Accueil > Médias & Audiovisuel > De plus en plus d’intermédiaires publicitaires sur le web français De plus en plus d’intermédiaires publicitaires sur le web français Du fait du développement de la publicité programmatique ouverte, il y a en moyenne 38 vendeurs publicitaires qui disposent d'une connexion à un site web en France, selon une étude réalisée au sein de la CNIL, décryptée et enrichie par mind Media. Le chiffre est souvent bien plus important pour les principaux médias d'information et illustre la complexité croissante de la publicité programmatique. Par Jean-Michel De Marchi. Publié le 17 novembre 2020 à 14h59 - Mis à jour le 19 septembre 2022 à 16h30 Ressources Malgré les intentions affichées par de nombreux acteurs pour simplifier la chaîne marketing entre marques et éditeurs médias, le nombre de vendeurs et revendeurs d’espaces publicitaires en ligne est toujours très important : 38 en moyenne ont accès à chacun des sites web français, selon une étude du laboratoire d’innovation numérique de la CNIL (Linc). Publiée début octobre, elle permet de mesurer et de visualiser à la fois avec quels intermédiaires publicitaires les sites français sont connectés – volontairement ou non – pour commercialiser leurs espaces publicitaires en ligne et la place que ces acteurs occupent sur le web. Des intermédiaires publicitaires très nombreux sur l’ensemble du web Le Linc a utilisé la même méthode que celle employée chaque année par mind Media, à savoir l’examen de deux protocoles techniques conçus par l’IAB pour favoriser la transparence de l’achat et de la vente publicitaire : le standard Ads.txt, lancé en 2017, par lequel les éditeurs de sites web peuvent déclarer les prestataires autorisés à vendre leurs espaces (consultez notre dernier décryptage fin 2019 sur les principaux éditeurs médias) et le standard Sellers.json, lancé en 2019, qui permet aux vendeurs et adexchanges de lister leurs fournisseurs d’espaces (consultez notre dernier décryptage réalisé début 2020). TRANSPARENCE PUBLICITAIRE mind media a lancé un “hub” dans notre nouvelle rubrique “Les Essentiels” pour comprendre les enjeux et les chiffres clés de la transparence publicitaire en ligne afin de faciliter vos prises de décision : lire notre synthèse Et sur notre site : #Transparence Là où mind Media se concentre habituellement sur les quelque 70 groupes éditeurs médias les plus importants, le laboratoire d’innovation numérique de la CNIL s’est basé sur un périmètre plus large, à savoir le top 5 000 des sites web les plus visités en France (en s’appuyant sur la société de mesure Alexa) ayant déclaré un registre Ads.txt. Soit, parmi ce top 5 000, un panel retenu d’un peu moins de 1 600 sites au 26 août 2020 (31,8 %). Sur cette base, un site web en France déclare travailler avec 38 partenaires publicitaires en moyenne. De grandes variations existent : le maximum atteint est de 189 partenaires publicitaires détectés sur un site (Scan-manga.com), et le minimum d’un seul partenaire. Mais une tendance se dégage : malgré les bonnes intentions affichées par l’ensemble des acteurs ces dernières années pour réduire le nombre d’intermédiaires sur la chaîne marketing, force est de constater que les sites web travaillent avec un nombre toujours élevé de partenaires publicitaires. Méthodologie Le laboratoire d’innovation numérique de la CNIL (Linc) a étudié les standards Ads.txt renseignés par les éditeurs de sites web pour lister leurs prestataires de vente, et le standard Sellers.json, qui permet aux vendeurs et adexchanges de lister leurs fournisseurs d’espaces. L’étude a été réalisée le 26 août 2020. Le Linc s’est appuyé sur les sites du top 5 000 France d’Alexa ayant déclaré leur fichier Ads.txt, soit un peu moins de 1 600 sites médias français. Etude complète Le nombre de partenaires mentionnés dans les fichiers Ads.tx d’un site peut varier selon l’ajout ou le retrait de sociétés par l’éditeur, les fichiers reposant sur des données déclaratives. Pour un commentaire ou une information supplémentaire à communiquer, contactez l’auteur de l’article ou la rédaction : redaction@mindnews.fr Les 25 sites web français ayant le nombre de prestataires publicitaires le plus important Source : Laboratoire d’innovation numérique de la CNIL (Linc) – au 26 août 2020. Périmètre : les 25 sites web en France au sein des 1 600 sites médias français disposant d’un fichier Ads.txt parmi les 5 000 les plus visités selon Alexa. Etude complète L’emprise de Google sur la vente publicitaire au sein du web franças est, s’il en était encore besoin, apparente : le groupe est présent sur près de 98 % des 400 sites les plus fréquentés en France ayant un registre Ads.txt via au moins l’un de ces outils. C’est également vrai sur les sites de longue traine, où Google excelle. Dans l’ordre, AppNexus, Magnite (issu de la fusion entre Rubicon Project et Teleria), OpenX, PubMatic, Index Exchange et Oath suivent ensuite, avec 78 