Accueil > Investissement > Épargne : comment la crise sanitaire a accéléré l’adoption du conseil digitalisé Épargne : comment la crise sanitaire a accéléré l’adoption du conseil digitalisé Arrivés sur le marché français à partir des années 2010, les robo-advisors ne connaissent pas (encore) le succès fulgurant de leurs homologues américains et britanniques. Si les encours progressent, le recours au conseil automatisé est loin d’être devenu la norme. Tour d’horizon des acteurs en place et sur leur vision du marché. Par Caroline Soutarson. Publié le 13 janvier 2022 à 6h20 - Mis à jour le 13 janvier 2022 à 10h05 Ressources Bâtis sur les ruines de la crise financière de 2007, les premiers robo-advisors – les étatsuniens Betterment et Wealthfront en tête – ont su profiter des progrès en intelligence artificielle et d’un “sentiment grandissant de défiance des consommateurs à l’égard des banques” pour disrupter le marché du conseil financier, décrit Philipp Maume, professeur de droit à l’Université technique de Munich dans son article “Regulating Robo-advisory” paru en 2019. Suivant la tendance américaine, de nouveaux acteurs européens et notamment français se sont lancés sur le même segment de marché du conseil digitalisé et automatisé. Les primo-arrivants (lire notre premier dossier les concernant paru en 2016) Active Asset Allocation (AAA), Advize, FundShop, WeSave et Yomoni sont toujours présents. Même Marie Quantier, qui a connu quelques déboires ces dernières années, n’a pas dit son dernier mot et fait son grand retour en 2022 (voir encadré). D’autres les ont même rejoints tels que Fundvisory, Nalo, Birdee et, plus récemment Artur et Zalpha (ex-Marie Quantier), ce qui prouve une certaine attractivité du marché côté offre. Marie Quantier renaît de ses cendres en Zalpha La société éditrice de Marie Quantier, Q-Hedge Technologies, a fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire prononcé le 25 juillet 2019. Quatre mois plus tard, la solution de conseil digital a été rachetée à la barre pour moins de 100 000 euros, elle qui s’était valorisée jusqu’à 9 millions d’euros, par MyFunds Office, un distributeur de fonds de placement en France, Espagne, Belgique, Luxembourg et Suisse. “Oubliée” du public durant deux ans, la fintech refait parler d’elle lorsque le courtier Patrimea acquiert une partie de son portefeuille de clients du contrat d’assurance vie Marie Quantier I, resté assuré chez Suravenir, filiale du Crédit Mutuel Arkéa, en novembre 2021. 2022 signe le retour de la fintech, sous la marque Zalpha cette fois, avec un lancement le 10 janvier. Elle sera dirigée par Jérôme Glodas, cofondateur de MyFunds Office et président de Zalpha, ainsi que par Pierre Hervé, son directeur général. Le robo-advisor fait équipe avec Generali Vie pour le contrat d’assurance vie. Pourtant, la France n’a pas connu l’engouement des pays nord-américains ou britanniques. “On arrive à un stade de maturité sur les marchés occidentaux hors européens. Les robo-advisors détiennent plus de mille milliards de dollars d’actifs sous gestion au niveau mondial, dont 9 % en Europe”, souligne Gaël Minon, responsable des solutions digitales de Gambit et directeur de Birdee, le robo-advisor de Gambit. Selon Statista, les actifs gérés par les robo-advisors en France sont quant à eux inférieurs à 17 milliards d’euros, plaçant l’Hexagone derrière le Royaume-Uni (22,3 milliards d’euros) et l’Italie (19,4 milliards) mais devant l’Allemagne (15,3 milliards). Avec un taux de croissance supérieur à 50 % en 2021, la progression des actifs gérés par les robo-advisors en France est amenée à ralentir dans les années à venir Les épargnants français ne se sont effectivement pas jetés sur les nouvelles offres de conseil digitalisé, qui demeurent une niche. Sébastien