Accueil > Adtechs & Martechs > Publicité en ligne : ce qu’il faut retenir du rapport de l’Autorité de la concurrence australienne soulignant la domination “excessive” et “anti-concurrentielle” de Google Publicité en ligne : ce qu’il faut retenir du rapport de l’Autorité de la concurrence australienne soulignant la domination “excessive” et “anti-concurrentielle” de Google Après une enquête de 18 mois, l'ACCC a publié un rapport de 200 pages dans lequel Google est pointé du doigt à la fois pour des situations s'apparentant de fait à des monopoles dans les technologies publicitaires et pour des pratiques anti-concurrentielles. Six recommandations sont formulées, dont l'octroi de nouveaux pouvoirs de régulation. Par Jean-Michel De Marchi. Publié le 28 septembre 2021 à 18h11 - Mis à jour le 01 octobre 2021 à 11h03 Ressources L’autorité de la concurrence australienne, l’ACCC, a publié mardi 28 septembre son rapport définitif sur l’écosystème publicitaire numérique australien, qui lui avait été commandé par le gouvernement en février 2020 (la synthèse). Dans cette étude de 200 pages, l’organe pointe essentiellement l’omniprésence de Google dans la publicité en ligne, à travers sa domination des technologies publicitaires et la captation des données, à chaque fois sans réelle concurrence possible (le rapport complet de l’ACCC). L’AACC estime ainsi qu’en 2020, “plus de 90 % des impressions publicitaires échangées via les technologies publicitaires ont transité par au moins un service de Google”. Le rapport a tenté une estimation des parts de marché de Google d’un bout à l’autre de la chaine technologique publicitaire : Source : Rapport ACCC sur la publicité en ligne en Australie – Septembre 2021 Aucun fournisseur n’impose une contrainte concurrentielle significative sur Google et les éditeurs n’ont pas, dans les faits, la possibilité de se passer de ses services, affirme le rapport. Bien que les revenus de Google tirés des services publicitaires pour les éditeurs “sont généralement peu importants”, l’ACCC considère que Google “a pu utiliser le contrôle qu’elle exerce sur ces services pour y associer ses services SPP plus rentables” en lui conférant un avantage concurrentiel important : Source : Rapport ACCC sur la publicité en ligne en Australie – Septembre 2021 Google bénéfice donc, selon l’ACCC, d’un monopole de fait dans les technologies publicitaires, à la fois pour la vente et la demande d’espaces : “Bien qu’il existe plusieurs fournisseurs de services DSP et SSP, Google reste de loin le plus grand fournisseur, et aucun autre fournisseur n’est un concurrent proche. Les fournisseurs rivaux de DSP et SSP se concentrent généralement sur les grands annonceurs et éditeurs, ce qui signifie que les petits clients n’ont guère le choix du fournisseur. En outre, même si les grands éditeurs et annonceurs peuvent choisir d’utiliser des services autres que Google, ils utiliseront souvent les services du concurrent en plus des services de base de Google (multi-hébergement) et ne se substitueront pas complètement à Google.se substitueront pas complètement à Google.” Source : Rapport ACCC sur la publicité en ligne en Australie – Septembre 2021 Publicité en ligne : un rapport remis au gouvernement propose différentes mesures très coercitives contre les plateformes Des pratiques qui faussent la concurrence Outre ces situations, qui constituent selon l’Autorité de la concurrence australienne des situations monopolistiques de fait, le rapport constate également des pratiques anticoncurrentielles de Google, “pour privilégier ses propres services et les protéger de la concurrence”. Selon le rapport, Google a par exemple : Restreint l’achat de l’inventaire de YouTube (qui appartient à Google) à ses propres DSP Dirigé la demande issue de ses DSP (en particulier Google Ads) vers sa propre SSP Utilisé son serveur publicitaire d’éditeur pour privilégier sa propre SSP Restreint la façon dont son SSP travaille avec des serveurs publicitaires tiers, refusant notamment de participer au mécanisme du header bidding, ces ventes d’espaces via des enchères globales mises en place par les éditeurs pour favoriser la concurrence entre différentes sources de demande publicitaire Une réglementation actuellement inefficace L’ACCC souligne que les lois australiennes “ne suffisent pas à elles seules à résoudre les problèmes de concurrence dans le secteur, et que l’ACCC devrait être habilitée à élaborer des règles spécifiques en réponse” et ajoute que de nouvelles solutions réglementaires sont nécessaires pour remédier à la domination de Google et rétablir la concurrence dans le secteur de la technologie publicitaire au profit des entreprises et des consommateurs.” C’est donc l’ensemble de la stratégie de Google qui est pointée du doigt par l’ACCC : sa politique d’intégration verticale et sa domination dans les technologies et les données constituent “des effets de levier” et “un auto-référencement”, qui a “probablement interféré avec le processus concurrentiel”. Enfin la présence du groupe à la fois du côté de la vente publicitaire et de la demande génère des conflits d’intérêt lors des enchères, au détriment de ses clients. Pour y remédier, l’autorité de la concurrence australienne formule 6 recommandations : Recommandation 1 : Google doit modifier ses documents publics (conditions générales d’utilisation, règles de confidentialité…) afin de décrire clairement comment le groupe collecte et utilise des données provenant de tiers pour fournir des services de technologie publicitaire. Recommandation 2 : L’ACCC devrait avoir le pouvoir d’élaborer des règles sectorielles spécifiques pour traiter les conflits d’intérêts et les problèmes de concurrence dans la chaîne d’approvisionnement ad tech. Ces règles s’appliqueraient aux fournisseurs de technologies publicitaires qui répondent à