Accueil > Médias & Audiovisuel > Ciblage publicitaire : les identifiants uniques peuvent-ils remplacer les cookies tiers ? Ciblage publicitaire : les identifiants uniques peuvent-ils remplacer les cookies tiers ? L'IdentyLink de Liveramp, l'Unified ID de The Trade Desk, Univesal ID d'ID5, Digitrust de l'IAB... Toutes ces initiatives ont pour but de pallier le faible taux de synchronisation des cookies tiers entre les différents acteurs du programmatique. Depuis que les navigateurs et les régulateurs font la guerre au cookie tiers, ces solutions sont-elles amenées à disparaitre, ou peuvent-elles aujourd'hui se poser en alternative pour le ciblage utilisateur ? Par Paul Roy. Publié le 20 février 2020 à 16h05 - Mis à jour le 02 décembre 2021 à 10h21 Ressources Il y a deux ans, d’abord pour pallier le mauvais taux de matching et la dégradation de l’expérience utilisateur liés à la synchronisation des cookies tiers entre les différents acteurs programmatiques, les initiatives d’identifiants publicitaires uniques communes ou privées se sont multipliées. “À l’origine, l’idée était de dépasser cette logique d’identifiant propriétaire pour avoir un langage commun pour se prévaloir des problèmes de matching et des déperditions à chaque étape de la chaîne de valeur”, explique Mathieu Roche, le fondateur d’ID5. Dans un récent article de Digiday – qui présentait les initiatives d’ID uniques comme les prochaines victimes de la mort des cookies tiers -, Jordan Mitchell, le président de l’IAB Tech Lab soulignait que sans cookies, l’identifiant Digitrust créé par l’organisme serait amené à disparaitre, et dans son sillon d’autres initiatives également. Certains acteurs voient cependant encore dans ces solutions une potentielle alternative au cookie tiers pour le ciblage des internautes. Le mail comme première piste Que ce soit dans la présentation de Project Rearc par l’IAB ou des différentes initiatives privées, un identifiant unique reposant sur l’encryptage d’un mail collecté par l’éditeur reste la solution la plus envisagée comme alternative au cookie tiers. “Avec le consentement explicite des utilisateurs, leur adresse e-mail (connexion) peut être encryptée en une chaîne de caractères anonyme (hashed email) et, grâce aux frameworks appropriés, elle peut débloquer des opportunités de publicité adressable sur l’open web”, explique Augustin Decré, directeur général Europe du Sud de Index Exchange, qui a généralisé l’usage de Unified ID Solution de The Trade Desk en 2018 – The Trade Desk, sollicité par mind Media, n’a pas pu répondre à nos sollicitations au moment de la parution de l’article. Côté acheteurs, LiveRamp a récemment lancé – en mai 2019 aux États-Unis et en février 2020 en France – ATS (Authenticated Traffic Solution) qui repose sur l’identification de l’utilisateur via un mail collecté sur le site de l’éditeur (inscription à une newsletter, login) et encrypté, pour permettre aux différentes parties de la chaine publicitaire d’utiliser un seul identifiant pour chaque utilisateur. Aujourd’hui, la solution est testée sur quelques éditeurs américains, et requiert que les SSP et DSP intègrent l’IdentityLink (sa solution de réconcialiation de données offline et online) LiveRamp. “Pour l’instant, cela reste une part très faible des campagnes menées. Nous nous attachons à créer l’infrastructure avec les DSP et les SSP pour s’assurer qu’ils obtiennent les bons identifiants”, explique Vihan Sharma, le directeur général Europe de Liveramp. Pour le moment, 30 DSP sont compatibles et 20 SSP ont signé (parmi lesqueslles Index Exchange, Rubicon et OpenX) ou sont en cours de signature. L’adoption reste un frein Mais ce type de solutions n’est applicable que sur des audiences loguées, ou pour lesquelles un mail a été collecté – via l’inscription à une newsletter par exemple. “Aujourd’hui, un éditeur qui tente de récolter des informations sur un utilisateur via les newsletters ou en utilisant un login peut espérer obtenir le mail de maximum 20 % de ses audiences”, affirme Jérémy Parola, directeur des activités numériques de Reworld Media. “C’est important que les éditeurs obtiennent des adresses emails pour l’identification, mais ça couvrira difficilement la population d’ici deux ans”, ajoute Mathieu Roche. Vihan Sharma (Liveramp) justifie, lui, l’initiative de Liveramp par la hausse de qualité du ciblage avec ATS : “Aujourd’hui, via le recours aux cookies tiers, nous avons un reach de 50% en France. Nous pensons que la part d’audience loguée sur les sites des éditeurs va être amenée à augmenter et que nous pourrons donc atteindre, d’ici deux ans, un reach similaire avec l’environnement ATS, ce qui fera de notre solution une alternative crédible aux solutions existantes.”