d’Ornano, président de Yomoni, le robo-advisor qui revendique les encours les plus élevés en BtoC (650 millions d’euros en décembre 2021), indique que ses clients particuliers proviennent essentiellement de “quatre industries : la banque, le consulting, la tech et la santé”. L’acquisition client s’avère en effet complexe. D’ailleurs, cette considération avait été le point de départ de plusieurs repositionnements commerciaux des robo-advisors il y a quelques années. Advize, Birdee, FundShop ou encore WeSave, qui avaient démarré en BtoC, se sont progressivement tournés, au moins partiellement, vers le BtoB(toC). Un retour sur investissement de 7 euros pour 1000 euros déposés à la souscription Au-delà d’une faible demande pour les services de conseil financier automatisé, le retour sur investissement est également en cause dans les changements stratégiques des robo-advisors. Sébastien d’Ornano, qui souhaite rester sur le segment BtoC (à l’exception de l’offre Yomoni Society, un compte-titres accessible aux personnes morales afin d’optimiser la gestion de trésorerie), confie que “lorsque 1 000 euros sont investis via la plateforme [seuil minimal d’investissement, ndlr], nous gagnons 7 euros”. Dans le cas précis des robo-advisors en BtoC, en plus de conseiller une allocation d’actifs automatiquement (et/ou avec peu d’intervention humaine), la proposition de valeur se fait sur une réduction des frais de gestion par rapport à leurs concurrents traditionnels en dirigeant l’épargne des utilisateurs vers des fonds indiciels peu coûteux. Les frais de gestion globaux sont inférieurs à 2 % pour l’ensemble des plateformes. Le business model repose donc, comme souvent pour les fintech BtoC, sur les volumes. À l’inverse de celui des robo-advisors travaillant en BtoB, qui misent sur l’abonnement. “Nous recevons des frais d’installation, qui dépendent du temps d’intégration (lui-même dépendant de la personnalisation de la plateforme, des réponses aux exigences financières et réglementaires, de la connexion à différentes API…), ainsi que le coût de l’abonnement. L’abonnement comprend la mise à disposition des interfaces qui vont être utilisées pour passer des opérations financières, qu’il faut héberger, et un service après-vente de qualité, pour assister rapidement un client qui a rencontré une anomalie dans son parcours ou un problème de connexion par exemple. Il y a un an ou deux encore, les utilisateurs pouvaient attendre 24 ou 48 heures. Plus maintenant”, explique Olivier Gentier, directeur général d’Advize. “Quand on signe un client entreprise, on gagne de l’argent tout de suite mais pas sur le stock après, la marge reste chez le distributeur. L’activité est donc moins scalable qu’en BtoC”, résume le président de FundShop Léonard de Tilly. “Le modèle économique est plus long à mettre en place avec les particuliers. Il faut attendre 3 à 4 années avant d’avoir des résultats significatifs. Un nouveau client n’est pas rentable dès la souscription puisque l’épargne [en assurance vie, ndlr] n’est pas transférable. Pour l’entreprise, cela nécessite beaucoup de capitaux au départ”, poursuit Léonard de Tilly, bien placé pour en parler, sa fintech ayant démarré en BtoC “le temps de se faire connaître”. Et en effet, en pratique, les fintech restées en BtoC font état de levées de fonds plus élevées que celles en BtoB. Six ans après sa création, Yomoni a récolté au total plus de 17 millions d’euros. Il est le robo-advisor ayant capté le plus de financements via du capital-risque. Créé en 2016, Nalo a réuni 4 millions d’euros pour développer son service. En comparaison, Fundvisory, qui s’est directement lancé en BtoB, et FundShop, qui a migré vers la clientèle des conseillers, ont chacune levé moins de 3 millions d’euros. Le cas particulier d’Active