Accueil > Marques & Agences > Stéphane Guerry (Havas Play) : “Certains mondes virtuels ont déjà des capacités de ciblage et d’activation marketing” Stéphane Guerry (Havas Play) : “Certains mondes virtuels ont déjà des capacités de ciblage et d’activation marketing” Stéphane Guerry est président et CEO de l’agence Havas Play, lancée au sein d'Havas en mai 2022 et spécialisée dans le gaming, le divertissement, le web3 et le métaverse. L'agence est l'une des premières à proposer une offre dédiée, “Metaverse by Havas”. Pour mind Media, il dresse un premier bilan des expériences et dispositifs mis en place. Sans nier les difficultés d'un secteur fragilisé par une surmédiatisation initiale, les difficultés de Meta, les déboires des cryptomonnaies et la chute de FTX, il livre son regard sur les opportunités que représentent ces nouveaux espaces pour les marques et les bonnes pratiques marketing à déployer. Par Charlène Salomé. Publié le 12 janvier 2023 à 11h42 - Mis à jour le 13 janvier 2023 à 17h42 Ressources Vous avez lancé une offre dédiée au métaverse fin 2021, mais le concept est encore assez flou. Quelle définition en avez-vous ? Chez Havas, nous définissons les metaverses comme des mondes virtuels persistants et rémanents qui, même lorsqu’on n’y est pas connectés, continuent d’évoluer. Notre présence, sous la forme d’un avatar, ne cesse de développer sa réputation, ses points et sa force. A partir de cette définition, nous considérions au sein d’Havas que nous avions déjà investi le métavers, avant même que le nom ne se répande dans les médias. Tout ce que nous avons développé dans les jeux vidéo ces dernières années, par exemple, consiste à imaginer et designer la présence des marques dans ce type de monde virtuel. Le lancement de l’offre Metaverse by Havas fin 2021 était un moyen pour signifier aux marques notre présence dans ces univers et notre volonté de les accompagner, avec le bon rythme et la bonne solution, afin de détecter les opportunités naissantes dans ces nouveaux métaverses. La plupart de ces univers ne sont pas encore prêts, notamment ceux qui reposent sur une cryptomonnaie ou la blockchain, que nous appelons cryptoverses. Se distinguent en revanche de plus en plus des métaverses de jeux vidéo et des cryptoverses qui prennent la forme de plateformes ouvertes dans lesquelles l’utilisateur peut céder la propriété de ses éléments de jeu et terrains sous forme de blockchain. Pour certains acteurs et observateurs, la déception a été grande car ils s’attendaient à ce que ces mondes soient déjà prêts et grands. Or, même le groupe Meta a annoncé qu’il commençait à peine à investir en R&D dans ce domaine pour atteindre un milliard d’utilisateurs d’ici dix ans. Il y a pourtant déjà certains mondes virtuels qui ont des capacités de ciblage et d’activation marketing qui sont bien acceptés par les communautés qui y sont déjà présentes. Stéphane Guerry 2022 Président, Havas Play2016 Président, Havas Sports et Entertainment2014 PDG, Arena Media (Havas Media) 2012 Directeur général, Saatchi & Saatchi2011 CEO, Razorfish2010 Directeur général adjoint, Euro RSCG C&O A quels besoins chez les marques répond votre offre Metaverse by Havas ? Nous sommes persuadés que des communautés vont utiliser des mondes virtuels pour se rassembler, quelle que soit l’ambition ou le centre d’intérêt commun. Il ne s’agit pas de savoir si c’est une bonne ou une mauvaise chose, mais plutôt d’être conscient que les métaverses vont prendre de la place dans les modes de consommation média de demain. Notre rôle en tant qu’agence est d’aider les marques, avec le bon timing, à comprendre ce qu’elles peuvent et doivent y faire. Certaines préféreront attendre que ces mondes soient mûrs, d’autres veulent les explorer dès maintenant. L’offre Métaverse By Havas consiste à identifier les opportunités d’aujourd’hui et celles de demain. Nous proposons principalement des solutions de conseil et design aux marques. L’idée est de réfléchir à leur présence dans ces mondes virtuels. Pour certaines marques, cette présence peut se matérialiser sous la forme d’une boutique ou d’un terrain, d’un avatar de marque, ou encore par la création d’un monde propre, qui deviendra un métavers propriétaire