Accueil > Médias & Audiovisuel > Bataille des magazines TV : pourquoi RL Mags a fait interdire le dernier magazine de Prisma Media Bataille des magazines TV : pourquoi RL Mags a fait interdire le dernier magazine de Prisma Media Frédéric Truskolaski, éditeur controversé de plusieurs publications TV et people, a fait condamner lundi 28 avril Prisma Media pour concurrence déloyale. Le groupe présidé par Claire Léost va devoir stopper rapidement la publication de son nouveau magazine, Programmes Télé 15 Jours, qui avait été lancé en novembre au sein d’un marché très concurrentiel. Par Jean-Michel De Marchi. Publié le 02 mai 2025 à 12h20 - Mis à jour le 02 mai 2025 à 12h27 Ressources “C’est une décision qui nous paraît incompréhensible”, a réagi la direction de Prisma Media, interrogée par mind Media lundi 28 avril. Le groupe média, détenu par Louis Hachette Group (Vivendi), a en effet perdu l’une de ses procédures judiciaires face à RL Mags et doit mettre un terme à la parution de son quinzomadaire Programme Télé 15 jours, pour lequel il revendique 60 000 lecteurs. RL Mags, détenu et dirigé par Frédéric Truskolaski, édite plusieurs magazines TV et people (Oops, Closer, Public, France Dimanche, Gossip, Vécu, Histoires Vraies, 20 ans, Télé 15 Jours, Télé Programmes 2 Semaines…). Certains ressemblent beaucoup à ceux déjà lancés par des groupes médias historiques (Reworld Media, Prisma Media, CMI France, autrefois Mondadori…), ce qui lui vaut de nombreux procès. Il a en tout cas obtenu gain de cause dans celui intenté par le groupe en décembre contre Prisma Media devant le Tribunal des activités économiques de Paris, selon un jugement consulté lundi 28 avril par mind media et par Challenges. “Mais il faut rappeler que Prisma Media a obtenu en décembre dernier la condamnation de deux sociétés éditrices appartenant à Frédéric Truskolaski, Journaux magazines et luxury mobility, pour concurrence déloyale et contrefaçon de marque, nous a déclaré Prisma Media. Nous allons priver 60 000 lecteurs d’un magazine qui a trouvé sa place sur le marché des quinzomadaires, avec une qualité éditoriale issue d’une équipe de 100 journalistes dédiés aux offres TV. Nous étudions maintenant toutes les voies de recours pour obtenir une révision de ce jugement.” Bruno Van Boucq (Proxistore) : “Le comportement de Google sur le marché publicitaire est profondément anticoncurrentiel, injuste et immoral” Duel judiciaire acharné Les contentieux entre RL Mags et Prisma Media sont en effet récurrents ces dernières années, comme le rappelait Off Investigation en décembre. Et parfois RL Mags les remporte, comme ce 28 avril. Au cœur de ce nouveau litige : la mise sur le marché par Prisma Media, depuis le 30 novembre 2024, du quinzomadaire Programmes Télé 15 Jours, que RL Mags considère comme une imitation frauduleuse de son titre Télé 15 Jours, qu’il édite depuis avril 2019, créant un risque de confusion significatif avec son propre magazine, synonyme de concurrence déloyale et d’actes de parasitisme. Lors des débats du 31 janvier et du 4 avril, RL Mags, représenté par l’avocate Mélissa Savoy-Nguyen (Pudlowski & Savoy Avocats), a mis en avant de nombreuses similitudes entre les deux magazines TV. Le groupe réclamait notamment 100 000 euros de dommages et intérêts, l’interdiction sous astreinte de la commercialisation du magazine de son concurrent et le rappel et la destruction des exemplaires en circulation. Programmes Télé 15 Jours visait les plus de 50 ans En lançant son nouveau magazine en novembre 2024, Prisma Media complétait son offre éditoriale dédiée à télévision, déjà fournie avec Télé Loisirs, Télé 2 Semaines, TV Grandes Chaînes et Télé Z. Ils s’adressent théoriquement à des segments de lecteurs différents. Prisma Media avait présenté Programmes Télé 15 Jours comme “un quinzomadaire spécialement conçu pour répondre aux besoins et aux attentes des plus de 50 ans.” Le groupe insistait sur son prix, 0,75 euro par semaine, “le moins cher du marché des magazines télé”, et son “confort de lecture” avec un format plus grand et un papier de qualité supérieure. Les grilles de programmes TV détaillaient 77 chaînes au total, avec 10 pages de contenus pour chaque jour de la semaine, et un cahier de neuf pages de jeux. De son côté, par la voix de son avocat Patrick Sergeant (cabinet Patrick Sergeant), Prisma Media a insisté sur les différences entre les deux magazines (nombre de pages de programmes par jour, séquencement, couleur des bandeaux…) et contesté l’originalité de Télé 15 Jours, estimant que les grilles suivaient des modèles très courants dans le secteur, et que le logo s’inspirait de titres préexistants. Prisma Media a également souligné que les deux magazines ne paraissaient pas la même semaine, éliminant ainsi tout risque de confusion dans le lectorat. La baisse des ventes de Télé 15 Jours mise en avant par RL Mags depuis le lancement de celui de Prisma ? Le groupe l’attribue à sa périodicité et à la tendance générale du marché, et non à la sortie de son nouveau magazine. Imiter, mais pas trop Le groupe présidé par Claire Léost a présenté les demandes de RL Mags comme abusives, insistant sur le comportement agressif du groupe de Frédéric Truskolaski depuis plusieurs années, avec notamment le lancement de nouveaux quinzomadaires reprenant l’identité visuelle de magazines de Prisma Media existant depuis 20 ans. Le Tribunal a tranché en faveur de RL Mags, retenant la plupart de ses arguments. Concernant la couverture, il a estimé que le titre est en réalité le même (Télé 15 Jours), le mot “Programmes” étant écrit plus petit et dans une police différente, le prix, la police du mot “Télé”, la taille et l’emplacement de “15 jours”, les bandeaux d’accroche, la présentation des dates, la structure des accroches et de la photo de couverture, les surtitres, le sous-titre, la photo de une, le titre principal, et le bandeau inférieur, ainsi que l’identité du format et la similarité de la qualité du papier étant aussi trop similaires. L’intérieur des magazines, et certains choix de rubriquage, ont également été jugés similaires. Le tribunal a aussi retenu le délit de parasitisme (se placer dans le sillage d’un concurrent en tirant indûment profit de ses investissements et/ou de sa notoriété), car Prisma Media a repris le même positionnement marketing axé sur une meilleure lisibilité de son magazine pour les lecteurs. Comment les éditeurs d’information veulent mieux monétiser leurs communautés sociales Trop de similitudes S’il est admis qu’une entreprise puisse s’inspirer d’un concurrent, la décision du tribunal indique que Prisma Media est allé trop loin en reprenant trop d’éléments significatifs du magazine de RL Mags, pouvant raisonnablement engendrer une confusion dans l’esprit d’un consommateur moyen, quelles que soient ses motivations et les pratiques par ailleurs de son concurrent. Le tribunal n’a cependant pas suivi totalement le groupe de Frédéric Truskolaski dans ses demandes. Il a certes prononcé l’interdiction de la commercialisation de son magazine Programmes Télé 15 Jours – un coup dur -, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée (dans la limite de 100 000 euros) à compter du 21e jour suivant la signification du jugement, soit à partir du 19 mai, ainsi que le retrait des exemplaires litigieux et des supports publicitaires, papier et numériques, sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard (dans la limite de 100 000 euros), là aussi à compter du 21e jour suivant la signification. Mais Prisma Media n’est condamné qu’à 50 000 euros de dommages et intérêts. Un marché très fourni C’est le dernier des nombreux contentieux ces 15 dernières années entre Frédéric Truskolaski et d’autres groupes de presse magazine français, pour contrefaçon ou concurrence déloyale et parasitisme. Avec une dizaine de condamnations à la clé. L’Informé les détaillait début 2024. RL Mags est régulièrement pointé du doigt par ses concurrents et par des articles de presse en raison de ses productions low cost et ses unes de magazine qui peuvent semer la confusion chez les lecteurs. Cette concurrence exacerbée tient également à la forte demande du public : les magazines TV représentaient 207 millions d’exemplaires vendus en 2024, soit 42 % de la diffusion totale de la presse magazine, devant les magazines d’actualités (24 %), les magazines féminins (21 %) et les magazines de loisirs (7 %), selon le dernier Observatoire de la presse, publié par l’ACPM en avril 2025. Plus d’une quinzaine d’offres éditoriales TV différentes s’affrontent. Télé 7 Jours (CMI France) est le premier magazine en diffusion (environ 691 000 exemplaires France payés par numéro en mars 2025), devant Télé Z (Prisma Media) avec 580 000 exemplaires, TV Grandes Chaînes (Prisma Media) avec 489 000 exemplaires, Télé Star (Reworld Media) avec 487 000 exemplaires, ou encore Télé 2 Semaines (461 000). S’ajoutent à ces magazines les offres TV de quotidiens comme celui de la PQR, avec Diverto (3 millions d’exemplaires par numéro) et celui du Figaro (527 000 exemplaires). La diffusion France payée des magazines TV – qui est très peu numérisée – était en baisse de 4,8 % en 2024 (ACPM). 50 % des ventes proviennent des abonnements, 37 % des ventes en kiosque, et 7 % de ventes numériques par tiers. Sur le numérique, Télé Loisirs arrive très largement en tête (133 millions de visites en mars 2025, ACPM), devant Télé 7 Jours (17 millions), Télé 2 Semaines (12 millions) et Diverto (2,5 millions). Jean-Michel De Marchi ConcurrenceJuridiquePresse magazineSites d'actualité Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Dossiers Comment les éditeurs d'information veulent mieux monétiser leurs communautés sociales Bruno Van Boucq (Proxistore) : “Le comportement de Google sur le marché publicitaire est profondément anticoncurrentiel, injuste et immoral” Confidentiels INFO MIND MEDIA - Les fondateurs de Toutabo en justice face à leur acquéreur Readly Analyses Confidentiels ENQUÊTE - Plusieurs médias français et européens préparent une class action contre Google aux Pays-Bas 11 000 abonnés en ligne pour l’édition du Monde en anglais Analyses Quelle est la stratégie des éditeurs vis-à-vis des robots crawlers ? Dossiers Etude mind Media - 366 (5/5) : comment convaincre les lecteurs de s’abonner aux médias ? 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