Accueil > Industrie > TENDANCES 2024 – PECAN et droit commun : le marché de la télésurveillance se consolide TENDANCES 2024 – PECAN et droit commun : le marché de la télésurveillance se consolide L'entrée dans le droit commun et la prise en charge anticipée permettent aux entreprises d'accéder au remboursement de leur solution de télésurveillance. Plus de six mois après cette mise en place, le marché est entré dans une nouvelle phase de consolidation. Par Coralie Baumard. Publié le 16 janvier 2024 à 21h19 - Mis à jour le 25 février 2025 à 14h58 Ressources Avec l’entrée dans le droit commun le 1er juillet 2023, la France est devenu le premier pays de l’Union européenne à rembourser (hors expérimentation) les solutions de télésurveillance médicale qui apportent un bénéfice clinique ou améliorent l’organisation des soins. Signaux forts Les arrêtés instaurant les référentiels des lignes génériques pour la télésurveillance de l’insuffisance cardiaque, du diabète, de l’insuffisance rénale et de l’insuffisance respiratoire sont parus au Journal officiel le 24 juin 2023. Cureety devient la première entreprise à bénéficier de la PECAN. Interrogé par mind Health, François-Guirec Champoiseau, son CEO, soulignait l’impact non négligeable de cette obtention. “La dynamique est excellente, nous avons entre guillemets une reconnaissance du marché. Nous avons recruté 10 centres en septembre 2023, autant que sur toute l’année 2022. Aujourd’hui, nous déployons notre solution dans 5 à 10 centres par mois. Nous triplons notre volume de recrutement de patients et la file active de notre plateforme tous les 6 mois.” Le remboursement de Resilience est acté au Journal officiel. L’entreprise est la première à avoir obtenu un inscription en nom de marque de sa solution depuis l’entrée dans le droit commun de la télésurveillance. Le décret concernant le niveau de rémunération supérieure des professionnels de santé prévu pour la télésurveillance des patients gravement atteints suivis pour insuffisance cardiaque ou diabète est paru au Journal officiel le 7 janvier 2024. Il prévoit un forfait majoré de niveau 1 de 56 € et un forfait niveau 2 de 70 €. Au 22 décembre 2023, 25 entreprises ont obtenu le certificat de conformité au référentiel d’interopérabilité et de sécurité de l’Agence du numérique en santé. Trois d’entre elles ont obtenu plusieurs certificats : Implicity, Newcard et myDiabby Healthcare. Pourquoi c’est important ? Débuté en 2014 et renouvelé en 2018, le programme ETAPES a expérimenté la prise en charge par l’Assurance Maladie de la télésurveillance de cinq pathologies : insuffisance cardiaque, insuffisance rénale, insuffisance respiratoire, diabète, prothèses cardiaques implantables. L’entrée dans le droit commun qui lui fait suite doit permettre un déploiement de la télésurveillance à plus grande échelle pour améliorer la prise en charge des maladies chroniques et optimiser les parcours. L’objectif est également de réduire les hospitalisations évitables qui, comme le confiait Pierre Simon, ancien président fondateur de la Société Française de Télémédecine et néphrologue, à mind Health “représente environ une dizaine de milliards d’euros par an pour l’Assurance Maladie”. Une ouverture à de nouvelles pathologies Avec l’entrée dans le droit commun, l’éligibilité au remboursement n’est plus limitée à cinq pathologies mais accessible quelle que soit la pathologie traitée. Une ouverture synonyme d’une nouvelle impulsion pour la filière. “L’exemple de Resilience l’a prouvé, en moins de six mois, nous sommes capables d’ouvrir de nouvelles indications et de mettre en place un remboursement pour une profession qui n’en avait pas jusqu’à maintenant. Certaines entreprises sont actuellement financées via France 2030 pour des essais cliniques en cours. Nous avons construit un continuum avec la stratégie d’accélération pour leur permettre de faire des essais cliniques médico-économiques ambitieux et ainsi déposer des dossiers de remboursement”, souligne Vincent Vercamer, directeur de projets à la Délégation ministérielle au numérique en santé (DNS). Biosency, Ensweet, Cureety, Healabs et Diampark sont ainsi lauréates de l’AAP “Évaluation du bénéfice médical et/ou économique des dispositifs médicaux numériques ou à base d’IA” qui leur permet d’obtenir un financement évaluer leur solution. Télésurveillance en oncologie : le filtre du remboursement Corinne Collignon, cheffe de service de la Mission numérique en santé de la HAS, confirme que les dossiers étudiés par la CNEDiMTS concernent aujourd’hui des pathologies variées. “ETAPES ne ciblait que des situations chroniques, mais on peut imaginer à terme que la télésurveillance s’inscrive dans des situations plus aiguës, par exemple pour favoriser la sortie précoce d’hospitalisation. Tucky Center, qui a reçu un avis défavorable de la CNEDiMTS en octobre dernier, revendiquait trois indications distinctes, dont une en suivi post-opératoire des patients après une opération de chirurgie bariatrique. Ce dossier montre bien que certains industriels