Accueil > Adtechs & Martechs > MFA : les acteurs de l’achat programmatique accélèrent pour améliorer la qualité média MFA : les acteurs de l’achat programmatique accélèrent pour améliorer la qualité média Le terme MFA a fait surface pour définir un problème bien connu de l’industrie, celui des sites n’ayant aucun but autre que celui d’attirer les investissements publicitaires, au mépris de l’expérience utilisateur. La meilleure définition du problème et la progressive prise de conscience côté annonceurs poussent les acteurs de l'advérification à proposer des solutions, même s’il reste difficile de définir l’ampleur du phénomène sur le marché français. Par Paul Roy. Publié le 17 novembre 2023 à 17h28 - Mis à jour le 27 mai 2025 à 12h29 Ressources Les trois points à retenir : La nouvelle catégorisation de l’interprofession anglo-saxonne permet aux outils d’advérification de faire évoluer leurs dispositifs. Une approche hybride (humaine et automatisée) est privilégiée pour les catégoriser mais le marché côté vente manifeste des craintes concernant une catégorisation trop restrictive par certains acteurs. Le filtrage des sites peut avoir lieu à plusieurs niveaux (agences, DSP, advérification) et soulève une nouvelle problématique de responsabilité. Une étude de l’ANA publiée cet été a remis sur le devant de la scène un sujet depuis longtemps identifié par l’industrie publicitaire. 15 % des investissements publicitaires et 23 % des impressions vendues en open auction seraient aujourd’hui “gaspillés” sur des sites MFA (made for advertising). Ce terme s’est depuis généralisé sur le marché qui craint que la disponibilité des outils d’IA générative n’accentue encore le problème, avec la possibilité non plus seulement de répliquer mais de créer du contenu à grande échelle à partir d’articles sur des sites réels. L’interprofession anglo-saxonne (4A’s, WFA, ISBA et ANA) a embrayé à la rentrée en listant une quinzaine de critères permettant de qualifier ces sites MFA : un rapport publicité sur contenu élevé (souvent deux fois au-dessus de la moyenne sur internet), un rafraîchissement très rapide des annonces publicitaires, un haut pourcentage de trafic payant et peu d’audience organique, ainsi que du contenu et un site de mauvaise qualité et souvent non-propriétaire. De la nécessité de bien définir ces sites pour les identifier Le manque de critères clairs pour les définir était l’un des principaux éléments bloquants pour les exclure. “On est vraiment dans la zone grise du marché. Ce n’est pas de la fraude, mais un moyen de se jouer du système en étant malin. Ce ne sont pas des robots à grande échelle ou de la criminalité organisée”, constate Benjamin Lanfry, chief supply officer d’Ogury, société adtech spécialisée dans la publicité mobile. “Les MFA sont créés pour aller chercher des audiences. Tandis que pour la fraude, on parle de sites avec des pages empilées les unes derrière les autres et de robots qui cliquent sur des publicités, avec une intention frauduleuse”, ajoute Laetitia Zinetti, RVP Europe du sud de DoubleVerify, un fournisseur d’outil d’advérification. “Certains sites font de l’arbitrage tout en ayant un réel univers éditorial. C’est quand l’approche est dévoyée et que le contenu n’est plus développé que pour être mieux référencé par les outils de mesure qu’il y a un problème” Souaade Agmir (Publicis Media) D’autant que la frontière est souvent mince entre certains sites d’arbitrage de “bonne volonté” et des sites MFA. “Certains sites font de l’arbitrage tout en ayant un réel univers éditorial. C’est quand l’approche est dévoyée et que le contenu n’est plus développé que pour être mieux référencé par les outils de mesure qu’il y a un problème”, indique Souaade Agmir, head of media trading digital de Publicis Media. Pour expliquer le fait que le sujet ne revienne que maintenant sur le devant de la scène, tous indiquent que ces sites sont excellents sur les critères de visibilité et de taux de clic – majoritairement utilisés en programmatique ouvert -, mais très faibles sur les indicateurs relatifs à l’attention publicitaire. IA générative : le secteur adtech amorce des premiers cas d’usage Sans surprise, les outils d’advérification se sont rapidement penchés sur le sujet et ont adapté leurs dispositifs aux critères énoncés par l’ANA qui, ils le soulignent, doivent être analysés conjointement pour éviter les faux positifs. “Pour identifier ces sites, nous les regardons sous deux angles différents. D’abord, à travers les données issues de la chaîne de valeur publicitaire : le pourcentage de trafic payant provenant d’un site, le nombre d’ad requests générées, et la relation entre ces différents sites qui sont souvent opérés dans une logique de réseau”, explique Scott Pierce, head of fraud protection d’Integral Ad science. En effet, derrière ces sites, des sociétés bien identifiées en ont fait leur modèle économique (Frontstory, Journkey, des sociétés israéliennes avec plusieurs sites d’arbitrage en France). “Puis nous regardons ensuite la structure du site : le rapport publicité / contenu, le taux de rafraîchissement des publicités…”, ajoute-t-il. Approche humaine ou automatisée ? Aujourd’hui, DoubleVerify et Adloox se basent sur une analyse à la fois humaine et automatisée pour parvenir à cette identification. IAS revendique lui une approche “AI-driven” pour exclure ces sites. “Nous