Accueil > Industrie > Quelles entreprises ont été autorisées par la FDA à commercialiser des dispositifs médicaux intégrant de l’IA? Quelles entreprises ont été autorisées par la FDA à commercialiser des dispositifs médicaux intégrant de l’IA? La Food and Drug Administration (FDA) a dressé, à l’automne 2021, une liste de plus de 300 dispositifs médicaux (DM) intégrant de l’apprentissage automatique qu’elle a examinés et autorisés depuis le début des années 2000. Quelles entreprises, notamment françaises, développent ces innovations ? Quels domaines médicaux sont concernés ? mind Health a décortiqué cette liste pour mieux comprendre la combinaison gagnante entre DM et IA. Par Aymeric Marolleau et Camille Boivigny. Publié le 10 janvier 2022 à 11h26 - Mis à jour le 31 janvier 2023 à 16h14 Ressources Alors que la technologie continue de faire progresser de multiples aspects des soins de santé, les logiciels incorporant de l’intelligence artificielle (IA), et en particulier le sous-ensemble de l’IA connu sous le nom d’apprentissage automatique (ML, pour machine learning), sont devenus une partie importante d’un nombre croissant de dispositifs médicaux (software as a medical device, SaMD). L’un des plus grands avantages potentiels du ML réside dans sa capacité à créer des informations nouvelles et pertinentes à partir de la grande quantité de données (big data) générées chaque jour lors de la prestation de soins de santé. Selon la Food and Drug Administration (FDA), “l’intérêt pour les dispositifs médicaux intégrant la fonctionnalité ML a augmenté ces dernières années.” Pour preuve, depuis les années 2000, elle a examiné et autorisé un nombre croissant de dispositifs avec ML dans de nombreux domaines de la médecine. Et cette tendance devrait se poursuivre. Quelles voies réglementaires pour faire autoriser un dispositif médical avec ML ? Il en existe trois. Premièrement, l’autorisation 510(k), disposition réglementaire nord-américaine permettant la commercialisation des dispositifs médicaux des classes I, II et III. Deuxièmement, une demande De Novo, processus conçu pour les “nouveaux” DM, pour lesquels les fabricants ne peuvent établir d’équivalence substantielle, mais dont les profils de risque ne justifient pas nécessairement la désignation d’appartenance à la classe III. Troisièmement, le Pre-Market Approval (PMA), processus destiné aux innovations de rupture. Les dispositifs médicaux qui entrent dans le cadre de cette dernière se voient offrir une “voie d’accès rapide” au marché américain se traduisant par une collaboration étroite avec le personnel de la FDA. Pour permettre au grand public de mieux comprendre cette tendance, l’agence américaine a recensé et publié, à l’automne 2021, une liste de DM intégrant de l’IA/ML commercialisés aux États-Unis (voir méthodologie). Elle y précise le nom de chacun, la société qui l’a développé, la date de l’autorisation, ou encore le domaine médical concerné. La FDA précise néanmoins que cette liste n’est pas exhaustive et se fonde sur des informations publiquement disponibles. Quelles sociétés se montrent les plus actives ? Quels domaines médicaux sont les plus concernés ? À quel rythme l’innovation progresse-t-elle ? mind Health a analysé le document de la Food & Drug Administration pour apporter des éléments de réponse. Les principaux acteurs de l’imagerie médicale Il ressort ainsi que la FDA, qui a publié début 2021 un “plan d’action” sur la réglementation du marché des dispositifs médicaux fondés sur l’IA, a attribué au moins 343 autorisations à 317 dispositifs de ce type depuis 1997. Les demandes ont été déposées par 218 sociétés différentes. Siemens Medical Solutions (Siemens Healthineers) est celle qui en a obtenu le plus grand nombre, pour des produits qui concernent tous les diagnostics radiologiques, comme Ysio Max (système de radiographie numérique), AI Rad Companion (détection d’anomalies sur des radiographies) ou encore Syngo.via (solution de post-traitement 3D des images). Le groupe GE, de son côté, a obtenu 22 autorisations depuis 2014 pour les dispositifs de plusieurs entités différentes : GE Medical Systems Ultrasound and Primary Care Diagnostics LLC, GE Medical Systems SCS, GE Medical Systems LLC, GE Healthcare Japan Corporation et GE Healthcare. Toutes ces autorisations portent sur la radiologie. L’intelligence artificielle en santé Cinq acteurs français Nous avons identifié cinq sociétés françaises, qui ont chacune obtenu une seule autorisation. BioMérieux, spécialisé dans le diagnostic in vitro, a obtenu dès 2013 une autorisation de commercialisation pour Vitek MS, un spectromètre de masse utilisant une technologie, nommée “MALDI-TOF”, qui “compare le spectre de l’échantillon avec une banque de spectres incluant un grand nombre de bactéries enregistrées pour permettre une identification précise”. BioMérieux a été rejoint en 2017 par Cardiologs Technologies, pour son logiciel d’aide au diagnostic de l’arythmie à partir des électrocardiogrammes (ECG), “CardioLogs ECG Analysis Platform”. La directrice marketing Europe de la société fondée en 2014, France Schwarz, indiquait à mind Health en 2020 que cette solution permet de réduire le temps d’analyse : “En moyenne, les experts (cardiologues ou rythmologues) analysant ces données divisent leur durée d’analyse et de traitement par deux, à performance diagnostique égale”. Cardiologs a été acquise par le groupe néerlandais Philips en novembre 2021. Parmi les acteurs français, citons aussi Qynapse, pour QyScore Software – analyse de marqueurs d’IRM cérébrale pour les radiologues et les neurologues -, en 2019, Therapixel, pour MammoScreen – aide à l’interprétation des mammographies – en 2020 et TheraPanacea pour ART-Plan en 2021. Comment Therapixel a obtenu un agrément auprès de la FDAPierre Fillard, fondateur et CSO de Therapixel, confie qu’”obtenir l’agrément FDA ne fut pas une mince affaire et a clairement constitué la plus grosse barrière à l’entrée. Bien que le dossier soit à 95 % similaire à celui du marquage CE.” Bien que des solutions existent déjà sur le marché outre-Atlantique, Therapixel a tout de même dû réaliser une étude clinique pour démontrer une équivalence substantielle illustrant la pertinence et la sécurité de la sienne. “Les capacités de la FDA à mobiliser une équipe sur un dossier sont assez incroyables. Le niveau de détails et retours délivrés est impressionnant. Les échanges avec l’agence américaine permettent de faire progresser le niveau de compréhension du dispositif. La tâche est difficile mais très satisfaisante au final puisque notre solution gagne en qualité, performances et opportunités. En plus d’être précis et enrichissants, ces échanges sont toujours rapides (90 jours), alors qu’un dossier peut facilement compter un millier de pages.” Therapixel a reçu deux agréments de la part de la FDA, en mars 2020 après un dépôt en octobre 2019, et fin 2021 pour une solution déposée au début de l’année. Quels domaines sont les plus concernés ? Les dispositifs portent sur 15 domaines différents, mais 70 % des autorisations concernent la radiologie. Comment expliquer cette avance ? Notamment par le fait que les données de radiologie, et plus généralement d’imagerie, nécessitent moins de traitement de nettoyage et d’analyse que d’autres types de données et parce que les algorithmes peuvent s’exercer sur des millions d’images associées à des diagnostics. Par ailleurs, la radiologie est, du moins en France, l’une des spécialités médicales les plus touchées par le manque de praticiens. Les logiciels issus de la R&D aident les praticiens non seulement à traiter les images, mais aussi à réduire les doses d’irradiation : “une caméra à infrarouge récupère le gabarit du patient et l’IA exploite cette donnée pour nous aider à positionner le patient au centre du tunnel et en hauteur”, expliquait ainsi à mind Health en 2019 Agnès Malgouyres, responsable