Asset Allocation AAA, positionné en BtoB(toC), se démarque sur le point des levées. L’entreprise, qui entre dans sa douzième année d’existence, est en premier lieu une société d’ingénierie financière. Elle a par la suite opéré un élargissement de son activité, notamment grâce à une levée de fonds de 4 millions d’euros intervenue en 2017. “Lorsque nous avons débuté notre activité, le terme de robo-advisor n’existait pas mais nous produisions des algorithmes d’investissement. Et à partir de 2017, nous avons massivement investi dans l’intelligence artificielle et avons décidé de nous appuyer sur la digitalisation pour pouvoir rencontrer les besoins du marché. Grâce à ces investissements, nous avons pu développer une solution qui propose, en quelques secondes, à partir de l’objectif de placement, de l’horizon de temps et du niveau de risque du client final, une allocation qui maximise les chances du projet d’aboutir”, résume Adina Grigoriu. Si les levées de fonds des acteurs en BtoC semblent un passage obligé dans les modèles d’affaires, elles engendrent également une forme de barrière à l’entrée. Un nouvel entrant confie à mind Fintech que peu d’investisseurs français osent prendre le risque de parier sur les robo-advisors aujourd’hui. Et que le peu qui le font sont déjà engagés avec des acteurs en place. “Il y a une priorité aux robo-advisors qui ont déjà reçu des financements. Yomoni a levé de l’argent auprès de cinq investisseurs qui remettent au pot, car la fintech continue de perdre des sommes colossales (2 à 3 millions d’euros par an)”, déplore un nouvel entrant en quête de fonds. Des robo-advisors “ultra-spécialisés” affluent sur le marché BtoC De nouveaux acteurs souhaitent néanmoins relever le défi de s’adresser aux particuliers. Et alors que les robo-advisors étaient jusque-là plutôt généralistes, Sébastien d’Ornano note “une tendance aux acteurs ultra-spécialisés”, de la même manière que les néobanques ont vu se décliner durant les dernières années leurs versions pour les ados ou encore les néobanques vertes. Le président de Yomoni évoque notamment Goodvest, lancé en septembre sur le créneau de la finance responsable. La fintech a construit un contrat d’assurance vie compatible avec l’Accord de Paris (grâce à un partenariat avec le cabinet de conseil Carbon 4 Finance) et couple ainsi l’analyse du profil investisseur avec les thématiques d’investissement responsable chères à l’épargnant pour proposer une allocation 100 % en unités de compte. Comment Carbon 4 Finance calcule les impacts environnementaux des portefeuilles d’investissement 2021 a également vu arriver Artur, une solution d’agrégation d’actifs financiers (comptes bancaires, immobilier, cryptoactifs…) proposant à la fois des conseils automatisés sur l’allocation de ses placements et, à terme, la souscription de plusieurs classes d’actifs (SCPI, private equity, stablecoins…), le tout sans frais de gestion. Pour l’instant, “nous proposons de gérer les portefeuilles d’épargne au sein de l’assurance vie Apicil sous la forme d’un abonnement au montant unique de 6,99 euros par mois [qui correspondent aux frais de gestion chez les autres robo-advisors, ndlr]. Cela fait moins de 84 euros par an”, précise Vania Mareuse, ajoutant qu’Artur est le seul acteur à proposer une formule par abonnement. Sachant que les robo-advisors en BtoC demandent approximativement 1,5 % de frais de gestion (voir tableau), la solution d’Artur devient donc préférable pour l’épargnant à partir de 5 600 euros placés. “Les robo-advisors ont recopié les systèmes des acteurs traditionnels avec des tarifs moins élevés. Nous apportons de la nouveauté avec l’abonnement”, affirme le cofondateur. Ramify est également entré dans l’arène avec des algorithmes de conseil, en y ajoutant une touche de