Le secteur français du crowdfunding connaît sa première baisse de collecte

Pour la première fois depuis dix ans, le secteur du financement participatif en France, dans son ensemble, a vu son activité reculer. Selon le baromètre réalisé par Mazars et Financement Participatif France (FPF), les plateformes ont collecté en 2023 un total de 2,08 milliards d’euros, soit un repli de 11,3 % comparé à l’année précédente.

La crise qui touche le secteur immobilier, devenu au fil des ans la locomotive du financement participatif, a eu un impact considérable. La collecte du crowdfunding immobilier obligataire a fondu de 28 % en 2023 (à 1,16 milliard d’euros) et revient à son niveau de 2021. Et les indicateurs de risques se sont détériorés : 20 à 25 % des projets accusent un retard de plus de six mois. A contrario, le crowdfunding des énergies renouvelables a connu une année dynamique, même si les volumes restent encore limités (+11,5 % à 368 millions d’euros).

Décollage du crowdequity

Au-delà de cette photographie globale, les résultats ressortent aussi contrastés selon la nature des fonds collectés. Après des années de morosité, “2023 a été l’année du décollage pour l’investissement [crowdequity, Ndlr]. Une tendance qui devrait être amenée à se poursuivre avec des incitations fiscales qui vont s’appliquer en 2024] souligne Mathilde Iclanzan, vice-présidente de FPF et directrice générale de WiSEED. Les investissements en capital et en royalties ont atteint 267,2 millions d’euros l’an dernier, contre 150 millions d’euros en 2022.

Après des “années Covid” fastes, en 2020 et 2021, le segment du don a retrouvé la croissance avec 160,5 millions d’euros collectés. Ce sont les outils de prêts qui ont le plus souffert en 2023, du fait des difficultés rencontrées par les entreprises et de la crise de l’immobilier. Un contexte qui a poussé October, l’un des leaders du prêt aux PME, à annoncer un sérieux coup de frein sur l’origination de nouveaux projets. “Un projet sur dix n’a pas réussi à boucler sa collecte“, confirme Bertrand Desportes, associé de Mazars et auteur de l’étude. Au bout du compte, 1,66 milliard d’euros ont été collecté sous forme de prêts (dont 1,36 milliard en obligations), contre 2,09 milliards d’euros en 2022 (et 1,78 milliard en obligations).

Développement des canaux intermédiés

Autre enseignement de l’étude : l’approche directe reste majoritaire dans les dispositifs de collecte (à 63 %), mais les canaux intermédiés, qui constituent le solde, montent en puissance (+3 points de base sur un an). Au sein de ces canaux indirects, les CGP ressortent en tête (20 %), devant les réseaux bancaires (8 %), les fonds d’investissement (7 %) et les family offices (1 %). “Au moins cinq plateformes sont sociétés de gestion pour pouvoir créer leurs fonds. Cela leur permet de répondre à l’enjeu de l’abaissement du plafond de financement par projet, à 5 millions d’euros, dans le cadre de la nouvelle réglementation européenne“, indique Florence de Maupeou, directrice générale de FPF.

Cette réglementation a introduit l’agrément de prestataire de services de financement participatif (PSFP), obligatoire depuis le 10 novembre 2023. Selon un nouveau décompte, 50 plateformes françaises l’ont obtenu à ce jour, ce qui place la France en tête des pays de l’UE en termes de nombres de sociétés agréées.