Accueil > Marques & Agences > L’évolution des résultats financiers des grands réseaux de communication mondiaux depuis 2015 L’évolution des résultats financiers des grands réseaux de communication mondiaux depuis 2015 mind Media a compilé les principaux indicateurs économiques au niveau mondial de dentsu, Havas, Interpublic, Omnicom, Publicis et WPP entre 2015 et 2020 pour analyser leur évolution et ce qu’elle dit des particularités de leur modèle économique. Par avec Paul Roy et Aymeric Marolleau. Publié le 19 novembre 2021 à 14h57 - Mis à jour le 03 janvier 2024 à 17h08 Ressources À un mois et demi de la fin de l’année 2021, le marché de la communication est dans la dernière ligne droite pour réaliser ses objectifs financiers annuels. Les six principaux groupes de communication mondiaux – dentsu (Carat, iProspect, Isobar, Merkle, dentsu X…), Havas (Havas, Havas Media, BETC, Havas AMO…), Interpublic (Mediabrands, McCann, Weber Shandwick, FCB…), Omnicom (TBWA, BBDO, OMD, PHD, Interbrand…), Publicis (Publicis, Leo Burnett, Zenith, Starcom, Epsilon…) et WPP (GroupM, Mindshare, Ogilvy, Wunderman, Y&R…) -, ambitionnent d’enregistrer 10 % de croissance organique en moyenne. “Les Big Six vont connaître une forte croissance organique en 2021, en rebond du recul enregistré en 2020, et certains pourraient même dépasser les résultats de 2019”, observe Jérôme Bodin, analyste financier chez Oddo BHF. En 2021, les Big Six pourront compter sur la reprise des investissements publicitaires des annonceurs. Les études de marché avancent des taux de croissance différents, mais toutes prédisent une croissance dynamique, supérieure à 10 % : en juin dernier, eMarketer annonçait 15 % en ayant compilé les estimations de dentsu, GroupM, Zenith (Publicis) et Magna (Interpublic) ; certaines d’entre elles ont depuis été revues à la hausse. Une augmentation supérieure à celle du PIB mondial, qui sera de l’ordre de 5,7 % en 2021 selon l’OCDE et de 5,9 % selon le FMI. La croissance organique des Big Six s’est établie à -8,6 % en 2020 sous l’effet de la crise 2021 sera donc l’année de la reprise, après que le marché de la communication ait souffert des restrictions de budgets des annonceurs en réaction à la pandémie de Covid-19, à hauteur de 4,2 % selon Magna. En comparaison, la contraction de l’économie mondiale a été évaluée à 3,4 %. En réaction, les grands groupes de communication ont tous vu leurs revenus reculer en 2020 par rapport à 2019 (-9,2 % en moyenne) : -9,3 % pour WPP, -11,4 % pour Interpublic, qui a même été légèrement dépassé par dentsu, et -11,9 % pour Omnicom, doublé par Publicis, dont les revenus n’ont baissé que de 1,9 %. WPP reste le plus grand réseau d’agences mondial, avec 13,3 milliards d’euros de revenus en 2020, devant un groupe formé de Publicis et Omnicom, à 10,7 milliards, et dentsu et Interpublic, à 7,4 milliards. Havas ferme la marche, avec 2,1 milliards d’euros. Ces baisses de revenus se sont traduites par une chute de la croissance organique, indicateur le plus représentatif de l’évolution du marché, qui s'est établie à -8,6 % en moyenne, alors qu'elle était autour de 0 % en 2019. Les groupes les plus touchés ont été dentsu et Omnicom avec -11,1 %. La croissance organique d’Interpublic a été la moins impactée, puisqu’elle ressort à -4,8 %. Thomas Jamet, PDG de Mediabrands en France, le réseau média du groupe Interpublic, explique cette performance par, notamment “le recours au chômage partiel dès le début de la crise, l’organisation flexible du travail qui réduit les coûts de loyers et de transports, ainsi qu’une gestion financière méticuleuse”. Malgré l’ampleur de la crise, les groupes de communication ont déployé des leviers pour limiter ses effets et préserver tant que possible leurs indicateurs financiers. Dès le mois d’avril 2020, WPP prévoyait ainsi un plan d’économies de 700 à 800 millions de livres sur l’année, comprenant notamment le gel des recrutements, l’arrêt du recours à des freelances et la baisse de 20 % du salaire des