Accueil > Services bancaires > Rehana Mitha (Edenred Payment Solutions) : “Nous sortons progressivement du BtoC au profit des acteurs BtoB” Rehana Mitha (Edenred Payment Solutions) : “Nous sortons progressivement du BtoC au profit des acteurs BtoB” Début 2025, Edenred Payment Solutions a dévoilé un service de cartes virtuelles à destination des assureurs, afin de fluidifier l’indemnisation des sinistres. mind Fintech s’est entretenu avec sa directrice générale, Rehana Mitha (ex-Idemia), pour en savoir davantage et faire le point sur l’offre de l’entité de Banking-as-a-Service, connue dans l’Union européenne sous le nom de PPS EU. Par Caroline Soutarson. Publié le 23 octobre 2025 à 6h00 - Mis à jour le 23 octobre 2025 à 13h34 Ressources Comment Edenred, spécialiste des avantages salariés, s’est retrouvé à opérer une plateforme de Banking-as-a-Service ? L’histoire d’Edenred Payment Solutions, qui regroupe un portefeuille d’activités dans les paiements, remonte aux débuts des années 2010, avec la dématérialisation du titre-restaurant. Edenred avait acquis le processeur-émetteur PrePay Technologies [en 2007, Ndlr], une plateforme qui permettait notamment d’émettre des cartes en circuit fermé. Nous avons donc utilisé la solution de manière transversale au sein du groupe, puis en externe. Nous avons en effet décidé d’équiper des fintech il y a une dizaine d’années. Dans ce contexte, depuis 2023, nous avons séparé la gestion technique de la plateforme de paiement en interne de l’activité commerciale, qui opère sous la marque Edenred Payment Solutions (EPS) en tant que prestataire de services de paiement (PSP) régulé. Nous sommes présents à la fois au Royaume-Uni et dans l’Union européenne [en tant qu’établissement de monnaie électronique agréé auprès de la FCA outre-Manche – PrePay Technologies ou PPT – depuis 2018, et par la Banque nationale de Belgique pour l’UE – PPS EU – depuis 2019, Ndlr]. Nous opérons en France via une succursale, ce qui nous permet d’émettre des IBAN français. Quels services de paiement propose Edenred Payment Solutions ? Nous avons trois segments d’activité. Tout d’abord, celui du Banking-as-a-Service. Nous fournissons des comptes de monnaie électronique, des services d’émission et de processing de cartes, ainsi que l’accès aux rails de paiement – SEPA dans l’UE et Faster Payment au Royaume-Uni. Nous travaillons notamment avec Tide [néobanque pour les pros britannique, Ndlr] depuis 2016, outre-Manche et en Allemagne, ainsi qu’avec Monese [challenger anglais racheté par le fournisseur de comptes et cartes prépayées Pockit fin 2024, Ndlr]. En France, nous collaborons avec les [néobanques vertes, Ndlr] Green-Got et Qileo. Nous proposons également des solutions de finance embarquée pour les entreprises. Nous leur permettons d’intégrer des services de paiement dans leurs parcours clients, ou bien d’effectuer des paiements elles-mêmes. Dans ce cadre, nous pouvons émettre et autoriser des cartes virtuelles à usage unique ou assorties de contrôles d’usage spécifiques, par exemple pour le buy now, pay later [BNPL ou paiement fractionné, Ndlr]. Nous émettons notamment les cartes virtuelles fournies par Oney et ViaBill pour le paiement des marchands. Plus récemment, nous avons également développé un premier cas d’usage pour les assureurs et assisteurs dans le cadre de l’indemnisation des sinistres, en partenariat avec l’insurtech Eyst Technology. [Stripe, Adyen, manager.one, Swan et Xpollens se sont également positionnés sur ce cas d’usage, Ndlr] Notre troisième segment, qui correspond à notre offre historique en externe, concerne les cartes prépayées mono-marque et les cartes cadeaux. Il s’agit d’une activité davantage concentrée sur le marché britannique qui s’étend actuellement dans l’UE. Eyst Technology travaille avec AXA, Generali, Fidelia et Filassistance Créée en 2022, l’insurtech française Eyst Technology fournit aux assureurs et aux assisteurs une solution SaaS permettant aux assurés de régler des prestations spécifiques sans avance de fonds (paiement dirigé). La start-up s’appuie sur EPS pour l’émission des cartes virtuelles, envoyées dans les wallets Google Pay et Apple Pay des assurés, ainsi que pour la conformité. “L’assureur paramètre la carte avec un montant plafond, une date d’expiration, un nombre d’utilisations possibles et des marchands autorisés spécifiques. Si l’assuré a un problème automobile, nous pouvons émettre une carte virtuelle qui ne sera acceptée que dans un réseau de dépanneurs et garagistes partenaires”, illustre Rehana Mitha. À l’occasion d’un événement organisé par Edenred Payment Solutions en octobre 2025, soit “seize mois après le lancement”, le cofondateur et directeur général d’Eyst, Antoine Vanoverberghe, dénombre “4 000 cartes émises pour ses clients. Nous atteindrons 500 000 euros de flux de paiement d’ici fin 2025”. Le dirigeant confie également à mind Fintech compter cinq clients dont “AXA Partners, Generali et les assisteurs Fidelia (Covéa) et Filassistance (CNP Assurances)”. Dans les prochains mois, l’insurtech prévoit d’ajouter de nouvelles fonctionnalités à son offre, dont le web push provisioning (WPP) – “c’est-à-dire l’ajout de la carte au wallet en un clic” – ainsi que du cashback. En parallèle, elle entamera son expansion en Europe. “Nous irons en Belgique et en Espagne avec AXA et en Allemagne avec un autre acteur”, précise Antoine Vanoverberghe. Pour mener ces projets de front, Eyst Technology a bouclé une levée de fonds de 1,4 