n’impliquons pas d’examen humain pour pouvoir catégoriser et scorer les sites à grande échelle”, explique Scott Pierce (IAS). La société utilise uniquement un algorithme de machine learning, qui s’est entraîné sur une liste de sites MFA établie par la société Jounce Media afin d’identifier les caractéristiques communes et répliquer l’analyse sur de nouveaux sites de manière automatisée. Pour les trois outils, il s’agit ensuite d’un moyen d’exclure les sites pré et post campagne. “Il s’agit d’une case pour indiquer qu’on ne veut pas apparaître sur ces sites”, schématise Laetitia Zinetti (DoubleVerify). On vous explique : comment fonctionne l’analyse sémantique pour le ciblage contextuel Le blocage temporaire des inventaires de l’ensemble des sites de Reworld Media par The Trade Desk – comme rapporté par Minted – avait pointé les limites d’une analyse purement basée sur l’automatisation pour juger d’un trop plein de publicité sur un site, considéré comme MFA ou non. “Le gros du travail est fait par nos modèles ML, et l’approche humaine est ensuite nécessaire pour éviter de plomber certains sites”, explique Alexandre Beaurepaire, head of marketing d’Adloox. Sur ce point IAS se veut rassurant : “nous avons aussi des clients éditeurs et nous voulons éduquer le marché en étant transparent auprès de tous sur la manière dont nous avons scoré leurs sites. À l’image de ce qui a été fait pour les aider à améliorer leur taux de visibilité il y a une dizaine d’années”, explique Scott Pierce. Sur les annonceurs qui ont testé la bêta de son outil, IAS a mesuré 25 à 30 % des impressions se retrouvant sur des sites MFA avant optimisation, en ligne avec les estimations de l’ANA. Des proportions similaires sont observées sur le marché français par Adloox, qui indique que son filtrage permet de réduire cette part à 0,8 %. Responsabilité du filtrage et attention La politique de The Trade Desk a fait beaucoup de vagues côté éditeurs, soucieux de voir qu’ils pouvaient être considérés comme des sites à faible valeur ajoutée publicitaire et bloqués comme tels par une DSP, et plus uniquement par un outil d’advérification. Ce qui pose la question de savoir qui doit agir ou non sur le ciblage des sites en amont de la campagne. Les réponses divergent côté achat. The Trade Desk assume le fait d’avoir des discussions avec les éditeurs sur les critères de qualité média et de les faire évoluer, notamment dans le cas de Reworld Media. “Pour effectuer des transactions sur la plateforme de The Trade Desk, toutes les sources d’inventaire au niveau mondial doivent répondre à des exigences qualitatives, par exemple en ce qui concerne la charge publicitaire, le contexte, la source de trafic et le contenu. Ces politiques sont publiques et s’appliquent à toutes nos sources d’inventaire dans le monde entier. Il se peut par ailleurs que nous bloquions certains sites ou vendeurs qui ne respectent pas ces critères, mais nous sommes disposés à les réévaluer en cas de demande des clients et si le vendeur ou l’éditeur accepte de se mettre en conformité avec nos critères”, nous indique Sven Hagemeier, general manager, inventory development EMEA de The Trade Desk. Baromètre programmatique : le ralentissement sur la vidéo et le display s’est confirmé au premier semestre “Notre parti pris est de travailler avec les agences, avec lesquelles nous définissons les fonctionnalités et l’offre publicitaire qui répondent aux besoins de l’annonceur. Pour déterminer quel inventaire est de bonne qualité ou pas, nous travaillons avec les outils d’advérification”, nuance Antoine Ripoche, regional manager France d’Azerion, qui vient de racheter la DSP Hawk. Les agences sont en effet en première ligne pour identifier les besoins de leurs clients et ont depuis quelques années basculé sur un modèle d’inclusion de sites, en partie pour répondre à la problématique des sites conçus pour la publicité. “Au départ, lorsque nous faisions des listes d’exclusion, c’était un jeu du chat et de la souris. On s’est vite rendu compte qu’il était impossible d’analyser l’ensemble du web et qu’il y avait assez d’inventaires disponibles pour inverser l’approche”, explique Souaade Agmir (Publicis Media), ajoutant que les listes d’inclusion comprennent entre 1 500 et 2 500 sites selon les besoins des inventaires, et que l’exclusion est toujours utile pour certains sous-domaines de sites inclus dans les listes. Là-aussi, l’agence revendique une démarche d’ouverture auprès des éditeurs qui ne correspondraient pas à ses standards. “Certaines discussions ont lieu avec des éditeurs qui ne comprennent pas pourquoi nous n’investissons pas chez eux en open auction, et nous les aidons à s’améliorer”, indique-t-elle. Tous les acteurs interrogés soulignent cependant que la bascule progressive du marché sur des KPI d’attention publicitaire devrait aussi l’aider à prendre conscience du problème. “De plus en plus d’annonceurs ont leurs normes custom (comme le son activé par défaut sur la vidéo de certaines campagnes). Il y a fort à parier que les annonceurs matures fassent évoluer leurs indicateurs de performance en intégrant la notion d’attention et plus seulement en se basant sur le taux de clic et la visibilité”, conclut Antoine Ripoche (Azerion). Paul Roy AdtechFraudeQualité médiaTransparence Besoin d’informations complémentaires ? 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