. Rappelons que côté éditeurs, les initiatives communes pour loguer les audiences se sont multipliées, de NetID en Allemagne au Pass Media en France, mais n’ont pour l’instant d’applications publicitaires et concentrent une partie limitée de l’audience. ID5 propose au départ une solution de synchronisation des cookies tiers sur un modèle SAAS, et un identifiant unique qui permet de connecter à une SSP de se connecter directement avec une DSP, sans passer par leur solution. Selon Mathieu Roche, le cofondateur d’ID5, son identifiant Universal ID peut s’affranchir du cookie tiers, et n’a en plus pas besoin d’utiliser le mail comme moyen d’identification : “L’identifiant ID5 est stocké par l’éditeur, donc dans son propre domaine (cookie 1st party). Il est ensuite passé comme un paramètre aux prestataires de l’éditeur en charge de la monétisation publicitaire. ID5 garantit la cohérence entre les identifiants éditeurs en les connectant les uns aux autres via des informations déterministes (email encrypté, login ID, etc.) ou via un algorithme”. L’identifiant Universal ID d’ID5 est aujourd’hui supporté par une quinzaine de plateformes adtechs parmis lesquelles Pubmatic, JustPremium, Bidswitch, Avocet, Platform161, etc. Mathieu Roche CEO de ID5 Le succès des ID uniques dépendait avant tout de leur adoption par tous les acteurs technologiques, et principalement côté achat, comme nous le précisions à l’issue du salon DMexco à l’automne 2019. Aujourd’hui, les éditeurs peuvent activer le service d’ID5 via l’installation d’une API dédiée (code JS open source), ou en mode “OEM” via des services qu’ils utilisent pour la monétisation de publicitaires (Prebid, Hubvisor, Index Exchange, etc.) ou la gestion de consentement (partenariats CMP en cours de finalisation). Pour l’instant son adoption est limitée : “L’identifiant Universal ID d’ID5 est aujourd’hui supporté par une quinzaine de plateformes adtechs parmis lesquelles Pubmatic, JustPremium, Bidswitch, Avocet, Platform161, etc.”, affirme Mathieu Roche (ID5). Les acteurs s’accordent à dire que la position de Google est paradoxalement positive et devrait donner un coup de fouet à l’adoption de ce type de solutions, que ce soit avec ou sans collecte du mail de l’utilisateur. “Il y aujourd’hui une deadline, et ça crée une obligation de s’adapter. Il y a un état d’urgence, qui va nécessairement pousser les acteurs à adopter ce type de solutions, les autres alternatives étant très limitées”, estime Mathieu Roche. Un organisme neutre opérateur d’une alternative au cookie ? Dans notre récent dossier sur la préparation du marché de la publicité en ligne à la fin des cookies tiers, plusieurs acteurs avançaient la nécessité d’une initiative portée par un acteur tiers pour créer un identifiant unique et conserver cette capacité de synchronisation entre les différentes plateformes. En effet, pour le moment, les éditeurs de ces identifiants – hormis ID5 – même s’ils les proposent gratuitement, sont fournisseurs d’autre produits publicitaires et marketing. Project Rearc est une sorte de projet ombrelle, pour repenser les fondements du marketing digital dans un contexte où nous n’aurons plus accès aux cookies tiers, et où des restrictions sont à venir sur les identifiants mobiles Dennis Buccheim Vice-président de l’IAB Tech Lab Mi-février, lors de sa conférence annuelle, l’IAB Tech Lab s’est positionné, en appelant à contribution ses membres pour trouver une solution alternative aux cookies tiers, autour de Project Rearc. Ce projet a été au départ interprété comme une volonté de l’IAB d’opérer une véritable alternative technique, ce qui n’est pas tout à fait exact. L’organisme a dû repréciser les contours de l’initiative dans un billet de blog. “C’est une sorte de projet ombrelle, pour repenser les fondements du marketing digital dans un contexte où nous n’aurons plus accès aux cookies tiers, et où des restrictions sont à venir sur les identifiants mobiles”, nous indique Dennis Buchheim, vice-président de l’IAB Tech Lab, en précisant que le projet a été lancé par l’IAB Tech Lab il y a quelque mois en récoltant les apports des acteurs du marché sur le sujet. L’IAB réaffirme d’ailleurs que ce n’est pas son rôle de devenir l’opérateur d’un identifiant universel. “Il s’agit avant tout d’une question de coût et d’échelle. Nous avons déjà Digitrust qui est rentable et plutôt simple à opérer, mais qui surtout ne nous oblige pas à stocker de la donnée utilisateur, et qui dépend du cookie tiers. Nous ne voulons pas être le hub de stockage de tous les ID pour tous les acteurs. Et deuxièmement, beaucoup de nos membres sont investis dans la création de solutions d’identification, nous ne sommes donc pas légitime pour nous poser en concurrent”, souligne Dennis Buchheim (IAB Tech Lab). Les solutions techniques existent donc, mais pour le moment elles ne sont pas assez adoptées et donc pas entièrement substituables au cookie tiers pour réaliser un ciblage suffisamment précis et quantitatif. De plus, ces identifiants, comme le soulignait Digiday fin janvier, sont pour beaucoup dépendantes des décisions des navigateurs, qui visent le tracking utilisateur plus que l’utilisation des cookies tiers. “Au final, on peut penser que c’est Google – et lui seul – qui est en capacité de proposer une solution universelle à l’ensemble du marché”, constate Jérémy Parola (Reworld Media). Paul Roy Achat médiaIdentifiant uniqueTransparence Besoin d’informations complémentaires ? 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