million d’euros en septembre 2025, à laquelle ont notamment participé les réseaux Paris Business Angels et InsurAngels. La start-up avait également réalisé un tour de préamorçage en 2022 auprès de Plug and Play, Wilco et Bpifrance. Comment le cas d’usage d’indemnisation des sinistres a-t-il été accueilli sur le marché ? Plusieurs assureurs et sociétés d’assistance de premier ordre testent actuellement la solution. Des pilotes sont prévus en France d’ici fin 2025. Au global, nous souhaiterions compter une dizaine de pilotes d’ici la fin de l’année. Quelle est votre stratégie sur l’offre de Banking-as-a-Service ? Nous sommes capables d’offrir l’ensemble des services dont une fintech a besoin dès ses débuts. Nous pouvons l’accompagner, puis nous retirer progressivement, au fur et à mesure de son succès, lorsqu’elle internalise certaines briques, jusqu’à ne plus lui fournir que la gestion des paiements. Nous l’avons notamment fait pour Tide. Alors que nous lui fournissions toute la panoplie du Banking-as-a-Service à ses débuts, en 2016, Tide a finalement obtenu son agrément d’établissement de monnaie électronique [auprès de la FCA, en 2018, Ndlr]. La société n’avait donc plus besoin de notre brique d’ouverture de comptes et s’est tournée vers ClearBank pour fournir des comptes via un établissement de crédit régulé. Par la suite, Tide est devenu membre principal de Mastercard [en 2020, Ndlr] et a pu émettre ses propres cartes au Royaume-Uni. Dans l’UE [où Tide est présent en France et en Allemagne, Ndlr], en revanche, Tide fait toujours appel à nous pour l’émission et le traitement des cartes [tandis qu’Adyen gère l’ouverture de comptes, Ndlr]. Que pèse le Banking-as-a-Service dans l’activité d’Adyen ? Du fait de notre appartenance à un grand groupe, nous sommes sélectifs quant aux fintech clientes. Nous n’allons pas vers des activités à risque, comme les jeux, les paris ou les cryptoactifs. En outre, nous sortons progressivement du BtoC pour nous tourner vers des acteurs BtoB, afin de limiter les risques également. Cela ne remet évidemment pas en cause nos collaborations actuelles, notamment avec Green-Got, dont les projets consistent d’ailleurs à internaliser certaines briques [voir encadré, Ndlr]. Sophie Guibaud : “Fiat Republic permet aux banques de couvrir le marché des flux fiat-crypto” Green-Got développe son propre core banking La néobanque verte Green-Got travaille avec EPS “depuis fin 2020”, se souvient Andréa Ganovelli, son cofondateur et directeur général. Depuis, “75 000 cartes physiques ont été émises et 2,3 milliards d’euros transactions ont été effectués”, affirme le dirigeant de Green-Got. Mais, comme le souligne Rehana Mitha, Green-Got n’a pas vocation à rester sur les rails d’EPS indéfiniment. “Nous avons déposé une demande d’agrément d’établissement de paiement en France il y a deux ans et l’avons obtenu, sous conditions suspensives, en septembre 2025, indique Andréa Ganovelli. Les solutions de Banking-as-a-Service sont idéales pour démarrer, lorsqu’une entreprise ne dispose pas encore des fonds suffisants pour investir… Mais pour scaler, aller aussi vite qu’on le souhaite sur la roadmap et récupérer des marges, il faut pouvoir s’en détacher.” Dans ce cadre, Green-Got a lancé plusieurs chantiers techniques pour se passer d’EPS à terme. “Nous travaillerons plus directement avec Mastercard et construisons actuellement notre propre core banking. Nous ne communiquons pas, pour l’instant, sur notre partenaire pour la connexion SEPA.” Quelles opportunités se dessinent avec la finance embarquée ? Nous pensons que c’est un segment de marché à fort potentiel car il y a un besoin important d’intégrer des services financiers dans des plateformes non financières. Le cas d’usage assurantiel est naissant, mais nous misons beaucoup dessus. Du côté du paiement fractionné, nous avons aussi ajouté le BNPL in-store. Cependant, cette brique continuera d’évoluer avec la réglementation européenne. L’intégration du KYC et de l’évaluation de la solvabilité en magasin risquent d’ajouter des frictions dans le parcours client. Mais ce sont les fournisseurs de BNPL qui devront adapter leurs modèles ; EPS reste la couche de paiement sous-jacente. Révision de la directive sur le crédit : les acteurs du BNPL se préparent à rentrer dans le cadre Quels sont vos principaux indicateurs d’activité ? En 2024, Edenred Payment Solutions a traité 40 milliards d’euros de transactions. Notre entité commerciale compte entre 60 et 70 personnes (commerciaux, marketing, relation client). [Selon les comptes annuels de PrePay Technologies Limited consultés par mind Fintech, l’entité a enregistré un chiffre d’affaires de 78 millions de livres sterling en 2024, composé aux deux tiers par des frais de processing et commissions d’interchange. La moitié des revenus provient des activités outre-Manche, un tiers de l’UE et 11 millions de livres du reste du monde. PrePay Technologies Limited a dégagé un bénéfice net de plus de 12 millions de livres au titre de l’exercice (-39 % par rapport à 2023), Ndlr] Caroline Soutarson banking-as-a-servicecarte bancairecore bankingfinance embarquéegestion de sinistreinsurtech Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire La néobanque verte Green-Got devient établissement de paiement La néobanque pour les pros Tide se lance en France Edenred Payment Solutions met les cartes virtuelles au service des assureurs Dossier Pour les néobanques vertes, les comptes premiums deviennent une priorité