marketing intelligence artificielle chez Siemens Healthineers. Les sociétés recensées par la FDA ne multiplient pas les spécialités. Parmi les 55 qui ont obtenu plus d’une autorisation, une seule en a obtenu pour deux domaines différents. Il s’agit d’ImpediMed, spécialisé dans les technologies de spectroscopie de bio-impédance : son dispositif, baptisé SOZO, a obtenu trois autorisation dans le domaine de la gastroentérologie-urologie en 2017, 2018 et 2019, et une dans le domaine cardiovasculaire en 2017. Dans le domaine des maladies cardiovasculaires, Verily, filiale de Google dédiée à la santé, a obtenu une autorisation en janvier 2019 pour son capteur d’activité Study Watch. Le premier dispositif autorisé l’a été en 1997. Il s’agissait de “Compumedics Sleep Monitoring System”, un système pour mesurer la qualité du sommeil développé par la société Compumedics. Les incursions de l’IA ont été timides jusqu’en 2016, mais se sont nettement accélérées depuis, avec 100 autorisations pour la seule année 2020, soit un tiers de toutes les autorisations accordées. Quels dispositifs médicaux intégrant de l’intelligence artificielle en France et en Europe ? Le Lancet Digital Health a publié en accès libre, le 18 janvier 2021, une analyse comparative des autorisations de mise sur le marché accordées aux DM embarquant de l’IA, entre l’Europe et les Etats-Unis. 222 sont autorisés par la FDA contre 240 marqués CE. Un jour plus tard, les médias américains relayaient que leur gouvernement avait décidé de lever l’examen préalable à la mise sur le marché de certains DM utilisant l’IA. Ce n’est qu’un mois plus tard que la France se dotera, via la Haute Autorité de Santé, de sa première grille de classification des solutions numériques en santé, un an seulement après avoir rendu son premier avis sur un DM intégrant de l’IA apprenante. La présidente de la CNEDiMTS, Isabelle Adenot, a récemment confié à mind Health que “L’arrivée de l’IA a bousculé (ses) processus d’évaluation”. Ce que Guillaume Avrin, responsable du département Évaluation de l’IA au Laboratoire national de métrologie d’essais (LNE), confirme : “Le besoin de supervision permanente des systèmes d’IA critiques suppose de nouvelles méthodes”. Ce dernier a d’ailleurs récemment établi un référentiel de certification de l’IA, dont la société AXIONABLE s’est vue remettre le premier certificat le 24 novembre dernier. Méthodologie La FDA explique dans un texte accompagnant sa publication qu’elle a constitué cette liste – publiée pour la première fois le 22 septembre – en recherchant parmi ses propres informations publiques, ainsi qu’en examinant les informations dans les ressources accessibles au public et dans d’autres documents publics publiés par les fabricants. Elle précise qu’il ne s’agit pas d’une ressource exhaustive ou complète. “Il s’agit plutôt d’une liste d’outils dans toutes les disciplines médicales”, commente-t-elle. Elle prévoit par ailleurs de la mettre à jour périodiquement sur la base des mêmes informations. Le nom des sociétés n’est pas toujours orthographié de la même manière dans l’ensemble de la liste. Pour faciliter la comparaison entre les acteurs, nous les avons parfois uniformisés. Nous n’avons pas réconcilié les filiales au niveau groupe. Une remarque ? Une question ? Contactez-nous : datalab@mind.eu.com Aymeric Marolleau et Camille Boivigny Algorithmesbig dataCardiovasculaireDiagnosticDispositif médicalDonnées de santéGAFAMImagerie médicaleIntelligence ArtificielleLogicielRèglementaire Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire L'intelligence artificielle en santé Dans son rapport annuel, AI for Health analyse les bonnes pratiques de l'IA en santé L’IA moins précise que les radiologues Explicabilité et interprétabilité, critères indispensables de l’IA de confiance Le concept d’IA de confiance en santé Intelligence artificielle : la mission parlementaire sur la bioéthique veut maintenir la responsabilité du médecin