membres du comité exécutif et du conseil d’administration. Au sein de ce groupe, comme dans les autres, l’emploi a été une importante variable d’ajustement puisque ses effectifs, au nombre de 104 163 à la fin 2020, ont été réduits de 27,5 % (soit 28 660 personnes en moins) par rapport à 2019. dentsu a peu utilisé ce levier l’an dernier, puisque la réduction des effectifs n’a été que de 2,9 % (1867 personnes). Le groupe a cependant annoncé fin 2020 sa volonté de se séparer de 12,5 % de ses effectifs dans le monde, soit 6000 personnes au total. En moyenne - hors Havas, qui ne communique pas son nombre d’employés chaque année -, les équipes ont été diminuées de 10,6 % durant l’année de crise. Cette stratégie a permis à WPP de maintenir un taux de marge de 12,9 %, contre 14,4 % en 2019. La moyenne de taux de marge des groupes de communication - hors Havas, qui ne communique plus cet indicateur depuis son acquisition par Vivendi en 2017 - était de 12,6 % (contre 14,7 % en 2019), le plus haut étant celui de Publicis, à 16 % (contre 17,3 % en 2019). Interpublic, qui a perdu 4 points en un an sur cet indicateur, affiche seulement 7,3 % fin 2020 ; son rapport annuel mentionne une augmentation des charges de restructuration en 2020 (notamment des indemnités de fin de contrats), mais son taux de marge est historiquement plus faible que celui de ses concurrents. À noter qu’Omnicom utilise une méthode de calcul différente pour son taux de marge, basée sur le revenu net, c’est pour cette raison qu’il ne figure pas dans ces graphiques. “Leurs marges ont plutôt bien résisté pendant en 2020”, commente Jérôme Bodin (Oddo BHF), “ce qui montre la flexibilité du modèle des agences qui ont une facilité à ajuster leurs coûts assez rapidement, en agissant notamment sur la masse salariale, d’autant que le turn-over est assez élevé même hors crise”. De fait, le rapport entre la masse salariale et les effectifs de ces agences apparaît assez nettement sur le graphique ci-dessous. Omnicom a le meilleur ratio, avec 167 000 euros de chiffre d’affaires par salarié en 2020, contre 109 500 pour Havas, par exemple. En réduisant fortement ses effectifs entre 2019 et 2020, WPP est parvenu à améliorer le sien, de 111 000 euros en 2019 à 128 000 l’an dernier. Le modèle économique des groupes fait déjà face à des menaces depuis 2015 Si les taux de marge des groupes de communication sont restés positifs en 2020, ils s’érodent progressivement depuis 2015. Seul Publicis faisait légèrement mieux en 2020 que cinq ans plus tôt : 16 % contre 15,5 %. À noter que les données d’Havas ne sont plus disponibles après son acquisition par Vivendi en 2017 - son taux de marge était en 2015 et 2016 de 14,5 % - et qu’Omnicom a opté pour une autre méthode de calcul, c’est pourquoi ces deux groupes ne figurent pas dans le graphique ci-dessous. Le taux de marge moyen des quatre acteurs pris en compte est passé de 16,25 % en 2015 à 12,75 % en 2020. Le marché est en effet confronté à une difficulté à valoriser correctement son travail : “Si les marques réaffirment massivement depuis la pandémie de Covid-19 leur nécessité d’être accompagnées par des partenaires agences, tout en internalisant parfois une partie de ce métier, les groupes de communication peinent trop souvent à obtenir une juste rémunération pour cette prestation”, rappelle Raphael de Andreis, PDG d’Havas Village France et chairman des activités créatives du groupe Havas en Europe du Sud. Dans tous les pays, les agences dénoncent une tendance à une pression financière de la part des annonceurs. En France, en juillet 2019, Mercedes Erra, présidente exécutive d’Havas Worldwide et vice-présidente de la Filière communication, lançait un appel au marché à ce sujet, craignant pour la pérennité du modèle des agences. C’est d’autant plus vrai depuis la publication, en juin 2016, du rapport de l’ANA sur le système opaque de commissions prélevées par les agences médias sur l’achat média. Pour rappel, il estimait que ces montants pouvaient représenter 