fiscalité. Par cette caractéristique, la solution digitale de gestion de patrimoine cible “les hauts revenus”, explicite Olivier Herbout, cofondateur de la fintech. Enfin, en ce début janvier, Zalpha débarque avec un service intergénérationnel, “des baby-boomers à la génération Alpha”, s’appuyant à la fois sur du robo-advisory, mais proposant aussi de la gestion libre, en misant beaucoup sur l’expérience utilisateur : “en fonction de la génération de l’utilisateur (enfant, ado, adulte, baby-boomer) et de ses connaissances financières, l’application pourra prendre une forme différente”, détaille Jérôme Glodas, le repreneur de Marie Quantier. Selon lui, la faillite de 2019 ne remet pas en cause le système du conseil digitalisé. “Lancé en 2014, le robo-advisor ne pouvait pas fonctionner, c’était trop tôt. Maintenant, c’est différent”, assure-t-il. Plusieurs dirigeants voient notamment un impact positif de la crise sanitaire sur la digitalisation des usages. Ce phénomène s’est traduit chez Birdee par un élargissement de la clientèle potentielle à la suite d’un premier confinement aux résultats encourageants. “En juin 2020, nous avons abaissé le seuil d’entrée qui était de 1 000 à 50 euros pour les particuliers, ce qui a accentué l’augmentation de la clientèle. Le nombre de nos utilisateurs a été multiplié par trois en 2020 et a connu une hausse de 250 % en 2021 (+10 000 nouveaux utilisateurs en BtoC pur en 2021)”, confirme Gaël Minon. Les applications de trading sans commission pourraient faire de l’ombre aux robo-advisors Le marché de l’investissement a été marqué ces dernières années par l’afflux des néocourtiers. Initialement, ce ne sont pas des concurrents directs pour les robo-advisors, puisqu’ils ne sont pas agréés conseillers en investissement financier (CIF) et ne proposent par conséquent pas de conseil en allocation d’actifs. Toutefois, ces plateformes deviennent des concurrents indirects dans le sens où elles attirent des flux de capitaux (lire notre Essentiel Les néocourtiers démocratisent l’investissement). Mais pour Sébastien d’Ornano, le public cible n’est pas le même. “Les investisseurs des applications de neotrading n’ont pas le même rapport au temps que ceux qui passent via un robo-advisor. L’épargne déléguée est associée à une vision de moyen-long terme” alors que le trading sans commission est davantage associé à la spéculation court-termiste, argumente le dirigeant d’entreprise. Cette vision a néanmoins une limite puisque, outre-Manche, le néocourtier Freetrade a lancé en 2021 un produit de retraite et proposait, de plus longue date, l’ISA, l’équivalent britannique du PEA. Freetrade n’est cependant pas encore déployé en France, contrairement à son homologue allemand Trade Republic, représenté par son country manager Matthias Baccino qui axe son discours marketing sur l’investissement en actions pour préparer la retraite et dont la feuille de route indique la commercialisation d’un PEA pour 2022. Enfin, un troisième acteur pourrait faire de l’ombre, à moyen terme, aux robo-advisors français : l’Allemand Scalable Capital, à la fois robo-advisor et néocourtier. La solution a lancé une liste d’attente en France pour son activité de trading sans commission. Et une fois sur ce créneau, on peut imaginer que la partie conseil pourrait suivre. Bien que cela ne soit pas (encore) à l’agenda des néocourtiers européens, Robinhood a, début janvier, dévoilé une fonctionnalité de conseil automatisé pour ses nouveaux utilisateurs débutants. Le service est pour l’instant basique et limité, notamment car Robinhood n’est pas agréé comme conseiller financier. Et le marché français n’est pas sur la roadmap du géant américain. Mais cela donne le ton et montre que les néocourtiers, qui proposent entre autres des ETF, peuvent venir