vont aller dans des indications très différentes de celles d’ETAPES. C’est justement l’intérêt de ce guichet d’ouvrir à d’autres situations qui pourraient bénéficier d’une télésurveillance médicale.” La CNEDiMTS a rendu son avis sur deux dossiers en nom de marque (Continuum et Resilience), ainsi que sur trois dossiers en PECAN (Cureety, Presage et Tucky Center). ”En 2024, nous allons avoir les décisions de référencement pour plusieurs solutions en oncologie. Il n’y a pas la perspective de faire une ligne générique immédiatement mais en effet d’ici deux ou trois ans il semble logique d’en avoir une”, indique Vincent Vercamer. Analyse et perspective 2024 Si l’ouverture à de nouvelles pathologies présente une opportunités, certains grands acteurs ont quitté le marché avec l’entrée dans le droit commun. En janvier dernier, CDM e-Health, la société du groupe Air Liquide spécialisée dans la télésurveillance des patients insuffisants cardiaques, annonçait qu’elle mettait fin à son activité à partir du 30 juin 2023. En cause, les tarifs de remboursement, ainsi que sa dégressivité. D’autres entreprises semblent également s’être retirées du marché comme Sanofi Aventis et Roche Diabetes Care France qui proposaient dans le cadre du programme ETAPES des solutions de télésurveillance du diabète. Au 31 décembre 2023, elles n’avaient pas obtenu le certificat de conformité au référentiel d’interopérabilité et de sécurité de l’ANS leur assurant la continuité du remboursement de leurs solutions. La consolidation du marché promet de se poursuivre. “Nous arrivons à un certain stade de maturité, d’autant que le secteur n’a pas un nombre très important de patients. Les entreprises, si elles veulent survivre, ont la possibilité d’aller à l’international, mais peu de pays ont une maturité comparable à la France ou de fusionner”, estime Vincent Vercamer. Quelques mouvements avaient déjà pu être observé avant même l’entrée dans le droit commun, notamment Sêmeia qui avait racheté son concurrent Optim Care en décembre 2022. Si certaines entreprises comme Biosency, Tilak Healthcare ou encore Epoca ont réussi à boucler des levées de fonds, la tendance est à la raréfaction des financements, ce qui devrait accentuer le nombre de fusions-acquisitions. D’autant que certains acteurs à l’instar de Resilience affichent clairement leurs ambitions “d’élargir le spectre des pathologies suivies”. Resilience rachète GutyCare et dévoile sa stratégie de conquête du marché de la télésurveillance Paul-Louis Belletante, Chief Strategy Officer de Resilience, détaillait à mind Health la stratégie de l’entreprise après son acquisition de GutyCare, spécialisée dans la télésurveillance des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin. En mai dernier, le Dr Nicolas Pagès, CEO et cofondateur de Satelia confiait à mind Health son ambition “dans cinq ans, d’être présent dans cinq pays européens en ciblant cinq pathologies”. Un changement de modèle alors que la majorité des entreprises avaient jusqu’à présent essayé d’asseoir leur position en ciblant une pathologie. “L’entrée dans le droit commun donne la possibilité aux acteurs d’être multipathologies. Mais cela suppose qu’ils aient la capacité à réaliser des études cliniques pour pouvoir justifier auprès de la HAS l’ouverture d’une nouvelle indication et donc possiblement être multipathologies. Toutes les entreprises ne sont pas en capacité de le faire. Un second sujet est la capacité technique et réglementaire à être effectivement multipathologies. Il faut avoir réfléchi à une architecture logicielle permettant de justifier auprès de l’organisme notifié l’ajout d’une nouvelle aire thérapeutique et avoir un socle technique facilement adaptable d’une aire thérapeutique à une autre”, analyse Daniel Szeftel, président de Sêmeia. L’entreprise a un essai clinique en cours sur le diabète de type 2, un second va démarrer sur les MICI et elle va également travailler sur la dépression. Elle compte miser sur la PECAN pour les consolider. Outre la question capitalistique, Daniel Szeftel considère que le second sujet qui guidera la consolidation du marché sera la prochaine décision de la HAS : “La HAS a valorisé la conformité aux recommandations de l’ESMO plus que les études cliniques propriétaires, c’est un peu une ligne générique déguisée. Pour moi, cette première prise de position de la HAS sur la PECAN de Cureety ainsi que sur le nom de marque de Resilience ne dit pas encore quelles sont les exigences réelles de la HAS sur l’acceptation d’un nom de marque. Le sujet de 2024, c’est le premier nom de marque réel que la HAS acceptera de valider et qui donnera le la pour toutes les autres demandes qui vont suivre. On saura alors si l’on a un vrai marché dynamique de la télésurveillance.“ Autre sujet qui reste en suspens, la ligne générique concernant les prothèses cardiaques implantables, le texte n’étant à ce jour pas paru. Coralie Baumard Appel à projetsFinancementsLevée de fondsstart-upTélésurveillance Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind