Accueil > Médias & Audiovisuel > Meta met un terme à sa politique de main tendue vers les médias Meta met un terme à sa politique de main tendue vers les médias Facebook va fermer définitivement Instant Articles au printemps 2023. Une nouvelle décision qui s'inscrit dans le pivot du groupe amorcé fin 2021 : l'information devient marginale dans la stratégie de l'entreprise. Par Jean-Michel De Marchi avec Charlène Salomé. Publié le 28 octobre 2022 à 0h16 - Mis à jour le 28 octobre 2022 à 0h16 Ressources Meta poursuit sa réorientation stratégique. Le groupe a indiqué à Axios vendredi 14 octobre qu’Instant Articles sera supprimé en avril 2023 à l’échelle mondiale. Ce dispositif permet aux utilisateurs de l’application mobile de Facebook de lire des articles d’éditeurs médias partenaires dans leur intégralité sur la plateforme et avec un temps de chargement accéléré. Avec la fin du dispositif, le trafic des éditeurs sera dirigé directement vers leurs sites web mobiles. Instant Articles avait été mis en place à l’automne 2015, période pendant laquelle les premières critiques des médias ont vu le jour publiquement pour pointer la domination des sociétés technologiques pour l’accès aux audiences et la captation des revenus publicitaires. Facebook et Google, principales sociétés visées, ont alors rivalisé d’initiatives pour attirer les contenus des médias et les assister pour trouver de nouvelles audiences et les monétiser. Google a lancé un dispositif similaire à Instant Articles, baptisé Accelerated mobile pages (AMP). Des dispositifs peu monétisés Le format Instant Articles n’était plus que marginalement utilisé, en France comme dans les autres marchés. Malgré une première année pleine d’espoirs en 2016 du fait de ses bonnes audiences, Instant Articles a ensuite rapidement été critiqué puis délaissé par l’essentiel des éditeurs médias du fait d’une monétisation publicitaire décevante. En cause : l’absence de données sur les usages des utilisateurs transmises par Facebook et des conditions commerciales très strictes, comme la taille et l’unicité des formats publicitaires, et l’absence de connexion aux outils programmatiques. Une façon de tendre la main aux éditeurs, mais avec parcimonie. Une habitude pour les plateformes. Pourquoi les plateformes voient leur revenus publicitaires ralentir Avec ce format et d’autres initiatives, en particulier une série d’aides à l’innovation, l’objectif des deux groupes américains était à la fois politique, pour améliorer leur image et leurs relations avec les éditeurs, et stratégique, en augmentant la qualité des contenus dans leur écosystème et en collectant des données supplémentaires. Meta a notamment assisté les médias dans leur développement du marketing sur sa plateforme, à travers des relations de gré à gré et quelques programmes collectifs, en faveur par exemple de la presse régionale en France. Le groupe a également acheté des contenus vidéo, avec les dispositifs Facebook Live en 2016 et 2017, puis Facebook Watch en 2019 et 2020, et accordé des subventions à de petits médias, notamment en 2019, 2020 et 2021. Cela n’a pas suffit. D’abord parce que depuis deux ans, les relations entre les éditeurs et les deux grandes plateformes publicitaires sont plus conflictuelles, avec de nombreux contentieux juridiques et un lobbying plus agressif de part et d’autre. Notamment pour faire voter et appliquer un cadre légal sur la rémunération des médias pour l’indexation ou la reprise de leurs contenus. Les discussions ont été longues et tendues en France pour l’application de la loi sur le droit voisin ces deux dernières années, comme dans d’autres pays européens pour des textes similaires en Australie en 2021 et au Canada actuellement. Meta réoriente sa stratégie Ensuite parce que l’environnement du marché est moins favorable à Meta. Les restrictions dans le ciblage des utilisateurs et la mesure des performances marketing dans l’environnement applicatif d’Apple depuis un an et la montée en puissance de TikTok, qui lui prend des parts de marché, représentent des défis de taille pour son modèle publicitaire. Et pour son avenir. Obs e-pub du 1er semestre 2022 : TikTok capte des parts de marché dans le social media au détriment de Meta Depuis fin 2021, Meta tente donc de repositionner ses produits et de sa relation avec les utilisateurs. Facebook va être orienté vers une offre plus proche de celle de TikTok, avec des vidéos courtes et divertissantes, une tendance que le groupe a mal anticipé malgré les efforts déployés autour d’Instagram, et un flux de contenus plus visuels. Sur le plan financier, le groupe veut engager des investissements de plusieurs dizaines de milliards de dollars pour développer sur plusieurs années son metavers, une réorientation stratégique qui interrogent analystes et investisseurs. Les résultats de Meta de nouveau en baisse au troisième trimestre Le chiffre d’affaires de Meta a diminué de 4 % en un an, avec 27,7 milliards de dollars de chiffre d’affaires de juillet à septembre 2022, malgré un nombre d’utilisateurs quotidiens qui a progressé de 4 %, à 2,93 milliards d’utilisateurs. Son bénéfice net a chuté de 52 %, à 4,4 milliards de dollars. Au lendemain de la publication de ces résultats, jeudi 27 octobre, l’action de la société a aussitôt été pénalisée en Bourse avec une baisse de 23 %. En juillet, Meta avait déjà publié un chiffre d’affaires en baisse pour le deuxième trimestre, d’environ 