embêter les robo-advisors sur leur terrain. Les applications de trading présentent cependant l’avantage de démocratiser l’investissement – une tendance qui bénéficie également aux robo-advisors. Elles sont en effet en partie à l’origine de la croissance des investisseurs individuels en France, selon une étude de l’Autorité des marchés financiers publiée en novembre 2021. Cette croissance est une opportunité pour les robo-advisors de capter une partie des épargnants en quête de rendements supérieurs à celui du Livret A. Olivier Gentier souligne toutefois que l’augmentation des investisseurs individuels actifs pourrait n’être que temporaire. “Il y avait déjà eu une ruée vers l’investissement de ce type avec le boom d’Internet à la fin des années 1990 qui s’était soldée par beaucoup de comptes inactifs à moyen terme. Cela recommence avec les applications comme Trade Republic. Mais les investisseurs vont-ils être capable de gérer leur argent de manière complètement autonome ? En avoir l’envie, le temps ?” Accélération de l’activité dans le BtoB La pandémie, d’une manière ou d’une autre, a été salutaire pour tout le secteur. Bien que l’activité en BtoB de FundShop ait mal vécu l’année 2020, l’investissement dans de nouvelles solutions n’étant alors pas la priorité des CGP et institutionnels, l’activité est depuis florissante. “Nous avons connu un coup d’arrêt en 2020 pour équiper les projets à distance, avoue Léonard de Tilly. Avec la crise, beaucoup de prospects ont freiné les process d’achat.” Toutefois, “l’activité est repartie en 2021”, contrebalance le dirigeant de FundShop. Le marché se transforme. Alors que nous étions sur un plateau de croissance pendant quelques temps, depuis cette année [2021, ndlr], des acteurs qui ont du stock (CGP, banques privées, gros courtiers) commencent à s’équiper pour pouvoir pousser du conseil auprès de tous leurs clients. Alors que nous échangions depuis plusieurs années, ils considèrent aujourd’hui notre offre comme un axe de développement stratégique”. “Nous comptons aujourd’hui beaucoup de petits clients et 11 significatifs”, ajoute le dirigeant. Advize, au contraire, a profité du “premier confinement pour concrétiser des projets débutés avant le Covid et répondre à l’augmentation des demandes. Nous avons dû accélérer les délais de livraison et d’entrée en production”. “Le digital pose de moins en moins problème à l’utilisateur final qui est même souvent demandeur de ce genre de solution”, ajoute Olivier Gentier qui, s’il ne peut pas différencier l’impact Covid de la croissance d’Advize, affirme néanmoins que “la période Covid a fait prendre conscience” des avantages que pouvaient apporter “la digitalisation et l’automatisation des process ou encore l’optimisation de l’UX dans la compréhension entre le client et le conseiller”. La solution d’Advize a notamment su convaincre la plateforme de distribution destinée aux CGP “Nortia, ainsi qu’EasyBourse, Meilleurtaux, Monabanq et le dernier en date Moniwan”, liste Olivier Gentier. Du côté d’AAA, les partenariats vont bon train également. “Nous avons une trentaine de clients. Sept plateformes BtoC nous ont rejoints en 2021”, compte Adina Grigoriu qui affirme concentrer sa stratégie sur le BtoBtoC. Parmi les entreprises clientes, quelques fintech : “nous avons récemment contracté avec les distributeurs BtoC digitaux Anaxago, Advenis et Ritchee. Sinon, nous travaillons surtout avec des assureurs, leurs réseaux de distribution et avec des assets managers pour leur proposer un PMS (plateforme de gestion de portefeuille, ndlr) afin de gérer les gestions quantitatives de type robot en marque blanche”. “75 % du marché adressable de l’épargne salariale est déjà servi par du conseil digital” Les CGP ne sont pas les seuls à se munir de process digitalisés