Accueil > Investissement > Les prérequis pour l’enregistrement PSAN vont être renforcés Les prérequis pour l’enregistrement PSAN vont être renforcés À la suite de l’affaire FTX, l’Assemblée nationale a voté en faveur d’un renforcement du régime obligatoire pour les prestataires de services sur actifs numériques à partir de 2024. Par Caroline Soutarson. Publié le 25 janvier 2023 à 17h21 - Mis à jour le 01 février 2023 à 17h41 Ressources Alors que planait la menace de voir l’agrément de prestataire de services sur actifs numériques (PSAN) devenir obligatoire pour les nouveaux entrants d’ici octobre 2023, l’Assemblée nationale a voté le 24 janvier pour un amendement moins clivant. Les députés ont opté pour un renforcement des attentes dans le processus d’obtention de l’enregistrement (qui demeure toutefois bien moins strict que l’agrément) à partir du 1er janvier 2024. En plus de vérifier l’honorabilité des dirigeants et la mise en place de dispositifs de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT), l’Autorité des marchés financiers (AMF) et l’Autorité de contrôle prudentiel et de régulation (ACPR) s’assureront, entre autres, de la gestion des conflits d’intérêt des acteurs et de la ségrégation des actifs détenus par les acteurs pour leur compte propre et de ceux détenus pour leurs clients. La liste des PSAN enregistrés auprès de l’AMF Protéger les investisseurs “Le renforcement du régime de l’enregistrement consiste à imposer aux PSAN enregistrés à partir de 2024 des obligations jusque-là associées à l’agrément [pour plus de détails, lire le document Instruction DOC-2019-23 sur la constitution d’un dossier d’enregistrement et d’agrément, Ndlr]. Cette remontée des exigences est justifiée par ceux qui la soutiennent par les événements récents. Le cas de FTX laisse entendre une insuffisance dans leur gestion interne et dans la protection des avoirs des clients chez certains acteurs”, analyse Matthieu Lucchesi, avocat spécialisé dans l’innovation et la fintech chez Gide. “En cela, le régime que l’AMF avait imposé pour l’agrément PSAN il y a plusieurs années était assez visionnaire [voir encadré, Ndlr]. Les principes généraux restent pertinents. Pour les prestataires, le nouveau régime doit être l’occasion de montrer qu’ils se distinguent de certaines pratiques à l’étranger et de mettre en place des mesures plus vertueuses”, ajoute l’avocat qui a passé cinq ans chez le régulateur financier français. Un cadre réglementaire inédit La réglementation liée aux PSAN est souvent qualifiée d’innovante car composée de deux volets : un enregistrement obligatoire afin de proposer, en France, des services de : conservation pour le compte de tiers d’actifs numériques ou d’accès à des actifs numériques, le cas échéant sous la forme de clés cryptographiques privées, en vue de détenir, stocker et transférer des actifs numériques ; achat et vente d’actifs numériques en monnaie ayant cours légal ; échange d’actifs numériques contre d’autres actifs numériques ; exploitation d’une plateforme de négociation d’actifs numériques, un agrément optionnel qui “autorise une plus grande agressivité dans la manière de s’adresser à la clientèle et de nouer des partenariats commerciaux avec d’autres acteurs”, rappellait Matthieu Lucchesi, avocat chez Gide, en janvier 2022. Les services sur actifs numériques ne sont pas tous encadrés de la même manière par la réglementation PSAN. Le Code monétaire et financier en liste six autres (article L54-10-2) : réception et transmission d’ordres sur actifs numériques pour le compte de tiers, gestion de portefeuille d’actifs numériques pour le compte de tiers, conseil aux souscripteurs d’actifs numériques, prise ferme d’actifs numériques, placement garanti d’actifs numériques, placement non garanti d’actifs numériques. Pour l’exercice de ces services-là, les prestataires n’ont pas besoin d’enregistrement obligatoire et peuvent donc les exercer légalement sans procédure, selon l’actuel régime en vigueur. La ségrégation des actifs s’inspire directement du secteur financier. Elle implique “de parquer les actifs des investisseurs et de les protéger en cas de difficultés. Ségrégués, les fonds des clients ne sont pas absorbés dans les pertes du prestataire en cas de faillite, comme cela peut être le cas avec FTX et d’autres plateformes qui ont fait faillite”, illustre Matthieu Lucchesi. Et c’est l’objectif final de l’amendement : davantage protéger les investisseurs en cryptoactifs. Un axe jusque-là peu développé par les régulateurs puisque la mise sur liste blanche des acteurs enregistrés n’engendre pas de mécanisme de remboursement pour les utilisateurs lésés. Le cas s’est d’ailleurs présenté en 2022 avec l’ex-PSAN Bykep, qui a depuis été radié de la liste par l’AMF pour des manquements en matière de LCB-FT et pour avoir effectué des opérations “au débit de portefeuilles de clients sans leur consentement” (lire notre article sur le sujet). Ce dernier point est d’ailleurs aussi pointé dans le nouvel amendement. Les PSAN fournissant un service de conservation d’actifs numériques pour compte de tiers – ce qui correspond à 85 % des PSAN actuellement enregistrés – devront ainsi s’abstenir “de faire usage des actifs numériques ou des clés cryptographiques conservés pour le compte de leurs clients, sauf consentement exprès et préalable des clients”, explicite le texte. Comment l’écosystème crypto français s’empare du régime PSAN Ces mesures de renforcement ont été saluées par l’écosystème crypto français. “Il s’agit d’une décision pragmatique visant un juste milieu entre l’épanouissement de l’innovation en France et l’environnement sûr pour les utilisateurs dans lequel elle doit nécessairement s’inscrire. Mais il s’agit également d’un message à l’attention du secteur sur l’exemplarité et le professionnalisme attendus des acteurs dans cette voie vers l’harmonisation de la réglementation européenne” commente Faustine Fleuret, présidente et directrice générale de l’Association pour le développement des actifs numériques (Adan). Les PSAN déjà enregistrés sont épargnés Pour rappel, l’amendement voté, qui est entré en commission mixte paritaire, n’a aucun impact sur les PSAN déjà enregistrés et sur ceux qui le seront d’ici le 31 décembre 2023, “ce qui devrait crééer un mouvement d’affluence sur les demandes d’enregistrement à très court terme”, souligne Matthieu Lucchesi. Le régulateur s’est en effet déjà engagé à accompagner les PSAN disposant de l’enregistrement vers l’agrément, dans le contexte de la future mise en application du règlement européen sur les marchés de cryptoactifs (MiCA). D’ici l’entrée en application de MiCA (estimée à octobre 2024 si l’accord est signé en avril 2023), “les acteurs qui exerceront en conformité avec un droit national régissant la fourniture de services sur actifs numériques bénéficieront d’une période de transition de 18 mois” vers le nouvel agrément européen, soit avril 2026, rappelle Matthieu Lucchesi. Ce dernier relève également une particularité du régime français : “sur ce principe et selon l’Assemblée nationale, les prestataires qui fournissent des services sur actifs numériques définis par la loi française n’exigeant pas d’enregistrement obligatoire devraient également bénéficier de la période de transition”. Caroline Soutarson cryptoactifPSANrégulation Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Le nouveau PSAN Bux proposera des crypto en France en 2023 Bitpanda décroche la licence allemande pour la conservation de cryptoactifs L’AMF exclut Bykep des PSAN après des manquements LCB-FT Comment l’écosystème crypto français s’empare du régime PSAN