1 % en un an, à 28,8 milliards de dollars. Son bénéfice s’était établi à 6,9 milliards de dollars, en baisse de 36 % en un an. Meta a progressivement pris ses distances avec les éditeurs d’actualités. Avec moins d’équipes opérationnelles dédiées et un retrait de certaines instances professionnelles. Ainsi, en France, selon nos informations, sans stratégie vis-à-vis des éditeurs ni perspective claire, Meta s’est retiré de l’ACPM en 2022. Il y travaillait jusque-là avec les éditeurs sur des sujets de mesure et de fréquentation en ligne. Cet été, le groupe a franchi un cap supplémentaire. Dans un mémo interne relayé par le Wall Street Journal en juillet, le groupe avait annoncé que ses produits Facebook News et Bulletin (newsletters) seraient délaissés. Autrement dit fermés. Le premier produit agrège des contenus d’informations des médias dans un onglet dédié sur sa plateforme, le deuxième est un outil de newsletters payantes récemment, mis à disposition, qui n’a jamais fonctionné. Le groupe avait confirmé auprès de mind Media cette décision, indiquant vouloir réaffecter ses équipes en charge de Facebook News et ses investissements vers “les créateurs de contenus”. L’objectif affiché : se concentrer “sur les expériences les plus significatives pour les utilisateurs sur Facebook et sur l’avenir de notre entreprise”, soit les contenus vidéo de “créateurs” et le métaverse. Florence Trouche quitte la direction commerciale de Meta en France Les éditeurs devront s’adapter L’arrêt du programme Facebook News est un signe fort. Sans le dire ouvertement, Meta clôt ainsi sa politique de rapprochement avec les grands éditeurs médias. Les contrats financiers pluriannuels qui ont été signés dans différents pays avec les médias iront à leur terme : à l’automne 2022 aux Etats-Unis, sans doute en 2024 au Royaume-Uni et en Allemagne, etc. Le groupe avait chiffré cette aide à 850 millions d’euros dans le monde. En France, le dispositif a été mis en place en février 2022, avec un engagement de plusieurs dizaines de millions d’euros sur trois ans répartis entre plusieurs dizaines de groupes médias sélectionnés. Sauf improbable volte face, il ne sera très probablement pas reconduit. Les médias devront trouver d’autres sources de financement et, certainement, accélérer la distribution de leurs contenus sur d’autres canaux, déjà largement entamée. Seuls quelques grands éditeurs, du fait de leur puissance statutaire et de leurs capacités de lobbying, pourraient tirer leur épingle du jeu en conservant des relations privilégiées avec Meta et en nouant des accords individuels. Jean-Michel De Marchi avec Charlène Salomé FacebookFinancementGAFAMLobbyingMetaverseSites d'actualité Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Meta fustige de nouvelles pratiques unilatérales d’Apple dans son kiosque applicatif Mediabrands entrevoit "un fort ralentissement" des investissements publicitaires en France Analyses Obs e-pub : 5 graphiques pour comprendre l'évolution de la publicité en ligne en France au 1er semestre 2022 Confidentiels [Info mind Media] Florence Trouche quitte la direction commerciale de Meta en France Meta va devoir revendre Giphy Meta va délaisser Facebook News TikTok a approché le milliard de dollars de revenus en Europe en 2021 Meta étudie l’ajout de fonctionnalités payantes à Facebook et Instagram Analyses Pourquoi les plateformes ont vu leur croissance publicitaire ralentir au deuxième trimestre Analyses Les médias français poursuivent Apple aux Etats-Unis Big Techs : la Commission européenne pourrait créer une nouvelle direction antitrust Aux Etats-Unis, la FTC veut bloquer la dernière acquisition de Meta dans la réalité virtuelle Les revenus trimestriels de Meta en baisse pour la première fois Snap nomme un nouveau directeur général en France Analyses Ce qu'il faut retenir des Cannes Lions 2022 essentiels Nos synthèses et chiffres sur les principales thématiques du marché Les mutations du search à l'ère de l'IA générative L'application inaboutie de la loi sur les droits voisins Google vs DOJ : tout ce qu'il faut savoir sur le procès qui pourrait redéfinir l'adtech L’essentiel sur les identifiants publicitaires La transformation du marché publicitaire en 2024 2023 : le marché publicitaire doit se préparer à la fin du tracking utilisateur Comment l’intelligence artificielle générative bouleverse les médias Les enjeux réglementaires des médias en 2023 analyses Les articles d'approfondissement réalisés par la rédaction Adtech : pourquoi la Commission européenne sanctionne Google de près de 3 milliards d’euros Retail media : une consolidation indispensable des régies pour répondre aux attentes des acheteurs publicitaires IA et monétisation des contenus : comment l’IAB Tech Lab veut contrôler les robots crawlers Droits voisins : l’Apig veut introduire une plainte contre Meta devant l'Autorité de la concurrence Paul Boulangé (Starcom France) : "Nous sommes en train de déployer Captiv8 en France, notre solution d'automatisation du marketing d'influence" Claire Léost devient DG de CMA Média, WPP Media promeut Stéphanie Robelus… Comment les SSP généralistes investissent le secteur du retail media Bénédicte Wautelet (Le Figaro) : “Toute solution qui utilise de l’IA en rapport avec nos contenus doit y être autorisée et nous rémunérer” Aides à la presse : combien les éditeurs ont-ils perçu en 2024 ? 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