et automatisés. Dans le domaine de l’épargne salariale, Catherine Pays-Lenique, directrice générale d’Epsens, corrobore la tendance à l’équipement des professionnels. Le spécialiste de l’épargne salariale a en effet lancé au début de l’été 2021 une version pilote d’un robo-advisor avec RegardBTP, en recourant à la technologie de Fundvisory. “Nous avons décidé de passer à l’acte en 2019. Nous avons répondu à la demande du marché et aux attentes des épargnants en termes d’accompagnement pour proposer du conseil 100 % en ligne”, énonce la dirigeante, suivant les innovations d’Amundi et Natixis Interépargne dans le domaine. La branche de Natixis dédiée à l’épargne salariale avait également déjà fait appel à Fundvisory, qui a lancé en 2018 la solution Prospeer, en voyant que “le marché de l’épargne salariale était non adressé”, décrit Nicolas Gonzalez, CEO de Fundvisory. Depuis, les choses ont bien changé : “75 % du marché adressable de l’épargne salariale est déjà servi par du conseil digital” (lire notre dossier Comment l’épargne salariale se renouvelle-t-elle ?). Créée en 2017, la fintech Epsor s’est quant à elle insérée sur le créneau du conseil automatisé d’allocation en épargne salariale (lire notre entretien avec Benjamin Pedrini, le directeur général d’Epsor, qui date de février 2021). “Notre priorité pour 2022, c’est le client. Faire en sorte qu’il y ait une adoption des clients et des institutions financières”, annonce Nicolas Gonzalez, de Fundvisory. Car si le conseil digital conquiert progressivement les professionnels, l’usage par les clients finaux n’est pas forcément au rendez-vous, ce que regrette Catherine Pays-Lenique. “D’un côté, si vous ne proposez pas de service de conseil en ligne, les entreprises clientes vont le demander pour leurs salariés. De l’autre, quand vous l’ouvrez aux épargnants, une grande partie ne l’utilise pas. Il y encore un important travail d’appropriation et de démocratisation du service à réaliser”, conclut la directrice générale après six mois de test et une étude en interne. Si ce résultat n’est pas généralisable, il pose la question d’une fonctionnalité vitrine, au moins sur le segment de l’épargne d’entreprise. Les acteurs se mettent au vert Les fintech ont progressivement étoffé leur gamme de produits. C’est le cas de Yomoni, qui propose de l’assurance vie (standard, ESG et pour les mineurs), un PEA, un PER et des compte-titres, toujours en s’appuyant sur de la gestion indicielle. “En termes d’enveloppes : entre 60 et 65 % sont investis en assurance vie et 15 % en PER”, assure le président de Yomoni. “Bien que l’assurance vie réponde à 85 % des besoins de nos utilisateurs, notre ambition est d’avoir une palette de produits financiers disponibles pour les particuliers”, avance Guillaume Piard, cofondateur et président de Nalo, qui ne propose aujourd’hui que des produits d’assurance vie (standard, verte et une peu risquée pour l’épargne de précaution). Pour se différencier, Nalo présente une approche “multi-projet (ou goal-based investing, sur le modèle des anglo-saxons) qui permet d’avoir autant de poches d’investissement que de projets de vie, avec zéro frottement fiscal puisque les nouveaux projets bénéficient de l’antériorité fiscale”, rappelle Guillaume Piard. L’ajout de produits responsables est une tendance très forte chez les robo-advisors. Pour certains, c’est même devenu un fer de lance. Nalo, par exemple, communique depuis 2018 sur le sujet. Résultat, “55 % de nos clients choisissent activement l’option d’épargne verte”, selon le responsable. Birdee surfe également sur la tendance. “Nous avons adapté nos produits aux évolutions réglementaires et notamment au règlement SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation, ndlr). Aujourd’hui, 80 % de nos produits