certains critères liés à leur pouvoir de marché et/ou à leur position stratégique Recommandation 3 : En conséquence de la recommandation 2, l’ACCC devrait pouvoir mettre en œuvre des mesures opérationnelle pour traiter les problèmes de concurrence liées à la collecte et la gestion des données liés à un pouvoir de marché d’une entreprise et/ou à sa position stratégique dans la chaîne adtech. Il peut s’agir par exemple de mesures de séparation des données au sein d’une entreprise ou l’obligation de partager des données à des tiers. Recommandation 4 : Pour résoudre les problèmes de transparence identifiés dans l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, le secteur devrait, travailler ensemble pour développer et mettre en œuvre des normes de transparence. Par exemple les tarifs moyens et les taux d’acceptation des services adtechs et pour permettre une vérification complète et indépendante des services de plateforme à la demande. Recommandation 5 : Google devrait fournir aux éditeurs des informations suffisantes pour leur permettre de comparer la demande publicitaire reçues du SSP de Google (Google Ad Exchange) avec les SSP tierces et avec les enchères issues du header bidding, incluant les informations relatives aux offres de prix de vente d’une impression. Recommandation 6 : L’ACCC devrait être habilitée à élaborer et à appliquer des règles visant à améliorer la transparence des prix et des performances de l’ensemble des services adtechs. Ces règles seraient élaborées en consultation avec le secteur, par exemple des identifiants de transaction communs ou des exigences de publication des prix et des taux de prise dans un formulaire standard. La volonté de coordonner la régulation à l’échelle internationale “Beaucoup des problèmes que nous avons identifiés dans la chaîne d’approvisionnement de la technologie publicitaire sont similaires aux problèmes d’autres marchés de plateformes numériques, tels que la recherche en ligne, les médias sociaux et les marchés d’applications, a déclaré le président de l’ACCC, Rod Sims. Ces marchés sont également dominés par un ou deux fournisseurs clés, qui bénéficient d’une intégration verticale, ce qui entraîne d’importants problèmes de concurrence. Dans de nombreux cas, ceux-ci sont aggravés par un manque de transparence. La réglementation sectorielle, telle que celle proposée dans ce rapport, n’est pas nouvelle. D’autres industries, telles que les télécommunications, ont des règles spécifiques qui peuvent répondre aux problèmes particuliers de concurrence et de transparence identifiés dans ces secteurs.” Le gouvernement australien a indiqué examiner le rapport et les recommandations formulées. Mais des décisions ne devraient pas être prises avant un an : la manière dont les recommandations de ce rapport devraient être mises en œuvre, y compris le cadre juridique des règles et pouvoirs proposés, sera examinée “dans le cadre d’un rapport plus large de l’ACCC attendu en septembre 2022”, a déclaré Rod Sims. D’ici-là, l’organe va travailler “très étroitement avec (ses) homologues internationaux qui sont à différents stades de l’introduction de règles similaires pour traiter ces problèmes”, a-t-il ajouté. Google fait en effet face aux mêmes critiques aux Etats-Unis et en Europe. Des enquêtes sont en cours et des sanctions ont déjà eu lieu. Google a été condamné dans le cadre européen à trois reprises pour différentes pratiques anti-concurrentielles, pour 8,25 milliards d’euros d’amendes. La Commission européenne a lancé avant l’été une enquête sur la publicité en ligne visant Google. En France, le groupe a déjà été reconnu coupable à deux reprises pour ses pratiques publicitaires, en décembre 2019 pour la publicité search, et en juin 2021 pour les enchères programmatiques. Lors de ce dernier volet judiciaire, Google avait été reconnu coupable d’avoir favorisé sa SSP dans le système d’enchères programmatiques ouvert au détriment de l’ensemble du secteur publicitaire. Le groupe avait accepté une transaction amiable prévoyant une amende de 220 millions d’euros et formulé une série d’engagements pour modifier ses pratiques qu’il devra respecter dans les trois ans à venir. Publicité en ligne : pourquoi l’Autorité de la concurrence française inflige une amende de 220 millions d’euros à Google La réaction de Google Un porte-parole de Google nous a partagé le commentaire suivant : “Les services de technologie publicitaire numérique de Google apportent des avantages aux entreprises et aux consommateurs : ils aident les éditeurs à financer leur contenu, permettent aux petites entreprises d’atteindre des clients et de se développer, et protègent les internautes des mauvaises pratiques publicitaires. Une analyse réalisée par PwC Australie pour le compte de Google Australie a révélé que les trois quarts des clients de la technologie publicitaire de Google sont des petites et moyennes entreprises australiennes, et que trois entreprises interrogées sur quatre ont observé des avantages importants à utiliser les services de Google, notamment des économies de coûts, des gains de temps et une croissance de l’activité, par rapport à d’autres services. PwC estime également que l’existence et l’utilisation de la technologie publicitaire de Google soutiennent directement plus de 15 000 emplois équivalents temps plein et apportent une contribution annuelle de 2,45 milliards de dollars à l’économie australienne. En tant que l’un des nombreux fournisseurs de technologie publicitaire en Australie, nous continuerons à travailler en collaboration avec l’industrie et les régulateurs pour soutenir un écosystème publicitaire sain.” Jean-Michel De Marchi Achat programmatiqueAdtechConcurrenceDuopoleEtudesPublicité programmatiqueRéglementation Besoin d’informations complémentaires ? 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