Accueil > Adtechs & Martechs > Publicité programmatique : comment les éditeurs profitent de la demande pour la vidéo instream Publicité programmatique : comment les éditeurs profitent de la demande pour la vidéo instream Avec des investissements dans la vidéo instream qui ont progressé de 8 % en 2024, de nombreux éditeurs font de ce levier leur axe de développement prioritaire. Le format reste toutefois minoritaire et coûteux en termes de production. mind Media a interrogé des régies, agences et acteurs de l'adtech pour mieux comprendre les stratégies des éditeurs et les limites de ce format. Par Chiara De Martino. Publié le 21 février 2025 à 10h19 - Mis à jour le 03 mars 2025 à 12h39 Ressources D’après le baromètre du programmatique d’Alliance Digitale, la vidéo instream* (hors SVOD, AVOD et BVOD) a progressé de 8 % en 2024, et la vidéo outstream de 24 %. Les CPM en vidéo instream,se sont redressés (- 0,4 %), après une année 2023 difficile (- 7 %). Face à la perte de valeur des CPM dans le display (- 9,39 %), les éditeurs traditionnels semblent se tourner davantage vers la vidéo, dont les inventaires s’élargissent, s’ouvrant à l’open auction (+ 6,6 %). S’agit-il toutefois d’une véritable stratégie de long terme à poursuivre pour marques, agences et éditeurs, ou simplement d’un palliatif de courte durée dans un marché programmatique en souffrance ? D’après Arthur Millet, directeur général d’Alliance Digitale, la bonne réponse est plutôt la deuxième. Pour lui, la vidéo peut avoir “un petit effet booster”, mais cela “ne va pas inverser la donne dans l’entièreté du marché programmatique”. Au global, la demande pour le format vidéo n’est pas encore assez importante, et même si les budgets à forte valeur ajoutée se tournent vers l’image et la vidéo, au détriment de la bannière, cela “ne représente pas une stratégie de développement en soi, mais plutôt une compensation”. Bilan du marché programmatique en 2024 : 4 tendances à suivre – mind Media Vers une stratégie du volume même dans la vidéo ? De nombreux éditeurs concentrent cependant leurs efforts dans l’élargissement de leurs inventaires vidéo – en réfléchissant déjà à une logique de volume et performance -, pour faire de la vidéo leur axe de développement prioritaire. Selon Paul Ripart, directeur commercial programmatique et data chez Prisma Media Solutions, “le retour de l’open auction indique avant tout un besoin de performance” chez les annonceurs. Une tendance qu’on observe, par exemple, dans la progression de solutions publicitaires comme Performance Max de Google, outil tout-en-un permettant de diffuser les annonces sur tous les canaux disponibles de manière simultanée et optimisée, très apprécié par les marques et agences. La progression de l’open auction s’explique également par le fait “qu’il y a plus de vidéos sur le marché”, sans oublier un contexte social et politique, en 2024, qui a augmenté le trafic chez les éditeurs, avec les élections européennes, la dissolution du gouvernement et les nouvelles législatives, ainsi qu’une année riche en évènements sportifs avec les Jeux olympiques et l’Euro. De premiers effets visibles de Performance Max sur le marché programmatique ? “En tant que régie, on vend notre stock de campagnes, et une fois que celui-ci est vendu, le surplus passe en open auction”, détaille Paul Ripart. Ainsi, “comme l’année dernière le stock d’inventaires vidéos était très important, il y a parfois eu des CPM qui n’étaient pas toujours les plus élevés”. Cependant, pour le directeur commercial programmatique et data chez Prisma Media, la vidéo reste un format très rentable : même si ses CPM “se sont un peu tassés, ils restent largement plus élevés que dans le display”. Au contraire, pour Thibaud Chevalier, directeur du digital de la régie 366, la montée de l’open auction n’est pas synonyme d’une perte de valeur du format vidéo, mais plutôt “d’une logique de simplification” et “d’un travail fait par les éditeurs pour une meilleure catégorisation des inventaires, qui sont donc mieux achetés”, sans que cela amène forcément à moins de qualité. Aujourd’hui, “les éditeurs ont fait un travail important sur la qualité d’implémentation des players”, ce qui permet, avec l’open auction, de rémunérer assez mécaniquement les emplacements qui ont des bonnes performances, conclut-il. Chez Havas Media Network, Nicolas Russotto, head