Orange, Vodafone, Deutsche Telekom et Telefónica dévoilent leur projet d’identifiant publicitaire partagé

La Commission européenne a annoncé vendredi 6 janvier avoir reçu un dossier présenté par les quatre principaux groupes télécoms européens, Vodafone, Deutsche Telekom, Orange et Telefónica, pour créer une joint-venture afin de mettre en place sur le marché un identifiant publicitaire à l’échelle européenne. L’initiative vise à concevoir et utiliser une nouvelle solution d’identification numérique sur mobile, unique et partagée, pour permettre aux éditeurs médias et aux marques de personnaliser l’expérience utilisateur et développer leurs activités de marketing et de publicité numériques sans cookies et sans les solutions des plateformes tout en respectant la vie privée des internautes.

Même si des opérateurs français avaient également un projet similaire en tête, l’initiative revient à Vodafone, comme mind Media l’avait annoncé fin août. Le groupe britannique a rencontré plusieurs opérateurs télécoms français et européens depuis le printemps 2022. Des présentations ont également été faites auprès du marché publicitaire – notamment l’Alliance digitale – et de la Cnil cet automne.

Concrètement, Vodafone a conçu et met à disposition sa technologie baptisée TrustPid pour “pseudonymiser” l’utilisateur. “Sous réserve du consentement explicite de l’utilisateur fourni à la marque ou à l’éditeur (via un opt-in), l’entreprise commune générera un jeton sécurisé à partir d’un identifiant interne sécurisé et pseudonymisé via un code haché (chiffré) ou un mot de passe”, indiquent les acteurs dans leur requête.

Un potentiel important pour le marketing

Le dispositif s’appuie sur l’adresse IP de l’utilisateur pour générer des jetons numériques uniques et sécurisés (tokens) via des nombres aléatoires. Ils sont assimilés à des identifiants, mais “il n’est pas possible avec les jetons de vous identifier directement en tant que personne”, assure Vodafone sur un site de présentation. Pour être intégrés au dispositif, les internautes doivent avoir donné activement, sur les réseaux mobiles uniquement, leur consentement sur chaque site web participant, séparément et via un opt-in.

Selon le groupe, ils peuvent se désengager à tout moment ou ajuster leur préférences via un portail de gestion des données : une CMP dédiée sera proposée aux internautes pour observer et gérer – éventuellement supprimer – leur consentement sur chacun des différents supports numériques partenaires.

L’objectif des quatre acteurs est de s’appuyer sur la taille de leur clientèle mobile – ils dépassent 200 millions d’abonnés mobiles en Europe – pour proposer au secteur des médias et de la publicité un identifiant unique à l’échelle européenne afin de rivaliser avec les dispositifs proposés par les grandes plateformes au sein de leurs écosystèmes et parfois en dehors.

La Commission européenne doit examiner d’ici le 10 février la conformité du projet au cadre concurrentiel européen.

Via les données postales et de géolocalisation, les opérateurs télécoms sont potentiellement des acteurs majeurs du tracking en ligne et de la publicité ciblée. Ce qui en fait également des acteurs très surveillés. Différents observateurs et associations de protection de la vie privée en ligne doutent par ailleurs de la conformité des techniques de pseudonymisation avec le RGPD. Si le projet aboutit, des recours devant les instances de protection des données personnelles sont probables. Enfin la question de la CMP dédiée au dispositif, qui théoriquement s’ajouterait à la CMP propre à chaque site de l’éditeur ou de la marque, peut constituer un sérieux écueil dans l’acceptation du dispositif.