Newsletters : Kessel consolide son choix du modèle publicitaire

Il y a un peu plus de deux ans, le rachat de la plateforme de newsletters Revue par Twitter, le développement – puis l’abandon – de son propre outil par Meta, ou encore la levée de 61 millions de dollars de Substack, témoignaient de l’intérêt croissant du secteur des médias pour ce format. Depuis, la fièvre est retombée, et le modèle économique des newsletters est encore à prouver. 

C’est dans ce contexte qu’Adrien Labastire, fondateur de la société de production de vidéos pour les réseaux sociaux Golden Moustache, et Laure Goudiard du Mesnil, ancienne account sales manager chez Microsoft, ont lancé à l’été 2022 Kessel, une plateforme qui permet de s’abonner à des newsletters payantes ou gratuites. Kessel revendique aujourd’hui 700 000 lecteurs uniques par mois et une dizaine de personnes travaillent pour la société, dont trois employés à plein temps. 

Des personnalités aux médias

Près de 500 auteurs sont actifs sur la plateforme, parmi lesquels des créateurs indépendants (Hugo Clément, Rose Lamy, Hugo décrypte, Laurent Joffrin, Lauren Bastide, Thomas Wagner, Anne Sophie Novel, mais aussi de plus en plus de médias (BFM Business, Time to sign off, Fooding, Loopsider), un axe sur lequel la société veut se développer, dans un contexte de baisse du trafic issu des réseaux sociaux. 

L’ambition est d’ailleurs de se positionner comme un véritable kiosque d’abonnement et de recommandation de newsletters, et plus seulement comme une plateforme de diffusion. “Pour les médias, l’intérêt est de trouver un nouveau relais d’audience. Sur l’aspect monétisation, nous devenons un complément de revenu s’ils souhaitent faire payer un abonnement à leur newsletter avec un paywall, ou une régie d’appoint s’ils veulent que nous leur apportions des deals publicitaires”, explique Adrien Labastire, ajoutant que des discussions sont en cours avec plusieurs groupes média pour la diffusion de leurs newsletters.

70 % des revenus tirés de la publicité 

À rebours de la plupart des acteurs de la newsletter, Substack en premier lieu, qui ont vanté les mérites du modèle 100 % payant, Kessel a fait le choix de rapidement se positionner sur la publicité et a lancé sa régie durant l’été 2023, avec Emmanuel Ferry, ancien président d’Ogilvy Paris, comme business development advisor. Elle propose exclusivement des formats publi-rédactionnels, intégrés dans les newsletters des créateurs qui souhaitent monétiser leurs contenus. “Les annonceurs arrivent avec une problématique de communication identifiée : RSE, innovation, marque employeur ou encore inclusion… Et ils cherchent à cibler des décideurs avec du pouvoir d’achat, ou les jeunes générations qui en auront plus tard”, explique Adrien Labastire. Bompard, le SIG ou la banque en ligne Fortuneo font partie des annonceurs présents sur la plateforme. Parmi les derniers clients signés figurent Arte, le SIG (gouvernement) et Netflix.

En 2023, la société a réalisé 250 000 euros de chiffre d’affaires publicitaire (70 % du revenu), contre 110 000 euros de commissions sur les abonnements. Elle se veut optimiste pour 2024, avec des revenus prévisionnels d’1,5 million d’euros. L’enjeu cette année est d’automatiser davantage le placement et l’achat publicitaire sur la plateforme. “Nous voulons créer une forme d’ad manager pour que les annonceurs soient mis en contact avec les auteurs les plus pertinents sur la cible qu’ils cherchent à viser. Ce qui reste complexe à mettre en place”, admet Adrien Labastire, ajoutant qu’une version bêta de cette plateforme est disponible.

Kessel vise une levée de fonds pour accélérer son développement technologique, notamment sur la data. “Nous voulons nous renforcer sur ce point pour proposer les newsletters les plus pertinentes aux utilisateurs et leur permettre de se construire leur bouquet idéal. Et pour les annonceurs, proposer les cibles et les contenus thématiques qui correspondent le plus à leurs objectifs commerciaux, et à terme orienter la création de contenus”, conclut Adrien Labastire.