à 85 % de présence sur ces sites. Les sites médias toujours très intermédiés Au sein des 1 600 sites web français analysés par le Linc, on peut raisonnablement avancer que les sites médias les plus importants en fréquentation son connectés avec davantage que les 38 sociétés publicitaires partenaires qui constituent la moyenne du panel. Lemonde.fr, par exemple, a son inventaire potentiellement accessible à 136 vendeurs et revendeurs, Lefigaro.fr 50, Orange.fr 59, Allociné.fr et Jeuxvideo.com 148, Lamontagne.fr 45, Marieclaire.fr 118, LesEchos.fr 64, Melty.fr 98, Femmeactuelle.fr 50, Cnews.fr 78, Aufeminin.com 37 et Europe1.fr 80. À l’inverse, Lacroix.com, pour qui la publicité reste modeste dans son modèle, ne travaille qu’avec 9 partenaires et Francetvinfo.fr 13. Ce qu’indique d’ailleurs notre outil Ads.txt Scan sur les relations entre les médias et leurs prestataires de vente publicitaire en ligne. Fin 2019, lors de notre dernière étude sur leurs relations portant sur un panel restreint aux 70 groupes médias les plus importants en France (soit quelques centaines de sites médias), nous avions compté que ces éditeurs travaillaient avec 45 SSP et adexchanges en moyenne, contre 27 en 2018, et 13 en 2017. Data Consultez également notre outil Ads.txt Scan pour déterminer en temps réel les relations entre groupes médias et vendeurs et revendeurs publicitaires L’inventaire publicitaire des sites web, dont ceux des médias, reste donc largement ouvert d’année en année. L’une des raisons tient à la la mise en compétition exacerbée des prestataires publicitaires par les sites médias via la technologie du header bidding, destinée à optimiser les tarifs des ventes publicitaires. Un procédé pleinement utilisé par les éditeurs depuis deux ans. La deuxième explication, étroitement liée à la première, repose sur les dispositions contractuelles signées par les éditeurs avec leurs vendeurs en direct, essentiellement SSP – ou aux pratiques grises de certains vendeurs et revendeurs. Cela permet souvent aux prestataires de revendre les inventaires à leurs propres partenaires. Nos analyses de mars 2020 auprès de 34 SSP et adexchanges montraient ainsi la raréfaction des inventaires publicitaires exclusifs, et la présence de plus en plus rares de relations directes entre éditeurs et vendeurs publicitaires. Une vente en cascade parfois non maîtrisée Le constat est simple : les vendeurs et revendeurs publicitaires sont de plus en plus interconnectés les uns aux autres, comme le montrait notre décryptage en mars, confirmé par la récente étude du Linc portant cette fois sur les fichiers Sellers.json appliqués au top 20 des SSP sur le web français : alors qu’une SSP a en moyenne des relations déclarées avec seulement 671 éditeurs et 72 intermédiaires, les 51 accords d’interconnexion observés entre 20 SSP permettent à la majorité d’entre elles d’atteindre et de vendre l’inventaire de plus de 240 000 éditeurs de sites web français. Les SSP et adexchanges ont de cette façon accès aux inventaires publicitaires de l’immense majorité des sites web, y compris, donc, ceux de très nombreux éditeurs médias. “La principale différence est qu’une SSP avec moins d’intermédiaires va pouvoir proposer l’inventaire de l’éditeur à moindre coût”, souligne le Linc (son étude complète sur les fichiers Sellers.json). Certes il s’agit d’une transaction potentielle et les éditeurs limitent parfois les accès aux revendeurs. Mais l’écosystème de la vente publicitaire programmatique ressemble donc davantage à une gigantesque toile d’araignée qu’à une chaîne linéaire. Et ce mécanisme de ventes en cascade peut parfois être important. Il est désormais bien connu par le marché, mais son étendue réelle peut parfois échapper aux éditeurs. L’étude du laboratoire d’innovation numérique de la CNIL (à partir de données récoltées fin août 2020) le confirme visuellement, en permettant d’identifier les connexions entre éditeurs et vendeurs et revendeurs publicitaires de chacun des sites web du top 50 Alexa en France. Chacun des éditeurs de sites web est l’objet de 6 à 9 niveaux d’intermédiation. En voici quelques exemples, à partir de captures d’écran après l’utilisation de l’outil proposé par le LINC : Un manque de transparence toujours réel pour certains achats programmatiques Si les protocoles Ads.txt et Sellers.json on rendu l’identité des intermédiaires théoriquement plus transparente pour les donneurs d’ordre en permettant de détecter plus facilement la fraude publicitaire et l’identité des acteurs, la traçabilité des campagnes publicitaires reste complexe et incertaine. C’est autant d’investissements publicitaires dont le marché, et particulièrement les marques, ignore la destination et l’efficacité. Une étude du cabinet PwC pour l’association des annonceurs britanniques (ISBA) associant 15 annonceurs, 12 agences, 5 DSP, 6 SSP et 12 éditeurs médias, effectuée sur 31 millions d’impressions publicitaires et