvre-t-elle ?

Nous projetons de développer cette année une plateforme de gestion des contrats, notamment pour nos partenaires non assurantiels. Dans ce cadre, nous ferons intervenir la blockchain qui nous permet d’automatiser une partie des actes de gestion. Nous nous en servons déjà aujourd’hui par exemple pour le produit annulation ou retard de vol. Nous inscrivons des smarts contracts dans la blockchain qui déclenche, une fois le sinistre confirmé [via la plateforme FlightStats par exemple, ndlr], le règlement automatisé de l’indemnisation. 

Enfin, dernier pilier de notre offre : nos services de pilotage de la performance des résultats financiers et techniques. Dans Play & Plug, nos partenaires distributeurs ont accès à des dashboards qui reprennent les principaux indicateurs de leurs portefeuilles : suivi des sinistres, évolution dans le temps, par produit… Cette analyse dynamique permet d’adapter le prix à la tarification des produits que nous mettons à disposition.

Dans son processus de transformation digitale, Wakam a lancé en 2020, au sein de Play & Plug, un self-service. Quels produits d’assurance s’y trouvent ?

Pour l’instant, deux produits d’assurance sont disponibles en self-service : casse et vol de vélo et annulation ou retard de vol. Un prospect peut, en moins d’une journée, contractualiser avec nous un protocole de distribution. Et si le client est suffisamment agile, il peut distribuer le produit d’assurance en moins de 24 heures.

Quels autres produits d’assurance pourraient rejoindre le self-service ?

Tous les produits de notre catalogue ne sont pas forcément adaptés à ce type de contractualisation en complète autonomie. Les produits qui fonctionnent bien sur ce modèle sont ceux relativement simples à consommer, avec peu de profondeur dans les modalités de garantie. [Une assurance rachat de franchise devrait être lancée en 2022, ndlr]. Des produits d’assurance auto, moto, habitation, avec une profondeur importante, ou des options négociées avec le partenaire s’y prêtent moins. Toutefois, une partie du parcours de souscription peut être digitalisée. Aujourd’hui, nous permettons aux prospects de se faire connaître auprès de nous et d’avoir accès à notre catalogue de produits. Les briques d’accompagnement, d’onboarding, de découverte de nos services, pensées en mode self-care, sont un levier de croissance et de scalabilité essentiel pour Wakam.

N’importe quelle entreprise peut venir sur votre plateforme et obtenir un produit d’assurance ?

Avant de pouvoir distribuer le produit, nous demandons un certain nombre d’informations sur l’entreprise qui est soumise à un processus de KYB [know your business, ndlr].

Les produits proposés en self-service semblent davantage viser des entreprises non assurantielles. Est-ce le but ?

Oui, effectivement. C’est un moyen d’adresser un marché de non spécialistes de l’assurance, qui n’est pas notre segment historique mais qui devrait être un relais de croissance demain. Ce sont des clients qui ne connaissent pas bien les produits d’assurance mais qui souhaitent proposer une offre packagée à leurs clients finaux, car cela favorise leur propre croissance, et le parcours client est simplifié.

La technologie blockchain est notamment utilisée sur les produits en self-service. Quelles sont les caractéristiques de la blockchain que vous utilisez ?

Notre blockchain [le logiciel open source Quorum, une version entreprise d’Ethereum, ndlr] est privée mais nous intégrons une preuve de l’intégrité, de l’immuabilité des contrats dans la blockchain publique Bitcoin, deux fois par jour. Notre blockchain compte quasiment 600 000 smart contrats enregistrés. Nous prévoyons d’aller progressivement vers plus de blockchain publique sur notre chaîne de valeur, à mesure que le marché deviendra mature sur le sujet. 

Votre utilisation de la blockchain dans l’assurance est-elle un atout de différenciation ?

Aujourd’hui, les contrats liés à la blockchain ne représentent qu’une faible partie du chiffre d’affaires de Wakam. Mais plus nous automatisons nos traitements, plus nous pouvons optimiser nos tarifs.

Comment décidez-vous des briques de services à ajouter ou à améliorer sur votre plateforme ?

Nous avons créé une communauté de partenaires distributeurs privilégiés qui nous aident à créer nos produits digitaux en les testant dès les phases d’idéation, de partage des maquettes. Cela nous permet de collecter des insights régulièrement à travers des groupes de discussion, des interviews, des questionnaires, sur différents canaux.

Quelle part de l’effectif de Wakam est dédiée au développement de vos outils digitaux ?

Il y a deux ans, nous étions une vingtaine de personnes côté tech. Nos effectifs ont depuis quasiment doublé. Nous avons notamment investi dans des compétences en développement, product management, UX design, DevOps…

En février 2021, la MAIF a lancé “Insurance as a service by MAIF”, un portail API proposant des simulations et devis d’assurance. Qu’en pensez-vous ?

L’open insurance portera une grande partie de la croissance des assureurs à l’avenir. Cela confirme notre positionnement.