Accueil > Médias & Audiovisuel > 2024, année charnière pour 20 Minutes 2024, année charnière pour 20 Minutes Le média d’informations gratuit a de nouveau affiché des pertes en 2023. Affecté par un contexte publicitaire difficile, le titre, qui vient de réorganiser sa rédaction, va déménager son siège en février. La question de la viabilité de son modèle se pose, mais sa direction se dit confiante sur la relance de l’activité. Parmi les initiatives : une évolution éditoriale, un journal dédié aux JO de Paris proposé en français et en anglais cet été, et une politique de lobbying auprès des pouvoirs publics et des agences de communication. Par Jean-Michel De Marchi. Publié le 12 janvier 2024 à 15h43 - Mis à jour le 12 janvier 2024 à 15h44 Ressources Entre mesures d’économies et projets de développement, 20 Minutes cherche de nouveaux relais pour inverser la spirale dans laquelle il se trouve. La fin des éditions régionales papier et la trentaine de suppressions de postes enregistrées lors du plan de départs de 2022 (la moitié dans la rédaction), après déjà six suppressions de postes en 2021, n’ont pas suffi à redresser totalement les comptes. La baisse structurelle des usages papier et les difficultés croissantes sur le marché de la publicité dont souffrent les éditeurs médias mettent à mal les modèles intégralement publicitaires, partout en Europe. Belgique, Suisse… les difficultés s’accentuent pour le modèle de la presse gratuite C’est aussi le cas de 20 Minutes en France, et la crise sanitaire en 2020 a accéléré ses difficultés. Le titre avoisinait une quarantaine de millions d’euros de chiffre d’affaires et de légers bénéfices entre 2016 et 2019, avant un décrochage important de ses revenus en 2020 du fait de la non distribution du journal pendant les confinements et de la chute de la publicité. 20 Minutes totalise depuis quelques millions d’euros de pertes cumulées ces dernières années. “Nous ne communiquons pas sur les chiffres, mais la tendance s’améliore, et pas seulement du fait des économies mises en place. Il y a des signaux très positifs au niveau publicitaire qui nous permettent d’envisager un retour à la rentabilité en 2024”, affirme Ronan Dubois, directeur général de 20 Minutes depuis près d’un an. Des économies supplémentaires Détenu à parts égales par Sipa Ouest-France et le groupe Rossel, 20 Minutes rassemble maintenant près de 180 salariés (35 en régions) dont 90 journalistes. Le déménagement de son siège aura lieu fin février, toujours à Levallois-Perret dans les Hauts-de-Seine, pour des bureaux plus petits (1 100 m2), plus adaptés à la taille et aux besoins de ses équipes parisiennes (155 personnes en Île-de-France avec un télétravail important). Contraint, ce déménagement permettra cependant au journal de réaliser des économies de loyers et de recevoir une indemnisation pour la rupture de bail anticipée. Avec un effet positif important sur ses finances. Un nouveau siège, toujours à Levallois-Perret Comme mind Media l’indiquait le 21 décembre, 20 Minutes va quitter ses principaux locaux. Ils sont situés depuis octobre 2021 au 28-32, rue Jacques Ibert, à Levallois-Perret, dans les Hauts-de-Seine. Son propriétaire, BNP Paribas, a cédé l’immeuble au fonds d’investissement Red Tree. Celui-ci veut faire des travaux importants et les mettre aux normes HQE. La société va dédommager 20 Minutes pour la rupture de bail. Le journal rejoindra en février le 155-159 rue Anatole France, dans la même ville. Ces locaux appartiennent au fonds de gestion Comerz Real. Fin décembre, là aussi pour des raisons économiques, 20 Minutes a mis fin au contrat noué il y a 12 ans avec Agence Nice Presse, qui lui fournissait les articles locaux à Nice, pour le papier et le site, et dernièrement uniquement pour le site. Le même type de prestation éditoriale externe existe pour Montpellier et le contrat est pour l’instant conservé. Les JO de Paris pour rebondir Outre les différentes mesures d’économies (réduction des effectifs, suppression d’éditions papier, frais généraux), le journal a amorcé plusieurs projets. Il compte sur le développement de la vidéo, notamment via sa télévision locale en île-de-France, et sur l’impact des Jeux olympiques de Paris. 20 Minutes produira un journal de 16 pages dédié aux JO et aux sorties dans Paris et en Ile-de-France – un “city guide” -, notamment pour les touristes, attendus très nombreux. Cette édition distribuée gratuitement du lundi au vendredi sera intégralement traduite en anglais, soit des paginations de 32 pages. Selon la direction, l’accueil par les annonceurs est excellent. Le dispositif est supervisé par Fanny Annoot-Oualia, recrutée comme directrice de la rédaction en septembre. Jusque-là directrice du numérique de France Inter, elle a déjà travaillé avec Ronan Dubois à Konbini où elle a été rédactrice en chef (2018-2021). Elle a par ailleurs impulsé une nouvelle organisation de la rédaction au sein du journal au dernier trimestre, laquelle doit servir une évolution des contenus. Outre des efforts au long cours sur la vidéo, 20 Minutes veut renforcer son positionnement comme média du quotidien des Français, avec un ton positif et léger, sur des thématiques fortes, comme le climat et l’environnement, de l’actualité chaude et des articles plus magazines, plus anglés, utiles aux lecteurs. Par ailleurs, des passerelles et synergies avec les deux actionnaires de 20 Minutes sont et seront encore développées, par exemple dans le