publiée en mai 2020 avait ainsi évalué à 15 % la part d’achat média programmatique dont on ne peut attribuer le destinataire. Capture d’écran issue de l’étude précitée de l’ISBA – mai 2020 Les hypothèses qui expliquent cette inconnue de 15 % ? Des lacunes dans le reporting des campagnes, des frais prélevés par les DSP ou les SSP qui ne sont pas visibles, des transactions aux enchères opaques, des évolutions financières ou commerciales survenues après la vente ; des acteurs étrangers à la transaction qui captent une partie de la valeur, la revente d’impressions entre les fournisseurs technologiques, ou d’autres facteurs inconnus. La problématique est identique pour les éditeurs médias et elle est de plus en plus présente. En France, le dernier classement des principaux acheteurs publicitaires auprès des régies membres du SRI, publié en juin 2020, évaluait la proportion des investissements publicitaires en display hors instream dont l’acheteur est indéterminé à 18,3 %, contre 5,1 % en 2016. Les raisons sont là encore variées et souvent difficiles à définir avec certitude, comme notre décryptage le soulignait. Un arbitrage à faire par les éditeurs En France, le projet Trust ID, impulsé par l’UDM depuis 2019 et coordonné par Edipub, ambitionne de répondre à ces problématiques de transparence dans l’achat média, via un programme d’identifiant commun des campagnes, mais il tarde à se concrétiser. Les acteurs devront sans doute affiner leurs stratégies et faire des choix. Outre la capacité à cibler, les marques utilisent aussi la publicité programmatique pour tirer les prix à la baisse et ainsi palier un déficit de confiance dans les tarifs qui leur sont proposés. Pour les éditeurs, le programmatique permet de multiplier la concurrence entre sources d’achats et de défendre leurs tarifs. L’objectif recherché est le même : optimiser les transactions publicitaires. Dans les deux cas, le mode d’achat pratiqué prévoit un nombre d’intermédiaires importants. L’arbitrage entre transparence de la chaîne programmatique et optimisation financière s’avère donc délicat. C’est l’un des enjeux à résoudre pour une meilleure confiance au sein du marché et in fine une monétisation publicitaire plus efficace. L’un des leviers possibles est de mieux définir les relations contractuelles avec les SSP et avec les DSP pour cadrer plus étroitement l’achat et la vente en programmatique. SURMONTER LA CRISE mind Media lance un nouveau “hub” pour comprendre les nouveaux enjeux de la crise économique et publicitaire, présenter les chiffres clés du marché et les initiatives des acteurs : lire notre synthèse. Et sur notre site : #Surmonter la crise Jean-Michel De Marchi Achat programmatiqueAdtechHeader biddingPublicité programmatiqueSSPTransparence Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Hors-séries gratuit [Hors-série] Transparence de l’achat média publicitaire Dossiers Sellers.json (1/3) : Quels SSP ont le chemin le plus direct vers les éditeurs ? Dossiers Sellers.json (2/3) : le header bidding a raréfié les inventaires exclusifs Dossiers Sellers.json (3/3) : pourquoi les SSP et adexchanges ont multiplié les interconnexions entre eux Entretiens gratuit Bruno Latapie (20 Minutes) : "La crise va exacerber les enjeux de transparence et de traçabilité des investissements publicitaires" Transparence publicitaire : enjeux et initiatives essentiels Nos synthèses et chiffres sur les principales thématiques du marché Les mutations du search à l'ère de l'IA générative L'application inaboutie de la loi sur les droits voisins Google vs DOJ : tout ce qu'il faut savoir sur le procès qui pourrait redéfinir l'adtech L’essentiel sur les identifiants publicitaires La transformation du marché publicitaire en 2024 2023 : le marché publicitaire doit se préparer à la fin du tracking utilisateur Comment l’intelligence artificielle générative bouleverse les médias Les enjeux réglementaires des médias en 2023 analyses Les articles d'approfondissement réalisés par la rédaction Adtech : pourquoi la Commission européenne sanctionne Google de près de 3 milliards d’euros Retail media : une consolidation indispensable des régies pour répondre aux attentes des acheteurs publicitaires IA et monétisation des contenus : comment l’IAB Tech Lab veut contrôler les robots crawlers Droits voisins : l’Apig veut introduire une plainte contre Meta devant l'Autorité de la concurrence Paul Boulangé (Starcom France) : "Nous sommes en train de déployer Captiv8 en France, notre solution d'automatisation du marketing d'influence" Claire Léost devient DG de CMA Média, WPP Media promeut Stéphanie Robelus… Comment les SSP généralistes investissent le secteur du retail media Bénédicte Wautelet (Le Figaro) : “Toute solution qui utilise de l’IA en rapport avec nos contenus doit y être autorisée et nous rémunérer” Aides à la presse : combien les éditeurs ont-ils perçu en 2024 ? 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