1,67 % à 20 % des budgets investis par les annonceurs sans que ces derniers en soient informés. Cela a eu pour conséquence de fragiliser la confiance dans les agences et de réduire leur rémunération, sous ce modèle-là du moins. D’autant plus en France, où la Loi Sapin apporte des contraintes supplémentaires. “On observe une tendance baissière de la croissance organique des groupes de communication entre 2015 et 2017 en raison de la pression des grands annonceurs qui ont coupé les commissions versées aux agences médias mais aussi sur d’autres métiers”, fait remarquer Jérôme Bodin (Oddo BHF). La croissance organique moyenne est ainsi passée de 4,7 % en 2015 à 1 % en 2017, alors que dans le même temps le chiffre d’affaires moyen demeurait stable ou en légère progression. Plus largement, la croissance organique des grands réseaux a connu un ralentissement structurel depuis 2015, au point de se transformer en décroissance pour trois d’entre eux (dentsu, WPP et Publicis) en 2019, avant même la chute de 2020 liée au contexte sanitaire. Ces difficultés s’expliquent aussi par la pression économique que font peser les compétitions d’agences, mode de sélection de leurs partenaires privilégié des annonceurs. Dans le pire des cas, les agences peuvent investir plusieurs dizaines de milliers d’euros sans garantie d’obtenir un budget, dont les honoraires couvriront à peine, ou pas, le montant déjà investi. “Certains pitchs mondiaux peuvent impliquer jusqu’à 200 personnes dans les agences, et lorsque les contrats prennent fin au bout de seulement deux ou trois ans, c’est incroyablement destructeur de valeur pour les agences”, commente Raphael de Andreis (Havas). Il évoque la conséquence directe de cette menace : “La pression des coûts sur les agences interroge la capacité des groupes de communication à continuer à mettre les moyens dans le recrutement des meilleurs talents, qui sont la valeur ajoutée des agences”. Si les effectifs des groupes de communication ont tous progressé entre 2015 et 2019, hormis au sein d’Omnicom, les agences témoignent depuis plusieurs années de leurs difficultés à attirer et recruter des profils, en particulier les plus jeunes. En cause : une perte d’attractivité du secteur, mais aussi l’évolution à la baisse des salaires qu’il propose. Le modèle de l’agence résiste cependant dans le temps Avec la fin du modèle des commissions opaques, la rémunération au temps passé des profils en agence tend cependant à se généraliser ces dernières années. Les agences françaises régulièrement interrogées par mind Media confirment toutes cette tendance. Elle est portée par la remontée des agences sur le travail de conseil stratégique, une expertise auparavant réservée aux cabinets de conseil, tout en conservant l’aspect opérationnel de leur métier. “Les agences sont en train de se transformer en structures qui mêlent des entités de consulting et des plateformes technologiques et data, tout en étant capables de mettre en oeuvre les recommandations qu’elles font”, résume Thomas Jamet (IPG Mediabrands). D’importants investissements ont en effet été réalisés ces dernières années dans des actifs technologiques et data. C’est le cas d’Interpublic, qui a intégré Axciom en 2018, ou de Publicis qui a acquis en avril 2019 Epsilon pour 4,4 milliards de dollars. Les résultats de ces deux groupes, en particulier pendant la période de crise de 2020 (une croissance organique moins affectée pour le premier, un chiffre d’affaires stable pour le second), semblent témoigner du succès de cette stratégie. Plus récemment, les groupes de communication ont lancé ou renforcé des activités connexes à leur cœur de métier. Il s’agit notamment de l’accompagnement dans les problématiques liées au e-commerce. “Ces nouvelles activités sont plus spécifiques et permettent d’avoir un dialogue plus vertueux avec les annonceurs, avec une rémunération qui comprend plus facilement une part variable liée à la performance”, détaille Raphael de Andreis (Havas). Un mouvement similaire à celui effectué par les cabinets de conseil, un temps présenté comme des concurrents menaçants des groupes de communication. La résistance de leur modèle en période de crise fait dire au PDG d’Havas Village France que “le remplacement des agences par d’autres types d’acteurs comme les cabinets de conseil ou les GAFA n’a pas eu lieu et n’aura pas lieu”. Méthodologie Ces données ont été collectées par mind Media dans les rapports financiers annuels des groupes de communication ou des entreprises dont ils font partie (Vivendi pour Havas). Le revenu correspond au chiffre d’affaires brut déclaré, converti en euros. Pour que l’évolution des taux de change ne biaise pas l’évolution des chiffres d’affaires des agences, nous les avons convertis, pour chaque année, au taux en vigueur au 31 décembre 2020. La croissance organique est calculée sur le chiffre d’affaires brut pour Havas, Omnicom et Publicis, tandis que dentsu, Interpublic et WPP la basent sur le revenu net. Le taux de marge se rapporte à la marge opérationnelle du revenu net, sauf pour Omnicom qui prend en compte le revenu total ; cet indicateur n’est plus communiqué pour Havas depuis son acquisition par Vivendi en 2017. Cette année-là, les résultats du groupe de communication ont par ailleurs été impactés par son intégration, certains indicateurs ne sont donc pas représentatifs ou manquants. avec Paul Roy et Aymeric Marolleau AgencesAgences créativesAgences digitalesCovid-19Modèles économiquesRésultats économiquesStratégies annonceursSurmonter la crise Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind essentiels Nos synthèses et chiffres sur les principales thématiques du marché Les mutations du search à l'ère de l'IA générative L'application inaboutie de la loi sur les droits voisins Google vs DOJ : tout ce qu'il faut savoir sur le procès qui pourrait redéfinir l'adtech L’essentiel sur les identifiants publicitaires La transformation du marché publicitaire en 2024 2023 : le marché publicitaire doit se préparer à la fin du tracking utilisateur Comment l’intelligence artificielle générative bouleverse les médias Les enjeux réglementaires des médias en 2023 analyses Les articles d'approfondissement réalisés par la rédaction Adtech : pourquoi la Commission européenne sanctionne Google de près de 3 milliards d’euros Retail media : une consolidation indispensable des régies pour répondre aux attentes des acheteurs publicitaires IA et monétisation des contenus : comment l’IAB Tech Lab veut contrôler les robots crawlers Droits voisins : l’Apig veut introduire une plainte contre Meta devant l'Autorité de la concurrence Paul Boulangé (Starcom France) : "Nous sommes en train de déployer Captiv8 en France, notre solution d'automatisation du marketing d'influence" Claire Léost devient DG de CMA Média, WPP Media promeut Stéphanie Robelus… Comment les SSP généralistes investissent le secteur du retail media Bénédicte Wautelet (Le Figaro) : “Toute solution qui utilise de l’IA en rapport avec nos contenus doit y être autorisée et nous rémunérer” Aides à la presse : combien les éditeurs ont-ils perçu en 2024 ? Le New York Times affiche toujours une croissance très robuste portée par le numérique data Les baromètres, panoramas et chiffres sur l'évolution du marché Le classement des éditeurs français qui ont le plus d'abonnés purs numériques Les données récoltées par les acteurs de la publicité en ligne La liste des sociétés présentes dans les fichiers ads.txt des éditeurs français Les gains de budget des agences médias Opt-out : quels éditeurs français interdisent les robots crawlers de l'IA générative ? Le panorama des sociétés spécialisées dans les technologies de l’e-retail media La liste des outils utilisés par les équipes éditoriales, marketing et techniques des éditeurs français Le détail des aides à la presse, année par année La liste des CMP choisies par les principaux médias en France Digital Ad Trust : quels sites ont été labellisés, pour quelles vagues et sur quel périmètre ?