Accueil > Médias & Audiovisuel > Abonnements en ligne > Comment les éditeurs travaillent la segmentation de leurs offres numériques payantes Comment les éditeurs travaillent la segmentation de leurs offres numériques payantes Pour poursuivre la progression de leur nombre d'abonnés en ligne, les médias les plus matures diversifient leurs offres tarifaires, ce qui a aussi pour avantage d'augmenter le panier moyen. Par Jean-Michel De Marchi. Publié le 31 janvier 2020 à 13h48 - Mis à jour le 31 janvier 2020 à 13h48 Ressources Après une hausse progressive de la souscription des abonnements en ligne ces dernières années, 2018 a marqué un tournant avec plusieurs éditeurs ayant passé la barre des 100 000 abonnés numériques revendiqués : Le Monde, le Figaro, Mediapart et L’Équipe (voir notre bilan chiffré 2018 de l’abonnement pur numérique chez les médias d’information en France). Les éditeurs que nous interrogeons régulièrement se montrent optimistes sur leur marge de progression, affirmant détenir désormais une certaine maturité dans l’expertise marketing et pouvoir compter sur des lecteurs de plus en plus enclins à payer pour accéder à l’information. Pour franchir une deuxième étape dans leur stratégie de croissance des abonnés numériques, les éditeurs les plus en avance portent maintenant une attention particulière à leurs offres tarifaires, en travaillant sur une segmentation plus fine. Certains médias avaient déjà enclenché des initiatives en ce sens : Les Échos propose deux offres numériques distinctes (à 18 euros ou 26 euros par mois) dont la plus élevée permet l’accès à des avantages supplémentaires : accès à la version numérisée du journal papier, lien avec la rédaction, invitation à des conférences et des salons. Mais le mouvement se généralise et d’autres médias vont plus loin, avec des offres de plus en plus différenciées. Le Figaro a créé une offre à 20 euros Le Figaro, qui revendiquait 105 000 abonnés en ligne fin 2018, a mis en place ce type de politique tarifaire depuis l’été 2019, en l’axant sur l’enrichissement des contenus proposés et le multi-compte, à l’image des offres payantes de streaming, musical ou vidéo. Son offre commerciale numérique est ainsi passée d’un prix unique de 9,90 euros par mois à trois formules différentes : l’offre Access demeure à 9,90 euros avec accès, pour un internaute, aux contenus payants et aux six newsletters, et un affichage publicitaire limité. Une nouvelle offre Premium a été créée à 14,90 euros pour trois internautes, dans laquelle ont été ajoutés le PDF du journal et ses magazines, ainsi qu’une nouvelle application Figaro Jeux (mots croisés) – également souscriptible séparément (4,99 euros), tandis qu’une troisième offre a été créée, Premium+, à 19,90 euros, pour cinq internautes et avec les hors-séries inclus. Une politique qui a participé au développement de son portefeuille d’abonnés : Le Figaro revendique une progression de ses abonnés numériques de 40 % en un an, de 105 000 fin 2018 à environ 150 000 fin 2019 (lire notre entretien de son directeur général, Marc Feuillée). Le Monde veut récompenser la fidélité de ses abonnés Le Monde, qui dispose du socle d’abonnés numériques le plus important en France avec près de 230 000 souscripteurs fin 2019, en hausse d’environ 28 % en un an, selon son président du directoire Louis Dreyfus (notre entretien), déploiera en 2020 le même type de dispositif. Avec un déploiement accru sur la cible francophone à l’international et un enrichissement de l’offre éditoriale, une segmentation tarifaire plus fine est en effet l’un des leviers que vont activer les équipes du Monde pour atteindre l’objectif ambitieux affiché par Louis Dreyfus : atteindre le million d’abonnés purs numériques en 2025. La réflexion au sein du titre a débuté il y a plus d’un an : la direction travaille sur ce sujet avec précaution, car le tarif standard du Monde.fr, affiché à 17,90 euros, est déjà le plus élevé de la presse généraliste – avec celui des Échos – à coté d’une offre pour les étudiants à 8,5 euros par mois. “L’abonné aura accès à des contenus et services supplémentaires en fonction de l’offre tarifaire souscrite et de sa fidélité. On peut par exemple imaginer que la durée d’abonnement détermine l’accès à certains contenus et services”, nous indiquait au printemps dernier Julien Laroche-Joubert, le directeur numérique du Monde, à propos de ce projet. Comme au Figaro, le multi-compte devrait aussi être autorisé ou non en fonction de l’offre tarifaire souscrite par les abonnés du Monde. Mais l’ambition de récompenser la fidélité des abonnés revêt une complexité supplémentaire, car elle nécessite de mieux connaître – et donc mieux mesurer – les usages en ligne des abonnés. Techniquement, il faut mettre en place une gestion des connexions et des droits, ce qui nécessite de revoir profondément l’infrastructure technique à plusieurs niveaux. Comme nous l’indiquions déjà au printemps dernier, le Monde a amorcé ce projet, baptisé initialement “GBS”, en prévoyant une structure technique autour de trois listes de contrôle d’accès (ACL) principales, connectées à une gamme de systèmes de gestion APIS et single sign-on (SSO). Cette refonte technique, qui devrait se concrétiser dans les prochains mois, a déjà reçu au printemps 2019 un accord de subvention du fonds DNI de Google à hauteur de 400 000 euros. Un effet positif : la progression du panier moyen L’instauration d’offres tarifaires numériques plus fines, qui peut donc être bien plus complexe qu’il n’y paraît si elle a aussi l’ambition de personnaliser la relation avec les abonnés, est étudiée par de nombreux autres éditeurs en 2020, d’autant qu’en plus de permettre la poursuite de la croissance des abonnés, elle favorise la fidélisation des souscripteurs (lire notre doissier) ainsi que la hausse du panier moyen, autre axe de développement en cours chez les éditeurs médias. Sous l’effet des acteurs de streaming comme Netflix, Deezer et Spotify, qui ont ouvert le marché, les médias avaientd’abord fixé leur tarif mensuel à un prix agressif, autour de 8 à 10 euros par mois, et parfois moins au démarrage, entre 5 et 7 euros (Le Parisien, Le Figaro). C’était sans doute utile il y a quelques années pour habituer le lecteur à payer pour de l’information en ligne, mais pour développer des modèles économiques pérennes, les éditeurs doivent désormais travailler à l’augmentation de leurs tarifs, sans interrompre la croissance des souscriptions. Mediapart a par exemple fait passer son tarif de base de 9 à 11 euros mensuels dès 2016. Chez Libération, qui totalise environ 24 000 abonnés purs numériques fin 2019 contre 13 500 fin 2018 (+ 78 % en un an) son co-directeur général Clément Delpirou nous indiquait en décembre dernier vouloir rehausser prochainement le tarif de l’offre numérique de base, actuellement à 8 euros mensuels, pour le fixer à 9 ou 10 euros, après l’avoir étoffée de plusieurs newsletters ces deux dernières années et plus récemment de podcasts, tout en supprimant les trackers publicitaires. Le panier moyen de l’abonné en ligne des principaux éditeurs de presse en France était de 11 euros en 2018 (voir notre bilan annuel 2018). “Mais il faut aller plus loin pour conforter le modèle payant en ligne, et comme la plupart des médias nous y travaillons à La Croix”, nous indique Arnaud Broustet, directeur délégué du titre, qui est passé de 14 200 abonnés numériques en 2018 à 17 800 en 2019. L’offre numérique de La Croix est actuellement fixée à 11,90 euros par mois, tandis que l’offre numérique avec le supplément hebdomadaire du week-end est à 21 euros par mois. Sa direction réfléchit à la création d’une offre intermédiaire intégrant des services, qui serait proposée entre 12 et 15 euros par mois. Un objectif partagé par de nombreux éditeurs. Si ce chiffre devait également constituer un panier moyen effectif, il satisferait beaucoup d’éditeurs. Les chiffres 2018 mind Media publiera dans les prochaines semaines un état des lieux complet des abonnements numériques chez les éditeurs de presse français à la fin de 2019. En attendant, vous pouvez retrouver tous les chiffres de l’édition 2018 ici. Jean-Michel De Marchi Abonnements numériquesModèles économiquesTransformation des médias Besoin d’informations complémentaires ? 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