sont investis en fonds ou ETF durables. Et nous travaillons à augmenter ce taux à 100 % d’ici 2022. Nous voulons en faire un facteur différenciant”, clame Gaël Minon. Poussée à son paroxysme, cette tendance s’illustre parfaitement avec la fintech Goodvest, qui ne propose à la souscription que des assurances vie responsables. Quelque peu à contre-courant, le nouvel entrant Zalpha, dont le CEO Jérôme Glodas n’entend pas devenir une fintech verte : “nous proposons des produits ESG à nos épargnants mais également d’autres thématiques d’investissement (intelligence artificielle, robotique, innovation, silver-economy, ndlr). D’après une étude que nous avons réalisée, le rendement est privilégié à la nature responsable d’un investissement pour la majorité des investisseurs”. Bipolarisation de la clientèle adressée Si la possibilité de choisir ce dans quoi les épargnants veulent investir représente un élément de différenciation, le seuil minimal d’investissement permet aussi aux spécialistes de la gestion conseillée d’affirmer leur positionnement. Birdee est le seul à proposer un investissement à partir de 50 euros, un montant qui ne permet pas de rentabiliser l’inscription. À l’autre bout du spectre, seuls Yomoni et Nalo continuent de placer le seuil à 1000 euros, leur garantissant une population plus fortunée que leurs comparses. Chez Yomoni par exemple, “le premier dépôt moyen est de 11 000 euros”, estime Sébastien d’Ornano. Ce chiffre est assez révélateur puisque Statista estime à environ 8 700 euros les encours par utilisateur d’un robo-advisor en 2021 (voir graphique). Quant à Nalo, “nous avons une clientèle avertie et avisée. Notre client-type a 40 ans, est CSP+, dispose de plusieurs centaines de milliers d’euros à placer et d’un patrimoine moyen de 700 000 euros”, dessine Guillaume Piard. Les utilisateurs de robo-advisors détiennent en moyenne 8715 euros sur les plateformes françaises À l’inverse, les autres fintech ont progressivement réduit leur ticket d’entrée minimal. “En abaissant la barrière à l’entrée, nous voulons inciter nos clients à mettre en place des versements récurrents. Le retour sur investissement dépend de la longévité du client”, formule Gaël Minon. En démocratisant le conseil digitalisé, la fintech luxembourgeoise a également connu un changement dans sa clientèle. “Au départ, l’âge moyen de nos utilisateurs était de 41 ans. Nous avions une clientèle tech-friendly, early-adopter, mais qui avait déjà un minimum de patrimoine. Depuis 12-18 mois, c’est beaucoup moins homogène avec une clientèle qui rajeunit légèrement. La moyenne est passée à 39 ans” avec l’ouverture à un public plus large, détaille le CEO de Birdee. Le seuil d’entrée chez WeSave est à 300 euros et il s’élève à 500 euros chez Artur et Zalpha. Une activité qui s’exporte peu Quelle que soit la clientèle visée, la plupart des acteurs ne formulent pas de stratégie concernant un développement de leurs services à l’étranger. AAA est la société la plus internationale de notre panel. “La plateforme digitale est aujourd’hui utilisée en France seulement. Mais nos API sont disponibles dans le monde entier. Nous avons des clients aux États-Unis, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas et bientôt en Suisse”, énumère Adina Grigoriu. Birdee, acteur luxembourgeois présent sur le marché français, est, par essence, international. “Quasiment depuis nos débuts, nous proposons notre technologie en BtoB également, que ce soit à des pure players Internet sur notre marché domestique (France, Luxembourg, Belgique), à des banques universelles ou des assureurs. En 2021, nous avons même créé une plateforme dédiée avec des API et un modèle de “pay as you go” (paiement à l’usage)”, éclaire Gaël Minon. Quant aux autres fintech, celles positionnées exclusivement