à la marque. Celle-ci doit alors être assez puissante pour générer sa propre audience et la renouveler régulièrement. Nous avons également intégré un volet cryptomonnaie à cette offre, avec la création de NFT. Beaucoup de questions se posent : à quelle valeur doivent-ils être distribués ? Est-ce qu’on les génère en solo ou en collaboration avec des artistes ou des collectifs ? Notre offre comprend un volet RP qui consiste à faire connaître la marque, pas simplement dans des médias classiques mais aussi dans des médias spécialisés sur le web3 et les univers digitaux. “Ces univers peuvent aussi contribuer à rendre encore plus désirable la valeur immatérielle de certaines marques” On peine encore à imaginer les usages amenés à se développer dans les mondes virtuels. Quels sont-ils ? A partir du moment où des individus investissent ces univers, il y a plusieurs opportunités qui s’ouvrent. Elles concernent d’abord la distribution des biens virtuels mais aussi physiques. Les jeux vidéo et les cryptoverses partagent cette même logique de jeu ou de quête. La marque peut alors se positionner auprès des utilisateurs en tant qu’accélératrice de l’expérience ; elle peut aider l’avatar à avoir une réputation plus forte via l’achat de biens ou de services virtuels. Mais à terme, des commandes physiques pourront également avoir lieu dans ces univers virtuels. C’est pourquoi tous les distributeurs réfléchissent à leur présence afin de devenir le point de contact ou la marque de distribution préférée pour une livraison à domicile. Ces univers peuvent aussi contribuer à rendre encore plus désirable la valeur immatérielle de certaines marques. De nombreuses marques de luxe nous sollicitent pour réfléchir à leur présence. Des marques du secteur financier, de la banque, de l’assurance et du crédit font également partie de nos clients. Mais durablement, tous les secteurs, de la relation client à la distribution des produits et services, seront impactés, comme ce fut le cas lors de la naissance du digital. Quelles expériences et dispositifs avez-vous déjà mis en place ? Nous avons développé des expériences pour des marques ou des institutions qui nous ont permis de démontrer que si on se place au bon moment dans l’expérience de l’utilisateur, nous ne faisons pas une simple publicité mais nous rendons un service très précis. Les marques ne doivent pas venir dans un métaverse pour faire une interruption mais pour répondre à un besoin du joueur dans sa quête et dans son expérience. Récemment, nous avons par exemple réalisé une intégration pour Louis Vuitton dans League of Legends, dans le cadre des Final Series : on proposait aux meilleurs joueurs de gagner leur tenue fantasy version Louis Vuitton du personnage. Dans la vraie vie, lors des événements où les joueurs se rassemblent, il était également possible d’acheter une tenue final fantasy signée Louis Vuitton. Avec certaines marques, on travaille dans des cryptoverses : dans Decentraland, on a aidé l’entreprise américaine Fidelity à développer sa présence dans un espace de banque en ligne, où elle aide les utilisateurs à décrypter les cryptomonnaies et les NFT et propose aussi des solutions de crédit et de financement pour particuliers. Quelle est l’équipe dédiée à cette offre au sein d’Havas Play ? Notre équipe est basée en France mais nos clients se trouvent aussi aussi à l’étranger. L’équipe Metaverse By Havas se compose de 8 personnes : 2 personnes en conseil, 4 personnes en création et des chefs de projet qui pilotent la production. Pour le moment, ces univers ne sont pas cohérents en termes de design et d’outils de développement. Une fois qu’on les a conçus, on sous-traite le développement de ces univers. On fait appel à des freelances ou des joueurs investis dans le développement de leur monde. Compte tenu de la diversité des metaverses dans lesquels on intervient, on préfère garder cette liberté. Quel modèle de rémunération appliquez-vous auprès de vos clients ? Nous proposons un forfait annuel d’accompagnement à certaines marques, notamment celles de luxe, auquel s’ajoutent des honoraires par projet qui sont à géométrie variable selon les collaborations. On peut aussi proposer un modèle de rémunération partagée