content-to-commerce (avec SIPA Ouest-France) et pour 20 Minutes TV (avec Rossel). Une sensibilisation des pouvoirs publics et des agences 20 Minutes veut également jouer la carte institutionnelle en sensibilisant sur son rôle dans l’accès à l’information fiable et gratuite. “20 Minutes est aujourd’hui le seul éditeur gratuit d’information nationale et nous touchons un Français sur trois chaque mois. A l’heure où les fake news se développent sur les réseaux sociaux, où le public se détourne des médias et où la presse payante devient de plus en plus chère, donc élitiste, notre offre éditoriale gratuite a un rôle clé pour tout un pan de la société et doit être soutenue”, estime Ronan Dubois. [info mind Media] Nouvelles hausses des tarifs des quotidiens nationaux payants en janvier 2024 : le prix moyen atteint 3 euros Le directeur général de 20 Minutes a ainsi entamé une action de lobbying en novembre. D’abord auprès des agences, en contactant une cinquantaine de dirigeants en agences médias pour insister sur la nécessité de “soutenir” le journal à travers leurs investissements publicitaires. “Notre mission est vitale et votre soutien indispensable. En investissant dans 20 Minutes, les marques ne font pas seulement un choix économique, elles font un acte citoyen. Elles contribuent directement à rendre l’accès à une information de qualité équitable pour tous les Français”, affirme-t-il dans son courrier. En parallèle, 20 Minutes tente aussi de mobiliser les autorités publiques. Sa direction a envoyé un courrier au ministère de l’économie et des finances et à celui de la Culture – il a été adressé aux deux ministres d’alors (Bruno Le Maire, Rima Abdul-Malak), ainsi qu’à la DGMIC -, là encore pour mettre en évidence le rôle spécifique de 20 Minutes dans l’accès à l’information fiable. L’idée défendue : accorder des réductions ou des facilités fiscales aux marques sur une partie de leurs investissements publicitaires dirigés vers des médias essentiels à la société, comme 20 Minutes. Marc Feuillée (Groupe Figaro) : “On peut imaginer une protection de l’information par des quotas publicitaires en faveur des médias nationaux, en France ou en Europe” La direction se veut optimiste sur une nouvelle dynamique 20 Minutes joue-t-il son avenir cette année ? C’est le sentiment d’une partie des salariés, au moins concernant son édition papier, selon deux d’entre eux interrogés par mind Media. Le titre a gagné quelques années en devenant le dernier journal papier généraliste gratuit distribué à l’échelle nationale en France, après l’arrêt des parutions de Métro en 2015 et de Cnews en 2021. Ce dernier a poursuivi son activité sur le numérique. Mais le modèle est fragile, avec moins de deux quotidiens imprimés par semaine en moyenne en 2023 (1,9 exactement), soit huit quotidiens par mois selon l’ACPM, puisque les parutions sont interrompues pendant les vacances scolaires. L’arrêt des éditions locales en 2022 pour ne conserver que deux éditions – une en Ile-de-France, une autre au niveau national – s’est accompagné de la fin de la distribution papier dans certaines régions (Strasbourg, Rennes, Nantes, Nice). Cela a fait plonger son tirage papier, passé de 786 000 exemplaires en moyenne en 2019 (auxquels s’ajoutaient 153 000 téléchargements de son PDF) à 440 000 en novembre 2023 (et 343 000 téléchargements en PDF). Son audience totale s’établit désormais à 1,9 million de lecteurs par numéro, selon la dernière étude One Next de l’ACPM, en baisse de 40 % en trois ans et demi (3,3 millions). La direction se veut malgré tout confiante et insiste sur la nouvelle dynamique qui se met en place. “Nous avons de nombreux atouts à mettre en avant et 20 Minutes a su rebondir par le passé. L’intérêt pour notre marque média est toujours fort chez nos lecteurs et elle revient chez les annonceurs, avec une année 2024 qui sera très bonne”, affirme Ronan Dubois. Les Jeux olympiques de Paris vont attirer cet été les annonceurs. Mais la pérennité de l’offre papier pourra se poser en 2025, même si la direction indique ne pas avoir de projet en ce sens. Dans les équipes, on craint néanmoins la tentation de tirer une croix sur le journal papier pour réduire les coûts de fabrication et de distribution et ainsi basculer sur un modèle tout numérique. Mais même le numérique n’offre plus de garanties pour les médias ces deux dernières années. Comme chez de nombreux autres médias en ligne, les audiences de 20 Minutes ont d’ailleurs décliné ces dernières années, passant de 16 à 17 millions de VU mensuels fin 2021 (pour environ 1,7 million de VU quotidiens) à 12,7 millions de VU mensuels en novembre 2023 (1,3 million de VU quotidiens), selon Médiamétrie//NetRatings. Son trafic s’en ressent, avec 61,6 millions de visites mensuelles en novembre dernier, en retrait de 23 % en un an, selon l’ACPM. La cause ? La mise en avant moindre des médias par Facebook, des évolutions algorithmiques dans le référencement par les moteurs de recherche et plateformes sociales et l’exclusion de sous-domaines dans la mesure, pointent différents éditeurs. 20 Minutes dispose encore d’une marque média forte et d’une audience conséquente qu’il lui faut désormais mieux monétiser pour faire vivre son modèle gratuit. La tâche sera difficile. C’est l’enjeu tout au long de l’année. Jean-Michel De Marchi Marché publicitaire 2024Modèles économiquesSites d'actualité Besoin d’informations complémentaires ? 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