of programmatic, souligne la capacité de diffusion très large de l’open auction, permettant de toucher “à la fois de grands carrefours d’audience et des sites plus niche”. Il met également en avant “ses capacités data beaucoup plus larges par rapport à un deal”. À travers l’open auction, on peut, par exemple, ajouter des données first-party. Toutefois, il reconnaît que chez Havas, “une bonne partie des ventes des inventaires vidéo se font encore en deal”, sous ses trois formes : programmatique guaranti, preferred ou private auction deal. La vidéo, un format plus rentable mais lourd à produire Arthur Millet (Alliance Digitale) assure que, malgré une perte de la valeur des CPM dans la vidéo en raison d’une stratégie davantage axée sur le volume, ce format reste largement plus rentable que le display. En 2024, le CPM moyen de la bannière s’élevait à 0,74 euro, contre 7,53 euros dans la vidéo. “Même si vous perdez de la valeur en mettant de l’inventaire vidéo en open auction, à impressions égales, la vidéo reste très rentable comparée à la bannière. Le CPM de la vidéo représente en moyenne sept fois celui de la bannière”, analyse-t-il. Cependant, le directeur général d’Alliance Digitale alerte sur les risques d’une stratégie trop axée sur la vidéo, qui amène les éditeurs à être “souvent dépendants de solutions technologiques intermédiaires”, qui leur prennent de la valeur. Face à ce constat, nombreux sont les éditeurs qui se mettent au développement de technologies propriétaires. C’est le cas de 366, dont les actionnaires Sipa Ouest-France et Rossel ont racheté Digiteka, régie et fournisseur de solutions vidéo, pour la commercialisation du format vidéo instream, afin “de maîtriser la technologie vidéo in-house”, argumente le directeur du digital de 366 Thibaud Chevalier. Quand “on décide d’internaliser la technologie, cela veut dire qu’elle devient un enjeu stratégique”, assure-t-il. En soulignant que la vidéo prend une place “de plus en plus importante, d’année en année, dans notre mix” Pourquoi Rossel et le Groupe Sipa Ouest-France rachètent Digiteka – mind Media Pour Prisma Media aussi, la vidéo est reine, avec des investissements “réalisés depuis une dizaine d’années pour la création de nos propres studios”, affirme Paul Ripart. Aujourd’hui, la régie publicitaire dispose de six studios de production, car “pour avoir de la vidéo il faut, avant tout, en produire” et disposer des moyens techniques nécessaires. L’impact de la nouvelle norme OpenRTB 2.6 sur les éditeurs En ce qui concerne la baisse des investissements publicitaires, y compris pour le format vidéo, observée sur la deuxième partie de l’année, pour Paul Ripart (Prisma Media) un point à ne pas négliger est “le déploiement d’une nouvelle norme dans la vidéo de la part de l’IAB, à partir du deuxième semestre de l’année dernière”. Cette nouvelle norme “a catégorisé une partie de la vidéo instream comme display, en tant qu’accompanying content”, format où la vidéo accompagne un contenu écrit. Il s’agit de la spécification OpenRTB 2.6, développée par l’IAB Tech Lab avec l’objectif de proposer de nouvelles spécifications pour les enchères CTV et pour “permettre aux éditeurs de présenter leur inventaire avec plus de précision”, explique l’organisation interprofessionnelle. Pour de nombreux éditeurs français, cette mise à jour a signifié la perte d’une partie importante de leurs inventaires vidéo. Désormais, lorsqu’on achète de la vidéo via une transaction programmatique, “le choix pour un acheteur n’est plus simplement entre vidéo instream et oustream”, explique Paul Ripart, puisqu’à ces deux formats s’ajoute l’accompanying content. Dans ce contexte, les éditeurs ont vu leurs CPM baisser lorsque leurs vidéos étaient placées en accompanying content (format display), “avec le déclassement d’une partie de leurs inventaires”, conclut-il. Anthony Katsur (IAB Tech Lab) : “Si vous pensiez que mesurer était difficile ces vingt dernières années, vous n’avez encore rien vu” – mind Media Ce changement, au cours de l’année dernière, dans le classement des formats vidéo est reconnu, côté SSP, par Augustin Decré, managing director SEMEA chez Index Exchange, société membre de l’IAB Tech Lab et qui a co-écrit cette nouvelle norme. “Une grande partie de ce qu’on qualifiait de vidéo instream est passée en oustream”, constate-t-il. A son avis, on devrait