Accueil > Financement et politiques publiques > L’évaluation clinique des technologies de santé à l’échelle européenne (HAS) L’évaluation clinique des technologies de santé à l’échelle européenne (HAS) Dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, la Haute Autorité de Santé a organisé le 7 mars 2022 un symposium intitulé "Évaluer ensemble les technologies de santé en Europe”. Objectif : préparer l’entrée en vigueur du règlement européen sur l’évaluation des technologies de santé, qui devrait changer les pratiques de manière “radicale”. Par Camille Boivigny. Publié le 09 mars 2022 à 17h03 - Mis à jour le 15 mars 2022 à 14h36 Ressources L’adoption le 1er mars 2022 du nouveau règlement européen sur l’évaluation des technologies de santé marque un tournant. Selon la présidente de la HAS, Dominique Le Guludec,c’est “le début d’une nouvelle ère car il instaure une coopération obligatoire et accrue entre les agences des États européens en charge de ces évaluations. Dès 2025, il va radicalement changer nos pratiques, dans le cadre d’une nouvelle gouvernance. Notamment pour la HAS qui réalise environ 800 évaluations/an.” Le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, a souligné que ce règlement était une “pièce maîtresse” et représentait “une avancée nécessaire lors de la conférence ministérielle de la PFUE” qui a eu lieu quelques jours plus tôt. Ambition, projets et agenda Andrzej Rys, directeur des systèmes et produits de santé à la Direction générale Santé et Sécurité alimentaire de la Commission européenne, a rappelé qu’Ursula Von Der Leye avait appelé à la création d’une autorité de santé en Europe, en novembre 2021, en réponse à la crise sanitaire. “L’objectif est de bien coordonner le panel des pays de l’UE et leurs stratégies, s’il y a des manques relatifs aux dispositifs médicaux (DM), et de conseiller les États membres. Nous créons un nouveau réseau de 300 experts avec toutes les agences européennes, qualifiés et choisis parmi les États participants”. Il s’agit notamment de collecter des données pour composer un espace de données -notamment de vie réelle- au niveau européen (DARWIN). Ce nouveau règlement permettra selon lui une meilleure gestion des divers types de données dans le cadre de recherche publique, pour les médicaments existants et aidera à la prise de décision liée au programme R&D du secteur des industriels. “Le soutien des stratégies pharmaceutiques européennes et leurs instruments financiers appuiera la mise en œuvre de ce règlement HTA (pour Health Technology Assessment). Le cadre de ces évaluations cliniques conjointes s’inscrit également dans celui d’Horizon scanning, développé par plusieurs agences européennes.” Un groupe de coordination sera créé comme première autorité du cadre de la réglementation HTA. Sa première réunion se tiendra en juin 2022. La mise en place du règlement HTA européen Flora Giorgio, cheffe adjointe de l’unité B6 dispositifs médicaux et HTA à la Direction générale Santé et Sécurité alimentaire de la Commission européenne est revenue sur les principes clés de la mise en place de cette nouvelle réglementation. “Le travail conjoint se concentre sur les éléments cliniques et scientifiques de l’évaluation” a-t-elle détaillé. Ce seront les agences nationales qui les réaliseront, durant la procédure de négociation. Les entités seront nommées, “mais pas par Bruxelles”. La coopération existe selon elle depuis longtemps dans le cadre de l’HTA mais “tout se réglait au niveau national” alors que désormais, dans cette nouvelle étape, le rôle des États membres dans l’évaluation conjointe comporte des éléments essentiels de décision concernant l’accès aux médicaments par exemple, très varié au niveau européen. “La réglementation servira de fil rouge aux industriels pour développer leurs stratégies et qu’ils aient plus de visibilité. La France a souligné l’importance d’une implémentation progressive de cette réglementation. On commence par les médicaments anticancéreux car c’est là qu’existe la plus grande disparité d’accès.” Hétérogénéité médico-économique européenne Valérie Paris, présidente de la commission d’évaluation économique et de santé publique, membre du Collège de la HAS, a souligné de son côté la difficulté de mener l’évaluation médico-économique à un niveau commun.Elle a rappelé que l’Union européenne représente un cinquième des ventes globales de médicaments au niveau mondial et un quart pour les DM, loin derrière les États-Unis qui restent loin devant. “Chaque pays restera responsable de la définition du produit qu’il jugera pertinent puisque cette composante est différente selon les pays”, a-t-elle expliqué. “Jusqu’à présent les exigences et conclusions des évaluations nationales n’étaient pas toujours cohérentes et obligeaient les entreprises à se conformer à des standards différents. C’était trop imprévisible pour elles”, estime Valérie Paris. La notion d’évaluation conjointe envoie de nouveaux signaux à l’industrie sur les types et niveaux de preuves acceptables. Elle souligne également le besoin de coopérer sur une veille technologique au niveau européen “puisque ces innovations sont globales et car le rythme de développement des thérapies innovantes s’est considérablement accéléré”, note l’experte. Cette évaluation clinique commune, qui vise à éclairer les décisions de prix et remboursement, devrait ainsi permettre une plus grande égalité d’accès aux traitements ainsi qu’une meilleure prévisibilité pour les industriels, qui pourront les développer plus rapidement. Genèse de l’HTA et coopération des agences Ce nouveau règlement est le fruit des travaux du réseau EUnetHTA. Tiemo Wölken, membre du Parlement européen, estime qu’il constitue “un pas de plus vers une véritable Union Européenne de la santé, après une longue gestation -plus de 4 ans-, trois trilogues politiques, deux législation du Parlement et de la Commission européenne”. A l’arrivée, l’élu se réjouit d’avoir “réussi à faire pression” pour obtenir plus de transparence dans les essais cliniques, dont les résultats doivent désormais être publiés sur une plateforme informatique, “sans aucun conflit d’intérêt de la part des représentants ou des experts”. Il se félicite de l’application du règlement en cinq ans et non huit, comme initialement proposé par le Conseil européen. “L’efficacité de chaque pays sera meilleure puisque chacun aura accès à des ressources rares en utilisant plus rapidement l’expertise de tous les États-membres, notamment en termes de donnés de qualité : toute l’Europe aura accès aux mêmes data et aux mêmes évaluations cliniques au même moment, lors de l’intégration dans le processus national de l’HTA”. Tiemo Wölken souhaite désormais que la coordination de ce nouveau système reste entre les mains de la Commission européenne et soit dotée d’un mécanisme robuste, dans une agence existante par exemple. Il insiste sur la nécessité d’absence d’ambiguïté en termes de responsabilité, soulignant que la question des ressources humaines est cruciale. “Le futur secrétariat sera la colonne vertébrale de l’HTA pour qu’il soit applicable en janvier 2025”, conclut-il. Camille Boivigny base de donnéesDispositif médicalDonnées cliniquesdonnées de vie réelleEssais cliniquesEuropeIndustrieLaboratoiresMédicamentRechercheRèglementaireStratégie Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Entretien Pr Fabrice Barlesi (Gustave Roussy) : “Le numérique permettra une plus grande équité sur le territoire national et au-delà” Innovation en santé : la proposition de loi adoptée en première lecture au Sénat La HAS publie 4 référentiels de télésurveillance médicale Entretien Isabelle Adenot (CNEDiMTS): "L’arrivée de l’IA a bousculé nos processus d’évaluation" Dispositifs médicaux connectés : Un guide de la HAS pour accompagner les industriels à préparer l'évaluation