La presse numérique thématique connaît un mouvement de concentration

L’année 2022 a connu un nombre important d’acquisitions de médias numériques sur des thématiques liées aux technologies. Citons par exemple le rachat d’Humanoid par Ebra en mars, la cession d’Unify à Reworld Media en juin, le passage d’Usbek & Rica sous le giron de CMI France en octobre, ou encore l’intégration de Phonandroid.com et Papergeek.fr par CCM Benchmark en décembre. “Il y a beaucoup de dossiers de médias à racheter qui circulent en ce moment”, confirme Jeremy Parola, directeur des activités numériques de Reworld Media, qui fait partie des gros acquéreurs de la presse en France ces dernières années. 

Ce type de mouvement devrait se poursuivre en 2023, et même dans les prochaines semaines. “Il y aura peu de levées de fonds en 2023, comme en 2022, pour les sociétés qui sont les moins rentables, ce qui va les pousser à rejoindre des entreprises plus solides”, prédit Guillaume Bonneton, partner de GP Bullhound. La banque d’affaires intervient d’ailleurs actuellement sur une transaction. Selon nos informations, DC Company, le groupe média que constitue Geoffrey la Rocca, communiquera aussi bientôt sur une deuxième acquisition pour réaliser son objectif d’un chiffre d’affaires d’une dizaine de millions d’euros pour l’ensemble de sa holding, après celle des Éclaireuses en octobre dernier.

Par ailleurs, toujours selon nos informations, le site dédié à l’actualité des start-up Maddyness devrait prochainement officialiser sa vente et le nom de son repreneur. Si son cofondateur Louis Carles indique que “tous les signaux étaient au vert en 2022”, l’entreprise fondée en 2011 a plus que doublé ses pertes, à plus de 447 000 euros, en 2021. Elle a aussi connu un important nombre de départs au sein de son équipe d’une quarantaine de personnes ces derniers mois.

Des sociétés en difficulté depuis la crise sanitaire et économique

Comme la plupart des acteurs de cette taille, Maddyness a souffert de la crise du Covid-19, d’autant plus qu’une partie de son activité repose sur l’événementiel. “Pendant la crise sanitaire, le gouvernement a mis en place les Prêts garantis par l’État (PGE) pour absorber les pertes financières afin de permettre aux entreprises de poursuivre leur activité. Désormais (depuis le 30 juin 2022, ndlr), elles doivent les rembourser”, avance Guillaume Bonneton (GP Bullhound).  

La forte réduction des investissements publicitaires durant la crise a rendu plus instables les modèles des médias qui reposent sur la publicité et le brand content, sans avoir une assise financière suffisante pour y faire face. “Les éditeurs de taille restreinte n’ont pas la même échelle de monétisation”, complète Jeremy Parola (Reworld Media). C’est pourquoi certains cherchent à s’adosser à de plus grands groupes pour bénéficier de leur force de frappe et de leur soutien financier. 

Des acquéreurs en quête de communautés engagées

De l’autre côté, les acquéreurs s’intéressent à “des médias publiant des contenus qualitatifs qui rassemblent des communautés très engagées, afin d’anticiper la disparition progressive des cookies tiers” et le retour de la publicité contextuelle, constate Guillaume Bonneton (GP Bullhound). Les sujets liés aux technologies en font partie. Ces acquisitions leur permettent aussi de renforcer leur couverture éditoriale sur des thématiques plus spécialisées.

Ainsi que “monter en compétences sur des sources de revenus pour diversifier leurs modèles économiques”, observe de son côté Jeremy Parola (Reworld Media). Il fait notamment référence à l’affiliation, beaucoup pratiquée par les médias proposant des tests et comparatifs de produits technologiques comme Numerama chez Humanoid ou Phonandroid, et qui vient compléter la monétisation publicitaire classique. Citons également le marketing d’influence, intégré notamment par Unify via le média MinuteBuzz, le MCM Studio FY (ex-Studio 71) ou encore le studio de création Garage, et dont les investissements des annonceurs continuent de progresser.