Comment MG Motor a augmenté l’engagement de ses campagnes à budget constant via l’IA avec Darbyon

Le contexte

MG Motor, l’une des marques de SAIC Motor, septième groupe automobile mondial, a vu sa situation commerciale se tendre fin 2024, consécutivement à la baisse du bonus écologique pour l’achat d’un véhicule neuf, et à la hausse des droits de douane sur les véhicules électriques chinois vendus dans l’Union européenne. La marque d’origine britannique, qui a fait faillite en 2005 avant d’être rachetée par le consortium chinois, distribue depuis 2020 en Europe une gamme essentiellement composée de modèles électriques, avec un positionnement axé sur le rapport qualité-prix. 

De 34 000 voitures vendues en 2023 en France, soit environ 2 % de part de marché, MG Motor est passé à 25 000 modèles écoulés en 2024 (1,45 % de part de marché), sortant du top 20 des vendeurs de véhicules électriques. Le constructeur a dû réinventer sa gamme en lançant deux modèles hybrides, la citadine MG3 Hybrid+ en juin, et le SUV MG ZS Hybrid+ en octobre. 

Contrairement à nombre de ses concurrents qui participent à faire vivre le marché publicitaire, le constructeur n’investit que très peu en achat média. “Comparé à Dacia par exemple, nous dépensons beaucoup moins sur le marketing et la communication. En moyenne, le secteur est sur un rapport budget marketing / nombre de voitures vendues de 1 200 euros. Nous sommes en dessous de 300 euros, confie à mind Media Pierre-Edouard Sabary, directeur du digital chez MG Motor. Nous avons très peu de budget, donc nous l’investissons dans la performance.” 

La marque investit une grosse partie de son budget sur les réseaux sociaux. Mais elle fait face à la “fatigue publicitaire” des internautes sur ces canaux. “Nous traçons tous les leads et nous comparons les conversions par source. Nous constatons que si on utilise la même créa trop longtemps, cela ne fonctionne pas. Elles s’épuisent au bout d’un mois, un mois et demi”. Pour les renouveler, elle faisait face à ses contraintes budgétaires. “Le groupe ne nous fournit quasiment aucun visuel, ou toujours sous le même angle. La maison mère est intraitable sur le moindre euro dépensé. Parfois, nous n’avons pas l’argent pour faire un shooting. En revanche, elle est très ouverte à l’innovation et au test and learn”. C’est pourquoi Pierre-Edouard Sabary a décidé de recourir à l’IA pour générer des visuels, en travaillant avec Darbyon, une agence de communication française créée en 2022, qui emploie une vingtaine de collaborateurs et propose des solutions d’IA sur mesure pour la création de contenu. 

Les objectifs

L’objectif de MG Motor était de réduire ses coûts de création publicitaire afin de pouvoir alimenter ses campagnes avec davantage de créations. Des campagnes fils rouges, qui se déploient toute l’année, sur tous les modèles. L’objectif de ces campagnes étant de générer du trafic et des leads. 

“Notre approche est d’utiliser l’IA dans une logique de performance, explique Joseph Repain, directeur de la création GenAI chez Darbyon, à mind Media. Un shooting, c’est minimum 200 000 à 500 000 euros, et cela peut aller jusqu’à 5 millions dans un secteur comme l’automobile. Pour MG Motor, l’idée était de compenser le peu de budget par une très forte agilité.” 

La technologie de Darbyon, développée avec une start-up française, est un modèle d’IA en LoRA (pour “low-rank adaptation”, principe consistant à adapter un grand modèle d’IA pour un usage spécifique sans redémarrer l’entraînement à zéro), permettant d’utiliser la puissance d’une l’IA open source, entraînée sur les assets de la marque, pour un usage en publicité display et social media. Cette technologie permet de générer des images des modèles de voiture sous tous les angles, ce que ne pourrait pas faire un modèle standard. “Si on utilise un modèle standard, il va altérer l’image en mixant celle du véhicule avec tous les modèles de voiture sur lesquels il a été entraîné”, explique le directeur de création. 

L’agence a recours à plusieurs modèles open source et propriétaires, dont Midjourney. “Grâce au LoRA combiné au machine learning, le système peut être entraîné avec les images qu’il a lui-même générées, précise Joseph Repain. Et ensuite, on peut vraiment travailler la direction artistique.”

