Comment des médias audiovisuels publics européens s’unissent pour mutualiser leurs contenus d’informations en ligne

Contexte

L’Union européenne de radio-télévision (UER), dont France Télévisions est membre, réunit 115 organisations de services publics audiovisuels afin de réaliser des synergies, échanger des analyses et développer des projets collectifs entre médias. La structure est l’un des organes capables de mettre en œuvre des projets collectifs européens que demandent les autorités politiques de certains pays – dont la France – pour une information de qualité moins onéreuse à produire. Les médias membres de l’UER revendiquent un total de 40 000 journalistes. C’est dans ce cadre que l’association a déployé le 9 février un dispositif technique de mutualisation des articles d’information produits par 15 de ses membres.

Objectif

Ce dispositif, qui a été testé durant plusieurs mois, doit rendre accessibles aux rédactions des médias publics, au même endroit et facilement, les articles et vidéos produits par d’autres médias publics qui auront été préalablement traduits. “Ce projet numérique, d’importance stratégique, donnera à nos publics nationaux un aperçu pan-européen sur notre réalité partagée. Il facilitera aussi la vérification des faits au-delà des frontières et renforcera la nécessité pour les responsables politiques de rendre des comptes”, a indiqué fin janvier dans un communiqué Dephine Ernotte, présidente de France Télévisions et de l’UER.

“Il s’agit d’enrichir les points de vue, de partager les expertises sur l’actualité et de faciliter la compréhension de ce qui se passe dans d’autres pays”, complète auprès de mind Media Eric Scherer, directeur de l’innovation et des affaires internationales de France Télévisions, qui a été l’un des deux responsables du projet au sein de l’UER (sa fiche LinkedIn).

Si la deuxième étape du projet prévoit la distribution des contenus sur les sites d’actualités de certains médias membres, il n’y a pas d’enjeu autour du nombre de clics ou du volume d’audience pour les médias. L’intérêt est d’offrir aux rédactions une perspective éditoriale plus large.

Dispositif

Le premier volet du dispositif a été déployé le 9 février. 15 groupes médias audiovisuels publics issus de différents pays participent, notamment France Télévisions pour la France, Arte (France et Allemagne), BR-ARD (Allemagne), RTBF (Belgique), RTVE (Espagne) et RAI (Italie).

Un CMS sert d’infrastructure commune pour agréger les contenus d’informations (articles, vidéos) partagés par les rédactions de ces 15 médias. Ces contenus sont traduits automatiquement en plusieurs langues via une solution européenne dont le nom n’est pas communiqué. Un moteur de recherche permet ensuite d’effectuer des recherches thématiques.

Ce premier niveau du dispositif permet ainsi de constituer une agence de presse informelle, uniquement BtoB, pour offrir à chaque rédaction utilisatrice une veille sur l’actualité européenne à partir des contenus produits pas d’autres médias de service publics.

Et après ?

Ce projet de mutualisation des contenus prévoit la mise en place ces prochains mois d’un deuxième niveau pour ce dispositif, cette fois en BtoC avec 10 médias participants : France Télévisions (France), Arte (France et Allemagne), BR-ARD (Allemagne), RTBF (Belgique), RTVE (Espagne), YLE (Finlande), RTE (Irlande), RAI (Italie), RTP (Portugal) et SWI (Suisse). Ils afficheront sur leurs sites d’informations, au sein d’un module de recommandation qui sera placé sous leurs articles, les contenus traduits qu’ils auront sélectionnés parmi ceux à disposition.

L’outil de recommandation reposera sur la technologie de Peach, un programme de développement interne à l’UER sur la distribution personnalisée de contenus, et la marque média d’origine sera visible.

L’un des enjeux de cette étape du projet tient dans les droits d’auteurs attachés aux productions journalistiques qui diffèrent selon les organisations et les pays. Liberté a donc été donnée aux médias membres du premier niveau de choisir si leurs contenus alimentent ce dispositif de diffusion en BtoC et lesquels.

Cet outil de recommandation est mis à disposition de tous les membres de l’UER qui participent aux échanges d’actualités, ainsi qu’aux organisations uniquement radio de l’association qui souhaitent partager leurs contenus. D’autres médias publics pourront donc prochainement rejoindre le dispositif.

Financement

Le budget pour le premier niveau du projet – la constitution d’une agence de presse de fait – a nécessité un investissement de 800 000 euros débloqué par le comité Actualités de l’UER.

Pour le deuxième niveau du dispositif – la sélection et la distribution de contenus en ligne – qui devrait être mis en place ces prochains mois, l’UER a obtenu une aide de cofinancement de 900 000 euros de la part de la Commission européenne, afin de “financer le développement des moyens techniques et les process de tri en entre rédactions”, selon l’UER.

L’accord de financement conclu avec l’institution européenne prévoit son aboutissement au plus tard en juillet 2021. Il comprend aussi le programme de nature similaire “Collection européenne”, une sélection de documentaires, magazines et reportages sur des sujets d’actualité, de politique et de société en Europe, qui réunit sur leurs espaces numériques certains programmes produits par les médias publics allemands ARD et ZDF, France Télévisions, Arte et le média suisse SRG SSR.