probablement observer “la mise en place progressive d’une offre oustream premium”, qui permettra de rééquilibrer le marché, avec des CPM un peu plus élevés, puisque “l’attention publicitaire reste plutôt haute par rapport au display classique”. La vidéo verticale à l’horizon Si les éditeurs veulent continuer à investir dans l’élargissement de leurs inventaires vidéo, un axe de développement qui suscite beaucoup d’intérêt est celui de la vidéo verticale, à l’image des formats proposés par les réseaux sociaux. “Digiteka a développé un produit d’expérience vidéo verticale, qui est aujourd’hui implémenté sur beaucoup de nos marques” – notamment celles du groupe Rossel, Ouest-France, 20 Minutes et Diverto -, explique Thibaud Chevalier (366). L’objectif à long terme est “de généraliser l’implémentation de la vidéo verticale sur l’ensemble des marques”. “On voit un intérêt de la part des internautes, avec des bons temps de consommation des vidéos”, analyse-t-il. La régie est encore “dans une phase de développement des usages et des audiences”, avec le lancement de ce nouveau format ayant eu lieu entre juin et juillet 2024, et la monétisation publicitaire est en train d’être mise en place. Pour l’instant, 366 a vendu uniquement des campagnes test. IA générative : Aive automatise la post-production vidéo – mind Media Cette volonté d’aller vers la vidéo verticale est également confirmée par Prisma Media, “avec un travail, assez récent, sur les productions spécifiques au social”, explique Paul Ripart. En complément des contenus réalisés pour les réseaux sociaux, la régie veut “réimporter cette production également sur nos sites”, qui sont consommés à 90 % sur mobile. Prisma Media a démarré cette nouvelle stratégie depuis environ six mois. Autre défi pour le directeur commercial programmatique et data de Prisma Media, “l’arrivée des éditeurs sur l’écran télé, où les places sont assez chères”, en raison d’une forte demande de la part des annonceurs. En 2025, “on va assister à la course à la CTV”, avec des régies, comme Prisma Media, “qui devront relever le défi de sortir des écrans du téléphone et de l’ordinateur pour s’incruster dans l’écran télé”. *Le baromètre prend en compte les vidéos diffusées par 80 régies et 1 500 sites, walled gardens (Youtube, Meta, Amazon…) et régies des chaînes TV exclus. Chiara De Martino AdtechAgencesDisplayMobilePublicité programmatiqueVidéo programmatique Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire L’IAB Tech Lab invite l’industrie de l’adtech à plus de surveillance sur la supply chain La Commission Sustainability d’Alliance Digitale veut se pencher sur la réduction des chemins programmatiques Adtech : une nouvelle affaire de publicités diffusées dans un environnement inapproprié Médias, publicité, culture : moins de levées de fonds en 2024, plus de consolidation Amazon : les recettes publicitaires en hausse de 20 % en 2024 Analyses Etudes Observatoire de l'e-Pub : la toute-puissance de la vidéo, en 2024, accule encore un peu plus les médias essentiels Nos synthèses et chiffres sur les principales thématiques du marché Les mutations du search à l'ère de l'IA générative L'application inaboutie de la loi sur les droits voisins Google vs DOJ : tout ce qu'il faut savoir sur le procès qui pourrait redéfinir l'adtech L’essentiel sur les identifiants publicitaires La transformation du marché publicitaire en 2024 2023 : le marché publicitaire doit se préparer à la fin du tracking utilisateur Comment l’intelligence artificielle générative bouleverse les médias Les enjeux réglementaires des médias en 2023 analyses Les articles d'approfondissement réalisés par la rédaction Heikel Manai (France Télévisions) : “En matière d’IT, un dogmatisme 100% européen serait contre-productif” INFO MIND MEDIA - L’Équipe gagne son match judiciaire contre Fedcom Media CGV 2026 des régies TV : un pas supplémentaire vers la simplification du trading Mara Negri (EBX) : “Notre objectif est de proposer des inventaires BVOD et CTV dans l’ensemble des pays européens" INFO MIND MEDIA - L’alliance adtech des médias français Mediasquare peine elle aussi à faire condamner Google en justice IA générative : panorama des solutions techniques de protection et de monétisation des contenus Fermeture de Xandr DSP : qui va gagner la bataille des budgets ? 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