IA générative : Aive automatise la post-production vidéo

Il aura fallu près de cinq ans à Aive pour mettre sa solution sur le marché. La start-up cofondée par Olivier Reynaud, l’un des entrepreneurs à l’origine de Teads, automatise à grande échelle la post-production et la distribution vidéo, à partir d’algorithmes d’intelligence artificielle générative. Fondée en février 2019, elle a commencé à commercialiser son produit fin 2023.  

Si l’offre d’Aive surfe sur la tendance de l’IA générative, son projet remonte à 2018, après le rachat de Teads en 2017 et le départ d’Olivier Reynaud de la société en 2018. “L’idée était d’imaginer une technologie capable d’effectuer les tâches répétitives et peu créatives des processus de création”, explique à mind Media le CEO. En 2019, il est rejoint par le chief product technical officer Rudy Lellouche, ancien conseiller et client de Teads, à son départ d’Adyoulike. 

Une première levée de fonds en pre-seed auprès de business angels, en 2019, permet alors de recruter une première dizaine d’ingénieurs, qui développent l’IA pendant quatre ans. La start-up, basée à Paris et Montpellier, lève de nouveau des fonds en 2022, et vient de compléter début 2024 un nouveau tour de table. En comptant les subventions, la dette et les fonds apportés par les business angels, Olivier Reynaud indique avoir financé la société à hauteur de plus de 8 millions d’euros. Parmi les investisseurs figurent Aurélie Jean, le family office de Groupe Duval, l’un des cofondateurs d’Eventbrite, et l’un des cofondateurs de Hugging Face. 

Une technologie basée sur un “meta-model”

La solution d’Aive, open source, permet d’automatiser la réalisation de résumés de vidéos de différentes longueurs, d’adapter leurs formats pour les distribuer sur différentes plateformes de streaming ou de réseaux sociaux, de produire des versions localisées, et de fournir une analyse créative des productions avant leur diffusion, restituée sous forme de score créatif, en référence aux exigences des différentes plateformes. Le tout dans un environnement cloud collaboratif.

“Il faut savoir que parfois, il est nécessaire de produire plusieurs centaines de versions à partir d’une création vidéo. Notre solution permet de modifier tous les paramètres, y compris l’audio. Au final, 95 % des étapes sont automatisées : les sous-titres, changer un format horizontal pour un format vertical, raccourcir la durée, adapter la bande audio, chapitrer, découper, créer des résumés de chaque partie”, détaille Olivier Reynaud, qui insiste également sur le fait de “garantir l’étanchéité de la donnée” en cours de processus. 

La technologie s’appuie sur un ensemble de “small models” (par opposition aux “large language models”, ou “LLM”, utilisés par exemple par ChatGPT). Elle s’adresse aux marques, agences, aux GAFAM et aux secteurs du divertissement et de la télévision. Permettant de faire de la recherche dans des vidéos (par exemple, on peut lui demander de sélectionner tous les plans larges où n’apparaissent aucun personnage), elle peut être utilisée pour faire du dérushage, par les monteurs qui font des bandes-annonces, ou encore à l’avenir pour la publicité contextuelle. Les premiers clients sont des grandes marques de luxe, des agences et des acteurs de l’audiovisuel, indique la société.

La combinaison de plusieurs small models fait de Aive un “meta-model”. “Nous utilisons plusieurs dizaines de modèles d’IA, un pour chaque usage. L’idée, c’est de décomposer la créativité. Pour chaque élément, on a un modèle. L’outil va produire une analyse pour chaque scène – définir par exemple qu’il s’agit d’un intérieur, plan large, avec un logo, des personnes discutent entre elles – et va automatiser les étapes de création. Recourir au meta-modeling en fait une solution atypique et unique en son genre”, déclare Olivier Reynaud. Pour le client, l’outil se présente comme une web app, et dispose de connecteurs pour exporter les résultats sur Premiere Pro. Commercialement, il s’agit d’un modèle SaaS. Le CEO ne communique pas le ticket d’entrée, mais revendique un gain de productivité : “Cela revient 10 à 30 fois moins cher que si c’était fait à la main”.  

La génération de vidéos originales n’est pas encore au point 

Décidément avare de chiffres, Aive assure que sa solution bénéficie d’un “démarrage très prometteur”. Elle a recruté un directeur commercial, et compte doubler ses effectifs (de 22 collaborateurs actuellement) en 2024 en recrutant des profils tech et commerciaux. “Notre marché adressable est énorme, car nous nous adressons à tous les secteurs, comme Adobe par exemple. Même aux non-créatifs. Le marché des professionnels qui utilisent la vidéo sans être des pros de la vidéo, c’est 500 millions de personnes dans le monde. Nous réfléchissons donc à créer une offre pour ces publics-là. Mais pour l’instant, notre offre s’adresse uniquement aux grandes entreprises”, commente Olivier Reynaud. 

L’étape ultérieure pourrait être de proposer la création de la matière première elle-même. “Créer de la vidéo, c’est ce sur quoi on communique depuis l’origine du projet. A l’avenir, on aura la capacité de générer des séquences. Mais le niveau actuel n’est pas encore celui attendu par les agences. Cela demande énormément de travail et de recherche pour avoir quelque chose de qualitatif”, concède le dirigeant. Le secteur est bouillonnant. Fin novembre 2023, Pika, une start-up créée par deux doctorants de Stanford permettant d’éditer et de générer des vidéos dans des styles dessin animé ou animation 3D, a levé 55 millions de dollars.