en BtoC, elles s’en tiennent pour l’instant au marché français. Les robo-advisors en BtoB n’ont pas de stratégie bien plus définie à l’international. “Nous avons eu des demandes du côté du Benelux et de l’Italie. Nous n’excluons pas d’y aller sur les 2 ou 3 prochaines années, la technologie étant assez adaptable”, concède Nicolas Gonzalez, tout en exprimant ses craintes sur la domiciliation étrangère d’un conseiller pour un client final. “Une internationalisation pourra se faire sur deux angles, réfléchit Olivier Gentier, d’Advize. Via l’un de nos distributeurs domestiques qui voudrait lancer le même service en dehors de la France. Ou bien via notre capacité d’aller distribuer nos produits ailleurs.” Du côté de FundShop, même son de cloche : en théorie, l’expansion est faisable. En pratique, cela relève plus de l’anecdotique. “Notre technologie est internationalisable. Nous avons un client à l’étranger, avons réalisé un PoC pour un acteur asiatique et sommes en discussion avec un acteur d’Afrique du Nord, liste Léonard de Tilly. Nous estimons avoir beaucoup investi en R&D ces dernières années. […] Maintenant que nous avons la technologie, nous sommes dans une phase de monétisation, de déploiement, de vente, avec un focus sur l’intégration et un objectif : générer des revenus”, priorise le CEO. EntrepriseAAAAdvizeWeSaveFundShopYomoniFundvisoryBirdeeNaloArturGoodvestRamifyZalpha (ex-Marie Quantier)Date de création201020112012201320152015201520162019202020202020AgrémentsCIFCIFCIF et COA-SG et CIFCIFEntreprise d'investissement et courtier en assuranceCIF et COACIF, COA et COBSPCIF et COACIF et COACIF et COAPositionnement principalBtoBBtoB (et BtoC à la marge)BtoB et BtoCBtoBBtoCBtoBBtoB et BtoCBtoCBtoCBtoCBtoCBtoB et BtoCClients entreprises (BtoB)MAIF, Allianz France, Spirica, OFI AM, AG2R la Mondiale, Generali, UAF Life Patrimoine, MesPlacements.fr, Anaxago, Advenis, RitcheeEasyBourse, Meilleurtaux, Monabanq, Moniwan, Bourse Direct, NortiaeToro"Beaucoup de petits clients et 11 significatifs"-AG2R La Mondiale, Generali, Aviva France, Natixis Interépargne, EpsensNC-----Nombre de clients (BtoC)-NCNC-34 000 mandats signés (septembre 2021)-10 000 nouveaux clients en 20216 700 clients (début 2021)1 000 payantsNC900 personnes sur la liste d'attente-Assureur-Generali Vie et One Life (Luxembourg)Suravenir (filiale à 100% du Crédit Mutuel Arkéa)-Suravenir (filiale à 100% du Crédit Mutuel Arkéa)-BNP Paribas CardifGenerali VieApicilGenerali VieApicilGenerali VieFrais de gestion--1,5 %-De 0,9 % à 1,6 %-1 %De 0,85 % à 1,65 %6,99 €/moisDe 1,65 % à 1,9 %1 %1,5 %Profils de risque-NCNC-9-5illimité6 (+3 à venir)NC-NCMontant minimum d'investissement-NC300€-1 000€-50€1 000€500€500 € (300 € pour les -26 ans)1 000€500€Levées de fonds4 M € auprès de MAIF Avenir, Région Sud Investissement et InnovAllianzGenerali est actionnaire minoritaireRacheté par Amundi en 2019- Pré-amorçage : 60 000 € (Wilco) - Amorçage : 300 000 € (Axa Strategic Ventures) - Série A : 2,2 M€ (Apicil)- Amorçage : 3,5 M € (Crédit Mutuel Arkéa) - 5 M € (Crédit Mutuel Arkéa et Iéna Venture) - Série A : 8,7 M € (Arkéa et Weber Investissements)- Amorçage : 300 000 € - Série A : 1,8 M € (Macif et Aviva)BNP Paribas Asset Management est actionnaire- 2 M € auprès de 67 business angels - 2 M € ----Site Internethttps://active-asset-allocation.com/fr/https://advize.fr/https://www.wesave.fr/https://www.fundshop.fr/https://www.yomoni.fr/https://www.fundvisory.fr/https://birdee.co/https://nalo.fr/https://artur.ai/https://goodvest.fr/https://ramify.fr/https://www.zalpha.green/ Caroline Soutarson assurance vieconseil à distanceépargneépargne salarialeinvestissementrobo-advisortransformation digitale Besoin d’informations complémentaires ? 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