Darbyon applique sa technologie aux secteurs de l’automobile, du luxe, et des vins et spiritueux. L’agence, qui opère également dans les domaines de l’achat média, des relations presse et de la performance digitale, revendique une quinzaine de clients, avec lesquels elle noue généralement des contrats de deux ou trois ans. 

Le dispositif

Pour MG Motor, Darbyon a développé un outil de “prompt to image” entraîné à partir d’une trentaine de photos prises sous plusieurs angles, en décrivant au modèle d’IA à quoi correspondent toutes les parties du véhicule. “Il peut même le reproduire sous des angles qui n’existent pas. A cette échelle, dans la création de contenu pour l’automobile, c’est unique en France”, affirme Joseph Repain. 

Le constructeur automobile change désormais chaque mois ses créations sur les réseaux sociaux. “L’IA a changé la donne en apportant des angles de vue que nous n’avions pas. On ne sait pas à l’avance quelle créa va faire mouche auprès d’une audience, mais l’algorithme de Meta choisit celles qui performent le mieux”, détaille Pierre-Edouard Sabary. Les créations générées par l’IA de Darbyon sont diffusées également en publicité display, sur Google Display Network, et avec Criteo en retargeting. Ce n’est pas Darbyon qui gère l’achat média, mais l’agence média de MG Motor, Haiku. Celle-ci pilote également la personnalisation des bannières diffusées en display programmatique, via le système de DCO (dynamic creative optimization) d’Adventori. 

Les résultats

“Le nombre de créations a été multiplié par 15 pour un coût similaire”, se félicite Pierre-Edouard Sabary, de MG Motor. “Nous pouvons proposer beaucoup plus de contenu pour s’adapter à toutes les typologies d’audience, avec une qualité comparable à des shootings”, ajoute-t-il, les créations étant par ailleurs renouvelées cinq fois plus vite.

Toutes les semaines, la marque fait un point avec son agence sur les CPL, les CPC et les CPV. Mais début avril, il était encore un peu tôt pour mesurer le lift. “D’autant que nous n’avons pas vraiment fait d’A/B test, et tout basculé du jour au lendemain. Nous avons aussi changé les messages, cela fait beaucoup d’éléments qui entrent en jeu”, justifie le directeur du digital, qui se félicite par ailleurs que MG Motor entre dans le top 10 des véhicules hybrides, et occupe désormais la septième position sur le marché de la vente de véhicules aux particuliers en France, toutes motorisations confondues, avec une part de marché de 2,67 %. 

Et après ?

La prochaine étape du partenariat entre Darbyon et MG Motor porte sur la publicité vidéo. “Pour la CTV, nous pourrons travailler sur la création de campagnes complètes ou retravailler des assets existants. Jusqu’à présent, nous n’avons pas encore fait d’IA générative en création TV, mais nous travaillons dessus, et devrions être prêts à la fin du troisième trimestre”, indique Joseph Repain (Darbyon). “Les premiers tests sont très positifs, les vidéos performent très bien, ajoute Pierre-Edouard Sabary (MG Motor). Nous les utiliserons pour les réseaux sociaux ou en BVOD.” 

“On travaille avec des motion designers et des logiciels d’effets spéciaux pour créer notre recette. L’IA permet de supprimer 70 à 80 % du process de création, mais il faut savoir quel outil utiliser, et à quel moment. On travaille la direction artistique également, avec d’autres images d’input. Ensuite on va prompter, puis upscaler (inventer des pixels qui n’existent pas, en gros), et retoucher”, détaille Joseph Repain. Plusieurs solutions sont mises à contribution, parmi lesquelles celles de Runway, Kling, Topaz et Adobe. “Aucune solution IA sur étagère ne peut reproduire fidèlement un produit aussi complexe qu’une voiture. Le futur de l’IA, en marketing, c’est le sur-mesure. Moi, j’intègre les meilleurs ingrédients, quels qu’ils soient. Et je peux en changer très facilement, ce qui raccourcit les cycles d’innovation. C’est l’un des avantages d’être indépendant”, conclut-il.