avec nos clients sur des drops NFT. Une partie de la vente de NFT peut être ainsi partagée entre des créateurs du Web3, la marque et notre agence. “Pour 2022, notre chiffre d’affaires lié aux métaverses se compte en centaines de milliers d’euros et il approchera le million d’euros en 2023. Cela reste encore assez embryonnaire, mais on croit beaucoup dans le développement de cette activité” Quel chiffre d’affaires avez-vous réalisé en 2022 ? Et celui visé en 2023 ? Pour 2022, notre chiffre d’affaires lié aux métaverses se compte en centaines de milliers d’euros et il approchera le million d’euros en 2023. Cela reste encore assez embryonnaire, mais on croit beaucoup dans le développement de cette activité. Pour que se développent les métaverses dans leur version maximaliste, tels qu’on les aperçoit dans la présentation de Meta, il y a plusieurs conditions à atteindre. Il faut d’abord que les appareils pour y accéder se miniaturisent et que la 5G se développe afin de proposer des expériences en 3D ou réalité augmentée en temps réel à des millions de personnes. Il faut aussi que les portefeuilles, les wallets, se développent, car il faut bien stocker ces objets virtuels collectés quelque part. Tout cela va prendre du temps. Quels sont les enseignements tirés un an après le lancement de votre offre ? Quelles sont les difficultés entrevues ? Dans ces univers virtuels, lorsque la présence de marque est bien faite et qu’elle vient enrichir l’expérience, elle est vraiment bienvenue ; la marque fait alors partie de la communauté. C’est un premier enseignement positif. Sur le volet cryptoverse, l’annonce de Meta a suscité énormément d’attentes et de curiosité et les médias se sont emballés. La déception a été à la hauteur de cet emballement, certains remettant en cause la viabilité des métaverses. Les communications de Meta qui expliquent que le groupe recherche encore les bonnes expériences ou encore le fait que The Sandbox ait toujours du mal à sortir son propre univers jettent le trouble. Mais je pense qu’il s’agit d’une question de temps, comme lors des débuts du digital. Les solutions entrevues d’aujourd’hui ne seront peut-être pas les solutions utilisées massivement demain, mais elles permettent de développer les expériences et les usages. Le deuxième enseignement est que tous les cryptoverses ne sont pas prêts. Enfin, la faillite de certains opérateurs, même annexes, comme FTX, font du mal à l’ensemble de l’écosystème. A partir du moment où la valeur des cryptos chute, ça freine le développement de ce type de projets. On est maintenant dans une phase où on attend que ça se stabilise avant de repartir. Mais il ne faut pas expéditif ce n’est pas parce que FTX a fait défaut que le système de la blockchain et des cryptos n’est pas intéressant. Comment les marques qui s’intéressent au métaverse mais hésitent sur leur stratégie doivent-elles se positionner ? Je leur conseillerais de commencer à jouer et à passer du temps dans ces univers afin qu’elles se rendent compte que les marques y sont plébiscitées. Comme lors des débuts des réseaux sociaux, il faut y passer du temps pour comprendre ce qui, en correspondant à l’ADN de la marque, peut contribuer à apporter du sens et de la valeur ajoutée. Et ainsi déterminer comment les marques peuvent aider à la réputation ou à l’expérience des joueurs tout en leur donnant un coup de pouce pour accéder à la fin du jeu. Quels sont vos projets et initiatives en cours ? On veut continuer à constituer cette offre pour les metaverses comme un réseau. Nous avons lancé cette initiative en France et voulons désormais la déployer partout à l’international, au sein de tous les bureaux Havas. En France, on opère l’activité sous la marque Havas Play lancée en mai 2022. On va travailler à ouvrir de plus en plus de bureaux Havas Play dans le monde, ils auront le même type d’offres et sauront faire des ponts entre agence média et agence créative, afin d’aider les marques à s’inscrire dans les communautés, les conversations et les passions des utilisateurs. Charlène Salomé AgencesAgences digitalesInnovationsMetaverseTransformation marketing Besoin d’informations complémentaires ? 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